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10/10/2012 | FRANCE | N°11DA01137

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 10 octobre 2012, 11DA01137


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 15 juillet 2011 et confirmée par la production de l'original le 20 juillet 2011, présentée pour la COMMUNE DE LA NEUVILLE-CHANT-D'OISEL, représentée par son maire en exercice, par la Selarl Eden avocats, avocat ;

La COMMUNE DE LA NEUVILLE-CHANT-D'OISEL demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1000161 du 12 mai 2011 par lequel le tribunal administratif de Rouen a, à la demande de M. et Mme Gustave A, annulé l'arrêté du 23 novembre 2009 par lequel le maire de la C

OMMUNE DE LA NEUVILLE-CHANT-D'OISEL a délivré à la SCI B un permis de const...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 15 juillet 2011 et confirmée par la production de l'original le 20 juillet 2011, présentée pour la COMMUNE DE LA NEUVILLE-CHANT-D'OISEL, représentée par son maire en exercice, par la Selarl Eden avocats, avocat ;

La COMMUNE DE LA NEUVILLE-CHANT-D'OISEL demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1000161 du 12 mai 2011 par lequel le tribunal administratif de Rouen a, à la demande de M. et Mme Gustave A, annulé l'arrêté du 23 novembre 2009 par lequel le maire de la COMMUNE DE LA NEUVILLE-CHANT-D'OISEL a délivré à la SCI B un permis de construire une centrale à béton et un bâtiment de fabrication d'une surface hors d'oeuvre nette de 3 286 m² sur un terrain situé sur la route départementale n° 13 ;

2°) de rejeter la demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge de M. et Mme A une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marie-Odile Le Roux, président-assesseur,

- et les conclusions de M. David Moreau, rapporteur public ;

Considérant que la COMMUNE DE LA NEUVILLE-CHANT-D'OISEL relève appel du jugement du 12 mai 2011 par lequel le tribunal administratif de Rouen a, à la demande de M. et Mme A, annulé l'arrêté du 23 novembre 2009 de son maire délivrant à la SCI B un permis de construire une centrale à béton et un bâtiment de fabrication d'une surface hors d'oeuvre nette de 3 286 m² sur un terrain situé sur une parcelle cadastrée section A 249, sise route départementale n° 13 ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que si la COMMUNE DE LA NEUVILLE-CHANT-D'OISEL n'a pas été associée à l'expertise judiciaire ordonnée par le juge des référés du tribunal de grande instance de Rouen, cette circonstance ne faisait obstacle ni à ce que le rapport d'expertise rendu par l'expert ainsi désigné soit versé au dossier devant le tribunal administratif pour être soumis au débat contradictoire entre les parties, ni à ce que le tribunal administratif puisse fonder sa décision sur les constatations de ce rapport d'expertise tenues pour exactes ; qu'il n'est pas contesté que le rapport d'expertise a été soumis au débat contradictoire entre les parties devant le tribunal administratif de Rouen ; que, dans ces conditions, la COMMUNE DE LA NEUVILLE-CHANT-D'OISEL n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier comme étant fondé sur un rapport d'expertise qui ne lui était pas opposable faute d'avoir été établi contradictoirement ou comme ayant méconnu les stipulations de l'article 6, 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité du permis de construire du 23 novembre 2009 :

Considérant que, pour prononcer l'annulation du permis de construire en date du 23 novembre 2009 par lequel le maire de la COMMUNE DE LA NEUVILLE-CHANT-D'OISEL a autorisé la construction d'une centrale à béton et d'un bâtiment de fabrication relevant de la nomenclature sur les installations classées pour la protection de l'environnement, le tribunal administratif de Rouen, après avoir regardé le permis de construire comme étant fondé sur les dispositions pertinentes des articles 2AU 2.1 et 2AU 2.3 du plan local d'urbanisme, a retenu que l'arrêté ne prévoyait pas les mesures permettant de compenser ou de supprimer les nuisances sonores et visuelles provoquées par l'installation et révélées par le rapport d'expertise ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptibles de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au juge d'appel, saisi d'un jugement par lequel un tribunal administratif a prononcé l'annulation d'un permis de construire en retenant plusieurs moyens, de se prononcer sur le bien-fondé de tous les moyens d'annulation retenus au soutien de leur décision par les premiers juges et d'apprécier si l'un au moins de ces moyens justifie la solution d'annulation ; que, dans ce cas, le juge d'appel n'a pas à examiner les autres moyens de première instance ; que, dans le cas où il estime, en revanche, qu'aucun des moyens retenus par le tribunal administratif n'est fondé, le juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif des autres moyens de première instance, examine ces moyens ; qu'il lui appartient de les écarter si aucun d'entre eux n'est fondé et, à l'inverse, en application des dispositions précitées de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, de se prononcer, si un ou plusieurs d'entre eux lui paraissent fondés, sur l'ensemble de ceux qu'il estime, en l'état du dossier, de nature à confirmer, par d'autres motifs, l'annulation prononcée par les premiers juges ;

Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles 2AU 1 " occupations interdites " et 2AU 2 " occupations et utilisations du sol soumises à conditions spéciales " que, d'une part, sont interdites toutes les occupations et utilisations autres que celles énumérées à l'article 2 et, d'autre part, que les installations classées susceptibles d'être autorisées doivent être regardées comme étant celles visées au 2.3, les opérations mentionnées à l'article 2.2 visé par l'article 1.2 n'ayant pas par nature le caractère d'installations classées pour la protection pour l'environnement ; que les dispositions de l'article 2AU 2.3 concernent : " Les installations classées, à condition que toutes dispositions soient prises pour limiter ou supprimer les dangers ou nuisances liés à leurs activités pour la commodité du voisinage, pour la sécurité, la salubrité publique, pour l'agriculture, la protection de la nature et de l'environnement " ;

Considérant qu'il est constant que le permis de construire attaqué a été délivré pour la construction d'une installation classée pour la protection de l'environnement relevant de la rubrique n° 2522 de la nomenclature ; qu'il ressort également des pièces du dossier que les constructions projetées sont situées dans un secteur environné de terres agricoles et de quelques maisons d'habitation dont celle des époux A ; que la maison de ces derniers est située non à 300 mètres mais au plus à environ 180 mètres de la centrale à béton projetée ; qu'il n'est d'ailleurs pas contesté que, dans ces conditions, l'installation classée concernée, compte tenu de sa nature et du mode d'exploitation, était susceptible de comporter notamment des nuisances pour le voisinage ; que le permis de construire attaqué contient d'ailleurs des prescriptions destinées à compenser ou supprimer ces nuisances ;

Considérant qu'un permis de construire n'a pas d'autre objet que d'autoriser des constructions conformes aux plans et indications fournis par le pétitionnaire ; que la circonstance que ces plans et indications pourraient ne pas être respectés ou que ces constructions risqueraient d'être ultérieurement transformées ou affectées à un usage non-conforme aux documents et aux règles générales d'urbanisme n'est pas par elle-même, sauf le cas d'éléments établissant l'existence d'une fraude à la date de la délivrance du permis, de nature à affecter la légalité de celui-ci ; que la survenance d'une telle situation après la délivrance du permis peut conduire le juge pénal à faire application des dispositions répressives de l'article L. 480-4 du code de l'urbanisme ; qu'en revanche, elle est dépourvue d'incidence sur la légalité du permis de construire, sans qu'il soit besoin pour le juge administratif de rechercher l'existence d'une fraude ;

Considérant que la circonstance que l'exploitant de l'installation classée ne respecte pas les prescriptions prévues au permis de construire ne suffit pas à établir que ces prescriptions étaient par elles-mêmes insuffisantes lorsque l'auteur du permis les a édictées ; que, par suite, les nuisances sonores ou visuelles éprouvées par M. et Mme A en raison de la mise en oeuvre de l'activité de la centrale à béton et du bâtiment de fabrication, telles que notamment constatées par l'expert judiciaire, ne sont pas en elles-mêmes de nature à révéler une méconnaissance des dispositions pertinentes du plan local d'urbanisme ; qu'il en va ainsi notamment des nuisances visuelles provoquées par l'installation de projecteurs provoquant un éblouissement, non conformes à la prescription dont est assorti le permis de construire ;

Considérant, en revanche, qu'il ressort également du rapport de l'expert que les nuisances sonores prévisibles auraient pu être sérieusement atténuées voire supprimées par des prescriptions supplémentaires consistant, d'une part, en la réalisation d'un mur d'une hauteur de quatre mètres entourant la propriété où se situe l'installation notamment dans sa partie Nord et, d'autre part, en un système de fermeture automatique des portes, lesquelles sont d'ailleurs orientées vers les habitations et non exclusivement vers les champs ; que le permis de construire se borne à prévoir un " mur de protection " " le long de la haie, séparant la centrale du voisinage - hauteur 3 mètres " ; que cette protection ne vise que l'habitation qui jouxte à l'Est la centrale à béton ; qu'en revanche, cette protection ne concerne pas l'habitation des époux A, située au Nord, et, qui bien que plus éloignée, est néanmoins, dans le contexte rural, atteinte par les mêmes nuisances ; qu'ainsi, le permis de construire comporte des prescriptions insuffisantes au regard des exigences des dispositions de l'article 2AU 2.3 du plan local d'urbanisme ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que ces insuffisances entachent d'illégalité la totalité du permis de construire accordé ; que, par suite, la COMMUNE DE LA NEUVILLE-CHANT-D'OISEL n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé le permis de construire du 23 novembre 2009 ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de M. et Mme A, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, au titre des frais exposés par la COMMUNE DE LA NEUVILLE-CHANT-D'OISEL ; qu'en revanche, il y a lieu de mettre à la charge de cette dernière le versement à M. et Mme A de la somme de 1 500 euros au titre des frais de même nature ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE LA NEUVILLE-CHANT-D'OISEL est rejetée.

Article 2 : La COMMUNE DE LA NEUVILLE-CHANT-D'OISEL versera à M. et Mme A une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE LA NEUVILLE-CHANT-D'OISEL, à M. et Mme Gustave A et à la SCI B.

Copie sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime et, en application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative, au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Rouen.

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N°11DA01137


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11DA01137
Date de la décision : 10/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-02-02-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Nature de la décision. Octroi du permis. Permis assorti de réserves ou de conditions. Objet des réserves ou conditions. Protection de la salubrité.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: Mme Marie-Odile Le Roux
Rapporteur public ?: M. Moreau
Avocat(s) : SELARL EDEN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2012-10-10;11da01137 ?
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