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15/10/2015 | FRANCE | N°14DA00404

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 15 octobre 2015, 14DA00404


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Floss a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 12 décembre 2011 du préfet de l'Oise déclarant cessible au profit de la société Séquano Aménagement la parcelle cadastrée AD n° 32 incluse dans le périmètre de la ZAC de Gournay-les-usines.

Par un jugement n° 1200679 du 10 décembre 2013, le tribunal administratif d'Amiens a annulé l'arrêté du 12 décembre 2011 en tant qu'il déclare cessible la parcelle cadastrée AD n° 32.

Pro

cédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 mars 2014, et deux mémoires, enregistr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Floss a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 12 décembre 2011 du préfet de l'Oise déclarant cessible au profit de la société Séquano Aménagement la parcelle cadastrée AD n° 32 incluse dans le périmètre de la ZAC de Gournay-les-usines.

Par un jugement n° 1200679 du 10 décembre 2013, le tribunal administratif d'Amiens a annulé l'arrêté du 12 décembre 2011 en tant qu'il déclare cessible la parcelle cadastrée AD n° 32.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 mars 2014, et deux mémoires, enregistrés les 6 février et 15 septembre 2015, la société Séquano Aménagement, représentée par le cabinet DS avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) à titre principal, de rejeter la demande présentée par la SARL Floss devant le tribunal administratif ;

3°) à titre subsidiaire, que l'annulation ne soit prononcée qu'à l'expiration d'un délai de douze mois à compter de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de la SARL Floss la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Christian Bernier, président-assesseur,

- les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public,

- et les observations de Me A...D..., représentant la société Séquano Aménagement, et de Me B...C..., représentant la SARL Floss.

1. Considérant que, par un arrêté du 26 mai 2011, rectifié par un arrêté du 7 juin 2011, le préfet de l'Oise a déclaré d'utilité publique les acquisitions foncières et les travaux nécessaires à la réalisation du projet de rénovation urbaine du quartier de Gournay-les-Usines et, par un arrêté du 12 décembre 2011, a déclaré les parcelles nécessaires à l'exécution des travaux cessibles au profit de la société Séquano Aménagement ; qu'à la demande de la SARL Floss, propriétaire de la parcelle AD n° 32 située dans le périmètre de l'arrêté de cessibilité, le tribunal administratif d'Amiens, par un jugement du 10 décembre 2013, a annulé l'arrêté du préfet de l'Oise du 12 décembre 2011 en tant qu'il déclare cessible la parcelle AD n° 32 ; que la société Séquano Aménagement relève appel de ce jugement ;

Sur la fin-de non-recevoir opposée par la SARL Floss en appel :

2. Considérant que la société Séquano Aménagement, bénéficiaire de l'arrêté de cessibilité contesté et défendeur en première instance, a qualité pour agir dans la présente instance ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le moyen tiré de l'exception d'illégalité de l'arrêté de déclaration d'utilité publique :

S'agissant de l'étude d'impact du dossier de déclaration d'utilité publique :

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " L'expropriant adresse au préfet pour être soumis à l'enquête un dossier qui comprend obligatoirement : / I.-Lorsque la déclaration d'utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d'ouvrages : (...) / 6° L'étude d'impact définie à l'article R. 122-3 du code de l'environnement, lorsque les ouvrages ou travaux n'en sont pas dispensés (...) " ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 122-3 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors en vigueur : " / I.-Le contenu de l'étude d'impact doit être en relation avec l'importance des travaux et aménagements projetés et avec leurs incidences prévisibles sur l'environnement. / II.-L'étude d'impact présente successivement : / 1° Une analyse de l'état initial du site et de son environnement, portant notamment sur les richesses naturelles et les espaces naturels agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs, affectés par les aménagements ou ouvrages ; / 2° Une analyse des effets directs et indirects, temporaires et permanents du projet sur l'environnement, et en particulier sur la faune et la flore, les sites et paysages, le sol, l'eau, l'air, le climat, les milieux naturels et les équilibres biologiques, sur la protection des biens et du patrimoine culturel et, le cas échéant, sur la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses) ou sur l'hygiène, la santé, la sécurité et la salubrité publique ; (...) / 4° Les mesures envisagées par le maître de l'ouvrage ou le pétitionnaire pour supprimer, réduire et, si possible, compenser les conséquences dommageables du projet sur l'environnement et la santé, ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes ; (...) " ;

5. Considérant que les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population et n'ont pas permis une bonne information de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet de rénovation urbaine en litige s'étend sur plus de 150 hectares et prévoit la construction de sept cent cinquante logements, l'installation de commerces et d'activités tertiaires et la réalisation d'équipements publics, notamment des établissements scolaires ; que la partie de l'étude d'impact du dossier d'enquête publique de la ZAC de Gournay-les-Usines consacrée à l'état des sols, dans sa dernière version de juin 2010, est succincte ; qu'elle indique que les sous-sols de ce site peuvent présenter des traces de pollutions diverses en raison de la nature des activités qui y ont été pratiquées dans le passé, et que la nature de ces produits, si leur présence dans le sol est avérée, peut constituer un risque sanitaire certain pour les populations ; qu'elle souligne qu'il s'agirait d'une contrainte importante dans le cas d'un réaménagement de ces sites en vue d'y accueillir des logements ou des équipements ; qu'elle conclut qu'un diagnostic initial devra être réalisé et qu'il aura pour objectif de recenser toutes les activités passées et actuelles exercées sur le site et de recueillir toutes les informations et données environnementales concernant le site et son voisinage ; que, toutefois, et alors même que le projet porte sur des aménagements nombreux et de grande ampleur susceptibles d'intéresser une population importante qui a vocation à résider dans cette zone et à utiliser les équipements collectifs qu'il est prévu d'y installer, ce constat ne fait état d'aucune information qui n'était déjà connue de longue date, et l'étude d'impact reporte à des études ultérieures le soin de préciser l'état actuel des sols et sous-sols, et donc d'évaluer les risques sanitaires et de déterminer les actions de dépollution et de réhabilitation des sols dont la nécessité est soulignée ; que, dès lors, l'analyse de l'état initial du site est entachée de lacunes et d'insuffisances et l'étude d'impact ne permet pas d'apprécier les effets directs et indirects, temporaires et permanents, du projet sur l'hygiène, la santé, la sécurité et la salubrité publique ; que les auteurs de l'étude soulignent par ailleurs au point VI 1.2 que la localisation et la nature des pollutions qui pourraient être révélées par les études de sol sont susceptibles d'avoir un impact sur le contenu du projet lui-même ;

7. Considérant qu'il ressort de ce qui précède que les insuffisances de l'étude d'impact n'ont pas permis au préfet de l'Oise, à la population et à l'ensemble des personnes intéressées par l'opération, qui ne se limitent pas à celles qui occupent actuellement les terrains en cause, de disposer d'une information suffisante et adaptée à la situation des risques encourus ; qu'en outre, les incertitudes relatives à l'existence, à la nature des pollutions et aux actions à entreprendre affectent la configuration du projet, et notamment le nombre et la localisation des logements à construire ainsi que l'importance et l'emplacement des équipements collectifs qui leur seront associés ; que, par suite, l'étude d'impact ne répond pas aux exigences des dispositions combinées de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique et de l'article R. 122-3 du code de l'environnement ;

S'agissant des éléments du dossier relatifs au coût du projet :

8. Considérant qu'aux termes de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " L'expropriant adresse au préfet pour être soumis à l'enquête un dossier qui comprend obligatoirement : / I.-Lorsque la déclaration d'utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d'ouvrages : (...) / 5° L'appréciation sommaire des dépenses ; (...) " ;

9. Considérant que l'estimation sommaire des dépenses que doit comporter le dossier soumis à enquête doit comprendre non seulement le coût des acquisitions foncières en vue de la réalisation de l'opération envisagée, mais aussi celui des travaux et des aménagements projetés ;

10. Considérant que le projet de ZAC " multisites " du quartier de Gournay-les-Usines, sectorisé en sept " îlots " opérationnels, envisage, en deux phases de réalisation, la requalification et/ou l'aménagement d'espaces publics et de voies de circulation, la réalisation de logements, et pour certains îlots, la réalisation de commerces et de locaux consacrés aux activités tertiaires et industrielles ; qu'il ressort de l'étude d'impact complémentaire de juin 2010 que le projet prévoit également l'extension d'une école existante ainsi que la création d'un groupe scolaire ; que la déclaration d'utilité publique porte sur l'ensemble des travaux et acquisitions foncières de la zone ; que le document du dossier de demande de déclaration d'utilité publique intitulé " appréciation sommaire des dépenses " mentionne, dans le périmètre de la ZAC, le coût des études générales préalables, des acquisitions foncières, des travaux de mise en état des sols, des travaux d'aménagement des espaces publics et des mesures d'insertion dans l'environnement ; que l'estimation sommaire des dépenses devait également intégrer le coût des travaux de réalisation des équipements publics prévus par le programme d'aménagement de la ZAC et notamment le coût de l'extension de l'école de Gournay et celui de la construction du nouveau groupe scolaire ; que la société Séquano Aménagement ne peut utilement faire valoir que ces équipements ne seront pas exclusivement utilisés par les futurs habitants de la ZAC dès lors qu'il s'agit aux termes mêmes de la notice explicative de juin 2010 d'" équipements nouveaux indispensables " prévus par le programme de rénovation du quartier ; que le dossier soumis à enquête publique ne fournit pas d'indication sur le coût de ces équipements dont il ressort par ailleurs qu'ils doivent être évalués, de manière non contestée, à la somme de 10 millions d'euros, soit environ le quart du montant total de l'opération tel qu'il a été initialement chiffré ; que, dès lors, les dispositions de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ont été méconnues ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Séquano Aménagement n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a annulé l'arrêté du préfet de l'Oise du 12 décembre 2011 en tant qu'il déclare cessible la parcelle AD n° 32 ;

Sur les conclusions tendant à différer les effets de l'annulation contentieuse :

12. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intérêt général s'attacherait à un maintien temporaire des effets de l'arrêté de cessibilité ; que l'annulation rétroactive de cet arrêté préfectoral n'a pas davantage pour conséquence de compromettre la poursuite de l'opération dans son ensemble ; que, par suite, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la société requérante de reporter de douze mois les effets de l'annulation de l'arrêté du 12 décembre 2011 ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par la société Séquano Aménagement soit mise à la charge de la SARL Floss, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Séquano Aménagement une somme de 1 500 euros que la SARL Floss demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Séquano Aménagement est rejetée.

Article 2 : La société Séquano Aménagement versera à la SARL Floss une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Séquano Aménagement et à la SARL Floss.

Copie en sera transmise pour information au préfet de l'Oise, au ministre de l'intérieur et à la communauté d'agglomération creilloise.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14DA00404
Date de la décision : 15/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

34-02-03 Expropriation pour cause d'utilité publique. Règles générales de la procédure normale. Arrêté de cessibilité.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Christian Bernier
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : DS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 23/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-10-15;14da00404 ?
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