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06/11/2014 | FRANCE | N°14DA00432

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 06 novembre 2014, 14DA00432


Vu la requête, enregistrée le 10 mars 2014, présentée pour Mme C...D..., demeurant..., par Me A...B... ;

Mme D...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302936 du 6 février 2014 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 octobre 2013 par lequel le préfet de l'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination pour son éloignement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet

arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour portant la menti...

Vu la requête, enregistrée le 10 mars 2014, présentée pour Mme C...D..., demeurant..., par Me A...B... ;

Mme D...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302936 du 6 février 2014 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 octobre 2013 par lequel le préfet de l'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination pour son éloignement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer sa situation, dans le mois de la notification de l'arrêt à intervenir et ce, sous une astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du 8 octobre 2014 du président de la Cour désignant M. Laurent Domingo pour exercer les fonctions de rapporteur public à l'audience du 23 octobre 2014 ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Jean-Michel Riou, premier conseiller ;

Sur la régularité du jugement :

1. Considérant que si, dans sa demande présentée devant le tribunal administratif, Mme D... soutenait que la décision lui refusant l'admission au séjour avait été prise à l'issue d'une procédure irrégulière au motif que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé aurait été émis au vu d'un rapport médical établi par un médecin ne répondant pas aux conditions posées par l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le tribunal, en tout état de cause, s'est prononcé sur ce moyen ; que le moyen tiré de ce que le jugement serait irrégulier pour avoir omis de statuer sur ce moyen doit, par suite, être écarté ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6. Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux. " ; qu'il ressort des pièces du dossier que le mémoire du préfet de l'Oise présenté le 10 janvier 2014 et celui présenté pour Mme D...le 19 janvier 2014 ont été enregistrés respectivement les 14 et 19 janvier 2014, avant la clôture de l'instruction, réouverte par ordonnance du 9 janvier 2014 ; que le mémoire du préfet de l'Oise se bornait à faire état de la qualité de praticien hospitalier du Docteur Moulinier, déjà indiquée dans les mémoires précédents de la requérante ; que le mémoire présenté pour Mme D...évoquait la programmation d'une opération chirurgicale devant avoir lieu en mai 2014 pour le traitement de son obésité morbide, soit un fait postérieur à la décision attaquée ; que ces mémoires ne présentant pas le caractère d'éléments nouveaux au sens des dispositions précitées de l'article R. 611-1 du code de justice administrative, le tribunal n'a pas méconnu ces dispositions, ni le principe du contradictoire, en s'abstenant de les communiquer ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier ;

Sur le refus de séjour :

4. Considérant qu'aux termes du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...)." ; et qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code, relatif à l'avis du médecin de l'agence régionale de santé : " (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) / Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le médecin de l'agence régionale de santé, qui a été régulièrement désigné à cet effet par le directeur de l'agence, par décision du 6 septembre 2013, régulièrement publiée le 23 septembre 2013, a émis l'avis prévu par les dispositions précitées sur la base d'un rapport établi par un médecin agréé ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le refus de séjour aurait été prononcé sur le fondement d'un avis irrégulier manque en fait ;

6. Considérant que MmeD..., ressortissante de la République du Congo, n'a fait état, ni dans sa demande de renouvellement de son titre de séjour, ni au cours de l'instruction de cette demande, d'une circonstance humanitaire exceptionnelle qui aurait nécessité un avis du directeur général de l'agence régionale de santé ; que, par suite, le moyen tiré de l'absence d'avis du directeur général de l'agence régionale de santé doit, dans ces conditions, être écarté comme inopérant ;

7. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment pas des termes de la décision attaquée, que le préfet de l'Oise se serait estimé lié par l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ;

8. Considérant que l'avis mentionné ci-dessus du médecin de l'agence régionale de santé du 23 septembre 2013, indique que l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'il existe dans le pays dont elle est originaire un traitement approprié à sa prise en charge et que son état de santé lui permet de voyager sans risque vers ce pays ; que s'il ressort des pièces du dossier, et notamment des pièces médicales produites par Mme D...qu'elle souffre de lithiases rénales multiples, nécessitant un suivi urologique, dans un contexte d'obésité morbide, ces éléments ne remettent pas en cause l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ; que, par suite, la circonstance, à la supposer établie, que le préfet n'aurait pas pu apprécier la disponibilité d'un traitement approprié dans son pays d'origine faute d'avoir distingué entre la République démocratique du Congo (Kinshasa) et la République du Congo (Brazzaville), est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ; qu'il résulte de ce qui précède qu'en refusant le titre de séjour sollicité par Mme D...le préfet de l'Oise n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

9. Considérant que si Mme D...soutient que sa situation relève d'une circonstance humanitaire exceptionnelle au sens des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ressort des pièces du dossier qu'ainsi qu'il a été dit au point 8, l'éventuel défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, dès lors, en estimant que la situation de Mme D... n'était pas constitutive d'une circonstance humanitaire exceptionnelle, le préfet n'a pas méconnu les dispositions précitées ;

10. Considérant que, pour les motifs énoncés au point 8, le préfet de l'Oise n'a pas, en refusant le séjour à MmeD..., entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que la décision portant refus de titre de séjour serait illégale ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

12. Considérant que pour la raison indiquée au point 6, le moyen tiré de l'absence d'avis du directeur général de l'agence régionale de santé doit être écarté comme inopérant ;

13. Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit au point 11, Mme D...n'est pas fondée à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français serait dépourvue de base légale à raison de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour ;

14. Considérant que si Mme D...résidait en France depuis quatre ans à la date de la décision attaquée, dont dix-huit mois sous couvert d'un titre de séjour délivré en raison de son état de santé, elle ne justifie d'aucune attache familiale en France et ne serait pas isolée en cas de retour dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de quarante-quatre ans et où résident son mari et ses trois enfants ; qu'en outre, et en tout état de cause, compte tenu de ce qu'il a été dit au point 8, l'interruption de la prise en charge médicale dont Mme D...bénéficie actuellement en France ne constitue pas par elle-même une violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ainsi compte tenu des conditions du séjour de l'intéressée et en dépit de sa durée, le préfet de l'Oise n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision attaquée a été prise ; qu'il n'a donc pas méconnu ces stipulations ;

15. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé. / (...) " ; que pour les mêmes raisons que celles énoncées au point 8, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

16. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 8 et 14, Mme D...n'est pas fondée à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

17. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait illégale ;

Sur le pays de destination :

18. Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit au point 8, MmeD..., dont la demande de renouvellement du titre de séjour accordé pour raison de santé a été rejetée, ne produit aucun élément probant de nature à établir qu'elle encourrait des risques en cas de retour dans son pays d'origine ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué aurait été pris en méconnaissance des stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

19. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise pour information au préfet de l'Oise.

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N°14DA00432 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14DA00432
Date de la décision : 06/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Nizet
Rapporteur ?: M. Jean-Michel Riou
Rapporteur public ?: M. Domingo
Avocat(s) : DANDALEIX

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2014-11-06;14da00432 ?
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