Vu la requête, enregistrée le 18 mars 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Aïssa A, demeurant ..., par Me Arnoux, avocate ; M. A demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1002418 du 20 janvier 2011 par laquelle le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision, en date du 29 mai 2009, par laquelle le président du conseil régional du Nord/Pas-de-Calais l'a suspendu de ses fonctions et de la décision du 2 juillet 2009 par laquelle le président du conseil régional du Nord/Pas-de-Calais a refusé de le titulariser ;
2°) d'annuler les décisions attaquées ;
3°) de condamner le conseil régional du Nord/Pas-de-Calais à lui verser la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, modifiée ;
Vu le décret n° 92-1194 du 4 novembre 1992 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires stagiaires de la fonction publique territoriale ;
Vu le décret n° 2007-913 du 15 mai 2007 portant statut particulier du cadre d'emplois des adjoints techniques territoriaux des établissements d'enseignement ;
Vu le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 pris pour l'application de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Olivier Gaspon, premier conseiller,
- les conclusions de M. Vladan Marjanovic, rapporteur public,
- et les observations de Me Levasseur, avoué, pour la région Nord/Pas-de-Calais ;
Considérant que M. Aïssa A a été recruté et nommé, en qualité d'agent territorial d'entretien et d'accueil stagiaire des établissements d'enseignement, par un arrêté du président du conseil régional du Nord/Pas-de-Calais en date du 2 août 2006 ; que l'intéressé, affecté successivement au sein de deux lycées, a vu son stage prolongé d'un an par un arrêté du 23 novembre 2007 ; qu'il a ensuite fait l'objet d'une mesure de suspension pour une durée de 4 mois, aux termes d'un arrêté du 29 mai 2009 ; que le président du conseil régional du Nord/Pas-de-Calais a mis fin à ses fonctions par un arrêté du 2 juillet 2009 ; que M. A a saisi le tribunal administratif de Lille afin d'obtenir l'annulation des deux décisions en cause ; qu'il relève appel de l'ordonnance du 20 janvier 2011 par laquelle le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'ordonnance attaquée :
Considérant qu'aux termes de l'article 38 du décret du 19 décembre 1991 susvisé : " Lorsqu'une action en justice doit être intentée avant l'expiration d'un délai devant la juridiction du premier degré, devant le premier président de la cour d'appel en application des articles 149-1 et 149-2 du code de procédure pénale ou devant la Commission nationale de réparation des détentions provisoires, l'action est réputée avoir été intentée dans le délai si la demande d'aide juridictionnelle s'y rapportant est adressée au bureau d'aide juridictionnelle avant l'expiration dudit délai et si la demande en justice est introduite dans un nouveau délai de même durée à compter : a) De la notification de la décision d'admission provisoire ; b) De la notification de la décision constatant la caducité de la demande ; c) De la date à laquelle la décision d'admission ou de rejet de la demande est devenue définitive ; d) Ou, en cas d'admission, de la date, si elle est plus tardive, à laquelle un auxiliaire de justice a été désigné " ;
Considérant que M A a présenté un recours gracieux contre les deux décisions litigieuses, lequel a été rejeté par une décision du président du conseil régional du Nord/Pas-de-Calais en date du 26 août 2009, notifiée le 3 septembre suivant ; que l'intéressé a alors saisi le bureau d'aide juridictionnelle, le 23 septembre 2009, soit dans le délai de recours contentieux ouvert par la notification de la décision du 26 août 2009 ; que le bureau d'aide juridictionnelle a rendu sa décision le 25 février 2010 ; que M. A a, ensuite, saisi le tribunal administratif de Lille le 16 avril 2010, soit dans le délai à nouveau ouvert par la décision du bureau d'aide juridictionnelle intervenue le 25 février 2010 ; qu'il suit de là que le tribunal administratif a jugé à tort que la demande qui lui était présentée était tardive ; que l'ordonnance attaquée du 20 janvier 2011 doit, pour ce motif, être annulée ;
Considérant, toutefois, qu'il y a lieu pour la cour de statuer immédiatement par voie d'évocation sur la demande et les autres conclusions de la requête de M. A ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation des décisions du président du conseil régional du Nord/Pas-de-Calais :
En ce qui concerne l'arrêté du 29 mai 2009 portant suspension de fonction :
Considérant qu'aux termes de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : " En cas de faute grave commise par un fonctionnaire, qu'il s'agisse d'un manquement à ses obligations professionnelles ou d'une infraction de droit commun, l'auteur de cette faute peut être suspendu par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire qui saisit, sans délai le conseil de discipline. Le fonctionnaire suspendu conserve son traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement et les prestations familiales obligatoires. Sa situation doit être définitivement réglée dans le délai de quatre mois. Si, à l'expiration de ce délai, aucune décision n'a été prise par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire, l'intéressé, sauf s'il est l'objet de poursuites pénales, est rétabli dans ses fonctions (...) " ; que la mesure provisoire de suspension prévue par ces dispositions législatives ne présente pas, par elle-même, un caractère disciplinaire ; qu'elle est uniquement destinée à écarter temporairement un agent du service, en attendant qu'il soit statué disciplinairement ou pénalement sur sa situation ; qu'elle peut être légalement prise dès lors que l'administration est en mesure d'articuler à l'encontre de l'intéressé des griefs qui ont un caractère de vraisemblance suffisant et qui permettent de présumer que celui-ci a commis une faute grave ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport établi le 7 avril 2009 par le proviseur du lycée d'affectation de M. A, que ce dernier a été l'auteur de plusieurs altercations, accompagnées de propos injurieux et grossiers, envers ses collègues ; qu'il est, par ailleurs, constant que la mesure de suspension a été prise en réponse aux menaces proférées par l'intéressé à l'encontre d'un collègue ; que, dans ces conditions, les faits reprochés présentaient un caractère de vraisemblance et de gravité de nature à justifier légalement la mesure de suspension attaquée ; que, par suite, M. A, qui a été suspendu de ses fonctions dans l'intérêt du service, n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté prononçant sa suspension devait, à peine d'irrégularité, être précédé d'une procédure disciplinaire ;
En ce qui concerne l'arrêté du 2 juillet 2009 mettant fin aux fonctions de M. A :
Considérant qu'aux termes de l'article 11 du décret du 15 mai 2007 susvisé : " A l'issue du stage, les stagiaires dont les services ont donné satisfaction sont titularisés par décision de l'autorité territoriale investie du pouvoir de nomination au vu notamment d'une attestation de suivi de la formation d'intégration établie par le Centre national de la fonction publique territoriale. Les autres stagiaires peuvent, sur décision de l'autorité territoriale, être autorisés à effectuer un stage complémentaire d'une durée maximale d'un an. Si le stage complémentaire a été jugé satisfaisant, les intéressés sont titularisés (...) " ; qu'aux termes de l'article 5 du décret du 4 novembre 1992 susvisé : " Le fonctionnaire territorial stagiaire peut être licencié pour insuffisance professionnelle lorsqu'il est en stage depuis un temps au moins égal à la moitié de la durée normale du stage. Le licenciement est prononcé après avis de la commission administrative paritaire compétente pour le cadre d'emplois dans lequel l'intéressé a vocation à être titularisé (...) " ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le stage de M. A a été prolongé de 1 an, à compter du 2 septembre 2007, en raison de ses absences au cours de la première année de stage, notamment une absence injustifiée de 12 jours au mois de mai 2007 relevée par le proviseur du lycée dans un rapport du 8 juin 2007 demandant la mutation de l'agent en raison de sa " désobéissance caractérisée " ; qu'après sa mutation dans un autre lycée le 15 juin 2007, l'intéressé a renouvelé, à partir du mois de janvier 2008, ses absences non autorisées et son refus d'exécuter les tâches confiées par sa hiérarchie, ainsi que précisément décrit par le proviseur et la gestionnaire d'établissement dans deux rapports en date des 18 mars 2008 et 7 avril 2009 ; qu'en outre, le comportement de M. A dans ses relations de travail, marqué par de nombreux conflits et altercations avec injures, a conduit le proviseur de son lycée d'affectation à demander le retrait de l'intéressé du service dans un rapport à la région en date du 7 avril 2009 ; que, eu égard à la manière de servir de M. A, la décision prise par le président du conseil régional du Nord/Pas-de-Calais de mettre fin à ses fonctions et de refuser sa titularisation à raison de faits dont l'exactitude matérielle est établie ne peut être regardée comme entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
Considérant qu'en vertu des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. A doivent, dès lors, être rejetées ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions susmentionnées de la région Nord/Pas-de-Calais ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance du 20 janvier 2011 du président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Lille est annulée.
Article 2 : La demande et le surplus des conclusions de la requête de M. A sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de la région Nord/Pas-de-Calais sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Aïssa A et à la région Nord/Pas-de-Calais.
Copie sera adressée au préfet du Nord.
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N°11DA00448