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06/10/2016 | FRANCE | N°16DA00410

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre - formation à 3 (ter), 06 octobre 2016, 16DA00410


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal administratif d'Amiens l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 15 septembre 2015 du préfet de l'Oise refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1503023 du 29 décembre 2015, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :
r>Par une requête, enregistrée le 23 février 2016, M.D..., représenté par Me E... F..., demande...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal administratif d'Amiens l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 15 septembre 2015 du préfet de l'Oise refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1503023 du 29 décembre 2015, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 23 février 2016, M.D..., représenté par Me E... F..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 29 décembre 2015 du tribunal administratif d'Amiens ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 15 septembre 2015 ;

Il soutient que :

- la décision du préfet lui refusant un titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une erreur de droit ;

- elle viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle viole les dispositions des articles L. 313-11 4°, L. 311-7 et L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français viole tant les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que les articles L. 313-11 4° et L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 mai 2016, le préfet de l'Oise conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens présentés par M. D...ne sont pas fondés.

M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 janvier 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Vinot, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. C...D..., né le 15 janvier 1988, de nationalité turque, soutient être entré sur le territoire français le 5 décembre 2012 ; qu'il a présenté le 14 janvier 2013 une demande d'asile qui a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 11 octobre 2013, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 12 mai 2015 ; qu'il a ensuite souscrit une demande de titre de séjour le 18 août 2015, sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en se prévalant de la qualité de conjoint de français, à la suite de son mariage avec Mme B...A..., le 20 décembre 2014 ; que, par un arrêté du 15 septembre 2015, dont M. D...demande l'annulation, le préfet de l'Oise a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé la Turquie comme pays à destination duquel il pourra être reconduit et prononcé à son encontre une interdiction de retour d'un an sur le territoire français ; que M. D...relève appel du jugement du 29 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : (...) 8° A l'étranger qui a obtenu le statut de réfugié en application du livre VII du présent code (...) " ; que M.D..., qui a sollicité le bénéfice des dispositions de l'article L. 314-11 précité par une demande d'asile formulée le 14 janvier 2013, a vu sa demande rejetée par les décisions rappelées au point 1 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile ; que, dans ces conditions, le préfet de l'Oise était tenu de refuser de lui délivrer la carte de résident prévue par les dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il suit de là que les moyens soulevés contre la décision refusant de délivrer à l'intéressé un titre de séjour en qualité de réfugié sont inopérants ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 311-7 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour "compétences et talents" sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois " ; qu'aux termes de l'article L. 211-2-1 dudit code : " (...) Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour (...) " ; qu'aux termes des dispositions de l'article R. 211-32 dudit code : " La déclaration obligatoire mentionnée à l'article L. 531-2 est, sous réserve des dispositions de l'article R. 212-6, souscrite à l'entrée sur le territoire métropolitain par l'étranger qui n'est pas ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne et qui est en provenance directe d'un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 " ; et qu'aux termes de l'article R. 211-33 du même code : " La déclaration d'entrée sur le territoire français est souscrite auprès des services de la police nationale ou, en l'absence de tels services, des services des douanes ou des unités de la gendarmerie nationale. A cette occasion, un récépissé est remis à l'étranger. Il peut être délivré par apposition d'une mention sur le document de voyage. L'étranger assujetti à l'obligation de déclaration doit être en mesure de justifier, à toute réquisition des agents de l'autorité, qu'il a satisfait à cette obligation, par la production de ce récépissé (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 212-6 de ce code : " L'étranger non ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne n'est pas astreint à la déclaration d'entrée sur le territoire français : 1° S'il n'est pas assujetti à l'obligation du visa pour entrer en France en vue d'un séjour d'une durée inférieure ou égale à trois mois ; 2° Ou s'il est titulaire d'un titre de séjour en cours de validité, d'une durée supérieure ou égale à un an, qui a été délivré par un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 ; toutefois, la déclaration doit être souscrite par les résidents d'Etats tiers qui sont désignés par arrêté du ministre chargé de l'immigration " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que la production d'un visa de long séjour, délivré, le cas échéant, selon les modalités fixées au sixième alinéa précité de l'article L. 211-2-1, est au nombre des conditions auxquelles est subordonnée la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 ; que, dès lors, le préfet peut refuser une telle carte de séjour en se fondant sur le défaut de production par l'étranger d'un visa de long séjour ;

4. Considérant que si M. D...se prévaut d'une entrée sur le territoire français le 5 décembre 2012, sous couvert d'un visa Schengen délivré par les autorités grecques, ce visa ne comporte aucun cachet de nature à prouver la date alléguée d'entrée en France ; qu'en tout état de cause, le requérant ne justifie pas avoir satisfait à la démarche de la déclaration obligatoire, exigée par les dispositions précitées et à laquelle il était tenu en sa qualité de ressortissant turc, dès lors qu'il n'est ni dispensé de l'obligation de visa, ni titulaire d'un titre de séjour d'une validité d'une durée supérieure à un an délivré par un Etat membre partie à la convention de Schengen ; que, par suite, M.D..., qui ne justifie pas d'une entrée régulière en France, n'est pas fondé à soutenir qu'il incombait au préfet de l'Oise, qui ne s'est pas fondé sur des faits inexacts, de lui délivrer un visa de long séjour ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, faute de justifier d'un visa de long séjour, M. D...ne remplissait pas l'ensemble des conditions prescrites par le 4° de l'article L. 313-11 pour prétendre à la délivrance de plein droit d'une carte de séjour temporaire ; que, par suite, le préfet de l'Oise a pu légalement lui refuser le titre de séjour sollicité sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 précité ;

6. Considérant qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

7. Considérant que M. D...fait valoir qu'il est présent en France depuis son entrée sur le territoire le 5 décembre 2012, où il a contracté mariage en décembre 2014 avec Mme B... A... ; que sa demande d'asile a toutefois été rejetée et qu'il ne justifie pas d'obstacles insurmontables à son retour en Turquie où il n'est pas isolé, afin d'y souscrire un visa de long séjour ; que, par suite, et compte tenu du caractère récent du mariage, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes raisons, il n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

8. Considérant qu'il résulte des motifs énoncés aux paragraphes 6 et 8, que le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) " ;

10. Considérant qu'en l'absence de titre de séjour, M. D...peut se voir appliquer les dispositions précitées du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet de l'Oise, en l'obligeant à quitter le territoire français, aurait méconnu les dispositions et stipulations susmentionnées et aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. C...D....

Copie en sera transmise pour information au préfet de l'Oise.

Délibéré après l'audience publique du 8 septembre 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- M. Olivier Nizet, président-assesseur,

- M. François Vinot, premier conseiller.

Lu en audience publique le 6 octobre 2016.

Le rapporteur,

Signé : F. VINOTLe président de chambre,

Signé : P.-L. ALBERTINI

Le greffier,

Signé : I. GENOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Isabelle Genot

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N°16DA00410


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre - formation à 3 (ter)
Numéro d'arrêt : 16DA00410
Date de la décision : 06/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. François Vinot
Rapporteur public ?: M. Habchi
Avocat(s) : QUENNEHEN et TOURBIER

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-10-06;16da00410 ?
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