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21/09/2017 | FRANCE | N°17DA00448

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre - formation à 3, 21 septembre 2017, 17DA00448


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 18 avril 2016 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office, d'autre part, de faire injonction, sous astreinte, à la préfète de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire, à défaut, de p

rocéder à un nouvel examen de sa situation après l'avoir mise en possession d'une ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 18 avril 2016 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office, d'autre part, de faire injonction, sous astreinte, à la préfète de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation après l'avoir mise en possession d'une autorisation provisoire de séjour.

Par un jugement n° 1602790 du 22 novembre 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 mars 2017, MmeA..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 22 novembre 2016 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté de la préfète de la Seine-Maritime du 18 avril 2016 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de huit jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente d'un nouvel examen de sa situation administrative ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention du 1er août 1995 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal sur la circulation et le séjour des personnes ;

- l'accord du 23 septembre 2006 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal relatif à la gestion concertée des flux migratoires et l'avenant à cet accord signé le 25 février 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, a été entendu, au cours de l'audience publique.

Sur la légalité du refus de séjour :

En ce qui concerne la légalité externe :

1. Considérant qu'il résulte de l'examen des motifs de l'arrêté du 18 avril 2016 en litige que ceux-ci comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles se fonde le refus de délivrance de titre de séjour opposé à MmeA..., ressortissante sénégalaise ; que, par suite, la décision de refus de séjour est suffisamment motivée au regard de l'exigence posée par l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ; que, dès lors, ce moyen, que Mme A...n'assortit au demeurant d'aucune argumentation, doit être écarté ;

En ce qui concerne le moyen tiré de l'erreur de droit :

2. Considérant que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers et aux conditions de délivrance de ces titres s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code, " sous réserve des conventions internationales " ; qu'en ce qui concerne les ressortissants sénégalais, s'appliquent les stipulations de la convention du 1er août 1995 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal relative à la circulation et au séjour des personnes ainsi que celles de l'accord du 23 septembre 2006 relatif à la gestion concertée des flux migratoires, telles que modifiées par un avenant signé le 25 février 2008 ; qu'aux termes du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord du 23 septembre 2006, dans sa rédaction issue du point 31 de l'article 3 de l'avenant signé le 25 février 2008 : " Un ressortissant sénégalais en situation irrégulière en France peut bénéficier, en application de la législation française, d'une admission exceptionnelle au séjour se traduisant par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant : - soit la mention "salarié" s'il exerce l'un des métiers mentionnés dans la liste figurant en annexe IV de l'Accord et dispose d'une proposition de contrat de travail ; / - soit la mention "vie privée et familiale" s'il justifie de motifs humanitaires ou exceptionnels " ;

3. Considérant que l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, inséré au sein d'une septième sous-section intitulée " l'admission exceptionnelle au séjour " de la deuxième section du chapitre III du titre Ier du livre III de la partie législative de ce code, dispose, en son premier alinéa, que : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 " ;

4. Considérant que les stipulations du paragraphe 42 de l'accord du 23 septembre 2006, dans sa rédaction issue de l'avenant signé le 25 février 2008, renvoyant à la législation française en matière d'admission exceptionnelle au séjour des ressortissants sénégalais en situation irrégulière rendent applicables à ces ressortissants les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, le préfet, saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour par un ressortissant sénégalais en situation irrégulière, est conduit, par l'effet de l'accord du 23 septembre 2006 modifié, à faire application des dispositions de l'article L. 313-14 du code ;

5. Considérant qu'il résulte de l'examen de l'arrêté contesté que celui-ci, qui vise expressément l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qui reproduit les stipulations du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord du 23 septembre 2006, dans leur rédaction issue de l'avenant signé le 25 février 2008, énonce notamment dans ses motifs que Mme A...n'a invoqué, au soutien de sa demande, aucun motif exceptionnel ni aucune considération humanitaire justifiant qu'elle soit admise au séjour ; qu'il suit de là qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète de la Seine-Maritime n'aurait pas examiné la situation de Mme A...au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, le moyen tiré de l'erreur de droit dont serait entachée la décision de refus de séjour en litige doit être écarté ;

En ce qui concerne la vie privée et familiale de la requérante :

6. Considérant qu'eu égard à ce qui vient d'être dit au point précédent et au point 1, il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète de la Seine-Maritime, qui fait notamment mention, dans les motifs de l'arrêté du 18 avril 2016 en litige, des éléments de fait caractérisant la situation personnelle et familiale de MmeA..., afférents, en particulier, à la réalité de la communauté de vie dont elle se prévaut, aux attaches familiales, ainsi qu'aux intérêts privés dont elle dispose sur le territoire français et dans son pays d'origine, ne se serait pas livrée à un examen particulier de la situation de l'intéressée, notamment familiale, avant de refuser de lui délivrer un titre de séjour ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / (...) " et qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, (...), dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...) " ;

8. Considérant que MmeA..., qui serait entrée sur le territoire français au cours de l'année 2010, se prévaut de la relation sentimentale qu'elle a nouée avec un ressortissant français, avec lequel elle vit maritalement et fait état, en outre, du fait que sa soeur réside régulièrement sur le territoire français, de même que son neveu, sa nièce, des cousins, ainsi qu'une tante et un oncle, qui possèdent la nationalité française ; qu'elle se prévaut, enfin, de ce que, titulaire d'un certificat d'aptitude professionnelle en comptabilité obtenu au Sénégal, elle a pu successivement exercer plusieurs emplois salariés durant les six années de son séjour en France ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que la vie maritale dont Mme A...se prévaut présentait, à la date à laquelle la décision de refus de séjour du 18 avril 2016 en litige a été prise, un caractère relativement récent puisqu'elle n'avait débuté, selon les mentions mêmes de la déclaration de vie commune souscrite à la mairie du domicile du couple, qu'au cours du mois d'avril 2014, soit à peine deux ans auparavant ; qu'en outre, il est constant que Mme A...n'a pas d'enfant ; qu'elle n'établit pas davantage qu'elle serait dépourvue d'attaches familiales proches dans son pays d'origine, dans lequel elle a habituellement vécu jusqu'à l'âge de trente-trois ans, s'étant notamment maintenue dans ce pays durant les vingt-cinq années qui ont suivi le décès de ses parents ; que, par suite, compte tenu de l'ancienneté, à la supposer établie par les seules pièces versées au dossier, et des conditions du séjour de Mme A...et en dépit de l'engagement bénévole dont justifie cette dernière au sein d'une association humanitaire, la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision contestée a été prise ; que cette décision n'a ainsi méconnu ni les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni, en tout état de cause, celles du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord du 23 septembre 2006 ; qu'en outre et alors qu'il ressort des motifs de l'arrêté en litige que la préfète de la Seine-Maritime a examiné d'office la demande de Mme A...au regard des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il n'est pas davantage établi que le refus de séjour contesté aurait méconnu ces dispositions ; qu'enfin, dans ces conditions, pour refuser de délivrer un titre de séjour à Mme A..., la préfète de la Seine-Maritime n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée, malgré les perspectives d'insertion professionnelle dont elle pourrait se prévaloir ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

9. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 1 à 8 que le refus de délivrance de titre de séjour prononcé, par l'arrêté du 18 avril 2016 en litige, à l'encontre de Mme A...n'est entaché d'aucune des illégalités invoquées ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français dont est assorti ce refus devrait être annulée par voie de conséquence de l'annulation de celui-ci ne peut qu'être écarté ;

10. Considérant que, si, en vertu du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être motivée, cette disposition n'impose pas, lorsqu'une telle mesure d'éloignement est adossée à un refus de séjour, que celle-ci fasse l'objet d'une motivation distincte de celle de ce refus ; que, comme il a été dit au point 1, la décision refusant de délivrer un titre de séjour à Mme A...est suffisamment motivée ; qu'il suit de là qu'il y a lieu d'écarter comme manquant en fait le moyen tiré de ce que l'arrêté en litige serait insuffisamment motivé en tant qu'il fait obligation à Mme A...de quitter le territoire français ;

11. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 8, le moyen tiré de ce que la décision obligeant Mme A...à quitter le territoire français aurait été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction assortie d'astreinte doivent, par voie de conséquence, être rejetées ; qu'il en est de même, en tout état de cause, de celle présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée à la préfète de la Seine-Maritime.

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N°17DA00448

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17DA00448
Date de la décision : 21/09/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : ELATRASSI-DIOME

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-09-21;17da00448 ?
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