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09/11/2017 | FRANCE | N°16DA00820

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre - formation à 3, 09 novembre 2017, 16DA00820


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Entreprise Georges Cazeaux a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision de résiliation, notifiée le 15 septembre 2012 par la commune de Bouvines, du marché conclu pour la restauration de l'église Saint-Pierre de Bouvines, d'ordonner la reprise des relations contractuelles et de condamner la commune de Bouvines à lui verser la somme de 500 000 euros en réparation du préjudice commercial subi, la somme de 360 416,40 euros à titre d'indemnité pour exécution de travaux com

plémentaires, la somme de 77 155,79 euros au titre du solde du marché, la so...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Entreprise Georges Cazeaux a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision de résiliation, notifiée le 15 septembre 2012 par la commune de Bouvines, du marché conclu pour la restauration de l'église Saint-Pierre de Bouvines, d'ordonner la reprise des relations contractuelles et de condamner la commune de Bouvines à lui verser la somme de 500 000 euros en réparation du préjudice commercial subi, la somme de 360 416,40 euros à titre d'indemnité pour exécution de travaux complémentaires, la somme de 77 155,79 euros au titre du solde du marché, la somme de 18 213,97 euros au titre du solde de la retenue de garantie ainsi que la somme de 29 400,35 euros au titre de la perte de marge sur les tranches conditionnelles.

Par un jugement n° 1206489 du 29 février 2016, le tribunal administratif de Lille a jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à la reprise des relations contractuelles et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 29 avril 2016, Me E...F..., agissant en qualité de liquidateur de la société Entreprise Georges Cazeaux, représenté par Me A...C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lille du 29 février 2016 ;

2°) d'annuler la décision de résiliation du marché ;

3°) de condamner la commune de Bouvines à lui verser la somme de 500 000 euros à en réparation du préjudice commercial subi, la somme de 360 416,40 euros à titre d'indemnité pour exécution de travaux complémentaires, la somme de 77 155,79 euros au titre du solde du marché, la somme de 18 213,97 euros au titre du solde de la retenue de garantie ainsi que la somme de 29 400,35 euros au titre de la perte de marge sur les tranches conditionnelles ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Bouvines la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Valérie Petit, président-assesseur,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,

- et les observations de Me B...G..., substituant Me H...D..., représentant MaîtreF..., agissant es-qualité de liquidateur de l'entreprise Cazeaux.

1. Considérant que par un acte d'engagement signé le 20 janvier 2011, la commune de Bouvines a confié à la société Cazeaux l'exécution du lot n°1 " échafaudages, maçonneries, pierres de taille, ravalement, étanchéité pieds de murs, vitraux et peinturage " du marché de restauration de l'église Saint-Pierre ; que la date contractuelle d'achèvement de la 1ère tranche des travaux, qui devait durer 10 mois, a été fixée au 1er février 2012 ; que compte tenu du retard d'exécution constaté, le maire a adressé à la société, le 16 juillet 2012, une mise en demeure de terminer les travaux pour le 31 juillet 2012 ; que cette mise en demeure étant restée infructueuse, la commune a décidé de résilier le marché, ce dont la société a été informée par un courrier du maire du 10 septembre 2012 ; que la société Entreprise Georges Cazeaux a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler cette décision de résiliation, d'ordonner la reprise des relations contractuelles et de condamner la commune de Bouvines à lui verser la somme de 500 000 euros en réparation du préjudice commercial subi, la somme de 360 416,40 euros à titre d'indemnité pour exécution de travaux complémentaires, la somme de 77 155,79 euros au titre du solde du marché, la somme de 18 213,97 euros au titre du solde de la retenue de garantie ainsi que la somme de 29 400,35 euros au titre de la perte de marge sur les tranches conditionnelles ; que, par un jugement du 29 février 2016, le tribunal administratif de Lille a jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à la reprise des relations contractuelles et a rejeté le surplus de sa demande ; que la société Georges Cazeaux, qui ne reprend pas ses conclusions de première instance tendant à la reprise des relations contractuelles, doit être regardée comme relevant appel de ce jugement en tant seulement qu'il n'a pas fait droit à ses conclusions indemnitaires ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que la société requérante soutient que le tribunal administratif aurait omis de statuer sur les conclusions par lesquelles elle demandait la réparation du préjudice constitué par la perte de chance de réaliser un bénéfice sur les tranches conditionnelles du marché ; que, toutefois, en jugeant que la résiliation du marché était justifiée au fond, de sorte que les conclusions indemnitaires de la société Cazeaux relatives aux conséquences de la résiliation ne pouvaient qu'être rejetées, les premiers juges ont statué sur ces conclusions, le préjudice invoqué correspondant nécessairement à une conséquence de la résiliation ;

Sur la résiliation du marché :

En ce qui concerne la régularité de la décision de résiliation :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales : " Le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : (...) 4° De prendre toute décision concernant la préparation, la passation, l'exécution et le règlement des marchés et des accords-cadres ainsi que toute décision concernant leurs avenants, lorsque les crédits sont inscrits au budget ; (...) " ; qu'il résulte de l'instruction que le conseil municipal de la commune de Bouvines a, par une délibération du 3 septembre 2012, " (...) décid[é] à l'unanimité de résilier le marché (...) " conclu avec la société Cazeaux ; que par son courrier du 10 septembre 2012, le maire de la commune a informé cette société que " la résiliation du marché (...) a été prononcée par le conseil municipal de Bouvines réuni le 3 septembre " ; qu'ainsi, il résulte clairement des termes de cette délibération et de ce courrier que la résiliation en litige a été prononcée par le conseil municipal, alors que ce conseil avait, par une délibération du 1er septembre 2008 prise sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales, délégué au maire le pouvoir de prendre au nom de la commune toute décision en matière de marchés publics ; qu'en l'absence de toute délibération ultérieure rapportant cette délégation, le conseil municipal doit être regardé comme s'étant dessaisi de sa compétence ; que, par suite, comme l'ont estimé à bon droit les premiers juges, la résiliation litigieuse a été décidée par une autorité incompétente ; que, toutefois, l'irrégularité de la procédure de résiliation n'est susceptible d'ouvrir droit à indemnité au profit de la société Cazeaux que dans le cas où cette décision n'était pas justifiée au fond ;

En ce qui concerne le bien-fondé de la décision de résiliation :

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la date de la décision de résiliation, le retard d'exécution du marché confié à la société Georges Cazeaux était de 9 mois, alors que le délai d'exécution de la tranche 1 était initialement fixé à 10 mois et que, compte tenu du souhait de la commune d'achever la restauration de l'église avant la commémoration des 800 ans de la bataille de Bouvines en juillet 2014, le délai d'exécution des tranches 2 à 4 était au total de 31 mois ;

5. Considérant, d'une part, que si la société requérante soutient que le classement de l'église comme monument historique, en décembre 2010, postérieurement à la signature de l'acte d'engagement, l'a contrainte à réaliser des prestations non initialement prévues dans le marché, en raison de nouvelles contraintes techniques impliquant un délai de réalisation plus long, elle n'assortit ce moyen d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé, alors que l'église était déjà inscrite à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques et que le cahier des clauses techniques particulières n'a pas été modifié ; qu'en particulier, il ne résulte pas de l'instruction que la nécessité d'effectuer plus de 600 masticages résulterait de la modification du type de classement de l'édifice au regard de la législation des monuments historiques ; que les comptes rendus de chantier n°11 du 9 septembre 2011 et n°12 du 23 septembre 2011 et un courrier de la directrice régionale des affaires culturelles du 3 janvier 2012 faisant état de " l'utilisation de moyens techniques pour un déjointement en totale contradiction avec la déontologie des interventions sur un monument historique, et ses conséquences fâcheuses pour la pierre " indiquent au contraire que ces opérations s'expliquent par de premières interventions inadéquates de la part de la société ou de son sous-traitant ;

6. Considérant, d'autre part, que le cahier des clauses techniques particulières ne précisait pas que le clocher était constitué de pierres massives ; que, si la société requérante fait valoir que ce n'est qu'en cours de travaux qu'elle a réalisé qu'il s'agissait d'un habillage pierre sur une structure en maçonnerie de briques, ce qui aurait retardé considérablement le chanter, il lui appartenait, en cas de doute, de solliciter avant l'établissement de son offre et la signature de l'acte d'engagement, des précisions sur ce point auprès de la commune ou du maître d'oeuvre ;

7. Considérant, enfin, que ni les remarques déplacées du maître d'oeuvre à l'égard de la société requérante, pour regrettables qu'elles soient, ni les sondages exigés par le maître d'oeuvre ne peuvent être regardés comme expliquant, sauf de manière marginale, le retard d'exécution du chantier, la requérante ne contestant d'ailleurs pas que ce retard ait été pris dès la pose de l'échafaudage ;

8. Considérant que compte tenu de l'ensemble de ces éléments, le retard d'exécution, par son ampleur, était de nature à justifier la résiliation du marché aux torts exclusifs de la société Cazeaux ; qu'ainsi, cette résiliation, bien que décidée irrégulièrement par le conseil municipal, était justifiée au fond ; que, par suite, les conclusions indemnitaires de la société Cazeaux relatives aux conséquences de la résiliation, y compris celles tendant à la réparation du préjudice correspondant à la perte de chance de pouvoir réaliser une marge nette sur les tranches complémentaires du marché, ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur l'indemnisation de travaux supplémentaires :

9. Considérant que le caractère global et forfaitaire du prix du marché ne fait pas obstacle à ce que la société requérante sollicite une indemnisation au titre de travaux supplémentaires effectués, même sans ordre de service, dès lors que ces travaux étaient indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art ; que toutefois, si la société sollicite la somme de 360 416,40 euros au titre des travaux supplémentaires qu'elle a effectués, elle se borne à soutenir qu'elle a dû non seulement remplacer les éléments de maçonnerie endommagés, mais aussi conforter à de très nombreux endroits le parement en pierres, qui menaçait de tomber, elle n'apporte aucun élément précis relatif à la nature exacte des travaux en cause, alors qu'il résulte de l'instruction qu'une partie de ceux-ci correspondent à la réparation de négligences causées par sa propre intervention ou par celle de son sous-traitant ;

Sur le solde du marché :

10. Considérant que si la société Georges Cazeaux demande le versement de la somme de 77 155,97 euros au titre du solde du marché, elle se borne à se référer à une situation de travaux qui aurait été validée par le maître d'oeuvre, sans contester sérieusement que la commune a dû recourir à une autre entreprise pour achever les travaux et procéder à un nettoyage en profondeur de l'orgue, insuffisamment protégé pendant les travaux ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que, compte tenu des montants en cause, la commune resterait redevable d'un solde ;

Sur le solde de la retenue de garantie :

11. Considérant que la société Cazeaux réitère ses conclusions de première instance tendant au versement de la somme de 18 213,97 euros au titre de la libération de la retenue de garantie ; que, toutefois, elle ne conteste pas que la retenue de garantie a été remplacée par une caution personnelle et solidaire de la société Oséo, en application de l'article 102 du code des marchés publics et qu'en conséquence, la commune n'a pas opéré de retenue de garantie sur les sommes versées au cours de l'exécution du marché ; que ses conclusions ne peuvent dès lors qu'être rejetées ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Georges Cazeaux n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ; que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Bouvines au titre des mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Georges Cazeaux est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Bouvines au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à MeF..., liquidateur de la société Georges Cazeaux et à la commune de Bouvines.

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N°16DA00820


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA00820
Date de la décision : 09/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-04-02-03 Marchés et contrats administratifs. Fin des contrats. Résiliation. Droit à indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: Mme Valérie Petit
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : AARPI COQUELET POUILLE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-11-09;16da00820 ?
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