Vu le recours, enregistré le 6 septembre 2013, présenté par le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE ; le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1107270 du 25 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Lille a condamné l'Etat à verser à M. A...la somme de 23 000 euros, avec intérêt légal à compter du 14 septembre 2011, en réparation du préjudice né de la perte de chance de ne pouvoir décider de la prolongation de son activité afin d'obtenir sa pension de retraite au taux plein ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Lille ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n°2004-1157 du 29 octobre 2004 pris en application des articles 276-4 et 280 du code civil et fixant les modalités de substitution d'un capital à une rente allouée au titre de la prestation compensatoire ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Maryse Pestka, rapporteur public,
- les observations de Me Dominique Guéry-Sekula, avocat de M. A...;
1. Considérant que le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE relève appel du jugement du 25 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Lille a condamné l'Etat à verser à M. A...la somme de 23 000 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 14 septembre 2011, en réparation du préjudice né de la perte de chance de ne pouvoir décider de la prolongation de son activité afin d'obtenir sa pension de retraite au taux plein ; que par la voie de l'appel incident, M. A... demande la réformation de ce jugement en tant qu'il a limité à la somme de 23 000 euros le montant de ladite indemnité ;
Sur la responsabilité :
2. Considérant que M.A..., professeur certifié d'anglais, a sollicité en juillet 2009 du recteur de l'académie de Lille des renseignements concernant ses droits à pension en cas de départ à la retraite en septembre 2010 ou en septembre 2011 ; que le service des pensions du MINISTERE DE L'EDUCATION NATIONALE lui a indiqué, dans une simulation datée du 2 février 2010, qu'en cessant son activité le 11 septembre 2011, il pourrait bénéficier d'une pension calculée sur la base de 163 trimestres avec un taux de pension de 75,937 % de son dernier traitement ; que cette simulation prenait notamment en compte une durée de service de l'intéressé concernant une période du 5 octobre 1971 au 30 septembre 1972 comme élève au centre de formation des professeurs d'enseignement général de collège et d'une autre période du 2 octobre 1972 au 7 juillet 1973 comme auxiliaire correspondant à un poste d'assistant de français en Grande-Bretagne ; que par un arrêté du 16 décembre 2010, M. A...a été admis à faire valoir ses droits à la retraite pour ancienneté d'âge et de services à compter du 1er septembre 2011 ; qu'informé par la réception de son titre de pension établi le 6 juin 2011, de ce que celle-ci était calculée sur la base de 156 trimestres lui permettant de bénéficier d'un taux de 69,965 %, M. A...l'a, dès le 15 juin 2011, contesté devant le ministre de l'éducation nationale en demandant la prise en compte de ces deux périodes ; qu'estimant que la simulation du 2 février 2010 comportait des éléments erronés lui ayant fait perdre des droits à pension alors qu'il aurait pu prolonger son activité, M. A...a demandé au tribunal administratif de Lille la condamnation de l'État à lui verser la somme de 55 200 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de l'erreur commise dans l'établissement de la simulation de ses droits à pension ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les deux périodes du 5 octobre 1971 au 30 septembre 1972 et du 2 octobre 1972 au 7 juillet 1973 n'ont pas été prises en compte dans le décompte définitif du titre de pension de M. A...; qu'ainsi, la simulation du 2 février 2010 a fait apparaître une majoration inexacte de sept trimestres de la durée des services qui pouvait légalement être retenue pour l'ouverture de son droit à pension ; que dans ces conditions, le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE, en fournissant à M. A...des renseignements erronés, a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;
4. Considérant que la simulation transmise à M.A..., alors même qu'elle mentionnait que ce document n'était communiqué qu'à titre indicatif et qu'elle ne préjugeait en rien de la décision du ministre des finances lors de la liquidation de la pension, a été le motif essentiel du choix de l'intéressé de faire valoir ses droits à la retraite au 1er septembre 2011 ; qu'il s'ensuit que le lien de causalité entre les renseignements erronés fournis par le MINISTERE DE L'EDUCATION NATIONALE et le préjudice subi par M.A..., né de la perte de chance de pouvoir décider de la prolongation de son activité afin d'obtenir une pension de retraite au taux plein, dès lors que dans ses courriers des 28 juillet et 5 août 2011, l'administration ne l'a pas invité à reporter la date de départ à la retraite, doit être regardé comme établi ;
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A...avait demandé la validation des services d'enseignement effectués en Grande-Bretagne au cours de la période du 2 octobre 1972 au 7 juillet 1973 laquelle lui aurait été refusée par une lettre du 2 juillet 1990 du ministère de l'éducation nationale ; que s'il soutient, sans être contredit, n'avoir jamais été destinataire de ce courrier, transmis sous couvert du recteur de l'académie de Lille, il ne s'est jamais inquiété de l'absence de réponse à sa demande de validation de service et n'a procédé à aucune vérification du nombre de trimestres contenu dans la simulation ; que dès lors, la carence de M. A...à entreprendre de telles démarches est de nature à atténuer la responsabilité de l'État ; qu'il sera fait une juste appréciation de l'ensemble des circonstances de l'espèce en laissant à la charge de M. A...la moitié des conséquences des renseignements erronés que comportait la simulation du 2 février 2010 ;
Sur le préjudice :
6. Considérant que M. A...a été privé d'une chance de prolonger son activité afin de bénéficier d'une pension de retraite à taux plein ; que la perte de revenus procédant de cette perte de chance, évaluée en retenant les montants nets, d'une part, d'une telle pension et, d'autre part, de celle qu'il perçoit depuis le 1er septembre 2011, s'élève à la somme de 191,60 par mois ; que, compte tenu du tableau de substitution d'une rente en capital annexé au décret n° 2004-1157 du 29 octobre 2004 et du partage de responsabilité fixé ci-dessus, le préjudice indemnisable de M.A..., né le 11 septembre 1950, doit être fixé à la somme de 14 770 euros ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de ramener à 14 770 euros le montant de l'indemnité due par l'État à M. A...et de réformer en ce sens le jugement attaqué du tribunal administratif de Lille ; que M. A...n'est pas fondé à demander, par la voie de l'appel incident, que la somme qui lui avait été accordée par le jugement attaqué soit portée à la somme de 53 000 euros ;
Sur les intérêts :
8. Considérant que M. A... a droit aux intérêts au taux légal correspondant à l'indemnité de 14 770 euros à compter du 14 septembre 2011, date de réception de sa demande par le ministre de l'éducation nationale ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. A...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La somme de 23 000 euros que l'Etat a été condamné à verser à M. A...par le jugement du 25 juin 2013 du tribunal administratif de Lille est ramenée à la somme de 14 770 euros. Cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 14 septembre 2011.
Article 2 : Le recours du MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE et l'appel incident de M. A...sont rejetés.
Article 3 : Le jugement du 25 juin 2013 du tribunal administratif de Lille est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt.
Article 4 : Les conclusions présentées par M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE, DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE et à M. B... A....
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N°13DA01519
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