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21/02/2013 | FRANCE | N°11DA01790

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3 (bis), 21 février 2013, 11DA01790


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 29 novembre 2011, présentée pour Mme C...A..., divorcéeB..., demeurant..., par Me B. Meignie, avocat, confirmée par un mémoire du 30 novembre 2011 ; Mme A...demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 0801464 du 15 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a limité à la somme de 63 905 euros, sous déduction d'une provision de 10 000 euros, la condamnation du centre hospitalier de Doullens à raison des préjudices qu'elle a subis ;

2°) de porter à la somme

de 441 344,76 euros au titre de ses préjudices patrimoniaux et à celle de 17...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 29 novembre 2011, présentée pour Mme C...A..., divorcéeB..., demeurant..., par Me B. Meignie, avocat, confirmée par un mémoire du 30 novembre 2011 ; Mme A...demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 0801464 du 15 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a limité à la somme de 63 905 euros, sous déduction d'une provision de 10 000 euros, la condamnation du centre hospitalier de Doullens à raison des préjudices qu'elle a subis ;

2°) de porter à la somme de 441 344,76 euros au titre de ses préjudices patrimoniaux et à celle de 176 000 euros au titre de ses préjudices extrapatrimoniaux, le montant de l'indemnité due suite à son intervention chirurgicale pratiquée le 11 juin 2007 dans cet établissement, ces sommes portant intérêt au taux légal à compter de la date de la saisine de juridiction administrative ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Doullens la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code civil et notamment ses articles 1153 et 1154 ;

Vu l'arrêté du 29 novembre 2011 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Corinne Baes Honoré, rapporteur public ;

1. Considérant que le 11 juin 2007, MmeA..., alors âgée de 40 ans, a été hospitalisée au centre hospitalier de Doullens pour y subir une ablation du ménisque du genou gauche ; que dans les suites immédiates de l'intervention, l'intéressée a présenté des troubles qui ont conduit le chirurgien qui l'avait opérée à procéder le soir même à une nouvelle intervention, au cours de laquelle plusieurs sections vasculaire et nerveuse ont été mises en évidence ; qu'après la prise en charge immédiate de l'urgence vasculaire et la réalisation d'une suture du nerf poplité, Mme A... a été transférée dans la nuit au centre hospitalier universitaire d'Amiens où un pontage et la suppression de la suture nerveuse ont été réalisés ; qu'elle a ensuite subi plusieurs autres interventions chirurgicales et connu des périodes d'hospitalisation jusqu'au 27 décembre 2007 ainsi que de rééducation ; que la date de consolidation de son état a été fixée au 24 novembre 2009 ; que par un jugement du 15 septembre 2011, le tribunal administratif d'Amiens a estimé que la responsabilité du centre hospitalier de Doullens était engagée en raison de l'ensemble des fautes commises lors de cette intervention et l'a condamné à verser les sommes de 63 905 euros à Mme A...et de 74 813 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de la Somme ; que Mme A...relève appel de ce jugement en ce qu'il n'a que partiellement fait droit à sa demande indemnitaire ;

Sur les préjudices à caractère patrimonial :

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'attestation d'imputabilité établie par le médecin conseil de la CPAM de l'Aisne pour le compte de la CPAM de la Somme fait apparaître les périodes d'hospitalisation et de soins liées aux conséquences dommageables du seul acte médical du 11 juin 2007 ; que dès lors, l'ensemble des dépenses de santé de la CPAM de la Somme, comprenant l'hospitalisation, les frais médicaux et pharmaceutiques, les frais de transport, les frais d'appareillage, les soins infirmiers et les massages justifiées en lien direct avec le préjudice s'élèvent à 80 067,83 euros ; que s'ajoutent à cette somme les dépenses afférentes à des séances de rééducation d'un montant de 1 530 euros ;

3. Considérant que les frais de santé futurs qui seront nécessairement exposés par la CPAM de la Somme en raison du préjudice subi par Mme A...entrent dans le préjudice indemnisable devant être réparé par le centre hospitalier de Doullens sur justificatifs et au fur et à mesure de leur engagement ; que la CPAM établit la réalité des dépenses de santé futures après consolidation d'un montant de 27 274,99 euros, cette dernière somme comprenant les frais de surveillance médicale future de MmeA..., ses frais pharmaceutiques futurs et le petit appareillage à renouveler régulièrement ; que ces dépenses dont le remboursement est demandé par la caisse sont donc justifiées et certaines ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'ensemble des dépenses de santé en lien avec le préjudice s'élèvent à 108 872,82 euros ; qu'il y a lieu d'allouer cette somme à la CPAM de la Somme qui en a intégralement supporté ou supportera la charge et de réformer sur ce point le jugement du tribunal administratif d'Amiens ;

Sur les préjudices extrapatrimoniaux :

5. Considérant que Mme A...qui était agent hospitalier à la retraite depuis le 31 décembre 2003 n'établit, par les pièces qu'elle produit, ni qu'elle aurait souhaité poursuivre une activité professionnelle ni qu'elle aurait pu retrouver un emploi ; que, par suite, la réalité d'une perte de gains n'est pas établie ;

6. Considérant qu'il résulte du rapport d'expertise prescrite par une ordonnance du 8 avril 2010 du président du tribunal administratif d'Amiens que Mme A...est victime d'une incapacité permanente partielle de 25 % ; qu'il est constant qu'elle a besoin d'une tierce personne pour les gros travaux ménagers, à raison de 12 heures par mois ; que devant les premiers juges, elle avait fixé le montant mensuel de cette prestation à la somme de 18 euros, compte tenu des aides perçues de la caisse d'allocation familiale ; qu'eu égard aux périodes durant lesquelles elle a été hospitalisée jusqu'au 27 décembre 2007, les premiers juges ont évalué son préjudice à 800 euros à la date du jugement puis sur une base de 216 euros annuels pour les années suivantes, cette somme étant convertie en un capital de 4 824 euros ; qu'en cause d'appel, Mme A... réévalue cette somme à 18 euros par heure et demande le versement d'une somme de 6 480 euros au titre des frais de tierce personne pour la période avant consolidation et d'une somme de 51 982,56 euros pour la période postérieure à la consolidation ;

7. Considérant que Mme A...n'établit pas la réalité des frais de tierce personne exposés, tant pour la période antérieure à la consolidation que pour celle postérieure ; qu'il résulte de l'instruction qu'elle a produit des factures de l'association AGAF 80 d'un montant total de 385,36 euros pour la période de février 2008 à décembre 2010 pour l'emploi d'une tierce personne avec un coût horaire variant entre 1,52 euros et 4,24 euros ; que par suite, les premiers juges n'ont pas procédé à une inexacte évaluation du coût de l'assistance d'une tierce personne ;

8. Considérant que Mme A...établit en appel la réalité de l'achat, pour la somme de 3 000 euros d'un véhicule équipé d'une boite de vitesse automatique dont la nécessité n'est pas contestée ; qu'il y a donc lieu de porter à 3 000 euros l'indemnité due à ce titre et de réformer le jugement sur ce point ;

9. Considérant que Mme A...demande la prise en charge d'une somme de 686,83 euros correspondant à des frais liés à son hospitalisation consistant en la location d'un poste de télévision, d'un téléphone, des frais de déplacements qu'elle a remboursés à ses parents et de communications téléphoniques ; qu'il y a lieu, par adoption des motifs des premiers juges, de limiter cette indemnisation à 281 euros ;

10. Considérant que les premiers juges n'ont pas procédé à une estimation insuffisante du surcroit de frais d'entretien de ses enfants durant la période d'hospitalisation en allouant à Mme A... une somme de 2 000 euros ;

11. Considérant qu'il résulte des rapports d'expertise que Mme A...a subi des souffrances évaluées à cinq sur une échelle de sept, due notamment aux nombreuses interventions chirurgicales qu'elle a dû subir ; que son préjudice esthétique résultant de nombreuses cicatrices aux jambes est de trois sur une échelle de sept ; que les premiers juges n'ont pas procédé à une estimation insuffisante des souffrances endurées, du préjudice esthétique et des troubles de toute nature dans ses conditions d'existence en les évaluant à la somme de 56 000 euros ; qu'en appel Mme A...établit la réalité d'un préjudice d'agrément dû à l'impossibilité à se livrer à toute activité sportive ou de simple promenade avec ses trois enfants du fait de ses difficultés à se déplacer ; qu'il y a lieu de lui allouer 1 500 euros à ce titre ; qu'il y a lieu de porter à 57 500 euros l'indemnisation du préjudice personnel de MmeA... ;

12. Considérant qu'il n'appartient pas à la cour de donner acte à la requérante des réserves qu'elle formule sur les éventuels droits futurs à réparation qu'elle pourrait faire valoir contre le centre hospitalier de Doullens ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, qu'il y a lieu de porter à 67 595 euros la somme que le centre hospitalier de Doullens devra verser à Mme A...correspondant à la réparation de ses préjudices, sous déduction de la provision de 10 000 euros accordée par une ordonnance du 22 avril 2008 du président du tribunal administratif d'Amiens ;

Sur les intérêts :

14. Considérant que Mme A...a droit sur les sommes allouées aux intérêts au taux légal à compter du 20 mai 2008, date de sa demande devant le tribunal ;

Sur les frais d'expertise :

15. Considérant qu'il résulte du jugement du tribunal administratif que les dépens de l'instance d'un montant de 1 323,20 euros ont été mis à la charge du centre hospitalier de Doullens ; que cette somme comprend notamment le règlement des honoraires du professeur Gosset, expert nommé par le tribunal administratif d'Amiens ; que cette demande est dès lors sans objet en appel ;

Sur l'indemnité forfaitaire :

16. Considérant que la CPAM de la Somme peut prétendre au versement de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale pour le montant maximum de 997 euros auquel elle est fixée, à la date du présent arrêt, par l'arrêté interministériel du 29 novembre 2011 susvisé ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant qu'en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Doullens le versement d'une somme de 1 500 euros respectivement à Mme A... et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Somme au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 63 905 euros que le centre hospitalier de Doullens a été condamné à verser à Mme A...est portée à 67 595 euros (soixante sept mille cinq cent quatre vingt quinze euros), sous déduction de la provision de 10 000 euros accordée par l'ordonnance du 22 avril 2008 du président du tribunal administratif d'Amiens. La somme de 67 595 euros portera intérêt au taux légal à compter du 20 mai 2008.

Article 2 : La somme de 74 813,34 euros que le centre hospitalier de Doullens a été condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de la Somme est portée à 108 872,82 euros (cent huit mille huit cent soixante douze euros et quatre vingt deux centimes).

Article 3 : Le centre hospitalier de Doullens versera, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 500 euros respectivement à Mme A...et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Somme.

Article 4 : Le jugement du 15 septembre 2011 du tribunal administratif d'Amiens est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A...et de celles de la caisse primaire d'assurance maladie de la Somme est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A..., au centre hospitalier de Doullens et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Somme.

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N°11DA01790


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 11DA01790
Date de la décision : 21/02/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01-02-01-04 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation. Responsabilité pour faute médicale : actes médicaux. Existence d'une faute médicale de nature à engager la responsabilité du service public. Exécution du traitement ou de l'opération.


Composition du Tribunal
Président : M. Nowak
Rapporteur ?: M. Jean-Jacques Gauthé
Rapporteur public ?: Mme Baes Honoré
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS ADEKWA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2013-02-21;11da01790 ?
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