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31/12/2012 | FRANCE | N°12DA00036

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 31 décembre 2012, 12DA00036


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 9 janvier 2012, présentée pour M. Valéry A, demeurant ..., par Me G. Pollet, avocat ;

M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104238 du 26 juillet 2011 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille en ce qu'il a rejeté ses conclusions à fin d'annulation tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 20 juillet 2011 par lequel le préfet du Nord lui a fait obligation de quitter le territoire, lui a refusé l'octroi d'un délai de départ volon

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 9 janvier 2012, présentée pour M. Valéry A, demeurant ..., par Me G. Pollet, avocat ;

M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104238 du 26 juillet 2011 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille en ce qu'il a rejeté ses conclusions à fin d'annulation tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 20 juillet 2011 par lequel le préfet du Nord lui a fait obligation de quitter le territoire, lui a refusé l'octroi d'un délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi et a ordonné son placement en rétention administrative ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté attaqué ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et d'ordonner le retrait du signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Olivier Yeznikian, président de chambre,

- et les observations de Me G. Pollet, avocat de M. A ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

1. Considérant que M. A ne peut utilement se prévaloir des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 dans la mesure où l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit une obligation particulière de motivation ; que l'arrêté contesté vise les dispositions de l'article L. 511-1 du même code, ainsi que les modalités d'entrée sur le territoire français de l'intéressé ; que si l'arrêté ne fait pas état de la demande d'asile formulée par l'intéressé, ainsi que de son interpellation alors qu'il se rendait en préfecture pour régulariser sa situation, l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre est suffisamment motivée au regard des exigences de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

2. Considérant que la directive 2008/115/CE a été transposée par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 ; que, par suite, M. A ne peut utilement se prévaloir des dispositions de cette directive à l'appui des conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français qui lui a été opposée ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 6° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; / (...) " ;

4. Considérant que M. A a eu un enfant avec une ressortissante française, né le 4 janvier 2010 au Cameroun ; que l'enfant et sa mère se sont installés en France en avril 2010 ; que M. A n'est arrivé en France qu'en novembre 2010 et ne réside pas avec eux depuis lors ; qu'il a reconnu l'enfant le 13 juillet 2011 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et, en tout état de cause notamment des quelques " mandats cash " dont le plus ancien produit remonte à janvier 2011, que l'intéressé contribue à l'entretien et à l'éducation de son fils depuis sa naissance ; qu'ainsi, M. A n'est pas fondé à soutenir que l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5. Considérant qu'à la suite du rejet de sa demande d'entrée sur le territoire au titre de l'asile, M. A s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français ; que le requérant, qui est hébergé chez son oncle, allègue sans l'établir que plusieurs membres de sa famille vivent en France ; que l'intéressé, qui ne vit pas avec la mère de son enfant, n'apporte pas d'éléments de nature à établir qu'il entretient des liens d'une particulière intensité avec son fils ; qu'ainsi, eu égard à l'ensemble des circonstances de l'espèce et, notamment, à la durée et aux conditions de son séjour, la décision l'obligeant à quitter le territoire français n'a pas porté au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel elle a été prise et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

6. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;

7. Considérant qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, compte tenu des choix des parents de l'enfant, ce dernier âgé d'un an et demi à la date de l'arrêté contesté, vit avec sa mère depuis son arrivée en France en 2010 et se trouve, même en France, éloigné de son père qui ne l'a reconnu que le 13 juillet 2011 ; que, dans ces conditions, la décision contestée ne porte pas atteinte à l'intérêt supérieur de son enfant ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est illégale ;

Sur la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire :

10. Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit au point 9, M. A n'est pas fondé à soutenir que la décision lui refusant un délai de départ volontaire serait dépourvue de base légale à raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

11. Considérant qu'aux termes du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour / (...) " ;

12. Considérant que la directive 2008/115/CE a été transposée par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 ; que, par suite, M. A ne peut utilement se prévaloir des dispositions de cette directive à l'appui des conclusions dirigées contre le refus de délai de départ volontaire qui lui a été opposé ;

13. Considérant que, pour prendre la décision contestée, le préfet a entendu se fonder sur les dispositions du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la décision attaquée fait état de l'entrée sur le territoire français de M. A muni d'un passeport ne lui appartenant pas, ainsi que du défaut de régularisation de sa situation depuis son entrée sur le territoire et de l'absence de garanties de représentation suffisantes ; qu'ainsi, la décision portant refus de délai de départ volontaire comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision doit être écarté ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'a pas procédé à un examen complet de la situation personnelle de l'intéressé ;

14. Considérant que M. A n'établit pas être entré régulièrement en France ; que sa demande d'asile formulée lors de son placement en zone d'attente à l'aéroport a été refusée ; qu'il n'a pas poursuivi de démarche afin de régulariser sa situation depuis son arrivée sur le territoire français ; qu'il s'est ainsi maintenu irrégulièrement sur le territoire français ; que, dès lors, le préfet pouvait, sur le fondement du seul a), faire application des dispositions du 3° du II de l'article L. 511-1 précité ;

15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que la décision lui refusant un délai de départ volontaire est illégale ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

16. Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit au point 9, M. A n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi serait dépourvue de base légale à raison de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

17. Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. (...) / L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office. (...) " ;

18. Considérant que le requérant ne peut utilement se prévaloir de la loi du 11 juillet 1979 dans la mesure où les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précitées, telles que modifiées par la loi du 16 juin 2011, prévoient une motivation particulière de l'obligation de quitter le territoire français qui fixe le pays de destination ; que la décision contestée vise les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précitées ; qu'elle est suffisamment motivée en fait, dès lors qu'elle mentionne la nationalité de M. A et indique que l'intéressé n'encourt aucun risque de mauvais traitement en cas de retour dans le pays dont il a la nationalité ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Nord n'a pas procédé à un examen complet de la situation de M. A ;

19. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi est illégale ;

Sur la décision ordonnant le placement en rétention administrative :

20. Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit au point 9, M. A n'est pas fondé à soutenir que la décision ordonnant son placement en rétention administrative serait dépourvue de base légale à raison de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

21. Considérant que le requérant ne peut utilement se prévaloir des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 dans la mesure où l'article L. 551-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit une obligation particulière de motivation ; que la décision contestée vise les articles L. 551-1 et L. 551-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et mentionne l'absence de garanties de représentation effectives propres à prévenir tout risque de fuite de l'intéressé ; qu'ainsi, elle comporte l'énonciation des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, par suite, l'arrêté est suffisamment motivé ;

22. Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : / (...) / 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé ; (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 561-2 du même code : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation. Les trois derniers alinéas de l'article L. 561-1 sont applicables, sous réserve de la durée maximale de l'assignation, qui ne peut excéder une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois " ;

23. Considérant que, par un arrêté en date du 20 juillet 2011, le préfet du Nord a fait obligation à M. A de quitter le territoire français sans délai, soit moins d'un an avant que le préfet ne lui oppose l'arrêté contesté ; qu'ainsi, il entre dans le champ d'application de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant dispose d'une résidence stable ; que s'il est en possession d'un passeport en cours de validité, ce seul élément ne permet pas de le regarder comme présentant des garanties de représentation effectives au sens de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet a pu ordonner le placement en rétention administrative de M. A en application des dispositions de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

24. Considérant que la directive 2008/115/CE a été transposée par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 ; que, par suite, M. A ne peut utilement se prévaloir des dispositions de cette directive à l'appui des conclusions dirigées contre la décision de placement en rétention administrative qui lui a été opposée ;

25. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 26 juillet 2011, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que, par conséquent, les conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Valéry A et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée pour information au préfet du Nord.

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N°12DA00036 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12DA00036
Date de la décision : 31/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Olivier Yeznikian
Rapporteur public ?: M. Moreau
Avocat(s) : POLLET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2012-12-31;12da00036 ?
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