La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/06/2016 | FRANCE | N°14DA00700

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 23 juin 2016, 14DA00700


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...E...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 14 juin 2013 par laquelle l'Office français de l'immigration et de l'intégration a mis à sa charge une contribution spéciale d'un montant de 16 800 euros, ensemble la décision du 26 juillet 2013 par laquelle son recours gracieux a été rejeté.

Par un jugement n° 1302432 du 21 janvier 2014, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire

, enregistrés le 23 avril 2014 et le 10 septembre 2015, M. E..., représenté par Me D...F..., de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...E...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 14 juin 2013 par laquelle l'Office français de l'immigration et de l'intégration a mis à sa charge une contribution spéciale d'un montant de 16 800 euros, ensemble la décision du 26 juillet 2013 par laquelle son recours gracieux a été rejeté.

Par un jugement n° 1302432 du 21 janvier 2014, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 23 avril 2014 et le 10 septembre 2015, M. E..., représenté par Me D...F..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 21 janvier 2014 du tribunal administratif d'Amiens ;

2°) de prononcer la décharge de la contribution spéciale d'un montant de 16 800 euros et, à titre subsidiaire, de réduire son montant à la somme de 3 360 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Office français de l'immigration et de l'intégration une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- à la date de la commission des faits reprochés, les dispositions de l'article R. 8523-4 du code du travail, fondement réglementaire de la décision contestée, n'étaient pas encore entrées en application ; celles de l'article L. 8253-1 de ce code ne pouvaient s'appliquer ;

- en application des dispositions de l'article R. 8253-8 de ce code, le montant de la contribution spéciale mise à sa charge ne pouvait s'élever qu'à la somme de 3 360 euros ;

- les stipulations de l'article 4 du protocole n° 7 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 mars 2015, l'Office français de l'immigration et de l'intégration, représenté par Me A...B..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. E...d'une somme de 2 800 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par M. E...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code du travail ;

- la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 ;

- la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013 ;

- le décret n° 2013-467 du 4 juin 2013 relatif au montant de la contribution spéciale instituée par l'article L. 8253-1 du code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Maryse Petska, rapporteur public.

1. Considérant que le 23 mars 2011, les services de la police aux frontières ont interpellé dans les cuisines du restaurant l'Auberge du Maroc dont M. E...est le gérant, un ressortissant marocain non déclaré et en situation irrégulière ; que M. E...a été condamné pénalement le 1er juillet 2011 pour l'emploi d'une personne étrangère en situation irrégulière ; qu'il relève appel du jugement du 21 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 14 juin 2013 par laquelle l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a mis à sa charge une contribution spéciale d'un montant de 16 800 euros, ensemble la décision du 26 juillet 2013 par laquelle son recours gracieux a été rejeté ;

Sur les conclusions tendant à la décharge du paiement de la contribution spéciale :

2. Considérant que l'article L. 8251-1 du code du travail dispose : " Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 8253-1 du même code dans sa rédaction issue de l'article 78 de la loi du 29 décembre 2010 applicable à la date de constatation de l'infraction : " Sans préjudice des poursuites judiciaires pouvant être intentées à son encontre, l'employeur qui a employé un travailleur étranger en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 acquitte une contribution spéciale. Le montant de cette contribution spéciale est déterminé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat et est au moins égal à 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12 et, en cas de réitération, à 25 000 fois ce même taux (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 8253-8 du code du travail : " Le montant de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 est égal à mille fois le taux horaire, à la date de la constatation de l'infraction, du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12 (...) " ; qu'aux termes toutefois de l'article L. 8253-1 du code du travail dans sa rédaction issue de l'article 42 de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 : " Sans préjudice des poursuites judiciaires pouvant être intentées à son encontre, l'employeur qui a employé un travailleur étranger en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 acquitte, pour chaque travailleur étranger sans titre de travail, une contribution spéciale. Le montant de cette contribution spéciale est déterminé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Il est, au plus, égal à 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12. Ce montant peut être minoré en cas de non-cumul d'infractions ou en cas de paiement spontané par l'employeur des salaires et indemnités dus au salarié étranger sans titre mentionné à l'article R. 8252-6. Il est alors, au plus, égal à 2 000 fois ce même taux. Il peut être majoré en cas de réitération et est alors, au plus, égal à 15 000 fois ce même taux (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 8352-2 du code du travail dans sa rédaction issue de l'article 1er du décret du 4 juin 2013 : " I. - Le montant de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 est égal à 5 000 fois le taux horaire, à la date de la constatation de l'infraction, du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12. II. - Ce montant est réduit à 2 000 fois le taux horaire du minimum garanti dans l'un ou l'autre des cas suivants : 1° Lorsque le procès-verbal d'infraction ne mentionne pas d'autre infraction commise à l'occasion de l'emploi du salarié étranger en cause que la méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 ; 2° Lorsque l'employeur s'est acquitté des salaires et indemnités mentionnés à l'article L. 8252-2 dans les conditions prévues par les articles R. 8252-6 et R. 8252-7. III. - Dans l'hypothèse mentionnée au 2° du II, le montant de la contribution spéciale est réduit à 1 000 fois le taux horaire du minimum garanti lorsque le procès-verbal d'infraction ne mentionne l'emploi que d'un seul étranger sans titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France. (...) " ;

3. Considérant, d'une part, que si l'article L. 8253-1 du code du travail, en vigueur à la date du 23 mars 2011 à laquelle les faits reprochés à M. E...ont été constatés, dispose que le montant de la contribution spéciale qu'il institue est déterminé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, cet article, en tant qu'il dispose que le montant de cette contribution est " au moins égal à 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12 " a édicté une règle suffisamment précise pour être applicable sans attendre l'intervention du décret d'application qu'il prévoit ; que, par suite, ces dispositions législatives ont, dès leur entrée en vigueur, abrogé les dispositions réglementaires précitées de l'article R. 8253-8 du code du travail ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait dépourvue de base légale doit être écarté ;

4. Considérant, d'autre part, que si les dispositions de la loi nouvelle plus douce prévoyant la possibilité de minoration du montant de la contribution spéciale, en cas de non-cumul d'infractions ou en cas de paiement spontané par l'employeur, sont d'application immédiate, M. E...n'invoque aucune circonstance justifiant en vertu des dispositions de l'article L. 8253-1 du code du travail, dans sa rédaction issue de l'article 42 de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012, que lui soit appliqué un montant réduit à 2 000 fois ou à 1 000 fois le taux horaire du minimum garanti ;

5. Considérant que le principe général du droit " non bis in idem " auquel se réfèrent les stipulations de l'article 4 du protocole n° 7 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne concerne que l'impossibilité de poursuivre et condamner pénalement une personne à raison des mêmes faits ayant donné lieu à un jugement d'acquittement ou de condamnation pénale définitive ; que ce principe ne fait pas obstacle à la possibilité de cumuler une sanction pénale avec une sanction administrative telle que la contribution spéciale instituée par l'article L. 8253-1 du code du travail au bénéfice de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 21 janvier 2014, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. E...le versement d'une somme de 1 500 euros au bénéfice de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. E...est rejetée.

Article 2 : M. E...versera à l'Office français de l'immigration et de l'intégration la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...E...et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

Délibéré après l'audience publique du 9 juin 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- M. Olivier Nizet, président-assesseur,

- M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller.

Lu en audience publique le 23 juin 2016.

Le rapporteur,

Signé : J.-J. GAUTHÉLe président de chambre,

Signé : P.-L. ALBERTINILe greffier,

Signé : I. GENOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Isabelle Genot

''

''

''

''

1

2

N°14DA00700

1

3

N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14DA00700
Date de la décision : 23/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-06-02-02 Étrangers. Emploi des étrangers. Mesures individuelles. Contribution spéciale due à raison de l'emploi irrégulier d'un travailleur étranger.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Jean-Jacques Gauthé
Rapporteur public ?: Mme Pestka
Avocat(s) : SCP DRYE DE BAILLIENCOURT et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-06-23;14da00700 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award