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25/01/2018 | FRANCE | N°16DA00803

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre - formation à 3 (bis), 25 janvier 2018, 16DA00803


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 7 décembre 2013 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a accordé à la SCEA du Champ de Marne l'autorisation d'exploiter une parcelle d'une superficie de 1 hectare 63 ares, située sur la commune de Buire-le-Sec.

Par un jugement n° 1307104 du 3 mars 2016, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 avril 2016, M.D..., représenté par

Me I... H..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 3 mars 2016 du tribunal adminis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 7 décembre 2013 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a accordé à la SCEA du Champ de Marne l'autorisation d'exploiter une parcelle d'une superficie de 1 hectare 63 ares, située sur la commune de Buire-le-Sec.

Par un jugement n° 1307104 du 3 mars 2016, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 avril 2016, M.D..., représenté par Me I... H..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 3 mars 2016 du tribunal administratif de Lille ;

2°) d'annuler cet arrêté du 7 décembre 2013 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le schéma directeur départemental des structures agricoles du Pas-de-Calais du 28 juillet 2010 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Valérie Petit, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

1. Considérant que, par un acte d'huissier du 20 mars 2013,

M. B...G...et Mme A...F...ont donné congé à M. C...D...du bail à ferme que celui-ci détenait sur une parcelle d'un superficie de 1 hectare 63 ares, située sur la commune de Buire-le-Sec aux fins de reprise par leur fils et petit-fils M. I... G..., associé de la SCEA du Champ de Marne ; que, par un arrêté du 7 octobre 2013, le préfet du Pas-de-Calais a accordé l'autorisation d'exploiter sollicitée par la SCEA du Champ de Marne ; que M. D...relève appel du jugement du 3 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 331-2 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté en litige : " I.- Sont soumises à autorisation préalable les opérations suivantes : / 1° Les installations, les agrandissements ou les réunions d'exploitations agricoles au bénéfice d'une exploitation agricole mise en valeur par une ou plusieurs personnes physiques ou morales, lorsque la surface totale qu'il est envisagé de mettre en valeur excède le seuil fixé par le schéma directeur départemental des structures. Ce seuil est compris entre une et deux fois l'unité de référence définie à l'article L. 312-5. (...) / 2° Quelle que soit la superficie en cause, les installations, les agrandissements ou les réunions d'exploitations agricoles ayant pour conséquence : / a) De supprimer une exploitation agricole dont la superficie excède un seuil fixé par le schéma directeur départemental des structures et compris entre le tiers et une fois l'unité de référence définie à l'article L. 312-5, ou de ramener la superficie d'une exploitation en deçà de ce seuil ; / b) De priver une exploitation agricole d'un bâtiment essentiel à son fonctionnement, sauf s'il est reconstruit ou remplacé ; / 3° Quelle que soit la superficie en cause, les installations, les agrandissements ou les réunions d'exploitations agricoles au bénéfice d'une exploitation agricole : / a) Dont l'un des membres ayant la qualité d'exploitant ne remplit pas les conditions de capacité ou d'expérience professionnelle ou a atteint l'âge requis pour bénéficier d'un avantage de vieillesse agricole ; / b) Ne comportant pas de membre ayant la qualité d'exploitant. (...) / 5° Les agrandissements ou réunions d'exploitations pour les biens dont la distance par rapport au siège de l'exploitation du demandeur est supérieure à un maximum fixé par le schéma directeur départemental des structures, sans que ce maximum puisse être inférieur à cinq kilomètres ; / 6° Les créations ou extensions de capacité des ateliers de production hors sol au-delà d'un seuil de production fixé par décret ; / 7° La mise en valeur de biens agricoles reçus d'une société d'aménagement foncier et d'établissement rural (...). " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des statuts de la SCEA du Champ de Marne établis le 1er avril 2011 ainsi que des mentions renseignées dans la demande d'autorisation d'exploiter que M. I...G...a la qualité d'associé exploitant au même titre que M.E..., second associé au sein de la SCEA ; qu'il est constant que M. I...G...ne remplit pas les conditions de capacité ou d'expérience professionnelle requises par les dispositions précitées ; que dans ces conditions, l'opération de reprise devait être soumise à autorisation préalable en application du a) du 3° de l'article L. 331-2 du code rural et de la pêche maritime ; que dès lors, l'autorisation en litige délivrée par le préfet ne présentait pas un caractère superfétatoire et faisait grief à M.D..., en sa qualité de preneur en place ; qu'il s'ensuit que M. D...est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté comme irrecevable sa demande ; que le jugement du 3 mars 2016 doit, dès lors, être annulé ;

4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Lille ;

Sur la légalité de l'arrêté du 7 décembre 2013 :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime : " L'autorité administrative se prononce sur la demande d'autorisation en se conformant aux orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département dans lequel se situe le fonds faisant l'objet de la demande. Elle doit notamment : " (..) ; 3° Prendre en compte les biens corporels ou incorporels attachés au fonds dont disposent déjà le ou les demandeurs ainsi que ceux attachés aux biens objets de la demande en appréciant les conséquences économiques de la reprise envisagée ; 4° Prendre en compte la situation personnelle du ou des demandeurs, notamment en ce qui concerne l'âge et la situation familiale ou professionnelle et, le cas échéant, celle du preneur en place ; 5° Prendre en compte la participation du demandeur ou, lorsque le demandeur est une personne morale, de ses associés à l'exploitation directe des biens objets de la demande dans les conditions prévues à l'article L. 411-59 ; " ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 9 du schéma directeur départemental des structures agricoles du département du Pas-de-Calais du 28 juillet 2010, alors applicable : " Pour évaluer la conformité de l'opération aux orientations définies à l'article 1 ou pour comparer les situations respectives du demandeur et de l'occupant (...), la commission départementale d'orientation de l'agriculture définit un ensemble de coefficients d'équivalence permettant une évaluation forfaitaire de l'excédent brut d'exploitation (EBEt) par actif, à partir du système de production et des droits à produire. Les coefficients d'équivalence retenus sont les suivants : (...). Une exploitation est considérée comme viable au sens de l'article 1 si elle dégage un ratio " excédent brut d'exploitation théorique / unité de main d'oeuvre " (EBEt / UMO) calculé selon les équivalences ci-dessus, supérieur à 25 000 euros. Une exploitation est considérée comme ayant un revenu par actif insuffisant au sens de l'article 1 si elle dégage un ratio " excédent brut d'exploitation théorique / unité de main d'oeuvre " (EBEt / UMO) calculé selon les équivalences ci-dessus, inférieur à 25 000 euros. (...) " ;

6. Considérant que, conformément aux dispositions précitées de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime, le préfet se prononce sur une demande d'autorisation en se conformant aux orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département dans lequel se situe le fonds faisant l'objet de la demande ; que pour apprécier la conformité de l'opération envisagée au regard des orientations fixées par le schéma directeur départemental des structures agricoles du Pas-de-Calais, l'autorité administrative doit procéder à une comparaison de la situation du demandeur et du preneur en place au regard du critère expressément prévu par le schéma, qui est le ratio " excédent brut d'exploitation théorique par unité de main-d'oeuvre " (EBEt / UMO) ;

7. Considérant, en premier lieu, que M. D...fait valoir que M. G...n'a pas l'intention de participer à l'exploitation directe des terres en litige au sein de la SCEA et qu'il s'agit en réalité de permettre à son associé, M.E..., d'agrandir son exploitation et de contourner la réglementation du contrôle des structures ; que toutefois, ces affirmations sont dépourvues de tout commencement de preuve ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet aurait méconnu les dispositions du 5° de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime doit être écarté ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que pour accorder l'autorisation en litige, le préfet s'est fondé sur la première orientation de l'article 1 du schéma et, en particulier ainsi qu'il le fait valoir en défense, sur le principe visant à conforter les exploitations dont le revenu actif par actif est insuffisant ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet ne s'est pas prononcé au regard des orientations du schéma doit être écarté ;

9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet a pris en considération le fait que la SCEA du Champ de Marne, constituée entre M.E..., âgé de cinquante-deux ans, marié et père de trois enfants, exploitant agricole au sein de l'EARL E...et M.G..., âgé de trente-neuf ans et père de deux enfants, au chômage, mettait en valeur 10 hectares 42 ares et bénéficiaire de droits à paiement unique dégageait un excédent brut de 2 218 euros par unité de main d'oeuvre, soit un seuil très inférieur au plafond de 25 000 euros ; qu'après reprise, ce seuil s'élèverait, ainsi que l'indique en première instance, le préfet à 3 039 euros ; qu'il a comparé la situation du demandeur à celle de M.D..., âgé de quarante-deux ans, marié et père de deux enfants, qui exploite 126 hectares 73 ares, dégageant un excédent brut d'exploitation, non contesté, de l'ordre de 56 000 euros ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, le préfet n'était tenu ni de prendre en compte la superficie exploitée par M. E...dans le cadre de son EARL, ni la superficie de 50 hectares pour lesquelles une autorisation d'exploiter aurait été délivrée à la SCEA en juillet 2011 et dont il n'est pas établi qu'elle serait effectivement exploitée par la SCEA du Champ de Marne à la date de l'arrêté contesté ; que, par suite, le préfet n'a pas commis d'erreur d'appréciation en considérant que la reprise améliorait la situation économique du SCEA du Champ de Marne tandis qu'elle n'affecterait que faiblement celle de M. D... ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté contesté ; que ses conclusions présentées tant en première instance qu'en appel au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de M. D... la somme demandée par la SCEA du Champ de Marne au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 3 mars 2016 du tribunal administratif de Lille est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif et ses conclusions présentées devant la Cour sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions présentées par la SCEA du Champ de Marne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...D..., à la SCEA du Champ de Marne et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

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N°16DA00803

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 16DA00803
Date de la décision : 25/01/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-03-03-01-01 Agriculture et forêts. Exploitations agricoles. Cumuls et contrôle des structures. Cumuls d'exploitations. Champ d'application de la législation sur les cumuls.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: Mme Valérie Petit
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SCP MEILLIER-THUILLIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 01/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-01-25;16da00803 ?
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