Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B...F...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 12 janvier 2010 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé son licenciement et de mettre à la charge de l'Etat et de la société Den Hartogh une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1000748 du 27 novembre 2012, le tribunal administratif d'Amiens a annulé cette décision du 12 janvier 2010 et a mis à la charge respective de l'Etat et de la société Den Hartogh la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un arrêt n° 13DA00114 du 3 juillet 2013, la cour administrative d'appel de Douai a rejeté la requête de la société Den Hartogh.
Par une décision n° 371852 du 27 mars 2015, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, sur pourvoi de la société Den Hartogh, a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire devant la cour.
Procédure devant la cour :
La décision n° 371852 du 27 mars 2015 du Conseil d'Etat a été enregistrée au greffe de la cour sous le n° 15DA00517 le 1er avril 2015.
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 25 janvier et 31 mai 2013, la société SAS Den Hartogh, représentée par Me A...E..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 27 novembre 2012 du tribunal administratif d'Amiens ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme F...devant le tribunal administratif ;
3°) de mettre à la charge de Mme F...une somme de 1 850 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et la somme de 35 euros au titre des dépens.
Elle soutient que :
- la demande d'autorisation de licenciement de Mme F...étant fondée sur un motif disciplinaire, aucune obligation de reclassement de l'intéressée ne lui incombait ;
- aucun texte ne prévoit une obligation de reclassement du salarié en cas de licenciement pour insuffisance professionnelle ;
- ce reclassement était impossible eu égard à la structure et à l'organisation de la société ;
- les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions des articles L. 2421-1 et L. 2323-4 du code du travail sont inopérants ;
- le comité d'entreprise a été régulièrement convoqué ;
- l'inspecteur du travail a mené l'enquête de manière contradictoire ;
- la décision de l'inspecteur du travail est suffisamment motivée ;
- en demandant à la salariée de s'expliquer sur les anomalies qui lui sont reprochés, l'inspecteur du travail n'a pas inversé la charge de la preuve ;
- à supposer même que les faits soient qualifiés d'insuffisance professionnelle, la décision contestée pourrait être confirmée par une substitution de motifs ;
- la salariée n'a pas sollicité un reclassement au sein de l'entreprise ; en tout état de cause, aucun poste n'était disponible.
Par des mémoires, enregistrés les 16 mai et 12 juin 2013, MmeF..., représentée par Me D...C..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la SAS Den Hartogh d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés ;
Par un nouveau mémoire, enregistré le 11 mai 2015, la SAS Den Hartogh conclut à ce que soit mis à la charge de Mme F...le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la consultation du comité d'entreprise, qui a émis un avis défavorable, était régulière ;
- à supposer même une irrégularité dans la procédure, le vice n'aurait pas été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision ou n'aurait pas privé l'intéressée d'une garantie ;
Par un mémoire, enregistré le 2 juin 2015, Mme F...conclut aux mêmes fins que ses précédents écrits par les mêmes moyens.
Par un mémoire, enregistré le 3 juillet 2015, la SAS Den Hartogh conclut aux mêmes fins que ses précédents écrits par les mêmes moyens.
La requête d'appel a été communiquée au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,
- les conclusions de Mme Maryse Pestka, rapporteur public,
- et les observations de Me A...E..., représentant la société Den Hartogh, et de Me D...C..., représentant MmeF... ;
1. Considérant que la société Den Hartogh relève appel du jugement du 27 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé du décision du 12 janvier 2010 de l'inspecteur du travail autorisant le licenciement de MmeF..., déléguée du personnel suppléant et membre de la délégation unique du personnel au comité d'entreprise ; que, par une décision n° 371852 du 27 mars 2015, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, a annulé l'arrêt du 3 juillet 2013 de la cour administrative d'appel de Douai rejetant la requête de la société Den Hartogh, au motif que la cour avait commis une erreur de droit en se fondant sur la seule circonstance que le motif du licenciement envisagé ne figurait pas dans la convocation du comité d'entreprise pour en déduire que celui-ci n'avait pu se prononcer en toute connaissance de cause et que l'administration ne pouvait en conséquence légalement autoriser le licenciement demandé ; que le Conseil d'Etat a renvoyé l'affaire à la cour, pour qu'elle y statue à nouveau ;
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'alors même qu'elle y faisait état d'une situation récurrente d'incompétence et d'insuffisances professionnelles, la demande de la société Den Hartogh d'autorisation de licenciement de Mme F... était fondée sur les fautes et erreurs commises par cette dernière ; qu'une telle demande présente un caractère disciplinaire ; que, dès lors, la société requérante n'était pas tenue de rechercher des possibilités de reclassement de l'intéressée ; qu'il s'ensuit que la société Den Hartogh est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision du 12 janvier 2010 de l'inspecteur du travail, autorisant le licenciement de Mme F... pour faute, au motif que la société n'avait pas satisfait à son obligation de reclassement ;
3. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les moyens présentés par Mme F... en première instance et en appel ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 2421-14 du code du travail : " En cas de faute grave, l'employeur peut prononcer la mise à pied immédiate de l'intéressé jusqu'à la décision de l'inspecteur du travail. / La consultation du comité d'entreprise a lieu dans un délai de dix jours à compter de la date de la mise à pied. / La demande d'autorisation de licenciement est présentée dans les quarante-huit heures suivant la délibération du comité d'entreprise. S'il n'y a pas de comité d'entreprise, cette demande est présentée dans un délai de huit jours à compter de la date de la mise à pied. / (...)" ; que si ce délai de quarante-huit heures n'est pas prescrit à peine de nullité, il doit cependant être aussi court que possible eu égard à la gravité de la mesure de mise à pied ;
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme F...a été dispensée d'exécuter son travail à compter du 2 novembre 2009, date de l'entretien préalable au licenciement ; qu'elle a donc été mise à pied à titre conservatoire sans qu'y fasse obstacle la circonstance qu'elle a continué à percevoir sa rémunération et que le courrier du 2 novembre 2009 de son employeur en informant la salariée ne comporte pas expressément le terme de mise à pied ; que la société Den Hartogh n'a adressé à l'inspecteur du travail sa demande d'autorisation de licenciement que le 1er décembre 2009, date de son courrier reçu le 4 décembre suivant par l'administration, soit vingt-deux jours après la délibération du comité d'entreprise au lieu des quarante-huit heures prévues par les dispositions précitées de l'article L. 2421-14 du code du travail ; que, dès lors, la longueur excessive de ce délai a aussi affecté la régularité de la procédure suivie par l'employeur et, par suite, entache d'illégalité la décision en litige par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement de Mme F...;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Den Hartogh n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision du 12 janvier 2010 de l'inspecteur du travail ; que ses conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Den Hartogh la somme de 1 500 euros demandée par Mme F...au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Den Hartogh est rejetée.
Article 2 : La société Den Hartogh versera la somme de 1 500 euros à Mme F...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Den Hartogh et à Mme B... F....
Copie en sera adressée au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Délibéré après l'audience publique du 28 janvier 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,
- M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller.
- M. Jean-François Papin, premier conseiller.
Lu en audience publique le 11 février 2016.
L'assesseur le plus ancien,
Signé : J.-J. GAUTHELe président de chambre,
président rapporteur
Signé : P.-L. ALBERTINILe greffier,
Signé : B. LEFORT
La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier,
Béatrice Lefort
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