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15/11/2016 | FRANCE | N°16DA01070

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3 (bis), 15 novembre 2016, 16DA01070


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 31 mars 2015 par laquelle le préfet de l'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement no 1501679 du 29 décembre 2015, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 juin 2016, M. A..., représenté par Me B...D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 29 décembre 2015 du tribunal administrat

if d'Amiens ;

2°) d'annuler l'arrêté du 31 mars 2015 du préfet de l'Oise ;

3°) d'enjoindre au préfe...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 31 mars 2015 par laquelle le préfet de l'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement no 1501679 du 29 décembre 2015, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 juin 2016, M. A..., représenté par Me B...D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 29 décembre 2015 du tribunal administratif d'Amiens ;

2°) d'annuler l'arrêté du 31 mars 2015 du préfet de l'Oise ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Oise de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- la décision attaquée méconnaît les stipulations du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en ce qu'il ne peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine alors que des membres de sa famille installés en France peuvent lui procurer l'assistance indispensable à son état, ce qui n'est pas le cas en Tunisie ;

- il est dans l'incapacité de voyager ;

- la décision attaquée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 août 2016, le préfet de l'Oise conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 avril 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 modifié ;

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Dominique Bureau, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. A..., ressortissant tunisien né le 28 novembre 1954, est entré le 8 août 2013 en France où vivent sa fille et son gendre, sous couvert d'un visa de court séjour ; qu'il a demandé, le 17 février 2014, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet de l'Oise a rejeté sa demande par une décision du 31 mars 2015 ; que M. A... relève appel du jugement du 29 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation cette décision ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11°: A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire (...) sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " (...) L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 susvisé, au vu du rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et des informations dont il dispose : " Le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; - la durée prévisible du traitement. Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays (...) " ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en a fait la demande sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays de renvoi ; que, lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A..., âgé de soixante ans à la date de la décision attaquée, est atteint d'un diabète de type 2 insulino-requérant et multicompliqué, notamment, par une cardiopathie pour laquelle il a subi en 2008 un triple pontage, une néphropathie ainsi qu'une rétinopathie ; qu'il est constant que l'absence d'une prise en charge appropriée à son état entraînerait pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, comme le mentionne le médecin de l'agence régionale de santé dans son avis émis le 20 février 2015 sur la demande de titre de séjour de l'intéressé ; que, selon l'un des certificats médicaux rédigés par le médecin traitant de M. A... le 16 avril 2015 et qui, compte tenu de la nature des pathologies considérées, peut être regardé comme relatif à la situation existante au 31 mars 2015, date de la décision contestée, l'état de l'intéressé nécessite un suivi régulier pluri-spécialisé ; que, toutefois, les nombreuses pièces médicales produites, dépourvues d'indication sur ce point, ne contredisent pas les conclusions de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé selon lesquelles M. A... peut bénéficier dans son pays de la prise en charge qui lui est nécessaire, alors, en outre, que le préfet de l'Oise produit des articles de presse médicale et des informations publiées sur le site du ministère de la santé tunisien sur les possibilités de traitement de ses pathologies ; que M. A... ne saurait utilement se prévaloir des difficultés d'accès à une telle prise en charge, au sujet desquelles il n'apporte au demeurant aucune précision ou justification ; qu'en tout état de cause, ni les mentions de l'un des certificats du 16 avril 2015, rédigé en termes généraux, ni les deux attestations peu probantes selon lesquelles il serait séparé de son épouse vivant au Maroc, indigente et hébergée chez un tiers, ne permettent de tenir pour établi que, faute d'assistance apportée par un membre de sa famille, M. A... se trouverait en cas de retour dans son pays contraint de vivre dans des conditions susceptibles de compromettre gravement son état de santé ; que le requérant n'est, ainsi, pas fondé à soutenir que le préfet de l'Oise aurait procédé à une inexacte application des conditions de délivrance d'un titre de séjour prévues par les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que, si M. A... a dû subir en octobre 2013 et en janvier 2014 l'amputation de deux orteils du pied droit à la suite d'une infection d'origine mécanique, les certificats médicaux selon lesquels la décharge totale de son pied lui interdit tout déplacement, de même que les voyages en avion, sont antérieurs de plus d'un an à la décision contestée ; que le certificat médical du 16 avril 2015 selon lequel son " état de santé ne lui permet pas de voyager " est dépourvu de toute précision ; qu'ainsi, et en tout état de cause, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... ne pourrait voyager sans risque à destination de son pays d'origine ;

6. Considérant, en troisième lieu, que le moyen tiré par M. A... de la méconnaissance par le préfet des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale est inopérant, dès lors que les circonstances de sa vie privée et familiale sont sans lien avec l'appréciation qu'il appartient au préfet de porter sur son état de santé pour examiner sa demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté attaqué ; que ses conclusions à fin d'annulation , ainsi que, par voie de conséquence, celles à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par suite, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., au ministre de l'intérieur et à Me B... D....

Copie en sera adressée au préfet de l'Oise.

Délibéré après l'audience publique du 18 octobre 2016 à laquelle siégeaient :

- Mme Odile Desticourt, présidente de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- Mme Dominique Bureau, premier conseiller.

Lu en audience publique le 15 novembre 2016.

Le rapporteur,

Signé : D. BUREAULa présidente de chambre,

Signé : O. DESTICOURT

Le greffier,

Signé : M.T. LEVEQUE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le Greffier

Marie-Thérèse Lévèque

2

N°16DA01070


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 16DA01070
Date de la décision : 15/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière - Légalité externe.


Composition du Tribunal
Président : Mme Desticourt
Rapporteur ?: Mme Dominique Bureau
Rapporteur public ?: M. Guyau
Avocat(s) : QUENNEHEN et TOURBIER

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-11-15;16da01070 ?
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