La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/09/2015 | FRANCE | N°14DA00298

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (bis), 22 septembre 2015, 14DA00298


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner le centre hospitalier de Saint-Quentin à lui verser une indemnité de 104 100 euros en réparation des préjudices subis à la suite d'une erreur médicale commise lors de l'intervention chirurgicale dont il a fait l'objet le 1er février 2004.

Par un jugement n° 1101914 du 12 décembre 2013, le tribunal administratif d'Amiens, après avoir mis hors de cause l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatr

ogènes et des infections nosocomiales, a, d'une part, rejeté sa demande et, d'au...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner le centre hospitalier de Saint-Quentin à lui verser une indemnité de 104 100 euros en réparation des préjudices subis à la suite d'une erreur médicale commise lors de l'intervention chirurgicale dont il a fait l'objet le 1er février 2004.

Par un jugement n° 1101914 du 12 décembre 2013, le tribunal administratif d'Amiens, après avoir mis hors de cause l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, a, d'une part, rejeté sa demande et, d'autre part, rejeté les conclusions du centre hospitalier de Saint-Quentin tendant à la condamnation de M. A...à lui verser une indemnité de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts à raison du caractère abusif de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 février 2014 et le 4 septembre 2015, M. A..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 12 décembre 2013 ;

2°) à titre principal, d'ordonner une nouvelle expertise afin de déterminer les causes des dommages qu'il a subis et d'évaluer les différents chefs de préjudice ;

3°) de condamner le centre hospitalier de Saint-Quentin à lui verser une indemnité globale de 118 100 euros en réparation de l'ensemble de ses préjudices ;

4°) à titre subsidiaire, de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales à lui verser cette somme ;

5°) de mettre à charge du centre hospitalier de Saint-Quentin et de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales une somme de 3 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

----------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Milard, premier conseiller,

- les conclusions de M. Guyau, rapporteur public,

- les observations de Me E... substituant MeB..., représentant M. A...et de Me D..., représentant le centre hospitalier de Saint-Quentin.

1. Considérant que M.A..., alors âgé de 45 ans, a été admis au service des urgences du centre hospitalier de Saint-Quentin le 1er février 2004 en raison de l'apparition de brûlures urinaires ; qu'il a subi une première intervention chirurgicale le 25 février 2004 visant à l'extraction de deux calculs et une seconde le 18 mars 2004 qui n'a permis que le changement de la sonde vésicale posée initialement ; qu'à la suite d'une complication survenue à la suite de la première intervention, M. A...a saisi, le 25 mars 2009, la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux d'une demande d'indemnisation au titre de la solidarité nationale ; que cette commission a, lors de sa séance du 15 septembre 2009, estimé que la survenue du rétrécissement de l'urètre ne relevait pas d'une faute technique du praticien et qu'elle était en lien direct avec le geste chirurgical réalisé le 25 février 2004 ; que l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales a alors adressé à M. A...une offre d'indemnisation transactionnelle partielle que celui-ci a refusée ; que M. A...a ensuite recherché la responsabilité pour faute du centre hospitalier de Saint-Quentin ; qu'il relève appel du jugement du 12 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Saint-Quentin à lui verser une indemnité de 104 100 euros en réparation des préjudices subis à la suite de l'intervention chirurgicale du 25 février 2004 ;

Sur l'appel principal :

Sur la nécessité d'une nouvelle expertise :

2. Considérant qu'il ressort du rapport d'expertise établi le 8 août 2009, ordonnée par la commission régionale de conciliation et d'indemnisation (CRCI), que M. A...était porteur de calculs intra-vésicaux de gros volume qui nécessitaient une intervention chirurgicale afin de procéder à leur extraction ; que le diagnostic a été correctement établi et il n'y a eu aucun défaut d'information de M. A...quant aux risques inhérents à cette intervention, ni de maladresse, négligence ou erreur commises dans la réalisation de cet acte réalisé par voie endoscopique ; que l'expert précise que la survenance du rétrécissement de l'urètre constitue une complication, qui bien qu'étant connue en chirurgie endoscopique, constitue un accident médical non fautif, totalement imprévisible et directement et exclusivement imputable à cet acte chirurgical ; qu'il indique que le choix du traitement, la surveillance de cette complication ont été adaptés ; qu'il n'y a pas eu enfin d'anomalie dans l'organisation et le fonctionnement du service ; que l'expert a en outre évalué de manière précise les différents chefs de préjudices subis par M.A... ; qu'ainsi, cette expertise répond de manière suffisamment pertinente aux diverses questions qui étaient posées ; que, par suite, la nouvelle demande d'expertise formulée par M. A...ne revêt aucun caractère utile ;

Sur la responsabilité du centre hospitalier de Saint-Quentin :

3. Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute (...) " ;

4. Considérant que comme cela a été dit au point 2, l'extraction des deux calculs vésicaux pratiquée le 25 février 2004 au centre hospitalier de Saint-Quentin a entraîné chez M. A... un rétrécissement de l'urètre, qui bien qu'étant une complication connue en chirurgie endoscopique, constitue un accident médical non fautif directement et exclusivement imputable à cet acte chirurgical, totalement imprévisible dans la mesure où elle ne révèle, en elle-même, aucune négligence ou erreur dans la réalisation de cet acte ; qu'enfin, le choix du traitement et la surveillance de cet aléa ont été conformes aux règles de l'art et aucune anomalie dans l'organisation et le fonctionnement du service n'a été relevée ; qu'ainsi, le centre hospitalier de Saint-Quentin n'a commis aucune faute médicale de nature à engager sa responsabilité ;

Sur les conclusions dirigées contre l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " / II. - Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire. " ; que l'article D. 1142-1 du même code définit le seuil de gravité prévu par ces dispositions législatives ; qu'il résulte de ces dispositions que l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales doit assurer, au titre de la solidarité nationale, la réparation des dommages résultant directement d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins à la double condition qu'ils présentent un caractère d'anormalité au regard de l'état de santé du patient comme de l'évolution prévisible de cet état et que leur gravité excède le seuil défini à l'article D. 1142-1 ;

6. Considérant que la condition d'anormalité du dommage prévue par ces dispositions doit toujours être regardée comme remplie lorsque l'acte médical a entraîné des conséquences notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé de manière suffisamment probable en l'absence de traitement ; que, lorsque les conséquences de l'acte médical ne sont pas notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé par sa pathologie en l'absence de traitement, elles ne peuvent être regardées comme anormales sauf si, dans les conditions où l'acte a été accompli, la survenance du dommage présentait une probabilité faible ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, qu'en l'absence d'intervention chirurgicale, le requérant était exposé à une récidive des phénomènes douloureux et à l'apparition d'épisodes infectieux pouvant entraîner ultérieurement des complications rénales importantes et que, compte tenu du volume des calculs vésicaux présents dans l'organisme de M.A..., leur élimination spontanée était quasiment impossible ; que les conséquences de l'extraction de ces calculs, qui se sont traduites par un rétrécissement de l'urètre provoquant, d'une part, l'apparition d'un inconfort urinaire qualifié par l'expert de modéré, d'autre part, l'existence d'un préjudice esthétique qualifié de très léger et, enfin, un ralentissement de l'activité sexuelle de M.A..., que l'expert impute pour une large part à un phénomène psychologique, ne sont pas notablement plus graves que celles auxquelles le requérant aurait été probablement exposé en l'absence d'intervention et ne peuvent ainsi être regardées comme anormales ; qu'enfin, ainsi qu'il a été dit au point 4, la survenance de la complication en cause, fréquente en chirurgie endoscopique, ne peut être qualifiée d'exceptionnelle ; que par suite, les conditions de mise en oeuvre d'une réparation par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales au titre de la solidarité nationale ne sont pas réunies ;

Sur l'appel incident du centre hospitalier de Saint-Quentin :

8. Considérant qu'eu égard aux moyens développés par M. A...et à l'ensemble des pièces qui ont été versées, la demande présentée par le requérant devant le tribunal administratif d'Amiens et sa requête d'appel ne présentent pas le caractère d'un recours abusif ; que, par suite, les conclusions incidentes du centre hospitalier de Saint-Quentin tendant à la condamnation de M. A...à lui verser des dommages et intérêts doivent être rejetées ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ; que le centre hospitalier de Saint-Quentin n'est pas fondé à soutenir, par la voie de l'appel incident, que c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses conclusions indemnitaires ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions de M. A...tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A...le versement au centre hospitalier de Saint-Quentin d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : L'appel incident du centre hospitalier de Saint-Quentin et ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A..., au centre hospitalier de Saint-Quentin, à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Aisne et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.

Copie sera adressée à la compagnie Axa France.

''

''

''

''

5

N°14DA00298


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 14DA00298
Date de la décision : 22/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation.


Composition du Tribunal
Président : M. Hoffmann
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: M. Guyau
Avocat(s) : ELBAZ

Origine de la décision
Date de l'import : 01/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-09-22;14da00298 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award