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13/12/2012 | FRANCE | N°12DA01012

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 13 décembre 2012, 12DA01012


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 10 juillet 2012 présentée par le PREFET DE LA SEINE-MARITIME qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201023-1201026 du 14 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Rouen, d'une part, a annulé ses arrêtés en date du 29 février 2012 refusant la délivrance d'un titre de séjour à M. A et à Mme B, son épouse, leur faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, leur faisant interdiction de retour sur le territoire français pendant une

durée de deux ans et fixant le pays à destination duquel ils pourraient...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 10 juillet 2012 présentée par le PREFET DE LA SEINE-MARITIME qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201023-1201026 du 14 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Rouen, d'une part, a annulé ses arrêtés en date du 29 février 2012 refusant la délivrance d'un titre de séjour à M. A et à Mme B, son épouse, leur faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, leur faisant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans et fixant le pays à destination duquel ils pourraient être reconduits d'office, d'autre part, lui a enjoint de délivrer aux intéressés une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " et de verser à leur avocat une somme de 1 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

2°) de rejeter la demande de M. et Mme A ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Corinne Baes Honoré, rapporteur public ;

1. Considérant que le PREFET DE LA SEINE-MARITIME relève appel du jugement du 14 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Rouen a annulé ses arrêtés en date du 29 février 2012 refusant la délivrance d'un titre de séjour à M. A et à Mme B, son épouse, de nationalité géorgienne, leur faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, leur faisant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans et fixant le pays à destination duquel ils pourraient être reconduits d'office et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer aux intéressés une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " ;

2. Considérant que si M et Mme A, qui sont entrés sur le territoire français le 11 juillet 2009, font valoir qu'ils sont engagés depuis le 1er février 2010 dans une procédure de procréation médicalement assistée et ont ouvert un dossier de demande de prise en charge en don de spermatozoïdes le 26 septembre 2011, il ressort des pièces du dossier qu'ils n'ont présenté que le 22 février 2012, soit sept jours seulement avant les arrêtés contestés, au président du tribunal de grande instance de Rouen une demande tendant à recueillir leur consentement d'assistance médicale à la procréation avec tiers donneur ; qu'ainsi, ils ne sauraient être regardés comme étant engagés, à la date de l'arrêté litigieux, dans un processus dont l'interruption porterait une atteinte disproportionnée au respect de leur vie privée et familiale ; que dans ces conditions, et eu égard aux conditions de leur séjour sur le territoire français, le PREFET DE LA SEINE-MARITIME est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que ses arrêtés en date du 29 février 2012 ont méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3. Considérant qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M et Mme A tant devant le tribunal administratif de Rouen que devant elle ;

Sur les décisions de refus de délivrance de titres de séjour :

4. Considérant, en premier lieu, que le préfet n'est tenu de saisir la commission départementale du titre de séjour prévue par l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que du cas des personnes pouvant prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 du même code ; que, dès lors, qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A n'étaient pas dans une telle situation, le préfet n'a pas entaché de vice de procédure les arrêtés contestés en ne consultant pas cette commission ;

5. Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M et Mme A ont adressé par voie postale le 27 janvier 2012 leur demande de séjour en France au titre des articles L. 313-11, 7° et 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en vertu de l'article R. 311-1 de ce code, les époux A étaient tenus de se présenter personnellement à la préfecture ; qu'ils n'établissent pas s'être présentés personnellement à la préfecture ; que leurs demandes étaient dès lors irrecevables ;

Sur les décisions faisant obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant que pour les mêmes motifs retenus au point 1, le PREFET DE LA SEINE-MARITIME n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle de M. et Mme A ;

Sur les décisions d'interdiction de retour sur le territoire français :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) III. L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. (...) Lorsqu'un délai de départ volontaire a été accordé à l'étranger obligé de quitter le territoire français, l'autorité administrative peut prononcer l'interdiction de retour, prenant effet à l'expiration du délai, pour une durée maximale de deux ans à compter de sa notification. (...) L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux ; qu'en particulier, la décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs ; que cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi ;

8. Considérant qu'en se bornant à prendre en compte la situation de M et Mme A et notamment leurs conditions d'entrée sur le territoire, la durée et les conditions de leur séjour ainsi que l'absence de liens personnels et familiaux en France, une telle motivation n'atteste pas de la prise en compte par le PREFET DE LA SEINE-MARITIME, au vu de la situation des intéressés, de l'ensemble des critères prévus par la loi ; que, par suite, M et Mme A sont fondés à demander l'annulation des décisions leur faisant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA SEINE-MARITIME est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé ses arrêtés du 29 février 2012 en tant qu'ils refusent la délivrance d'un titre de séjour à M. A et à Mme B, son épouse, leur font obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixent le pays à destination duquel ils pourraient être reconduits d'office et lui a enjoint de délivrer aux intéressés une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions de M et Mme A à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dès lors que l'État n'est pas la partie perdante à titre principal ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 14 juin 2012 du tribunal administratif de Rouen est annulé en tant, d'une part, qu'il a annulé les arrêtés en date du 29 février 2012 du PREFET DE LA SEINE-MARITIME refusant la délivrance d'un titre de séjour à M. A et à Mme B, son épouse, leur faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel ils pourraient être reconduits d'office et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer aux intéressés une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale ".

Article 2 : Le surplus des conclusions des demandes de M. et Mme A est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Zourabi A, à Mme Rosa A et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au PREFET DE LA SEINE-MARITIME.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12DA01012
Date de la décision : 13/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. Nowak
Rapporteur ?: M. Jean-Jacques Gauthé
Rapporteur public ?: Mme Baes Honoré
Avocat(s) : BIDAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2012-12-13;12da01012 ?
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