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08/10/2015 | FRANCE | N°14DA01911

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3 (bis), 08 octobre 2015, 14DA01911


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 14 décembre 2012 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a annulé la décision du 5 juillet 2012 de l'inspecteur du travail refusant d'accorder l'autorisation de le licencier et autorisant son licenciement pour motif économique.

Par un jugement n° 1304093 du 1er octobre 2014, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la

cour :

Par une requête enregistrée le 8 décembre 2014, M.C..., représenté par Me ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 14 décembre 2012 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a annulé la décision du 5 juillet 2012 de l'inspecteur du travail refusant d'accorder l'autorisation de le licencier et autorisant son licenciement pour motif économique.

Par un jugement n° 1304093 du 1er octobre 2014, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 8 décembre 2014, M.C..., représenté par Me A... D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 14 décembre 2012 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Maryse Pestka, rapporteur public.

1. Considérant que M. B...C..., agent de service, membre du comité d'entreprise, délégué syndical et délégué du personnel au sein de la société Pro Impec-Pro Santéa, relève appel du jugement du 1er octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 14 décembre 2012 par laquelle le ministre chargé du travail a annulé la décision du 5 juillet 2012 de l'inspecteur du travail refusant d'accorder à la société Pro Impec-Pro Santéa l'autorisation de le licencier et a autorisé son licenciement pour motif économique ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 2422-1 du code du travail : " Le ministre chargé du travail peut annuler ou réformer la décision de l'inspecteur du travail sur le recours de l'employeur, du salarié ou du syndicat que ce salarié représente ou auquel il a donné mandat à cet effet /. Ce recours est introduit dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de l'inspecteur. / Le silence gardé pendant plus de quatre mois sur ce recours vaut décision de rejet " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le recours hiérarchique, en date du 2 août 2012, de la société Pro Impec-Pro Santéa contre la décision du 5 juillet 2012 de l'inspecteur du travail refusant l'autorisation de licencier le requérant, a été enregistré le 16 août 2012 par le ministre chargé du travail ; que celui-ci a annulé le 14 décembre 2012, dans le délai de quatre mois, ladite décision de l'inspecteur du travail et a autorisé le licenciement de M.C... ; que, par suite, celui-ci ne saurait se prévaloir de l'existence d'une décision implicite, créatrice de droits, qui serait née le 2 décembre 2012 à la suite du rejet du recours hiérarchique de l'intimée ;

4. Considérant que la décision du 14 décembre 2012 du ministre chargé du travail comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle est fondée ; qu'elle satisfait par suite aux prescriptions des articles 1 et 3 de la loi du 11 juillet 1979 qui n'imposaient pas au ministre d'indiquer dans sa décision les raisons pour lesquelles il avait décidé d'écarter les motifs retenus par l'inspecteur du travail dans sa décision du 5 juillet 2012 ; que dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision du 14 décembre 2012 manque en fait ;

5. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 1233-3 du code du travail : " Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques. " ; que si la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise peut constituer un motif économique de licenciement, c'est à la condition que soit établie une menace pour la compétitivité de l'entreprise, laquelle s'apprécie, lorsque l'entreprise appartient à un groupe, au niveau du secteur d'activité dont relève l'entreprise en cause au sein du groupe ;

6. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail ; que, lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande d'autorisation de licenciement présentée par l'employeur est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel appartient cette dernière ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société Pro Impec-Pro Santéa, spécialisée dans le nettoyage et la propreté dispose de vingt-trois agences en France ; que cette société a enregistré depuis le début de l'année 2011 une forte diminution de sa rentabilité ; que les pertes enregistrées résultent, pour l'essentiel, des pertes de l'agence d'Ile-de-France, créée en 2009 par l'acquisition d'une société tierce ; qu'en octobre 2011, l'expert-comptable de la société Pro Impec-Pro Santéa les chiffrait à la somme de 966 000 euros pour une période de huit mois ; qu'en novembre 2011, cet expert-comptable signalait que le résultat de 521 000 euros prévu au 31 décembre suivant ne permettrait pas de rembourser les emprunts en cours ; que ce même résultat aurait été de 859 000 euros si l'agence d'Ile-de-France avait été neutralisée au 30 septembre 2011 ; que cet expert-comptable faisait état, en février 2012, d'une perte mensuelle de 100 000 euros pour l'agence d'Ile-de-France, de nature à mettre en péril l'ensemble de la société ; qu'il soulignait aussi, d'une part, les risques pesant sur la trésorerie de la société Pro Impec-Pro Santéa et, d'autre part, l'urgence de réduire les effectifs de l'agence d'Ile-de-France, de façon à retrouver l'équilibre financier et à ne plus obérer le résultat global de la société ; que l'expert-comptable désigné par le comité d'entreprise en application des dispositions de l'article L. 2325-35 du code du travail a confirmé cette analyse dans son rapport du 16 avril 2012, en soulignant la baisse importante de l'excédent brut d'exploitation de la société Pro Impec-Pro Santéa entre 2010 et 2011, passé de 901 000 euros à 143 000 euros, cette baisse s'expliquant quasi exclusivement par les résultats d'exploitation négatifs de l'agence d'Ile-de-France ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que la compétitivité de la société Pro Impec-Pro Santéa doit être regardée comme menacée de façon substantielle ; que c'est dès lors sans erreur d'appréciation que le ministre chargé du travail a estimé que la réalité du motif économique invoqué était de nature à justifier le licenciement de M.C... ;

8. Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter le moyen tiré de l'existence d'un lien entre ce licenciement et l'appartenance syndicale du requérant à la CGT ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 1er octobre 2014, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 14 décembre 2012 par laquelle le ministre chargé du travail a annulé la décision du 5 juillet 2012 de l'inspecteur du travail refusant d'accorder à la société Pro Impec-Pro Santéa l'autorisation de le licencier et a autorisé son licenciement pour motif économique ; que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ; qu'il n'y a toutefois pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C...le versement à la société Pro Impec-Pro Santéa d'une somme au titre des frais de même nature ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société Pro Impec-Pro Santéa présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C..., à la société Pro Impec-Pro Santéa et à la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

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N°14DA01911

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 14DA01911
Date de la décision : 08/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-03 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour motif économique.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Jean-Jacques Gauthé
Rapporteur public ?: Mme Pestka
Avocat(s) : DM AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 23/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-10-08;14da01911 ?
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