Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 18 février 2015 par lequel le préfet du Nord l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et a ordonné son placement en rétention administrative.
Par un jugement n° 1501498 du 5 juin 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 30 juin 2015, M. A...C..., représenté par Me D...B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer une carte de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la minute du jugement ne comporte pas l'ensemble des signatures requises ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le refus de lui accorder un délai de départ volontaire est entaché d'erreur d'appréciation au regard des dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le placement en rétention administrative est entaché d'erreur d'appréciation au regard de ses garanties de représentation ;
- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 décembre 2015, le préfet du Nord, représenté par la SELARL Claisse et associés, conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 août 2015 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Douai.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Olivier Yeznikian, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.
Sur la régularité du jugement attaqué :
1. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 741-8 du code de justice administrative : " Si le président de la formation est rapporteur, la minute est signée, en outre, par l'assesseur le plus ancien dans l'ordre du tableau " ;
2. Considérant qu'en l'espèce, ces dispositions ne trouvaient pas s'appliquer dans la mesure où le président de la formation de jugement n'était pas le rapporteur de l'affaire ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de ces dispositions doit être écarté ;
3. Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été signé par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience, conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ; que, par suite, le moyen tiré d'une irrégularité du jugement sur ce point doit également être écarté ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
4. Considérant que la décision attaquée, qui n'avait pas à faire état de tous les éléments caractérisant la situation personnelle et familiale de M.C..., comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; que la décision contestée fait état de la relation qu'entretient le requérant avec une ressortissante algérienne ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, la circonstance que le préfet n'ait pas mentionné que M. C...ait indiqué, au cours de son audition de police, que sa concubine était enceinte et qu'ils avaient le projet de se marier n'est pas de nature à entacher la décision d'une insuffisance de motivation ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté ;
5. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Nord n'aurait pas procédé à un examen sérieux de la situation personnelle de M.C... ; que la circonstance que la décision contestée ne mentionne pas tous les éléments de sa situation personnelle ne saurait caractériser un tel défaut d'examen ;
6. Considérant que M.C..., ressortissant tunisien né en 1983, déclare être entré en France en octobre 2010 sous couvert d'un visa délivré par les autorités italiennes, sans en apporter la preuve ; qu'il n'a entrepris aucune démarche en vue de régulariser sa situation administrative auprès de la préfecture ; qu'en se bornant à produire un relevé bancaire de mars 2011, le requérant n'établit pas avoir résidé habituellement en France de 2010 à 2014 ; que s'il se prévaut d'une relation sentimentale débutée en juin 2014 avec une ressortissante algérienne qui serait désormais enceinte, cette relation présentait, à la date de la décision contestée intervenue le 18 février 2015, un caractère récent ; que si postérieurement à la décision attaquée, M. C...a, d'une part, effectué une reconnaissance de paternité de l'enfant porté par sa compagne et s'est, d'autre part, marié le 20 mars 2015 avec celle-ci, ces circonstances n'ont pas d'incidence sur la légalité de cette décision qui s'apprécie à la date à laquelle elle a été prise ; qu'elles ne suffisent pas davantage à révéler l'ancienneté de leur relation à cette même date ; qu'en outre, M. C...n'est pas démuni de toutes attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de vingt-sept ans ; que, dans ces conditions, compte tenu du caractère incertain de la durée de son séjour en France et des conditions de celui-ci, le préfet du Nord n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision a été prise ; que, par suite, il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité ;
Sur le refus de délai de départ volontaire :
8. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers : " (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; / (...) / f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2. / (...) " ;
9. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 6, M.C..., qui ne justifie pas être entré en France sous couvert d'un visa délivré par les autorités italiennes, n'a entrepris aucune démarche en vue de régulariser sa situation administrative auprès de la préfecture ; qu'en outre, il ne peut justifier être en possession d'un document d'identité ou de voyage en cours de validité ; que, dans ces conditions, et alors même que M. C...établit qu'il dispose d'une adresse stable et effective auprès de sa compagne, le préfet du Nord a pu légalement estimer qu'il existait un risque de fuite au sens des dispositions du a) et du f) du 3° du II de l'article L. 511-1 précité ; que le refus d'accorder à l'intéressé un délai de départ volontaire n'est, dès lors, pas entaché d'erreur d'appréciation ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que la décision refusant d'octroyer un délai de départ volontaire est entachée d'illégalité ;
Sur la rétention administrative :
11. Considérant qu'eu égard à ce qui a été dit au point 9 et en dépit de l'état de grossesse de sa compagne, M. C...ne pouvait être regardé comme présentant, à la date de la décision en litige, des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français dont il faisait l'objet ; que, par suite, en ne l'assignant pas à résidence conformément à l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mais en le plaçant en rétention administrative sur le fondement de l'article L. 551-1 de ce code, le préfet du Nord n'a pas commis d'erreur d'appréciation ;
12. Considérant que la décision de maintenir l'intéressé dans un local ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ne porte pas par elle-même atteinte au droit de M. C... à mener une vie privée et familiale normale ; qu'en tout état de cause et compte tenu du caractère limité de cette période de rétention et de ce qui a été dit au point 6, le préfet du Nord n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que la décision ordonnant son placement en rétention administrative est entachée d'illégalité ;
14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C..., au ministre de l'intérieur et à Me D...B....
Copie en sera transmise pour information au préfet du Nord.
Délibéré après l'audience publique du 10 mars 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Olivier Yeznikian, président de chambre,
- M. Christian Bernier, président-assesseur,
- Mme Amélie Fort-Besnard, premier conseiller.
Lu en audience publique le 24 mars 2016.
Le président-assesseur,
Signé : C. BERNIERLe premier vice-président de la cour,
Président-rapporteur,
Signé : O. YEZNIKIAN
Le greffier,
Signé : S. DUPUIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Le greffier en chef,
Par délégation,
Le greffier,
Sylviane Dupuis
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N°15DA01096 2