La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/07/2013 | FRANCE | N°12DA01697

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (bis), 02 juillet 2013, 12DA01697


Vu la requête, enregistrée le 22 novembre 2012 au greffe de la cour, présentée par le préfet du Nord qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1204452 du 16 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté, en date du 29 juin 2012, par lequel le préfet du Nord a rejeté la demande de titre de séjour de M. B...A..., l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2°) de rejeter la demande de M. A...tendant à l'annulation de l'arrêté en cause ;

----------

----------------------------------------------------------------------------------------...

Vu la requête, enregistrée le 22 novembre 2012 au greffe de la cour, présentée par le préfet du Nord qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1204452 du 16 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté, en date du 29 juin 2012, par lequel le préfet du Nord a rejeté la demande de titre de séjour de M. B...A..., l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2°) de rejeter la demande de M. A...tendant à l'annulation de l'arrêté en cause ;

----------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Olivier Gaspon, premier conseiller,

- les conclusions de M. Vladan Marjanovic, rapporteur public,

- et les observations de Me Emmanuelle Lequien, avocat de M. A...;

1. Considérant que M. B...A..., ressortissant chinois né le 22 mai 1982, entré sur le territoire français le 20 septembre 2005 afin de poursuivre ses études et titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant ", a sollicité, le 25 novembre 2011, le renouvellement de sa carte de séjour temporaire et son changement de statut en qualité de salarié, puis, le 27 mai 2012, un changement de statut et la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " profession libérale " ; que le préfet du Nord relève appel du jugement, en date du 16 octobre 2012, par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé son arrêté du 29 juin 2012 ayant rejeté la demande de titre de séjour présentée par M.A... ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision de refus de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que le préfet du Nord ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui fixent les conditions de retrait d'un titre de séjour temporaire en cours de validité, pour soutenir que, l'intéressé ayant été embauché puis employé sans autorisation, il pouvait, pour ce motif, refuser le renouvellement et le changement de statut sollicités ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que les premiers juges ont fait droit, par la voie de l'exception, à la demande de M. A...tendant à ce que soit écartée la décision de refus d'autorisation de travail, en date du 20 avril 2012, en tant qu'elle fonde légalement la décision attaquée ; que le préfet du Nord conteste cette position en faisant spécifiquement valoir que la société Alpha Pub, employeur de l'intéressé, n'a transmis que tardivement le résultat des recherches de recrutement entreprises et la spécificité du profil recherché, alors que ces éléments d'appréciation doivent être pris en compte par le préfet pour accorder ou refuser l'autorisation de travail en application de l'article R. 5221-20 du code du travail ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 (L. 5221-2) du code du travail. / Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2. /La carte porte la mention " salarié " lorsque l'activité est exercée pour une durée supérieure ou égale à douze mois. " ; qu'aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : / 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail. " ; qu'aux termes de l'article R. 5221-20 du même code : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : 1° La situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes de placement concourant au service public du placement pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; (...) " ; que l'autorisation de travail sollicitée par M. A...a été refusée au motif que, dans la profession concernée de " designer, code ROME H 1204 ", les statistiques du marché du travail de la région Nord/Pas-de-Calais faisaient apparaître, au 31 janvier 2012, 62 demandeurs d'emploi inscrits pour 28 offres d'emploi collectées et un indicateur de tension de 0,5 % ;

5. Considérant que, si la fiche de poste initiale de l'emploi en litige, rédigée le 26 août 2011, ne comporte aucune indication sur la recherche de compétences en langue chinoise, il ressort des termes de l'annonce publiée par les soins de Pôle Emploi que la pratique du chinois (mandarin) était exigée pour le poste antérieurement à la décision de refus d'autorisation de travail du 20 avril 2012 ; que, toutefois, la société Alpha Pub n'a justifié du caractère infructueux de ses recherches, afin de pourvoir le poste ainsi défini, que par la production d'un courriel de Pôle Emploi en date du 13 juin 2012, constatant l'échec de cette recherche et indiquant le retrait de l'annonce en raison du défaut de candidat en adéquation avec le poste ; qu'il résulte de ce qui précède que, la société Alpha Pub n'ayant pas antérieurement justifié de ses recherches auprès de Pôle Emploi afin de recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail, le préfet a pu, sans erreur de droit, prendre, le 20 avril 2012, la décision de refus d'autorisation de travail en litige en opposant la situation objective de l'emploi dans la région Nord/Pas-de-Calais au 31 janvier 2012 pour la profession de " designer " ; que le préfet du Nord est donc fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lille a écarté comme illégale la décision de refus d'autorisation de travail du 20 avril 2012 et a annulé, par voie de conséquence, l'arrêté du 29 juin 2012 portant refus de séjour à l'encontre de M.A... ; qu'il y a lieu, par suite, pour la Cour d'annuler, dans cette mesure, le jugement attaqué du tribunal administratif de Lille en date du 16 octobre 2012 ;

6. Considérant qu'il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. A...devant le tribunal administratif de Lille ou en appel ;

Sur la demande d'annulation de l'arrêté du 29 juin 2012 :

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

7. Considérant, en premier lieu, que M. A...ne peut utilement invoquer la circulaire du ministre de l'intérieur n° INTV1224696C du 31 mai 2012, qui ne présente pas un caractère réglementaire ;

8. Considérant, en second lieu, qu'il convient, par les motifs retenus à bon droit par les premiers juges et qu'il convient d'adopter, de maintenir l'annulation de la décision du 29 juin 2012 du préfet du Nord en tant qu'elle a refusé à M. A...la délivrance d'un titre de séjour mention " profession libérale " ou " profession indépendante " ;

En ce qui concerne le surplus de la demande :

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...est également fondé à demander, par voie de conséquence de l'annulation du refus de délivrance de titre de séjour, l'annulation des décisions du même jour lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une décision dans un sens déterminé, la juridiction saisie de conclusions en ce sens prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant d'un délai d'exécution " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction saisie de conclusions en ce sens, prescrit par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé " ;

11. Considérant qu'en application de ces dispositions, les motifs d'annulation de l'arrêté susmentionné du 29 juin 2012 impliquent seulement que le préfet du Nord prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction de la demande de titre de séjour mention " profession libérale " ou " profession indépendante ", dans un délai de deux mois, et ce, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. A...présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1204452 du 16 octobre 2012 du tribunal administratif de Lille est annulé en tant qu'il a annulé la décision du préfet du Nord en date du 29 juin 2012 refusant de délivrer à M. A...une carte de séjour temporaire mention " salarié ".

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Nord de procéder, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, à un nouvel examen de la demande de carte de séjour temporaire mention " profession libérale " ou " profession indépendante " présentée par M.A....

Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande de M. A...et de la requête du préfet du Nord est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, au préfet du Nord et à M. B...A....

''

''

''

''

2

N°12DA01697


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 12DA01697
Date de la décision : 02/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. Mortelecq
Rapporteur ?: M. Olivier Gaspon
Rapporteur public ?: M. Marjanovic
Avocat(s) : LEQUIEN - LACHAL AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2013-07-02;12da01697 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award