Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir les décisions du préfet des Yvelines du 23 septembre 2014 lui faisant obligation de quitter le territoire français, refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, fixant le pays de destination et ordonnant son placement en rétention administrative.
Par un jugement n° 1403189 du 26 septembre 2014, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 novembre 2014, M. C...A..., représenté par Me B...D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;
3°) d'enjoindre au préfet des Yvelines de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, avec la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour permettant à l'intéressé d'exercer un emploi ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;
- elle procède d'un défaut d'examen de sa situation personnelle et médicale ;
- le préfet a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il a également méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il a violé les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que celles de l'article 8 de cette même convention ;
- il a commis une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de la décision attaquée sur sa situation personnelle et médicale ;
- le refus d'accorder un délai de départ volontaire repose sur une erreur d'appréciation au regard des dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le placement en rétention administrative est privé de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- le préfet a commis une erreur d'appréciation en le plaçant en rétention administrative au regard de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juillet 2015, le préfet des Yvelines conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 octobre 2014 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Douai.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Olivier Yeznikian, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
1. Considérant qu'il ressort des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention d'une obligation de quitter le territoire français, de la décision pouvant être prise à cette occasion de ne pas accorder à l'étranger de délai pour y satisfaire, de l'interdiction de retour sur le territoire français et de la décision mentionnant le pays de destination ; que, dès lors, l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979, ne saurait être utilement invoqué à l'encontre d'une obligation de quitter le territoire français ; qu'en tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que M. A...a été entendu par les services de police le 23 septembre 2014 et, qu'à cette occasion, il a été informé de ce qu'une mesure d'éloignement était susceptible d'être prise à son encontre ; qu'il a ainsi été mis à même de pouvoir communiquer divers renseignements concernant sa situation personnelle et médicale ; que, dans ces conditions, l'intéressé n'a pas été privé de la possibilité de présenter les éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision attaquée ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la procédure aurait été viciée doit être écarté ;
2. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet des Yvelines n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressé ; que M.A..., n'ayant pas communiqué à l'administration les éléments sur son état de santé, ne saurait reprocher au préfet de ne pas avoir examiné sa situation médicale ; que, dans ces conditions, le moyen tiré d'un défaut d'examen de sa situation personnelle et médicale doit être écarté ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) " ;
4. Considérant qu'il ressort des documents médicaux produits par M. A...et, en particulier de la biopsie de la vessie réalisée le 24 avril 2014, qu'il est atteint d'une cystite bilharzhienne au stade aigu ; que, toutefois, les scanners et échographies produits ne permettent pas d'établir que M. A...est suivi pour cette pathologie et que son état de santé nécessite une prise en charge médicale en France dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité ou des soins qui ne pourraient être assurés dans son pays d'origine ; que, par suite, le préfet des Yvelines n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 511-4 en obligeant l'intéressé à quitter le territoire français ;
5. Considérant que l'arrêté attaqué ne portant pas refus de séjour, M. A...ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en tout état de cause, il ne justifie pas, ainsi qu'il a été dit au point précédent, pouvoir bénéficier d'un titre de séjour de plein droit au regard de son état de santé ;
6. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; qu'en tout état de cause, il résulte de ce qui a été dit au point 4 que, si M. A...se prévaut de son état de santé, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en quittant la France, il serait privé d'un traitement adapté ; que, par suite, en l'obligeant à quitter le territoire français vers son pays d'origine, le préfet des Yvelines n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.A..., ressortissant sénégalais, déclare être entré en France le 24 mai 2011, à l'âge de trente ans ; qu'il s'y est maintenu malgré le prononcé d'une mesure d'éloignement à son encontre le 4 juin 2013 ; que s'il est constant que son demi-frère, sa demi-soeur, sa nièce et ses oncles résident en France, M.A..., célibataire, ne justifie pas entretenir avec eux des liens d'une particulière intensité, ni avoir noué des liens amicaux sur le territoire national ; qu'au surplus, il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident ses enfants et sa compagne, même s'il allègue en être séparé ; que, compte tenu des conditions et de la durée du séjour de M. A...en France, le préfet des Yvelines n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision attaquée a été prise ; qu'il n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
8. Considérant que, pour les mêmes raisons que celles exposées au point 7, le préfet des Yvelines n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité ;
Sur la décision refusant un délai de départ volontaire :
10. Considérant qu'aux termes des dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / (...) / d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement (...) " ;
11. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et n'est pas contesté, que M. A...n'a pas déféré à la précédente obligation de quitter le territoire français dont il a fait l'objet à la suite de l'arrêté pris par le préfet de police de Paris le 4 juin 2013 ; qu'il entre, dès lors, dans le champ d'application des dispositions du d) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code précité ; que, par suite, le préfet des Yvelines n'a pas commis d'erreur d'appréciation en refusant d'accorder un délai de départ volontaire à M. A...;
12. Considérant qu'il en résulte que l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que la décision portant refus de délai de départ volontaire est entachée d'illégalité ;
Sur la décision ordonnant le placement en rétention administrative :
13. Considérant que M. A...ne peut utilement exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français pour soutenir que la décision le plaçant en rétention administrative serait privée de base légale ;
14. Considérant qu'aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation (...) " ;
15. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, si M. A...a fait état lors de son audition de police de l'adresse de son domicile, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il y réside de manière stable et régulière ; qu'en outre, M. A...ne conteste pas s'être précédemment soustrait à une mesure d'éloignement et ne justifie pas être en possession d'un document d'identité ou de voyage en cours de validité ; qu'ainsi, il doit être regardé comme ne présentant pas des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque d'une nouvelle soustraction à l'obligation de quitter le territoire français ; que, dès lors, le préfet des Yvelines a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation au regard de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ordonner le placement en rétention administrative de M. A...;
16 Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au prononcé d'une injonction assortie d'une astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A..., au ministre de l'intérieur et à Me B...D....
Copie en sera transmise pour information au préfet des Yvelines.
Délibéré après l'audience publique du 12 novembre 2015 à laquelle siégeaient :
- M. Olivier Yeznikian, président de chambre,
- M. Christian Bernier, président-assesseur,
- M. Hadi Habchi, premier conseiller.
Lu en audience publique le 26 novembre 2015.
Le président-assesseur,
Signé : C. BERNIERLe président de chambre,
Président-rapporteur,
Signé : O. YEZNIKIAN
Le greffier,
Signé : S. DUPUIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Le greffier en chef,
Par délégation,
Le greffier,
Sylviane Dupuis
''
''
''
''
N°14DA01840 2