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08/07/2014 | FRANCE | N°13DA01949

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 08 juillet 2014, 13DA01949


Vu la requête, enregistrée le 5 décembre 2013, présentée pour M. C...A..., demeurant..., par Me B...D... ; M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302815 du 21 octobre 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 18 octobre 2013 du préfet de la Seine-Maritime ordonnant respectivement sa remise aux autorités hongroises et son assignation à résidence, à ce qu'il soit enjoint au préfet d'enregistrer sa demande d'asile et de lui délivrer une autorisat

ion provisoire de séjour, et à la mise à la charge de l'Etat d'une somme de...

Vu la requête, enregistrée le 5 décembre 2013, présentée pour M. C...A..., demeurant..., par Me B...D... ; M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302815 du 21 octobre 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 18 octobre 2013 du préfet de la Seine-Maritime ordonnant respectivement sa remise aux autorités hongroises et son assignation à résidence, à ce qu'il soit enjoint au préfet d'enregistrer sa demande d'asile et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, et à la mise à la charge de l'Etat d'une somme de 1 500 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

2°) d'annuler les arrêtés du 18 octobre 2013 du préfet de la Seine-Maritime ;

3°) d'enjoindre au préfet de procéder à l'enregistrement de sa demande d'asile ou de réexaminer sa demande, dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à venir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à MeD..., sous réserve qu'elle renonce au versement de l'aide juridictionnelle, au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu le règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifiés ;

Vu la loi n° 2000-231 du 12 avril 2000, modifiée, relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur ;

1. Considérant que, par arrêtés distincts du 18 octobre 2013, le préfet de la Seine-Maritime a respectivement ordonné la remise aux autorités hongroises de M. A...et l'a assigné à résidence ; que M. A...relève appel du jugement du 21 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux arrêtés ;

Sur l'arrêté de remise aux autorités hongroises :

2. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté de remise aux autorités hongroises de M.A..., qui énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivé ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des dispositions du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et notamment des articles L. 531-1 et suivants, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises les décisions par lesquelles l'autorité administrative ordonne la remise aux autorités compétentes d'un Etat membre ; que, dès lors, l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 susvisée, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, ne saurait être utilement invoqué à l'encontre d'une décision de remise aux autorités compétentes d'un Etat membre ; que, par suite, M. A... ne peut utilement se prévaloir de la violation des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, conformément aux dispositions des articles L. 531-1 et L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, M.A..., qui a sollicité la délivrance d'une autorisation provisoire au séjour au titre de l'asile, a été informé le 4 octobre 2013, notifié par le truchement d'un interprète en langue albanaise, de la possibilité de présenter ses observations ; que M. A...a présenté des observations par écrit le 11 octobre 2013, avant l'édiction de l'arrêté de remise aux autorités hongroises contestée du 18 octobre 2013 ; qu'il a donc été mis à même de faire valoir, avant l'intervention de cet arrêté, tous éléments d'information ou arguments de nature à influer sur le contenu de cette mesure ; qu'il n'invoque aucun autre élément de nature à constater que son droit à être entendu aurait été méconnu ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doit être écarté ;

5. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Maritime, qui, contrairement à ce que soutient M.A..., a procédé à un examen particulier de sa situation personnelle, se serait privé de la possibilité de mettre en oeuvre la faculté d'examiner sa demande d'asile prévue par le paragraphe 2 de l'article 3 du règlement (CE) n° 343/2003 du 18 février 2003 en décidant sa remise aux autorités hongroises ;

6. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 10 du règlement susvisé, est responsable l'Etat membre sur le territoire duquel l'étranger est irrégulièrement entré, et ce, pendant une durée d'un an après le franchissement de la frontière de cet Etat, et, qu'au-delà de ce délai, l'Etat responsable est celui dans lequel l'étranger a séjourné au moins cinq mois ; que, contrairement à ce que soutient M.A..., il ressort des pièces du dossier, qu'à la suite de son interpellation, les autorités hongroises l'ont identifié dans la borne dite " Eurodac ", au regard des éléments qu'il a fait valoir, en catégorie 1, c'est à dire en tant que demandeur d'asile ; que, par suite, c'est à bon droit que le préfet a regardé la Hongrie comme étant l'Etat responsable de l'examen de la demande de M.A..., sans entacher sa décision d'une erreur de fait, ni d'une erreur de droit ;

7. Considérant, en sixième lieu, que la Hongrie est un Etat membre de l'Union européenne, partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ainsi, des documents d'ordre général relatifs aux modalités d'application des règles relatives à l'asile par les autorités hongroises ne sauraient suffire à établir que la réadmission d'un demandeur d'asile vers la Hongrie serait, par elle-même, constitutive d'une violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales aux termes desquelles " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ou d'une atteinte grave au droit d'asile ; qu'il appartient néanmoins à l'administration d'apprécier, dans chaque cas, au vu des pièces qui lui sont soumises, et sous le contrôle du juge, si les conditions dans lesquelles un dossier particulier est traité par les autorités hongroises répondent à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile ;

8. Considérant, d'une part, que la documentation produite par M.A..., relative à des considérations d'ordre général selon lesquelles les demandeurs d'asile seraient privés en Hongrie de liberté et que le taux de reconnaissance de la qualité de réfugié y serait très faible, ne suffisent pas à établir que son dossier ne serait pas traité par les autorités hongroises conformément à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile ; que, d'autre part, la circonstance, au demeurant non établie par les pièces produites, selon laquelle M. A...aurait été maltraité par les agents de la police hongroise qui l'ont interpelé ne permet pas davantage d'établir que sa demande d'asile ne sera pas examinée conformément aux stipulations susvisées ; que, par suite, le préfet de la Seine-Maritime n'a, en décidant la remise aux autorités hongroises de M.A..., ni porté atteinte au droit d'asile, ni méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni commis d'erreur manifeste d'appréciation ;

9. Considérant, en septième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

10. Considérant, qu'à la date de l'arrêté attaqué, M. A...résidait en France depuis moins de quatre mois ; qu'il est constant qu'il est célibataire et sans enfant à charge ; qu'il n'établit, ni même n'allègue, que des membres de sa famille résideraient en France, autre que des cousins ; que, par suite, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas, en décidant sa remise aux autorités hongroises, porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur l'arrêté d'assignation à résidence :

11. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. A...n'est pas fondé à invoquer l'illégalité de l'arrêté de remise aux autorités hongroises à l'appui de ses conclusions à l'encontre de l'arrêté l'assignant à résidence ;

12. Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté ordonnant l'assignation à résidence de M. A..., qui énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivé ;

13. Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. A...avant de prononcer son assignation à résidence ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte, ainsi que celles présentées au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie sera transmise au préfet de la Seine-Maritime.

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N°13DA01949


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13DA01949
Date de la décision : 08/07/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Mortelecq
Rapporteur ?: M. Marc (AC) Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Marjanovic
Avocat(s) : SELARL EDEN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2014-07-08;13da01949 ?
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