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18/10/2012 | FRANCE | N°12DA00476

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 18 octobre 2012, 12DA00476


Vu, I, sous le n° 12DA00476, la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 24 mars 2012 et régularisée par la production de l'original le 27 mars 2012, présentée pour M. Vazo A, demeurant ..., par Me Mary, avocat ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1103183-1103184 du 24 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 juillet 2011 du préfet de la Seine-Maritime refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de

quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant l...

Vu, I, sous le n° 12DA00476, la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 24 mars 2012 et régularisée par la production de l'original le 27 mars 2012, présentée pour M. Vazo A, demeurant ..., par Me Mary, avocat ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1103183-1103184 du 24 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 juillet 2011 du préfet de la Seine-Maritime refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays dont il a la nationalité comme pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office ;

2°) d'annuler cet arrêté du préfet de la Seine-Maritime ;

3°) d'ordonner au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat et au bénéfice de Me Mary la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

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Vu, II, sous le n° 12DA00477, la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 24 mars 2012 et régularisée par la production de l'original le 27 mars 2012, présentée pour Mme Gulizar A, demeurant ..., par Me Mary, avocat ; Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1103183-1103184 du 24 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 juillet 2011 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays dont elle a la nationalité comme pays de destination ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime du 28 juillet 2011 ;

3°) d'ordonner au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat et au bénéfice de Me Mary la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller ;

Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre le même jugement et présentent à juger des questions communes ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statuées par un seul arrêt ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que si les demandes au tribunal administratif de Rouen par M. et Mme A comportaient chacune un sous-titre intitulé " Sur le défaut de motivation ", elles se bornaient toutefois, sous cet intitulé, à exposer un moyen auquel le tribunal a répondu, tiré de la méconnaissance, par les décisions en litige, des dispositions de l'article 24 de la loi susvisée du 12 avril 2000 ; que le moyen tiré du défaut de motivation de ces décisions n'a été soulevé que dans des mémoires enregistrés le 6 janvier 2012, soit postérieurement à la clôture de l'instruction ; qu'il en résulte que les premiers juges n'ont pas commis d'irrégularité en ne répondant pas à ce moyen ;

Sur la légalité des décisions de refus de séjour :

En ce qui concerne la légalité des refus de titres de séjour en qualité de réfugié :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par des décisions du 29 avril 2008 et 27 décembre 2010, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ont rejeté les demandes de M. et Mme A tendant à la reconnaissance de la qualité de réfugié ; qu'il en résulte que le préfet de la Seine-Maritime était tenu de leur refuser la délivrance de la carte de résident prévue par les dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il suit de là que l'ensemble des moyens soulevés contre les décisions du 28 juillet 2011 refusant l'admission au séjour en qualité de réfugié est inopérant ;

En ce qui concerne la légalité des refus de titres de séjour portant la mention " vie privée et familiale " :

Considérant, en premier lieu, que les décisions refusant à M. et Mme A la délivrance de la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " prévue au 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que le préfet de la Seine-Maritime n'était pas tenu de faire état du 1 de l'article 3 de la convention susvisée relative aux droits de l'enfant, laquelle ne constitue pas un fondement de ces décisions ; qu'il en résulte que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de ces décisions doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme A, ressortissants de la République d'Arménie, nés respectivement en 1980 et en 1982, sont entrés en France selon leurs déclarations en septembre 2007, après avoir sollicité, sous d'autres identités, l'asile auprès des autorités allemandes et autrichiennes ; que si deux de leurs quatre enfants sont nés en France, le 15 novembre 2007, les requérants n'établissent aucune impossibilité pour eux de poursuivre leur vie familiale hors de France et notamment en Arménie, où ils se sont mariés et où sont nés leurs deux premiers enfants en 2002 et 2003 ; que si les requérants font valoir leur intégration sociale et professionnelle, leurs liens personnels en France ne peuvent toutefois être regardés comme intenses, anciens et stables alors qu'ils ont vécu dans leur pays d'origine jusqu'à l'âge de 27 et 25 ans et qu'ils ne justifient d'aucune attache familiale, en France ; qu'ainsi, compte tenu de la durée et des conditions du séjour de M. et Mme A en France, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas, en refusant de leur délivrer le titre de séjour demandé, porté au droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ces décisions ont été prises et n'a ainsi méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. et de Mme A ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que les refus de titres de séjour opposés à M. et Mme A n'ont ni pour objet ni pour effet de priver leurs enfants de la présence de l'un ou l'autre de leurs parents ; qu'ils ne font pas davantage obstacle à la poursuite de la scolarisation de ces enfants ; que, par suite, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas méconnu les stipulations précitées de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur la légalité des décisions faisant obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la directive du 16 décembre 2008 susvisée : " Aux fins de la présente directive, on entend par : (...) / 4) " décision de retour " : une décision ou un acte de nature administrative ou judiciaire déclarant illégal le séjour d'un ressortissant d'un pays tiers et imposant ou énonçant une obligation de retour " " ; qu'aux termes de l'article 12 de la même directive : " 1. Les décisions de retour (...) sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles " ; qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; / 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; / 4° Si l'étranger n'a pas demandé le renouvellement de son titre de séjour temporaire et s'est maintenu sur le territoire français à l'expiration de ce titre ; / 5° Si le récépissé de la demande de carte de séjour ou l'autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l'étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé. / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. / L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office " ;

Considérant, d'une part, que l'obligation de quitter le territoire français qui assortit un refus de titre de séjour constitue, avec ce dernier, une décision unique de retour au sens de la directive du 16 décembre 2008 et n'a, par suite, pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle que comporte ce refus ; qu'il suit de là que doit être écarté le moyen tiré d'une incompatibilité des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile selon lesquelles l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour lorsque cette obligation assortit une telle décision ;

Considérant, d'autre part, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les décisions refusant à M. et Mme A la délivrance de titres de séjour sont régulièrement motivées ; qu'il en résulte que le moyen tiré de ce que les décisions en litige n'auraient pas donné lieu à une motivation spécifique et distincte ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en second lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et, notamment des motifs des arrêtés du 28 juillet 2011 en litige que le préfet de la Seine-Maritime se serait estimé tenu de prononcer à l'encontre de M. et Mme A une obligation de quitter le territoire français et qu'il se serait abstenu de procéder à un examen particulier de la situation personnelle et familiale des intéressés ; que dès lors, le moyen tiré de l'erreur qu'aurait commise le préfet de la Seine-Maritime en leur faisant obligation de quitter le territoire français doit être écarté ;

Sur la légalité des décisions fixant le pays de destination :

Considérant, en premier lieu, que les décisions du 28 juillet 2011 susmentionnées visent notamment l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionnent la nationalité, arménienne, de M. et Mme A ; que le préfet de la Seine-Maritime a, au surplus, visé l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et précisé que M. et Mme A n'établissent pas qu'ils ne peuvent être éloignés à destination d'un pays où leur vie et leur liberté seraient menacées ou qu'ils y seraient exposés à des traitements contraires aux stipulations de cet article ; que, dès lors, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de ces décisions doit être écarté ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ;

Considérant qu'en se bornant à alléguer, sans l'établir, appartenir à la communauté Yézide ainsi qu'avoir des " origines " azéries et avoir été contraints de fuir l'Arménie en 2003 en raison de persécutions qu'ils y ont subies, M. et Mme A n'établissent toutefois pas encourir des risques personnels en cas de retour dans leur pays d'origine ; que les décisions en litige n'ont méconnu ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leurs demandes ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. et Mme A sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Vazo A, à Mme Gulizar A et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.

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N°12DA00476


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12DA00476
Date de la décision : 18/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Nowak
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: Mme Baes Honoré
Avocat(s) : SELARL ANTOINE MARY et CAROLINE INQUIMBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2012-10-18;12da00476 ?
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