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05/10/2017 | FRANCE | N°17DA00765

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre - formation à 3, 05 octobre 2017, 17DA00765


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 3 octobre 2016 par lequel le préfet de l'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office, d'autre part, de faire injonction au préfet de l'Oise, sous astreinte, de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1

603731 du 14 mars 2017, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.

P...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 3 octobre 2016 par lequel le préfet de l'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office, d'autre part, de faire injonction au préfet de l'Oise, sous astreinte, de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1603731 du 14 mars 2017, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 avril 2017, M.B..., représenté par Me D...A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 14 mars 2017 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de l'Oise du 3 octobre 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Oise, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la date de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, a été entendu, au cours de l'audience publique.

Sur la légalité du refus de séjour :

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : / (...) / 8° A l'étranger reconnu réfugié en application du livre VII (...) " ;

2. Considérant qu'en sollicitant la reconnaissance du statut de réfugié, M.B..., ressortissant turc, a, contrairement à ce qu'il allègue, nécessairement demandé son admission au séjour au titre de l'asile, ce que confirment d'ailleurs les pièces versées au dossier par le préfet de l'Oise, qui comportent un formulaire de demande à cette fin, que l'intéressé a renseigné et déposé le 20 mai 2015 à la préfecture ; qu'aucune disposition du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'impose à l'autorité préfectorale, lorsqu'elle est saisie d'une telle demande d'admission au séjour au seul titre de l'asile, d'examiner d'office si le demandeur peut prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sur un autre fondement, même si elle conserve la faculté de faire usage, à titre gracieux, du pouvoir de régularisation qui lui est reconnu ; qu'il ressort des pièces du dossier que la demande d'asile que M. B...avait formée, a été rejetée par une décision du 12 octobre 2015 du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 19 juillet 2016 ; que le préfet de l'Oise, qui n'a pas examiné la demande d'admission au séjour de M. B...sur un autre fondement que celui de l'asile mais s'est seulement assuré, avant de lui faire obligation de quitter le territoire français, de ce qu'il n'était pas dans une situation faisant légalement obstacle au prononcé d'une telle mesure, au regard notamment des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, était ainsi tenu de refuser à M. B... la délivrance de la carte de résident qu'il sollicitait sur le fondement des dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au bénéfice des ressortissants étrangers admis au statut de réfugié, et de la carte de séjour temporaire prévue au 1° de l'article L. 313-13 de ce code, en faveur des ressortissants étrangers qui se sont vus reconnaître le bénéfice de la protection subsidiaire ; qu'il s'ensuit que les moyens tirés par M. B...de ce que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour serait insuffisamment motivée et qu'elle aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peuvent qu'être écartés comme inopérants ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

3. Considérant qu'en vertu du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, si la décision obligeant un ressortissant étranger à quitter le territoire français doit être motivée, elle n'a pas à faire l'objet, lorsqu'elle est adossée à une décision de refus de séjour, d'une motivation distincte de celle de ce refus ; qu'il résulte de l'examen des motifs des arrêtés contestés que ceux-ci, qui ne constituent pas la simple reprise de formules préétablies, comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles se fonde la décision refusant de délivrer un titre de séjour à M.B... ; que, par suite, alors même qu'ils ne reprennent pas les allégations de l'intéressé relatives à ses craintes quant à la perspective d'un retour dans son pays d'origine, ces motifs, qui révèlent notamment que le préfet de l'Oise s'est livré à un examen particulier de la situation de M. B...au regard des stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, constituent une motivation suffisante qui satisfait à l'exigence posée tant par les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que par celles antérieurement énoncées à l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 et qui avaient été codifiées, avant la date de la décision contestée, à l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;

4. Considérant que, comme il a été dit au point 2, il ressort des pièces du dossier que M. B... a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile ; qu'il a donc été mis à même de faire valoir, avant l'intervention de l'arrêté qui lui a refusé cette admission au séjour et l'a également obligé à quitter le territoire français, tous éléments d'information ou arguments de nature à influer sur le contenu de ces mesures ; que, par suite, la garantie consistant dans le droit à être entendu préalablement à la mesure d'éloignement, telle qu'elle est protégée par le droit de l'Union européenne et notamment par les stipulations de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, n'a pas été méconnue ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations et, en tout état de cause, de celles des articles 47 et 48 de la même Charte ne peut qu'être écarté ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 2 que le moyen tiré de ce que la décision faisant obligation à M. B...de quitter le territoire français devrait être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ne peut qu'être écarté ;

6. Considérant que M.B..., qui serait entré sur le territoire français le 1er mai 2015, invoque les relations qu'il aurait nouées depuis son arrivée sur ce territoire et la volonté d'intégration dont il aurait fait montre ; que, toutefois, M. B...n'apporte aucune précision quant à la nature des liens dont il fait état, tandis qu'il n'établit pas qu'il serait dépourvu d'attaches familiales proches dans son pays d'origine, dans lequel il a habituellement vécu jusqu'à l'âge de trente-cinq ans et où résident, selon les renseignements qu'il a lui-même portés dans sa demande d'admission au séjour, son épouse ainsi que ses trois enfants mineurs ; que, par suite, eu égard à la faible ancienneté et aux conditions du séjour de M.B..., qui n'a fait état d'aucune perspective d'insertion professionnelle, la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français n'a, malgré la volonté d'intégration qui serait la sienne, pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que cette décision n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

7. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 6 que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays à destination duquel M. B...pourra être reconduit d'office devrait être annulée par voie de conséquence de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français pour l'exécution de laquelle elle a été prise ne peut qu'être écarté ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " et qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ;

9. Considérant que M.B..., qui se borne à réitérer ses allégations relatives aux menaces et aux mauvais traitements dont il aurait été l'objet dans son pays d'origine en raison de son engagement militant au sein d'un parti politique d'opposition et d'une association locale de lutte contre un projet d'implantation d'une centrale hydroélectrique, ne produit aucun élément probant au soutien de ce récit qui n'a au demeurant convaincu ni l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, ni la Cour nationale du droit d'asile, les attestations non-circonstanciées de proches qu'il a versées au dossier étant dépourvues d'un tel caractère ; qu'il n'établit, par suite, l'existence d'aucune raison sérieuse de croire qu'il encourrait, actuellement et personnellement, des risques pour sa liberté ou sa sécurité en cas de retour dans ce pays ; qu'ainsi et compte tenu de ce que, comme il a été dit au point 6, l'intéressé ne serait pas isolé, contrairement à ce qu'il allègue, en cas de retour en Turquie, il n'est pas établi que les stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile auraient été méconnues par le préfet de l'Oise pour fixer la Turquie comme le pays à destination duquel M. B...pourra être reconduit d'office ; qu'il n'est pas davantage établi, dans ces conditions, que, pour prendre cette décision, dont les motifs révèlent que le préfet de l'Oise s'est livré à un examen effectif de la situation de l'intéressé, cette autorité se serait crue à tort liée par l'appréciation de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou par celle de la Cour nationale du droit d'asile, ni qu'elle aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. B...;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction assortie d'astreinte et, en tout état de cause, celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet de l'Oise.

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N°17DA00765


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17DA00765
Date de la décision : 05/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : DUSEN

Origine de la décision
Date de l'import : 07/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-10-05;17da00765 ?
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