Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...D..., Mme H...D..., M. G...I...et Mme E...I...ont demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir la délibération du 20 juin 2014 par laquelle le conseil municipal de la commune d'Aviron a " voté pour le droit de préemption " des deux parcelles ZB 51 et ZB 52 ainsi que l'arrêté du 21 octobre 2014 par lequel le maire de cette commune a exercé son droit de préemption sur ces parcelles.
Par un jugement n° 1404206 du 24 novembre 2015, le tribunal administratif de Rouen, par l'article 1er, a annulé " la décision de préempter les parcelles ZB 51 et ZB 52 prise par le maire d'Aviron le 21 octobre 2014, consécutive à la délibération du conseil municipal du 20 juin 2014 ", par l'article 2, a mis à la charge de la commune la somme globale de 500 euros à verser à M. et Mme G... I...et à M. et Mme C...D...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, par l'article 3, a rejeté le surplus des conclusions de la requête.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 15 janvier 2016 et 14 avril 2017, la commune d'Aviron, représentée par la SCP Baron, Cosse, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande de première instance ;
3°) de mettre à la charge de M. et Mme D...et M. et Mme I...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la délibération municipale du 20 juin 2014 attaquée, qui ne comporte qu'une simple déclaration d'intention, n'emporte pas préemption mais constitue un acte superfétatoire insusceptible de recours ;
- la réalité du projet hydraulique, qui n'avait pas été abandonné, était suffisamment justifiée à la date de la décision de préemption du 21 octobre 2014 sur la parcelle ZB 51 ;
- le moyen relatif à la parcelle ZB 52 est dépourvu d'objet dès lors que l'arrêté de préemption du maire ne portait pas sur cette parcelle et que la délibération précitée n'emportait pas préemption des parcelles ;
- il n'y avait pas de nécessité d'adopter une nouvelle délibération instaurant un droit de préemption urbain à la suite du remplacement du plan d'occupation des sols de la commune par un plan local d'urbanisme.
Par un mémoire en défense et un mémoire complémentaire, enregistrés les 4 mars 2016 et 7 mars 2017, M. C...D..., Mme H...D..., M. G...I...et Mme E...I..., représentés par Me A...G..., demandent à la cour :
1°) de rejeter de la requête ;
2°) de réformer du jugement en ce qu'il n'a pas annulé la délibération municipale du 20 juin 2014 votant le droit de préemption pour la parcelle ZB 52 ;
3°) de mettre à la charge de la commune d'Aviron la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la délibération, qui n'était pas superfétatoire en ce qui concerne la parcelle ZB 52, leur fait grief dans cette mesure ;
- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.
La clôture d'instruction a été fixée au 21 avril 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Olivier Yeznikian, président de chambre,
- les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public,
- et les observations de Me F...B..., représentant la commune d'Aviron, et de Me A...G..., représentant M. et Mme D...et M. et MmeI....
Sur la délibération du 20 juin 2014 du conseil municipal d'Aviron :
1. Considérant qu'il ne ressort ni des termes de la délibération attaquée, ni des autres pièces du dossier, que le conseil municipal de la commune d'Aviron a entendu exercer le droit de préemption en lieu et place du maire de la commune ; que, par suite, M. et Mme D...et M. et Mme I...ne sont pas fondés à demander l'annulation de cette délibération au motif qu'elle vaudrait décision de préemption de la parcelle ZB 52 ; qu'il en résulte, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune, qu'ils ne sont pas, en tout état de cause, fondés, par la voie de l'appel incident, à demander la réformation du jugement du tribunal administratif de Rouen attaqué sur ce point ;
Sur la décision du 21 octobre 2014 du maire de la commune d'Aviron portant préemption :
En ce qui concerne la parcelle ZB 52 :
2. Considérant qu'il résulte des termes de la décision du 21 octobre 2014, confirmés par les écritures de la commune, que le maire de la commune d'Aviron a entendu, à la suite de la réception de la déclaration d'aliéner du 21 septembre 2014, ne préempter que la parcelle ZB 51, située en zone U du plan local d'urbanisme communal ; que la possibilité d'étendre cette préemption à l'unité foncière englobant la parcelle ZB 52, classée en zone A du plan local d'urbanisme, n'a été envisagée, en tout état de cause, qu'à titre subsidiaire et dans la seule hypothèse où il serait exigé une préemption de la totalité de l'unité foncière en application de l'article L. 213-2-1 du code de l'urbanisme ; qu'en tout état de cause, aucune suite n'a été donnée à cette éventualité, le service des domaines ayant par ailleurs fixé la valeur respective des deux parcelles et la parcelle ZB 52 ayant été vendue le 13 janvier 2015 à l'indivision D...-I... ; que, dans ces conditions, la commune est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé la décision du maire en tant qu'elle portait préemption de la parcelle ZB 52 ;
En ce qui concerne la parcelle ZB 51 :
3. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme que les collectivités titulaires du droit de préemption urbain peuvent légalement exercer ce droit, d'une part, si elles justifient, à la date à laquelle elles l'exercent, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date, et, d'autre part, si elles font apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption ;
4. Considérant que, pour censurer la décision du maire de préempter la parcelle ZB 51, le tribunal administratif de Rouen a retenu que la commune ne justifiait pas, à la date de la mesure contestée, de la réalité d'un projet destiné à l'aménagement d'un réseau fonctionnel favorable au déplacement doux ni, en ce qui concerne spécifiquement la parcelle ZB 51, de la réalité d'un projet toujours actuel d'un aménagement hydraulique sur cette parcelle destiné à assurer l'infiltration des eaux de pluie ; qu'en appel, la commune ne conteste pas l'absence de projet préalable sur cette parcelle concernant les déplacements doux ; qu'en revanche, il ressort des pièces qu'ainsi qu'elle le soutient, elle avait, antérieurement à la préemption, un projet d'aménagement d'un ouvrage hydraulique sur cette parcelle afin de recueillir le ruissellement des eaux de pluie de la chaussée dans le cadre d'une opération d'aménagement de la RD 543 ; que ce projet avait été temporairement écarté au profit d'une solution provisoire ne comportant pas de séparateur d'hydrocarbures alors que l'aménagement envisagé doit recueillir des eaux pluviales ruisselant sur 3 200 m² de voirie et de bassin d'infiltration ; que la commune explique qu'elle avait été contrainte à ce choix faute de disposer de la propriété de la parcelle, le notaire étant à la recherche des héritiers du terrain ; que le maintien du projet a été confirmée par la création d'un emplacement réservé dans le document d'urbanisme antérieur à la préemption, ainsi que par les comptes rendus de chantier, et les documents, que la société ayant réalisé les travaux a établis pour expliquer leur portée ; que la circonstance que ces documents d'explication aient été rédigés postérieurement à la préemption est sans influence dès lors qu'ils se rapportent à des faits antérieurs ; qu'ainsi, l'ensemble de ces éléments est de nature à justifier la réalité d'un projet à la date de la décision attaquée ; que, par suite, la commune d'Aviron est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rouen a retenu une insuffisance de motivation quant à la réalité du projet allégué pour annuler la décision de préemption attaquée ;
5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les demandeurs devant la juridiction administrative ;
6. Considérant que le transfert de compétence à l'agglomération en ce qui concerne les ouvrages hydrauliques est intervenu postérieurement à la décision attaquée ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du maire de la commune d'Aviron doit être écarté ;
7. Considérant qu'aucune disposition ne fait obstacle à la préemption d'un espace boisé classé, lequel peut également concerner une parcelle classée en zone U ; que l'aménagement projeté qui consiste à aménager un cheminement pour les eaux pluviales et un bassin d'infiltration, est compatible avec la conservation du boisement, objectif qui apparaît d'ailleurs dans les délibérations du conseil municipal sur cette parcelle ; que, par suite, le moyen tiré de l'impossibilité de préempter la parcelle ZB 51 en ce qu'elle est comprise dans un espace boisé classé doit être écarté ;
8. Considérant que, d'une part, la transformation du plan d'occupation des sols en plan local d'urbanisme n'a pas, en tout état de cause, emporté caducité de la délibération du 27 septembre 1994 par laquelle le conseil municipal a institué le droit de préemption urbain pour la commune d'Aviron ; que, d'autre part, la délibération du 20 juin 2014 n'a pas pour effet d'instituer le droit de préemption urbain mais s'est bornée tout au plus à rappeler l'existence du droit de préemption urbain ; qu'enfin, le moyen tiré de la nécessité d'adopter une nouvelle délibération instaurant le droit de préemption urbain manque en fait ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur le défaut d'intérêt pour agir opposée en première instance par la commune d'Aviron, que cette collectivité est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé la décision de préemption du 21 octobre 2014 prise par son maire ;
10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme D...ainsi que de M. et Mme I...la somme globale de 1 500 euros à verser à la commune d'Aviron au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de M. et Mme D...et de M. et Mme I...présentées sur leur fondement ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rouen du 24 novembre 2015 est annulé.
Article 2 : La demande de M. et Mme D...et de M. et Mme I...est rejetée.
Article 3 : M. et Mme D...et M. et Mme I...verseront à la commune d'Aviron la somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Aviron, à M. C...D..., à Mme H...D..., à M. G...I..., à Mme E...I...et au ministre de la cohésion des territoires.
Délibéré après l'audience publique du 18 mai 2017 à laquelle siégeaient :
- M. Olivier Yeznikian, président de chambre,
- M. Christian Bernier, président-assesseur,
- M. Xavier Fabre, premier conseiller.
Lu en audience publique le 1er juin 2017.
Le président-assesseur,
Signé : C. BERNIERLe premier vice-président de la cour,
Président-rapporteur,
Signé : O. YEZNIKIAN
Le greffier,
Signé : C. SIRE
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Le greffier en chef,
Par délégation,
Le greffier,
Christine Sire
N°16DA00099 6