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28/09/2017 | FRANCE | N°16DA01732

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3 (bis), 28 septembre 2017, 16DA01732


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...E...B...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 24 octobre 2015 par lequel la préfète du Pas-de-Calais l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et l'a placé en rétention.

Par un jugement n° 1503370 du 31 août 2016, le tribunal administratif de Rouen a annulé la décision de placement en rétention administrative et rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 septembre 2016, M.B..., représenté par Me C...D..., demande à la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...E...B...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 24 octobre 2015 par lequel la préfète du Pas-de-Calais l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et l'a placé en rétention.

Par un jugement n° 1503370 du 31 août 2016, le tribunal administratif de Rouen a annulé la décision de placement en rétention administrative et rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 septembre 2016, M.B..., représenté par Me C...D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il rejette ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire et la fixation du pays de renvoi ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Charles-Edouard Minet, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment du procès-verbal d'audition signé par M.B..., que celui-ci a été entendu, assisté d'un interprète, le 24 octobre 2015 de 9h30 à 9h45, par un officier de police judiciaire sur ses conditions de séjour et de vie en France, sur les étapes et conditions de son arrivée sur le territoire et son désir de s'y maintenir ; qu'il lui a également été demandé s'il avait des observations à formuler au cas où la préfète du Pas-de-Calais prendrait à son encontre une mesure de reconduite à la frontière, éventuellement assortie d'une assignation à résidence ou d'un placement en rétention, et s'il avait d'autres éléments relatifs à sa situation qu'il souhaitait porter à la connaissance de la préfète ; qu'ainsi, l'intéressé a été personnellement entendu et a eu la possibilité, au cours de cette audition, de faire connaître ses observations sur la décision attaquée ; qu'en tout état de cause, il ne fait état d'aucune circonstance personnelle qu'il aurait pu utilement faire valoir lors de cette audition ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la décision attaquée méconnaîtrait le principe général du droit de l'Union européenne garantissant le droit d'être entendu doit être écarté ;

2. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète du Pas-de-Calais n'aurait pas procédé à l'examen de la situation particulière de M. B... ;

3. Considérant que M.B..., ressortissant afghan, est entré irrégulièrement sur le territoire français et n'a pas sollicité de titre de séjour ; qu'il pouvait, dès lors, faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement du 1°) du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que si la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté a déploré, dans ses recommandations en urgence du 13 novembre 2015, publiées au Journal officiel de la République française du 2 décembre 2015, un usage détourné de la procédure de placement en rétention administrative dans le cadre de l'évacuation des étrangers présents dans la " Jungle " de Calais, elle n'a, en tout état de cause, pas remis en cause le caractère irrégulier de leur présence ni la légalité de leur éloignement du territoire français ; que, par suite, ni la circonstance que l'administration n'aurait pas accompli de diligences en vue de son éloignement effectif, ni celle tirée de ce qu'il a été interpellé avec d'autres ressortissants placés dans la même situation ne permettent, dans les circonstances de l'espèce, de considérer que la préfète aurait poursuivi un autre but que celui assigné à la police spéciale des étrangers en obligeant M. B... à quitter le territoire français ; que, par suite, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 4 du protocole n° 4 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Les expulsions collectives d'étrangers sont interdites " ; qu'il faut entendre par expulsion collective, au sens de ces stipulations, toute mesure contraignant des étrangers, en tant que groupe, à quitter un pays, sauf dans les cas où une telle mesure est prise à l'issue et sur la base d'un examen raisonnable et objectif de la situation particulière de chacun des étrangers qui forment le groupe ; qu'ainsi, le fait que plusieurs étrangers fassent l'objet de décisions semblables ne permet pas en soi de conclure à l'existence d'une expulsion collective lorsque chaque intéressé a pu individuellement faire valoir devant les autorités compétentes les arguments qui s'opposaient à son expulsion ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 1 que M. B...a été entendu quant à son droit au séjour et sa situation personnelle avant l'édiction de la mesure d'éloignement en litige et a eu la possibilité, au cours de cette audition, de faire connaître ses observations sur la décision attaquée ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit au point 2, que la préfète du Pas-de-Calais n'aurait pas procédé à un examen de sa situation personnelle ; que, dans ces conditions, M. B...n'est pas fondé à soutenir qu'il a fait l'objet d'une mesure d'expulsion collective qui le visait de façon indiscriminée ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 4 du protocole n° 4 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui prohibe les expulsions collectives d'étrangers, doit être écarté ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

Sur la décision fixant l'Afghanistan comme pays de destination :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que la Cour européenne des droits de l'homme a rappelé qu'il appartenait en principe au ressortissant étranger de produire les éléments susceptibles de démontrer qu'il serait exposé à un risque de traitement contraire aux stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, à charge ensuite pour les autorités administratives " de dissiper les doutes éventuels " au sujet de ces éléments (28 février 2008, Saadi c. Italie, n° 37201/06, paragraphes 129-131 et 15 janvier 2015, AA. c. France, n° 18039/11) ;

8. Considérant qu'il ne ressort pas plus des pièces du dossier que des éléments d'information rendus publics par des organismes internationaux que la situation de conflit armé en Afghanistan, malgré sa gravité, serait caractérisée par un degré de violence aveugle d'un niveau si élevé qu'il existe des motifs sérieux et avérés de croire qu'un civil renvoyé dans ce pays y serait exposé, du seul fait de sa présence, à un risque réel de traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que si la situation prévalant dans la province de Nangarhâr peut être qualifiée de violence généralisée de forte intensité, compte tenu du nombre et de la nature des actes de violence qui ont touché la population civile au cours de l'année 2015 et ont été rapportés, notamment, par le Bureau européen d'appui en matière d'asile sur l'Afghanistan (EASO) en janvier 2016, M. B... n'assortit d'aucun élément précis ou vérifiable ses affirmations selon lesquelles il serait originaire de cette province ; qu'en outre, M. B..., lors de son audition par les services de police le 24 octobre 2015, n'a fait état d'aucun risque particulier le concernant ; qu'il ne démontre pas qu'il serait exposé à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour en Afghanistan ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ; qu'il en résulte que le requérant n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi ;

Sur la demande présentée en première instance sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

9. Considérant qu'en application de ces dispositions, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce et en tout état de cause, compte tenu en particulier de l'annulation seulement partielle de l'arrêté attaqué, de faire droit à la demande présentée par le conseil de M. B... au titre de la première instance ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français sans délai et de la décision fixant l'Afghanistan comme pays de destination et la demande présentée par son conseil au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; que, par voie de conséquence, et en tout état de cause, la demande présentée en appel par son conseil sur le fondement des mêmes dispositions doit être rejetée ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...E...B..., au ministre de l'intérieur et à Me C...D....

Copie en sera adressée pour information au préfet du Pas-de-Calais.

N°16DA01732 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 16DA01732
Date de la décision : 28/09/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Charles-Edouard Minet
Rapporteur public ?: Mme Fort-Besnard
Avocat(s) : LANGUIL

Origine de la décision
Date de l'import : 10/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-09-28;16da01732 ?
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