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16/11/2017 | FRANCE | N°17DA00147

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3, 16 novembre 2017, 17DA00147


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...et Mme B...D...ont demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 20 décembre 2007 par lequel le maire de la commune d'Aviron a déclaré reprises par la commune les concessions portant les numéros B 44 et B 45, dont l'état d'abandon avait été constaté.

Par un jugement n° 1400494 du 24 novembre 2016, le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 20 décembre 2007.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregist

rée le 23 janvier 2017, et un mémoire, enregistré le 25 octobre 2017, la commune d'Aviron, représen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...et Mme B...D...ont demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 20 décembre 2007 par lequel le maire de la commune d'Aviron a déclaré reprises par la commune les concessions portant les numéros B 44 et B 45, dont l'état d'abandon avait été constaté.

Par un jugement n° 1400494 du 24 novembre 2016, le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 20 décembre 2007.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 23 janvier 2017, et un mémoire, enregistré le 25 octobre 2017, la commune d'Aviron, représentée par la SCP Hubert, Abry, Lemaitre, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de M. et Mme D...;

3°) de mettre à la charge de M. et Mme D...la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

...................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Michel Richard, président-assesseur,

- et les conclusions de Mme Amélie Fort-Besnard, rapporteur public.

1. Considérant que M. et Mme A...ont été inhumés respectivement en 1924 et 1922 dans deux concessions perpétuelles, portant les numéros B 44 et B 45, situées dans le cimetière de la commune d'Aviron (Eure) ; qu'en février 2004, la commune d'Aviron a fait constater par un procès-verbal l'état d'abandon de ces deux concessions perpétuelles puis, par un arrêté du 20 décembre 2007, pris après trois ans la publication de ce procès-verbal, le maire de la commune a, sur le fondement de l'article L. 2223-17 du code général des collectivités territoriales, déclaré leur reprise par la commune ; que la commune d'Aviron relève appel du jugement du 24 novembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Rouen a, à la demande de M. et MmeD..., annulé l'arrêté du 20 décembre 2007 ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Considérant, en premier lieu, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 2223-19 du code général des collectivités territoriales : " L'arrêté du maire qui prononce la reprise des terrains affectés à une concession est exécutoire de plein droit dès qu'il a été procédé à sa publication et à sa notification " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, dans sa version alors en vigueur : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée / (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision " ; qu'il résulte de ces dispositions que lorsque la notification ne comporte pas les mentions requises, ce délai n'est pas opposable ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...D...est l'arrière petite-fille de M. et Mme A...qui ont été inhumés au cimetière de la commune d'Aviron ainsi qu'il a été dit au point 1 ; qu'il est constant que l'arrêté attaqué n'a pas été notifié à M. et Mme D... ; que, par suite, le délai de recours rappelé au point précédent ne leur est, en principe, pas opposable, alors même que cet arrêté a été publié par la mairie ;

5. Considérant, en second lieu, que le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance ; qu'en une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable ; qu'en règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l'exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance ;

6. Considérant que la règle énoncée ci-dessus, qui a pour seul objet de borner dans le temps les conséquences de la sanction attachée au défaut de mention des voies et délais de recours, ne porte pas atteinte à la substance du droit au recours, mais tend seulement à éviter que son exercice, au-delà d'un délai raisonnable, ne mette en péril la stabilité des situations juridiques et la bonne administration de la justice, en exposant les défendeurs potentiels à des recours excessivement tardifs ; qu'il appartient dès lors au juge administratif d'en faire application au litige dont il est saisi, quelle que soit la date des faits qui lui ont donné naissance ;

7. Considérant que Mme D... et son mari, qui résident dans la commune, ont obtenu du maire de la commune d'Aviron, le 14 octobre 2004, l'autorisation d'exhumer et de ré-inhumer M. et MmeA..., arrières grands-parents de cette dernière ; que cette demande indiquait l'adresse des intéressés ainsi que le lien de parenté qui les unissaient aux défunts ; que la commune d'Aviron, qui ne pouvait ainsi ignorer ce lien de parenté, ne justifie pas avoir été dans l'impossibilité de notifier l'arrêté en litige aux intéressés ; que les pièces produites en cours d'instance devant la cour par la commune ne permettent toutefois pas d'établir de façon suffisamment précise et incontestable la date à laquelle ceux-ci auraient eu connaissance de cet arrêté soit en vertu de la publication de l'arrêté, soit lors de la procédure judiciaire qui s'est déroulée devant le tribunal de grande instance d'Evreux et qui a donné lieu à une ordonnance du 23 janvier 2013 ; qu'en outre, si Mme D...a pu avoir connaissance de l'arrêté en cause lors de la procédure d'appel judiciaire, cette information était trop tardive pour permettre de constater que l'exercice du recours contentieux introduit devant le tribunal administratif de Rouen avait été effectué au delà d'un délai raisonnable ;

8. Considérant qu'il résulte des points 4 et 7, qu'en l'absence de notification de l'arrêté en litige conformément aux dispositions de l'article R. 2223-19 du code général des collectivités territoriales, M. et Mme D...n'ont pas, en l'espèce, exercé leur droit au recours devant le tribunal administratif de Rouen dans un délai déraisonnable au regard des règles posées par les points 5 et 6 ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par la commune d'Aviron à la demande de première instance tirée de sa tardiveté, doit être rejetée ;

Sur les moyens d'annulation retenus par le tribunal :

9. Considérant que la commune d'Aviron soutient que c'est à tort que le tribunal a retenu le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure suivie ; qu'elle n'apporte cependant aucun nouvel argument au soutien de ce moyen qu'elle avait soulevé en défense en première instance ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2223-17 du code général des collectivités territoriales : " Lorsque, après une période de trente ans, une concession a cessé d'être entretenue, le maire peut constater cet état d'abandon par procès-verbal porté à la connaissance du public et des familles. Si, trois ans après cette publicité régulièrement effectuée, la concession est toujours en état d'abandon, le maire a la faculté de saisir le conseil municipal, qui est appelé à décider si la reprise de la concession est prononcée ou non. Dans l'affirmative, le maire peut prendre un arrêté prononçant la reprise par la commune des terrains affectés à cette concession " ;

11. Considérant qu'en autorisant en 2004 M. et Mme D...à faire procéder à l'exhumation et à la ré-inhumation de M. et Mme A...dans le nouveau caveau réalisé par ces derniers pour la sépulture de leurs aïeux, la commune d'Aviron a implicitement mais nécessairement reconnu que ces concessions ne se trouvaient pas à l'état d'abandon ; que, dans ces conditions, en les déclarant reprises, le maire de la commune d'Aviron a méconnu les dispositions de l'article L. 2223-17 du code général des collectivités territoriales ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune d'Aviron n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 20 décembre 2007 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

13. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que les concessions cinquantenaires nos 45 et 46 se confondent avec les concessions perpétuelles numérotées B 44 et 45 ; qu'en revanche, le présent arrêt implique nécessairement que la commune attribue les concessions correspondant à la sépulture de M. et Mme A...à M. et Mme D... ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. et MmeD..., qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, la somme que la commune d'Aviron demande sur leur fondement ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune d'Aviron une somme de 1 000 euros à verser à M. et Mme D...sur le même fondement ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune d'Aviron est rejetée.

Article 2 : Il est enjoint à la commune d'Aviron de réattribuer les concessions correspondant à la sépulture de M. et Mme A...à M. et MmeD....

Article 3 : La commune d'Aviron versera à M. et Mme D...la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Aviron et à M. et Mme C...et GisèleD....

N°17DA00147 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17DA00147
Date de la décision : 16/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Collectivités territoriales - Commune - Attributions - Services communaux - Opérations funéraires.

Police - Polices spéciales - Police des cimetières.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Michel Richard
Rapporteur public ?: Mme Fort-Besnard
Avocat(s) : SCP HUBERT- ABRY LEMAITRE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-11-16;17da00147 ?
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