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02/10/2012 | FRANCE | N°10DA00937

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 02 octobre 2012, 10DA00937


Vu la requête sommaire, enregistrée le 29 juillet 2010 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, et le mémoire complémentaire, enregistré le 6 septembre 2010, présentés pour M. et Mme Abdulaziz A, demeurant ..., par la SELARL Alain Sarrazin, société d'avocats ; M. et Mme A demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802479 du 1er juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au t

itre des années 2003 et 2004 ;

2°) de prononcer la réduction des imposi...

Vu la requête sommaire, enregistrée le 29 juillet 2010 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, et le mémoire complémentaire, enregistré le 6 septembre 2010, présentés pour M. et Mme Abdulaziz A, demeurant ..., par la SELARL Alain Sarrazin, société d'avocats ; M. et Mme A demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802479 du 1er juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2003 et 2004 ;

2°) de prononcer la réduction des impositions contestées ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Patrick Minne, premier conseiller,

- les conclusions de M. Vladan Marjanovic, rapporteur public,

- et les observations de Me Boudin, avocat, pour M. et Mme A ;

Considérant que la SARL Ravalext, qui est une entreprise de ravalement et de maçonnerie créée le 14 février 2002, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période courant de sa création à l'exercice clos au cours de l'année 2004 à l'issue de laquelle des redressements ont été notifiés en matière d'impôt sur les sociétés ; que le foyer fiscal composé de M. et Mme A a fait l'objet d'un examen de situation fiscale personnelle à l'issue duquel, d'une part, Mme A, gérante associée de la société vérifiée, a été regardée comme ayant appréhendé les revenus distribués par cette entreprise et, d'autre part, des crédits bancaires ont été imposés comme revenus d'origine indéterminée ; que, par la présente requête, M. et Mme A font appel du jugement du 1er juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2003 et 2004 ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne les revenus distribués :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1°) Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) " ;

Considérant que la SARL Ravalext a inscrit, en charges d'exploitation des exercices 2002, 2003 et 2004 vérifiés, les montants respectifs de 243 991,07 euros, 205 269,87 euros et 279 325,62 euros correspondant à des dépenses de prestations fournies par des entreprises sous-traitantes ; que si l'administration intimée ne conteste pas que la société a soumis au vérificateur les factures émises par divers fournisseurs correspondant aux dépenses inscrites au compte de charges de sous-traitance générale, ni ne conteste le caractère déductible par nature de ces dépenses de sous-traitance, elle a établi, par les éléments précis recueillis au cours de la vérification de comptabilité, que les chèques émis par l'entreprise, sans ordre, n'ont pas été encaissés par 18 fournisseurs présentés comme entreprises sous-traitantes ; qu'au cours des vérifications de comptabilité des SARL Es-Bat et Crépi 27, présentées comme sous-traitantes, le vérificateur a observé que la SARL Ravalext était inconnue d'elles ; que le service a également recueilli des informations relatives aux entreprises Cevher Ravalement, Tonnerre et Ravalement Inan desquelles il résulte que, ne disposant d'aucun personnel salarié, ces fournisseurs n'étaient pas en mesure de réaliser les prestations de sous-traitance facturées ; qu'au vu de ces indices sérieux et concordants, le vérificateur, qui pouvait nourrir la conviction que les factures enregistrées en comptabilité ne correspondaient pas à des prestations réellement effectuées, était en droit de demander à la SARL Ravalext toute justification utile sur la réalité de ces opérations ; que celle-ci n'a produit aucun devis, contrats, cahiers des charges, documents de réception des travaux, ni aucun compte rendu de chantier, ni aucune correspondance commerciale avec les entreprises sous-traitantes ayant émis les factures en cause ; que si les requérants soutiennent qu'en raison de l'importance limitée des moyens matériels et humains de la société vérifiée, au demeurant reconnue par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires lors de sa séance du 17 janvier 2007, cette entreprise était contrainte de recourir aux services d'entreprises sous-traitantes, cette nécessité alléguée ne justifie pas, à elle-seule, de la réalité des prestations facturées ; que le service démontre que les factures en litige ne correspondent à la fourniture d'aucune prestation réelle dès lors que certaines des entreprises, présentées comme sous-traitantes, ne disposaient, pas plus que l'entreprise distributrice, de moyens humains et matériels pour effectuer les travaux ; que, surtout, les factures encore en litige devant la cour ont donné lieu à des paiements, soit en espèces, soit par des chèques établis sans ordre n'ayant pas été encaissés par les entreprises présentées comme les auteurs des factures ; qu'il n'est pas établi, par les seules affirmations de la SARL Ravalext, que certains de ces encaissements, constatés sur le compte personnel de Mme A, gérante statutaire de cette société, correspondaient à des opérations de compensation entre des dettes contractées par elle à l'égard des entreprises présentées comme sous-traitantes et des créances détenues par ces dernières sur elle ; que, dans ces conditions, l'administration était fondée à remettre en cause les charges de sous-traitance encore en litige que la SARL Ravalext a portées en déduction de ses résultats des exercices 2002 à 2004 ; que les rehaussements de résultats procédant de cette remise en cause présentent la nature de bénéfices ou produits qui, n'étant pas mis en réserve ou incorporés au capital, sont présumés distribués par la société vérifiée, au sens des dispositions précitées de l'article 109 du code général des impôts ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : c) Les rémunérations et avantages occultes ; (...) " ;

Considérant que, par proposition de rectification du 16 décembre 2005, l'administration a mis en demeure la SARL Ravalext de désigner les bénéficiaires des revenus distribués en application de l'article 117 du code général des impôts ; que, par lettre du 20 janvier 2006 d'observations aux redressements, la gérante de la SARL Ravalext a été clairement désignée comme bénéficiaire des règlements effectués par cette société en faveur des bénéficiaires non identifiés de ces paiements ; que, toutefois, le service ne conteste pas que la lettre du 20 janvier 2006, seulement signée du conseil de la société, n'a pas été contresignée par sa gérante ; que cette lettre désignant Mme A comme unique bénéficiaire des distributions en litige ne suffit donc pas à apporter la preuve de l'appréhension par cette dernière des sommes distribuées ; que le ministre invoque cependant le fait, non contesté, que Mme A, gérante et associée détenant la moitié des parts du capital de la SARL Ravalext, était le seul maître de cette société ; que, par suite, l'administration apporte la preuve de l'appréhension, par M. et Mme A, des revenus distribués par la société vérifiée, à raison de l'ensemble des sommes restant en litige ;

Considérant, en troisième lieu, qu'en énonçant que l'administration n'est pas tenue de mettre en oeuvre la procédure prévue à l'article 117 du code général des impôts lorsqu'elle est à même d'assurer et de justifier l'imposition des bénéficiaires des distributions occultes, le paragraphe n° 69 de la documentation administrative n° 4 J-1212 du 1er novembre 1995 n'ajoute pas à la loi ; que le paragraphe n° 70 de cette même documentation, relative aux conditions d'application de la pénalité fiscale visée à l'article 1763 A du code général des impôts ne peut être utilement invoquée par M. et Mme A, à qui l'administration n'a pas infligé cette sanction ; qu'en énonçant enfin que, lorsque la société n'a pas répondu dans le délai de trente jours à la demande de désignation des bénéficiaires de distributions, ou lorsque sa réponse est assimilée à un refus de réponse, elle est passible de la pénalité visée à l'article 1763 A du code général des impôts et que l'administration a toutefois la possibilité d'imposer les bénéficiaires de la distribution, en justifiant que les sommes ont bien été appréhendées par les personnes qu'elle se propose de taxer, les paragraphes nos 109 et 110 de la même documentation n'ajoutent pas à la loi fiscale ; que, par suite, M. et Mme A ne peuvent pas se prévaloir de ces interprétations administratives sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales : " Sous réserve des dispositions particulières au mode de détermination des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux, sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16 " ; qu'aux termes de l'article L. 193 du même livre : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition " ; qu'aux termes, enfin, de l'article R. 193-1 de ce livre : " Dans le cas prévu à l'article L. 193 le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré " ;

Considérant, en premier lieu, que les contribuables, qui ne contestent avoir été régulièrement taxés d'office en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, soutiennent que le montant de 10 000 euros versé en espèces au crédit du compte ouvert à la BNP Paribas le 19 février 2003 correspond à un prêt consenti par Mme B, tante de Mme A ; qu'ils n'établissent toutefois pas l'existence de ce prêt familial en produisant une reconnaissance de dette manuscrite émanant d'eux-mêmes, dépourvue de date certaine, ainsi qu'une attestation manuscrite émanant de Mme C A, établie le 1er août 2006, plusieurs années après la remise des espèces ; que la production des autorisations d'urbanisme et certificats de conformité n'est pas davantage de nature à justifier de ce que ces espèces avaient pour objet le financement de l'acquisition de la maison d'habitation de M. et Mme A ; qu'au surplus, et contrairement à ce que soutiennent les requérants, aucune écriture bancaire ne permet d'établir la réalité d'un emprunt ;

Considérant, en second lieu, que les contribuables soutiennent que le montant de 7 000 euros inscrit le 12 décembre 2003 au crédit de leur compte ouvert à la caisse régionale du Crédit agricole mutuel correspond à un prêt consenti par M. et Mme D, amis proches qui leur ont remis cette somme par chèque bancaire ; que les contribuables n'établissent toutefois pas l'existence de ce prêt, qu'ils présentent, sans le démontrer par la seule production d'un permis de démolir et un certificat de conformité, comme le moyen de financer des travaux urgents sur leur habitation ; que ni la reconnaissance de dette établie par eux-mêmes, ni l'attestation de prêt sans intérêt faite le 2 août 2006 par leur couple d'amis, dépourvues de date certaine, ne sont de nature à établir l'existence du prêt allégué, en l'absence de toute écriture bancaire réciproque de débit et de crédit permettant de déterminer l'origine du flux financier ; que, par suite, M. et Mme A n'apportent pas la preuve, qui leur incombe, de l'origine de la somme totale de 17 000 euros réintégrée dans leurs revenus de l'année 2003 ;

Sur les pénalités :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (...) " ;

Considérant, en premier lieu, qu'en faisant valoir que Mme A, en qualité de gérante de la SARL Ravalext, ne pouvait ignorer que les chèques qu'elle a établis en règlement de factures de sous-traitance ne correspondaient pas à des prestations effectives et qu'elle était bénéficiaire de ces sommes dont certaines ont été encaissées directement sur ses comptes bancaires personnels suivant une pratique répétée sur la période vérifiée, l'administration établit la mauvaise foi des requérants ;

Considérant, en second lieu, qu'en faisant valoir que M. et Mme A n'ont fourni aucune justification sérieuse de l'origine de la somme de 10 000 euros remise en espèces sur un de leurs comptes bancaires et de la somme de 7 000 euros remise par chèque au cours de la même année, l'administration démontre leur intention de soustraire les revenus restant en litige à l'impôt ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande tendant à la réduction des impositions contestées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

Considérant qu'en vertu de ces dispositions, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. et Mme A doivent, dès lors, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Abdulaziz A et au ministre de l'économie et des finances.

Copie sera adressée au directeur chargé de la direction de contrôle fiscal Nord.

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