Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D...E...a demandé au tribunal administratif de Lille, à titre principal, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 1er août 2013 par lequel le maire de Wattignies s'est opposé à sa déclaration préalable de travaux pour l'édification d'un abri de jardin sur un terrain situé 18 rue Jacquet et, à titre subsidiaire, de condamner la commune de Wattignies à lui verser une somme de 3 814 euros en réparation du préjudice financier subi.
Par un jugement n° 1305884 du 17 septembre 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 2 décembre 2015, et un mémoire, enregistré le 28 septembre 2016, M.E..., représenté par la SELARL Detrez, Cambrai avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 1er août 2013 par lequel le maire de Wattignies s'est opposé à sa déclaration préalable de travaux pour l'édification d'un abri de jardin ;
3°) d'enjoindre au maire de la commune, à titre principal, de prendre une décision de non-opposition à sa déclaration de travaux dans un délai de quinze jours suivant la décision à intervenir et, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa déclaration préalable de travaux dans le même délai ;
4°) de condamner la commune de Wattignies à lui verser la somme de 3 814 euros en réparation de son préjudice financier ;
5°) de mettre à la charge de la commune de Wattignies, au profit de la SELARL Detrez, Cambrai avocats, la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier faute pour le tribunal d'avoir sollicité de la commune une nouvelle habilitation de son maire à défendre après les élections communales de 2014 ;
- il est également irrégulier faute pour le tribunal de l'avoir invité à régulariser ses conclusions indemnitaires ;
- ses conclusions indemnitaires ont été à tort rejetées comme irrecevables ;
- l'auteur de l'acte est incompétent par méconnaissance des dispositions de l'article L. 2122-17 du code général des collectivités territoriales ;
- l'abri de jardin est compatible avec le règlement du plan local d'urbanisme.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 1er septembre et 15 novembre 2016, la commune de Wattignies, représentée par Me I...B..., conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge du requérant sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Un mémoire, enregistré le 21 novembre 2016, a été présenté par M.E....
L'instruction a été close le 30 novembre 2016 par ordonnance du 15 novembre 2016.
M. E...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 octobre 2015 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Douai.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Amélie Fort-Besnard, premier conseiller,
- les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public,
- et les observations de M. D...E...et de Me A...G..., représentant la commune de Wattignies.
1. Considérant que M. D...E...a déposé, le 5 juillet 2013, en mairie de Wattignies, une déclaration préalable pour l'installation d'un abri de jardin d'une surface au sol de 10,5 m² sur la parcelle cadastrée AM 312, située 18 rue Jacquet, où se trouve son habitation ; que, par un arrêté du 1er août 2013, le maire de Wattignies s'est opposé à cette déclaration ; que M. E...relève appel du jugement du tribunal administratif de Lille du 17 septembre 2015 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de cet arrêté et à l'indemnisation du préjudice financier qu'il estime avoir subi du fait de cette décision ;
Sur la régularité du jugement :
En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :
2. Considérant, en premier lieu, que, pour rejeter comme irrecevables les conclusions indemnitaires de M.E..., le tribunal administratif a retenu qu'il n'avait pas saisi la commune de Wattignies d'une demande préalable tendant au versement de la somme de 3 814 euros ; que cette irrecevabilité avait été expressément opposée en défense par la commune de Wattignies, dans un mémoire qui avait été communiqué à M.E... ; que, dès lors, le tribunal administratif n'était pas préalablement tenu de l'inviter à régulariser sa demande indemnitaire en application de l'article R. 612-1 du code de justice administrative ; que, par suite, M. E...n'est pas fondé à soutenir que le jugement est irrégulier faute pour le tribunal de l'avoir invité à régulariser ses conclusions indemnitaires ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que la commune de Wattignies a conclu, à titre principal, dans ses mémoires en défense successifs devant le tribunal administratif de Lille à l'irrecevabilité des conclusions indemnitaires de M.E..., faute pour ce dernier d'avoir préalablement lié le contentieux ; que, dès lors, M. E...n'est pas fondé à soutenir que, la commune de Wattignies ayant lié le contentieux par ses mémoires en défense, le tribunal aurait repris à tort cette fin de non-recevoir pour rejeter ses conclusions indemnitaires ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales : " Le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : / (...) / 16° D'intenter au nom de la commune les actions en justice ou de défendre la commune dans les actions intentées contre elle, dans les cas définis par le conseil municipal ; / (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 2132-1 du même code : " Sous réserve des dispositions du 16° de l'article L. 2122-22, le conseil municipal délibère sur les actions à intenter au nom de la commune " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 2132-2 : " Le maire, en vertu de la délibération du conseil municipal, représente la commune en justice " ;
5. Considérant que, lorsqu'une partie est une personne morale, il appartient à la juridiction administrative saisie, qui en a toujours la faculté, de s'assurer, le cas échéant, que le représentant de cette personne morale justifie de sa qualité pour agir au nom de cette partie ; que tel est le cas lorsque cette qualité est contestée sérieusement par l'autre partie ou qu'au premier examen, l'absence de qualité du représentant de la personne morale semble ressortir des pièces du dossier ;
6. Considérant que la commune de Wattignies a joint à son premier mémoire en défense, enregistré au greffe du tribunal le 4 novembre 2013, la délibération du 28 mars 2008 par laquelle le conseil municipal a, sur le fondement des dispositions de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales, donné délégation au maire pour la durée de son mandat aux fins notamment d'intenter au nom de la commune les actions en justice ou de défendre les intérêts de la commune dans les actions intentées contre elle, tant en demande qu'en défense et devant toutes les juridictions ; que les quatre mémoires en défense produits en première instance par la commune ont, en tout état de cause, été produits pendant ce mandat ; que, par suite, M. E...n'est pas fondé à soutenir que le tribunal administratif se serait fondé à tort sur des écritures produites par le maire de la commune pour rejeter ses conclusions indemnitaires ;
En ce qui concerne les conclusions d'excès de pouvoir :
7. Considérant que le moyen tiré de l'irrégularité des mémoires produits en défense par la commune concerne également les conclusions pour excès de pouvoir présentées par M. E...devant le tribunal administratif de Lille ; que, pour les mêmes raisons que celles exposées au point 6, le moyen soulevé par M. E...manque en fait en ce qui concerne les mémoires produits pendant le mandat couvrant la période de 2008 à 2014 ; que si la commune a répondu, le 6 juillet 2015, au moyen d'ordre public communiqué par le tribunal, sans produire de nouvelle délibération autorisant son maire à la représenter en justice après le renouvellement du conseil municipal, il ne ressortait pas, au premier examen, des éléments au vu desquels le tribunal a statué que le maire fût dépourvu d'une telle qualité pour la période couvrant le mandat débutant en 2014 ; qu'en tout état de cause, la commune qui n'était pas tenue de produire une nouvelle habilitation, a produit devant la cour la délibération du 8 avril 2014 habilitant son nouveau maire à la représenter en justice ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le tribunal aurait dû inviter la commune à produire une nouvelle habilitation de son maire à défendre après les élections municipales, doit, en tout état de cause, être écarté ;
8. Considérant que si M. E...a entendu soulever un moyen tiré du défaut de précision du moyen d'ordre public communiqué par le tribunal administratif, il ressort des pièces du dossier qu'un tel moyen manque en fait ;
Sur les conclusions d'excès de pouvoir :
En ce qui concerne la compétence de l'auteur de l'acte :
9. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 2122-17 du code général des collectivités territoriales : " En cas d'absence, de suspension, de révocation ou de tout autre empêchement, le maire est provisoirement remplacé, dans la plénitude de ses fonctions, par un adjoint, dans l'ordre des nominations et, à défaut d'adjoint, par un conseiller municipal désigné par le conseil ou, à défaut, pris dans l'ordre du tableau " ;
10. Considérant qu'il appartient à la partie contestant la réalité de l'empêchement du délégataire pour signer l'arrêté attaqué d'établir qu'il n'était pas empêché ;
11. Considérant que la décision attaquée a été signée par M.F..., 2ème adjoint au maire de Wattignies ; que M. E...n'apporte aucun élément de nature à établir que la première adjointe ou le maire n'était pas réellement empêchés ; qu'en outre, il ressort des pièces du dossier, notamment de la note du 5 juillet 2013, que le maire était en congés du 19 juillet au 5 août ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté ;
En ce qui concerne les dispositions du plan local d'urbanisme :
12. Considérant que M. E...dispose d'une maison d'habitation située à Wattignies, en zone NP du plan local d'urbanisme de la métropole européenne de Lille, soit une " zone naturelle et rurale de qualité paysagère à dominante récréative et de loisirs de plein air pouvant accueillir des équipements en lien avec cette vocation, dans le respect de la préservation des sites " ; qu'aux termes de l'article 1 de la section 1 du chapitre III du PLU, applicable aux zones NP de toutes les communes de la métropole de Lille: " Tous les types d'occupation ou d'utilisation du sol sont interdits à l'exception de ceux prévus à l'article 2 " ; qu'aux termes du A) de l'article 2 applicable aux constructions à usage d'habitation, sont autorisées : " 1) Pour l'existant : / a) L'extension mesurée à la condition qu'elle n'augmente pas le nombre de logements et sans que la construction puisse dépasser 170 m² de surface de plancher totale définitive après travaux, dans le respect de la qualité architecturale du bâtiment existant et dans un souci d'intégration à l'environnement rural et paysager. / (...) / d) Un abri de jardin dans la limite de 5 m² et les garages dans la limite de 40 m² par unité foncière supportant une habitation, dans le respect de la qualité architecturale du bâtiment existant, et dans un souci d'intégration à l'environnement rural et paysager. Sauf impossibilité liée à la configuration de l'unité foncière, les garages doivent être accolés à la construction à usage d'habitation " ;
13. Considérant que, l'abri de jardin pour lequel M. E...a déposé sa déclaration préalable de travaux devant s'implanter sur la parcelle d'assiette de sa maison d'habitation existante, le tribunal administratif de Lille a substitué les dispositions du d) du 1) du A de l'article 2, relatives aux constructions existantes, comme motif de la décision attaquée, à celles du b) du 2) de ce même A), applicables aux constructions nouvelles, initialement retenues par le maire ;
14. Considérant qu'il est constant que M. E...n'a pas demandé une extension de sa maison d'habitation mais l'implantation d'un abri de jardin distinct de celle-ci ; que, par suite, la circonstance que l'extension de sa maison d'habitation, notamment sous la forme d'un garage, pourrait être supérieure à 10 m² pour atteindre 40 m², est sans incidence sur la décision en litige ; qu'en revanche, il est constant que la surface de plancher de l'abri de jardin que souhaite implanter M. E...est de 10,5 m² ; que, dès lors, le maire de Wattignies était fondé à retenir que cette construction ne respectait pas la limite de 5 m2 fixée par les dispositions du plan local d'urbanisme citées au point 12 ; qu'enfin, M. E... ne peut utilement se prévaloir des circonstances que l'abri de jardin en cause serait d'une grande qualité esthétique et que d'autres abris de jardin de taille supérieure à 5 m2 auraient été autorisés dans le même secteur ;
15. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 9 à 14 que M. E...n'est pas fondé à demander l'annulation pour excès de pouvoir de l'opposition à sa déclaration de travaux ;
16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;
17. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions que M. E...présente sur leur fondement à l'encontre de la commune de Wattignies qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante ; qu'il n'y a pas lieu, eu égard à la situation économique du requérant, de faire droit aux conclusions que celle-ci présente sur le même fondement ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D...E...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Wattignies présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...E...et à la commune de Wattignies et à Me C...H....
Délibéré après l'audience publique du 4 mai 2017 à laquelle siégeaient :
- M. Olivier Yeznikian, président de chambre,
- M. Christian Bernier, président-assesseur,
- Mme Amélie Fort-Besnard, premier conseiller.
Lu en audience publique le 18 mai 2017.
Le rapporteur,
Signé : A. FORT-BESNARDLe premier vice-président de la cour,
Président de chambre,
Signé : O. YEZNIKIAN
Le greffier,
Signé : C. SIRE
La République mande et ordonne à la ministre du logement et de l'habitat durable en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Le greffier en chef,
Par délégation,
Le greffier,
Christine Sire
N°15DA01902 2