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21/09/2017 | FRANCE | N°16DA01897

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre - formation à 3, 21 septembre 2017, 16DA01897


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, d'annuler l'arrêté du 19 octobre 2015 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office, d'autre part, de faire injonction, sous astreinte, à la préfète de la Seine-Maritime de lui délivrer un titre de séjour, à défaut, de lui délivrer une autorisation provisoire

de séjour dans l'attente d'un nouvel examen de sa situation.

Par un jugement n°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, d'annuler l'arrêté du 19 octobre 2015 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office, d'autre part, de faire injonction, sous astreinte, à la préfète de la Seine-Maritime de lui délivrer un titre de séjour, à défaut, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente d'un nouvel examen de sa situation.

Par un jugement n° 1601496 du 25 août 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 octobre 2016, M.D..., représenté par Me C...B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 25 août 2016 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime du 19 octobre 2015 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation après l'avoir mis en possession d'une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, a été entendu, au cours de l'audience publique.

Sur la légalité du refus de séjour :

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : / (...) / 8° A l'étranger reconnu réfugié en application du livre VII (...) " ;

2. Considérant qu'aucune disposition du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'impose à l'autorité préfectorale, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'admission au séjour au seul titre de l'asile, d'examiner d'office si le demandeur peut prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sur un autre fondement, même si elle conserve la faculté de faire usage, à titre gracieux, du pouvoir de régularisation qui lui est reconnu ; qu'il ressort des pièces du dossier que la demande d'asile que M. D...avait formée a fait l'objet d'une décision de rejet par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 26 janvier 2015, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 24 juillet 2015 ; que le préfet de la Seine-Maritime, qui n'a pas examiné la demande d'admission au séjour de M. D...sur un autre fondement que celui de l'asile mais s'est seulement assuré, avant de lui faire obligation de quitter le territoire français, de ce qu'il n'était pas dans une situation faisant légalement obstacle au prononcé d'une telle mesure, au regard notamment de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, était ainsi tenu de refuser à M. D... la délivrance de la carte de résident qu'il sollicitait sur le fondement du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la carte de séjour temporaire prévue au 1° de l'article L. 313-13 de ce code en faveur des ressortissants étrangers qui se sont vus reconnaître le bénéfice de la protection subsidiaire ; qu'il s'ensuit que les moyens tirés par M. D... de ce que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour aurait elle-même été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de ce qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ne peuvent qu'être écartés comme inopérants ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

3. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point précédent que le moyen tiré de ce que la décision faisant obligation à M. D...de quitter le territoire français devrait être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ne peut qu'être écarté ;

4. Considérant que M.D..., ressortissant russe d'origine arménienne qui serait entré sur le territoire français le 27 avril 2014 en compagnie de son épouse et de leurs trois filles, nées respectivement en 1993, 1995 et 1997, fait état des résultats honorables obtenus par sa fille cadette Maria, qui était mineure à la date de l'arrêté en litige, dans le cadre de sa scolarisation en classe de seconde en France, et des efforts qu'il a accomplis, ainsi que l'ensemble des membres de la famille, pour maîtriser la langue française dans le but de pouvoir s'intégrer et du fait que son épouse a formulé une demande d'admission au séjour pour raison de santé ; qu'il est toutefois constant que Mme D... a elle-même fait l'objet, de même que les deux filles majeures du couple, d'une décision de refus de séjour et d'une obligation de quitter le territoire français prises le 19 octobre 2015 ; que, si la préfète de la Seine-Maritime a toutefois procédé, par un arrêté du 31 mai 2016, au retrait de l'obligation de quitter le territoire français dont le refus de séjour prononcé à l'égard de Mme D...était assorti, cette mesure a seulement eu pour objet de permettre au service de procéder à l'examen de la demande d'admission au séjour pour raison de santé que l'intéressée avait entre-temps formée, mais ne saurait permettre à celle-ci, ni aux autres membres de sa famille, de se prévaloir d'un droit au séjour ; qu'ainsi, M. D..., son épouse et leurs deux filles majeures se trouvaient, à la date à laquelle l'arrêté du 19 octobre 2015 en litige a été pris, en situation de séjour irrégulier sur le territoire français ; qu'en outre, M. D..., qui est, comme son épouse, de nationalité russe, n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales proches dans ce pays, où il a habituellement vécu, aux termes mêmes du récit qu'il a joint à sa demande d'asile, depuis l'année 2002 ; qu'il n'établit pas davantage, par ses seules allégations relatives aux discriminations et mauvais traitements dont lui-même et sa famille auraient été les victimes en Russie, lesquelles n'ont au demeurant convaincu ni l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, ni la Cour nationale du droit d'asile, que des circonstances particulières feraient obstacle à ce qu'il puisse poursuivre, avec son épouse et leurs filles, leur vie familiale dans ce pays et à ce que la cadette y poursuive sa scolarité au lycée ; que, par suite et eu égard notamment à la faible ancienneté et aux conditions du séjour de M. D... et en dépit des efforts d'intégration dont fait état l'intéressé, la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'est pas davantage établi, dans ces conditions, que, pour faire obligation à M.D..., qui n'invoque aucune perspective d'insertion professionnelle, de quitter le territoire français, malgré la scolarité poursuivie avec succès par sa fille cadette au lycée, le préfet de la Seine-Maritime aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;

5. Considérant qu'aux termes des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que ces stipulations sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation ;

6. Considérant qu'eu égard à ce qui a été dit au point 4, s'agissant notamment de la possibilité pour M. D...et sa famille de se réinstaller dans leur pays d'origine, où il n'est pas établi que sa fille cadette ne pourrait poursuivre sa scolarité au lycée, pour refuser aux intéressés la délivrance d'un titre de séjour, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas porté une attention insuffisante à l'intérêt supérieur de cet enfant, ni n'a méconnu les stipulations précitées du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

7. Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ;

8. Considérant que M.D..., qui reprend ses allégations afférentes aux discriminations et mauvais traitements dont lui-même, son épouse et leurs filles auraient fait l'objet dans leur pays d'origine, n'apporte aucun élément probant au soutien de son récit, alors au demeurant que sa demande d'asile a, comme il a été dit au point 2, été rejetée par une décision définitive ; qu'ainsi, il n'établit pas la réalité des risques personnels et actuels qu'il encourrait en cas de retour en Russie ; que, par suite, les dispositions précitées de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'ont été méconnues par le préfet de la Seine-Maritime pour fixer ce pays comme celui à destination duquel M. D... pourra être reconduit d'office ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction assortie d'astreinte doivent, par voie de conséquence, être rejetées ; qu'il en est de même, en tout état de cause, de celles qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée, pour information, à la préfète de la Seine-Maritime.

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N°16DA01897

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA01897
Date de la décision : 21/09/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SELARL MADELINE-LEPRINCE-MAHIEU

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-09-21;16da01897 ?
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