La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/07/2016 | FRANCE | N°15DA02057,15DA02058

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 05 juillet 2016, 15DA02057,15DA02058


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...D...et Mme A...C...ont demandé au tribunal administratif d'Amiens l'annulation des arrêtés du 3 juin 2015 par lesquels la préfète de la Somme a ordonné leur remise aux autorités polonaises.

Après avoir joint les deux requêtes, le tribunal administratif d'Amiens a, par un jugement nos 1501989-1501990 du 20 novembre 2015, rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

I) Par une requête, enregistrée le 23 décembre 2015 sous le n° 15DA02057, Mme D..., représentée par Me G

...F..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 20 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...D...et Mme A...C...ont demandé au tribunal administratif d'Amiens l'annulation des arrêtés du 3 juin 2015 par lesquels la préfète de la Somme a ordonné leur remise aux autorités polonaises.

Après avoir joint les deux requêtes, le tribunal administratif d'Amiens a, par un jugement nos 1501989-1501990 du 20 novembre 2015, rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

I) Par une requête, enregistrée le 23 décembre 2015 sous le n° 15DA02057, Mme D..., représentée par Me G...F..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 20 novembre 2015 ;

2°) à titre principal, de constater la caducité de la décision de remise aux autorités polonaises du 3 juin 2015 ;

3°) à titre subsidiaire, d'annuler cette décision ;

4°) d'enjoindre à la préfète de la Somme de lui délivrer, dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, une autorisation provisoire de séjour afin que sa demande d'asile soit examinée en France.

Elle soutient que :

- la mesure de transfert est caduque dès lors qu'elle n'a pas été exécutée dans un délai de six mois ;

- le préfet ne pouvait prolonger le délai de transfert pour une durée de dix-huit mois dès lors que la fuite n'est pas établie ;

- la Pologne ne respecte pas la procédure du droit d'asile et qu'elle ne pourra y vivre décemment ;

- la France doit la prendre en charge sur le fondement de l'article 17 alinéa 1 du règlement UE n°604/2013 du 26 juin 2013 ;

La requête a été communiquée à la préfète de la Somme qui n'a pas produit de mémoire.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la décision de la cour était susceptible d'être fondée sur un moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité des conclusions présentées devant le tribunal administratif.

Un mémoire, enregistré le 14 juin 2016, a été présenté pour Mme D... en réponse à la communication du moyen d'ordre public.

Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 janvier 2016.

II) Par une requête, enregistrée le 23 décembre 2015 sous le n° 15DA02058, Mme C..., représentée par Me G...F..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 20 novembre 2015 ;

2°) à titre principal, de constater la caducité de la décision de remise aux autorités polonaises du 3 juin 2015 ;

3°) à titre subsidiaire, d'annuler cette décision ;

4°) d'enjoindre à la préfète de la Somme de lui délivrer, dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, une autorisation provisoire de séjour afin que sa demande d'asile soit examinée en France.

Elle soutient que :

- la mesure de transfert est caduque dès lors qu'elle n'a pas été exécutée dans un délai de six mois ;

- le préfet ne pouvait prolonger le délai de transfert pour une durée de dix-huit mois dès lors que la fuite n'est pas établie ;

- la Pologne ne respecte pas la procédure du droit d'asile et qu'elle ne pourra y vivre décemment ;

- la France doit la prendre en charge sur le fondement de l'article 17 alinéa 1 du règlement UE n °604/2013 du 26 juin 2013.

La requête a été communiquée à la préfète de la Somme qui n'a pas produit de mémoire.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la décision de la cour était susceptible d'être fondée sur un moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité des conclusions présentées devant le tribunal administratif.

Un mémoire, enregistré le 14 juin 2016, a été présenté pour Mme C... en réponse à la communication du moyen d'ordre public.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 janvier 2016.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement n° 604/2013/UE du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Jean-Marc Guyau, rapporteur public.

1. Considérant que les requêtes visées ci-dessus sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 3 du règlement (CE) n° 604/2013 du Parlement européen du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers : " Les États membres examinent toute demande d'asile présentée par un ressortissant d'un pays tiers à l'un quelconque d'entre eux, que ce soit à la frontière ou sur le territoire de l'État membre concerné. La demande d'asile est examinée par un seul État membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable. " ; qu'aux termes de l'article 18 du même règlement : " 1. L'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile en vertu du présent règlement est tenu de : c) reprendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 23, 24, 25 et 29, le ressortissant de pays tiers ou apatride qui a retiré sa demande en cours d'examen et qui a présenté une demande dans un autre État membre ou qui se trouve, sans titre de séjour, sur le territoire d'un autre État membre " ; qu'enfin, son article 29 dispose : " 1. Le transfert du demandeur ou d'une autre personne visée à l'article 18 paragraphe 1, point c) ou d), de l'État membre requérant vers l'État membre responsable s'effectue conformément au droit national de l'État membre requérant (...) dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre État membre de la requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée (...). 2. Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'État membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'État membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois maximum si la personne concernée prend la fuite " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces des dossiers que les requérantes, de nationalité géorgienne, sont, selon leurs déclarations entrées en France le 2 octobre 2014, en provenance de Pologne ; qu'elles ont déposé une demande d'asile le 25 novembre 2014 ; qu'ayant constaté que l'examen de ces demandes de protection internationale relevait de la compétence des autorités polonaises, la préfète de la Somme a, après avoir obtenu le 11 décembre 2014 l'accord de ces dernières pour la reprise en charge des intéressées, en application du règlement communautaire du 26 juin 2013 visé au point 2, décidé de leur réadmission par les décisions attaquées du 3 juin 2015 ;

4. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 20-2 du règlement du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 que les décisions par lesquelles l'autorité administrative décide le transfert d'un demandeur d'asile vers l'Etat membre responsable de l'examen de cette demande, qui n'ont pas été exécutées, cessent de plein droit d'être applicables à l'expiration d'un délai de six mois ; qu'il est constant qu'en dépit des convocations qui ont été adressées aux requérantes le 8 juin 2015 et qui leur sont parvenues le 10 juin suivant les invitant à se rendre à la préfecture pour prendre possession de leur laissez-passer consulaire et de leurs documents de transport, les décisions du 3 juin 2015 n'avaient pas été matériellement exécutées à la date du 11 juin 2015, date à laquelle elles sont devenues caduques ; que si la préfète de la Somme a avisé les autorités polonaises de la prolongation à une durée de dix mois du délai de transfert de Mme C...et de Mme D...au motif que celles-ci avaient pris la fuite, la circonstance que les intéressées ne se soient pas rendues à la convocation qui leur est seulement parvenue, ainsi qu'il a été dit, la veille de la date d'expiration du délai pour procéder à leur transfert, ne peut à elle seule caractériser, alors qu'elles ont toujours disposé d'une adresse stable sur le territoire national, une intention de se soustraire de manière intentionnelle et systématique à la procédure initiée par l'autorité administrative ; que, dès lors, les requérantes sont fondées à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que les décisions de réadmission prises le 3 juin 2015 par la préfète de la Somme n'étaient pas devenues caduques à la date du 11 juin 2015 ;

5. Considérant toutefois que la caducité des décisions a pour effet de priver d'objet les demandes tendant à leur annulation ; que, par suite, les conclusions des demandes des requérantes tendant à l'annulation des décisions en date du 3 juin 2015 étaient sans objet à la date à laquelle les requêtes ont été enregistrées devant le tribunal administratif et, par suite, irrecevables ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme D...et Mme C...ne sont pas fondées à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leurs demandes ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

7. Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par les requérantes ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de Mme D...et de Mme C...sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...D..., à Mme A...C..., au ministre de l'intérieur et à Me G...F....

Copie sera adressée au préfet de la Somme.

Délibéré après l'audience publique du 21 juin 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Michel Hoffmann, président de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- M. Laurent Domingo, premier conseiller.

Lu en audience publique le 5 juillet 2016.

Le rapporteur,

Signé : M. H...Le président de chambre,

Signé : M. E...

Le greffier,

Signé : M.T. LEVEQUE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Marie-Thérèse Lévèque

''

''

''

''

2

Nos15DA02057,15DA02058


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA02057,15DA02058
Date de la décision : 05/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. Règles de procédure contentieuse spéciales.


Composition du Tribunal
Président : M. Hoffmann
Rapporteur ?: M. Marc (AC) Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Guyau
Avocat(s) : SCP FRISON ET ASSOCIES ; SCP FRISON ET ASSOCIES ; SCP FRISON ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-07-05;15da02057.15da02058 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award