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15/02/2018 | FRANCE | N°17DA00771

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3, 15 février 2018, 17DA00771


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...E...B...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 28 février 2017 par lequel la préfète du Pas-de-Calais lui a fait obligation de quitter le territoire français, a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français de deux ans et a fixé l'Afghanistan comme pays de destination.

Par un jugement n° 1701956 du 6 mars 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé, par son article 1er, la d

écision fixant le pays de destination et a rejeté, par son article 2, le surplus de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...E...B...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 28 février 2017 par lequel la préfète du Pas-de-Calais lui a fait obligation de quitter le territoire français, a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français de deux ans et a fixé l'Afghanistan comme pays de destination.

Par un jugement n° 1701956 du 6 mars 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé, par son article 1er, la décision fixant le pays de destination et a rejeté, par son article 2, le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 avril 2017, le préfet du Pas-de-Calais demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en tant que, par son article 1er, il a annulé la décision fixant le pays de destination ;

2°) de rejeter la demande de première instance de M.B....

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Olivier Yeznikian, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif :

1. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que la Cour européenne des droits de l'homme a rappelé qu'il appartenait en principe au ressortissant étranger de produire les éléments susceptibles de démontrer qu'il serait exposé à un risque de traitement contraire aux stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, à charge ensuite pour les autorités administratives " de dissiper les doutes éventuels " au sujet de ces éléments (28 février 2008, Saadi c. Italie, n° 37201/06, paragraphes 129-131 et 15 janvier 2015, AA. c. France, n° 18039/11) ;

2. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en dépit de la gravité de la situation en Afghanistan, rendue publique par des rapports émanant d'organisations non gouvernementales et d'instances officielles, il règnerait, à la date de la décision attaquée, dans cet Etat une situation de violence généralisée telle qu'un civil de nationalité afghane devrait de ce seul fait être regardé comme personnellement soumis à des risques de traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3. Considérant que, si M. B...fait valoir qu'il est originaire de la province de Logar, désignée comme particulièrement dangereuse, et qu'il serait menacé par les talibans, il n'apporte à l'appui de ses allégations aucun élément probant et vérifiable et, notamment, aucune précision d'ordre personnel quant à ses conditions de vie dans cette région ;

4. Considérant que, dans ces conditions, le préfet du Pas-de-Calais n'a méconnu ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, il est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a retenu, pour annuler la décision fixant le pays de destination, le moyen tiré de ce que M. B...craindrait, avec raison, d'être exposé, en cas de retour dans son pays d'origine, à une menace grave, directe et individuelle contre sa vie ou sa personne en raison d'une violence généralisée résultant d'un conflit armé interne et international ;

5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de cette partie du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M.B... devant le tribunal administratif de Lille au soutien des conclusions qu'il dirigeait contre la décision fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office ;

6. Considérant que, par un arrêté du 22 décembre 2015, la préfète du Pas-de-Calais a donné délégation à M. C...A..., chef de la section éloignement du bureau de l'immigration et de l'intégration de la préfecture, à l'effet de signer notamment les arrêtés fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision en litige doit être écarté ;

7. Considérant que la décision contestée comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit sur laquelle elle se fonde ; qu'elle est, par suite, suffisamment motivée ;

8. Considérant que, si M. B...s'est prévalu, à l'encontre de la décision fixant le pays à destination duquel il pourra être éloigné, de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français dont il a fait l'objet, ce moyen doit être écarté dès lors que le magistrat désigné du tribunal administratif de Lille a, par une partie du même jugement qui n'a d'ailleurs pas été contesté, rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la mesure d'éloignement ;

9. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 2, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doivent être écartés ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Pas-de-Calais est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lille a annulé la décision fixant le pays de destination ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement du 6 mars 2017 du tribunal administratif de Lille est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Lille tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise pour information au préfet du Pas-de-Calais.

N°17DA00771 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17DA00771
Date de la décision : 15/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Olivier Yeznikian
Rapporteur public ?: Mme Fort-Besnard

Origine de la décision
Date de l'import : 27/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-02-15;17da00771 ?
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