La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/10/2015 | FRANCE | N°14DA01705

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 15 octobre 2015, 14DA01705


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 12 mars 2014 du préfet de la Seine-Maritime lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination et de prononcer une injonction.

Par un jugement n° 1401845 du 2 octobre 2014, le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime et lui a enjoint de réexaminer l

a situation de M. D...dans un délai d'un mois à compter du jugement.

Procédure dev...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 12 mars 2014 du préfet de la Seine-Maritime lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination et de prononcer une injonction.

Par un jugement n° 1401845 du 2 octobre 2014, le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime et lui a enjoint de réexaminer la situation de M. D...dans un délai d'un mois à compter du jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 31 octobre 2014, le préfet de la Seine-Maritime demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 2 octobre 2014 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif.

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Christian Bernier, président-assesseur,

- et les observations de Me A...C..., représentant M.D....

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif :

1. Considérant qu'en dehors des cas où il satisfait aux conditions fixées par la loi, ou par un engagement international, pour la délivrance d'un titre de séjour, un étranger ne saurait se prévaloir d'un droit à l'obtention d'un tel titre ; que s'il peut, à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir formé contre une décision préfectorale refusant de régulariser sa situation par la délivrance d'un titre de séjour, soutenir que la décision du préfet, compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle, serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, il ne peut utilement se prévaloir des orientations générales que le ministre de l'intérieur a pu adresser aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation ;

2. Considérant, par suite, que M. D...ne peut utilement se prévaloir des prescriptions de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 qui n'ont pour objet que d'éclairer les préfets dans la mise en oeuvre de leur pouvoir discrétionnaire de régularisation ; que le préfet de la Seine-Maritime est, par conséquent, fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a annulé son arrêté du 12 mars 2014 au motif qu'il n'avait pas procédé à l'examen particulier de la situation de M. D...au regard des dispositions de cette circulaire ;

3. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. D...devant la juridiction administrative ;

Sur les conclusions d'annulation :

En ce qui concerne la décision de refus d'un titre de séjour :

4. Considérant que la décision attaquée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation de l'acte attaqué doit être écarté ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.D..., ainsi qu'il le reconnaît lui-même, a, lors de son arrivée en France, déclaré qu'il était marié et avait deux enfants résidant au Congo ; que, par suite, il ne peut utilement se prévaloir de ce que le préfet, en indiquant dans la décision, que l'intéressé était père de deux enfants qui résidaient en République démocratique du Congo, aurait entaché sa décision de faits matériellement inexacts ;

6. Considérant que M.D..., né le 12 décembre 1977, de nationalité rwandaise, qui a obtenu la qualité de réfugié au Togo en 2002, déclare être entré en France le 2 mars 2007 ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'il s'y est maintenu depuis cette date à la faveur de l'instruction de sa demande d'asile, qui a été rejetée par l'Office français de protection des étrangers et apatrides une première fois par une décision du 20 novembre 2008, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 21 mai 2010, puis une seconde fois, par une décision du 24 juillet 2013, l'Office ayant estimé que l'intéressé ne remplissait pas les conditions du transfert du statut de réfugié du Togo vers la France ; que s'il se prévaut de sa relation avec une compatriote, avec laquelle il a eu deux enfants, nés en France en 2009 et en 2011, il ressort des pièces du dossier que sa compagne est également en situation irrégulière et qu'elle fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ; que M. D... ne justifie d'aucune circonstance qui ferait obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue hors de France, et notamment au Togo, pays qui lui a accordé l'asile ; qu'il ne fait par ailleurs état d'aucune autre attache familiale en France ; que, dès lors, compte tenu des conditions de son séjour et alors même qu'après avoir occupé des emplois ponctuels et précaires, il a travaillé en qualité d'agent de sécurité de novembre 2009 à novembre 2011, en refusant de délivrer un titre de séjour, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision attaquée a été prise ; qu'il n'a donc pas méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

7. Considérant que, pour les mêmes raisons que celles exposées au point précédent, M. D... ne démontre pas que sa situation personnelle répondrait à des considérations humanitaires ou à des motifs exceptionnels justifiant que lui soit délivré un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les enfants de M. D...étaient âgés de cinq et trois ans à la date de la décision attaquée ; que rien ne fait obstacle, et alors même que l'aîné est scolarisé, à ce qu'ils puissent suivre leurs parents qui font l'un et l'autre l'objet d'une mesure d'éloignement ; que, dès lors, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas, par la décision en litige, porté atteinte à l'intérêt supérieur des enfants ; que, par suite, il n'a pas méconnu le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée est entachée d'illégalité ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

10. Considérant que M. D...a sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il a donc été mis à même de faire valoir, avant l'intervention de l'arrêté qui lui a refusé la délivrance d'un tel titre et l'a également obligé à quitter le territoire français, tous éléments d'information ou arguments de nature à influer sur le contenu de ces mesures ; qu'il n'invoque aucun autre élément de nature à établir que son droit à être entendu aurait été méconnu ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que cette garantie, telle qu'elle est consacrée par le droit de l'Union, a été méconnue ;

11. Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit au point 9, M. D...n'est pas fondé à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est dépourvue de base légale à raison de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour ;

12. Considérant que pour les mêmes raisons que ce qui a été dit aux points 6, 7 et 8, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de celles du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé, doivent être écartés ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée est entachée d'illégalité ;

En ce qui concerne le pays de destination :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens dirigés contre la mesure fixant le pays de destination ;

14. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. D...a obtenu le statut de réfugié au Togo le 12 août 2002 ; que la réalité des risques invoqués par l'intéressé en cas de retour au Rwanda doit être regardée comme suffisamment établie ;

15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D...est fondé à soutenir que l'arrêté préfectoral fixant le Rwanda comme pays de renvoi doit être, dans cette mesure, annulé ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Seine-Maritime est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé sa décision de refus de titre de séjour et, par voie de conséquence, celle portant obligation de quitter le territoire français ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

17. Considérant que le présent arrêt n'appelle pas de mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

18. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, en tout état de cause M. D...ne justifiant pas avoir obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle, de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rouen et la décision fixant le Rwanda comme pays de destination sont annulés.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Rouen et ses conclusions d'appel présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. B...D...et à Me A...C....

Copie en sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.

''

''

''

''

N°14DA01705 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14DA01705
Date de la décision : 15/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Christian Bernier
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : SELARL MADELINE-LEPRINCE-MAHIEU

Origine de la décision
Date de l'import : 23/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-10-15;14da01705 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award