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20/09/2016 | FRANCE | N°16DA00550

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3 (quater), 20 septembre 2016, 16DA00550


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 25 juin 2015 du préfet de la Seine-Maritime refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et fixant le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office.

Par un jugement n° 1503428 du 26 janvier 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregi

strée le 17 mars 2016, MmeB..., représentée par Me E... A..., demande à la cour :

1°) d'annul...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 25 juin 2015 du préfet de la Seine-Maritime refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et fixant le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office.

Par un jugement n° 1503428 du 26 janvier 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 mars 2016, MmeB..., représentée par Me E... A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 26 janvier 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 25 juin 2015 du préfet de la Seine-Maritime ;

3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer un titre de séjour temporaire d'une année dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans les mêmes conditions ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;

- le préfet de la Seine-Maritime n'a pas procédé à un examen complet de sa situation personnelle au regard de sa vie privée et familiale ;

- la décision en litige a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière en ce que le préfet de la Seine-Maritime aurait dû l'inviter à produire les documents nécessaires pour compléter son dossier de demande de titre de séjour en qualité de salarié et saisir la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte) ;

- elle méconnaît les stipulations du b) de l'article 7 de l'accord franco-algérien ;

- elle est entachée d'erreurs de fait dès lors qu'elle est entrée en France sous couvert d'un visa de long séjour et a toujours été en situation régulière sur le territoire français ;

- elle méconnaît les stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien et celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

- le préfet de la Seine-Maritime n'a pas procédé à un examen complet de sa situation personnelle au regard de sa vie privée et familiale ;

- la décision en litige est illégale à raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'erreurs de fait ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 mai 2016, la préfète de la Seine-Maritime conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mme B...ne sont pas fondés.

Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 février 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que MmeB..., ressortissante algérienne, née le 15 mars 1966, entrée en France le 5 octobre 2003 sous couvert d'un visa de type D portant la mention " étudiant, s'est vu délivrer un titre de séjour en cette qualité qui lui a été renouvelé jusqu'au 15 décembre 2014 ; qu'elle a sollicité, le 16 mars 2015, un titre de séjour sur le fondement des stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; que Mme B...relève appel du jugement du 26 janvier 2016 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 juin 2015 du préfet de la Seine-Maritime refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office ;

Sur le refus de titre de séjour :

2. Considérant que la décision attaquée, qui comporte l'ensemble des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde est suffisamment motivée alors même que le préfet n'a pas repris l'ensemble des éléments caractérisant la situation personnelle et familiale de l'intéressée ; qu'il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué que le préfet de la Seine-Maritime a procédé à un examen complet de la situation personnelle de Mme B...au regard de sa vie privée et familiale ;

3. Considérant qu'aux termes des stipulations du b) de l'article 7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée reçoivent après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les services du ministre chargé de l'emploi, un certificat de résidence valable un an pour toutes professions et toutes régions, renouvelable et portant la mention " salarié " : cette mention constitue l'autorisation de travail exigée par la législation française. " ; et qu'aux termes de l'article 9 du même accord : " (...) / Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des articles 4, 5, 7, (...) les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises. / (...) " ; qu'il résulte de ces stipulations que la délivrance d'un certificat de résidence algérien portant la mention " salarié " est subordonnée à la production par l'étranger d'un visa de long séjour et d'un contrat de travail visé par les services en charge de l'emploi ; qu'en vertu des dispositions de l'article R. 311-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en l'absence de présentation de demande de renouvellement de la carte de séjour à l'échéance du délai de deux mois précédant l'expiration de la carte de séjour dont il est titulaire, l'étranger doit justifier à nouveau des conditions requises pour l'entrée sur le territoire national lorsque la possession d'un visa est requise pour la première délivrance de la carte de séjour ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, en particulier du dossier de demande de titre de séjour présenté par la requérante, que si Mme B...a demandé un titre de séjour au titre de sa vie privée et familiale sur le seul fondement des stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, le préfet de la Seine-Maritime a également examiné la demande de l'intéressée en qualité de salarié au regard des dispositions du b) de l'article 7 du même accord ;

5. Considérant, d'une part, que Mme B...a sollicité son admission au séjour le 16 mars 2015 ; que cette demande, enregistrée au-delà de la date d'expiration, le 15 décembre 2014, du dernier certificat de résidence en sa possession, doit être regardée, en application des dispositions de l'article R. 311-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicables aux ressortissants algériens, comme une première demande de titre de séjour ; que si Mme B...est entrée en France sous couvert d'un visa long séjour le 5 octobre 2003, ce visa était, au jour de la décision attaquée, périmé ; que par suite, le préfet a pu refuser le certificat de résidence demandé par la requérante sans méconnaître les stipulations du b) de l'article 7 de l'accord franco-algérien au motif que celle-ci ne lui avait pas présenté un passeport muni d'un nouveau visa de long séjour exigé par les stipulations de l'article 9 du même accord ;

6. Considérant, d'autre part, qu'il résulte de ce qui a été dit au point 5 que MmeB..., qui ne remplissait pas les conditions pour bénéficier du titre de séjour en qualité de salarié au regard des stipulations précitées de l'accord franco-algérien, n'est pas fondée à soutenir que le préfet a entaché sa décision d'un vice de procédure en ne saisissant pas la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, ni qu'il aurait dû l'inviter à produire un contrat de travail visé par les services de l'Etat, pour compléter son dossier de demande de titre de séjour en qualité de salarié ;

7. Considérant que Mme B...fait valoir que la décision attaquée serait entachée d'erreurs de fait dès lors qu'elle est entrée en France sous couvert d'un visa de long séjour et a toujours été en situation régulière sur le territoire français ; que toutefois, il résulte de ce qui a été dit au point 5, que le préfet de la Seine-Maritime a pu, sans commettre d'erreurs de fait, estimer que Mme B...n'avait pas présenté un passeport muni d'un nouveau visa de long séjour et qu'elle était en situation irrégulière depuis l'expiration, le 15 décembre 2014, du dernier certificat de résidence en sa possession ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5. au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) " ;

9. Considérant que si Mme B...soutient que le centre de ses intérêts est fixé en France depuis douze ans, qu'elle a pu travailler plusieurs années en concourant au service public de la justice en réalisant des traductions et en effectuant du soutien scolaire, les pièces du dossier ne permettent toutefois d'établir ces activités que sur une courte période ; qu'en outre, la requérante n'établit pas ne pas pouvoir poursuivre sa vie professionnelle en dehors du territoire français ; que par ailleurs, Mme B...est célibataire et sans charge de famille et n'établit pas avoir constitué une vie privée et familiale sur le territoire français ; qu'en outre, elle dispose de nombreuses attaches dans son pays d'origine où résident son père et ses huit frères et soeurs ; qu'en tout état de cause, la requérante, qui a vécu sur le territoire français en qualité d'étudiante de 2003 à 2014, n'avait pas vocation à s'installer durablement en France ; que par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; qu'elle n'a donc méconnu ni les stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, ni celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que pour les mêmes motifs, elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

10. Considérant que la motivation de l'obligation de quitter le territoire se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement ; que la décision de refus de titre de séjour du 25 juin 2015 comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et mentionne les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permettent d'assortir le refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ; que, dès lors, la décision faisant obligation à la requérante de quitter le territoire français est suffisamment motivée au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979 ;

11. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux retenus aux points 2 et 9, le moyen tiré de ce que le préfet de la Seine-Maritime n'aurait pas procédé à un examen complet de la situation personnelle de Mme B...au regard de sa vie privée et familiale doit être écarté ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'illégalité, par voie d'exception, de la décision de refus de séjour à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français ne peut être accueilli ;

13. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux retenus aux points 7 et 9, les moyens tirés des erreurs de fait commises par le préfet, de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision en litige doivent être écartés ;

Sur le pays de destination :

14. Considérant que si la motivation de fait de la décision fixant le pays de destination ne se confond pas nécessairement avec celle obligeant l'étranger à quitter le territoire, la motivation en droit de ces deux décisions est identique et résulte des termes mêmes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lequel est, d'ailleurs mentionné dans la décision attaquée ; que, par ailleurs, le préfet a suffisamment motivé en fait sa décision en mentionnant que la requérante n'établissait pas être exposée à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ;

15. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 9, le moyen tiré de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision en litige doit être écarté ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B..., au ministre de l'intérieur et à Me E...A....

Copie sera adressée à la préfète de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience publique du 6 septembre 2016 à laquelle siégeaient :

- Mme Odile Desticourt, présidente de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- Mme Muriel Milard, premier conseiller.

Lu en audience publique le 20 septembre 2016.

Le rapporteur,

Signé : M. D...La présidente de chambre,

Signé : O. DESTICOURT Le greffier,

Signé : M.T. LEVEQUE La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Marie-Thérèse Lévèque

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N°16DA00550


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre - formation à 3 (quater)
Numéro d'arrêt : 16DA00550
Date de la décision : 20/09/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. Règles de procédure contentieuse spéciales.


Composition du Tribunal
Président : Mme Desticourt
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: M. Guyau
Avocat(s) : SELARL ANTOINE MARY et CAROLINE INQUIMBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 28/09/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-09-20;16da00550 ?
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