Vu la requête, enregistrée le 31 mars 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la COMMUNE D'OUTREAU, représentée par son maire en exercice, par Me Meillier, avocat ; la commune demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0500616 du 26 janvier 2010, par lequel le Tribunal administratif de Lille l'a condamnée à verser, en réparation du préjudice subi, à la SARL Ramery Travaux Publics, une indemnité de 39 169,32 euros ainsi que les intérêts au taux légal à compter du 16 août 2001, les intérêts étant eux mêmes capitalisés au 16 août 2002 ;
2°) de rejeter la demande présentée par la SARL Ramery Travaux Publics devant le Tribunal administratif de Lille ;
3°) de condamner la SARL Ramery Travaux Publics à lui payer une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le cahier des clauses administratives générales-travaux ;
Vu le décret no 2001-797 du 3 septembre 2001 ;
Vu le code des marchés publics ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Michel Durand, président-assesseur, les conclusions de M. Patrick Minne, rapporteur public et, les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Inguelaere pour la COMMUNE D'OUTREAU et Me Dagostino pour la SARL Ramery Travaux Publics ;
Considérant que, selon acte d'engagement du 11 août 2000, la COMMUNE D'OUTREAU a confié la réalisation du lot n°2 Assainissement du marché communal d'aménagement portant sur une voie publique à la SARL Ramery Travaux Publics ; que la COMMUNE D'OUTREAU relève appel du jugement du Tribunal administratif de Lille, en date du 26 janvier 2010, qui l'a condamnée à indemniser cette société à hauteur de 39 169,32 euros, en réparation des préjudices résultant des sujétions imprévues rencontrées sur ce chantier ;
Sur la fin de non-recevoir soulevée par la COMMUNE D'OUTREAU et tirée de l'irrecevabilité de la demande de première instance de la société Ramery Travaux Publics :
Considérant qu'aux termes de l'article 131 du code des marchés publics dans sa rédaction alors en vigueur : Les personnes publiques et les titulaires de marchés publics peuvent recourir aux comités consultatifs de règlement amiable des différends ou litiges. (...) La saisine du comité suspend, le cas échéant, les délais de recours contentieux jusqu'à la décision prise par la personne responsable du marché après avis du comité (...) ; qu'aux termes de l'article 8 du décret du 3 septembre 2001 susvisé : I. - Le comité notifie son avis dans un délai de six mois à compter de la saisine. Ce délai peut être prolongé par périodes de trois mois, par décision motivée du président. L'avis est notifié à la personne responsable du marché ainsi qu'au titulaire du marché. La date de cette notification fait courir le délai prévu au II. / (...) II. - La décision de la personne responsable du marché est notifiée au titulaire et au secrétaire du comité dans les trois mois suivant la date de notification de l'avis du comité. (...) / A défaut d'une telle décision, l'avis du comité est réputé rejeté. ; qu'aux termes de l'article 13 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicable aux marchés publics de travaux : (...) 13.44 (...) Si la signature du décompte général est refusée ou donnée avec réserves, les motifs de ce refus ou de ces réserves doivent être exposés par l'entrepreneur dans un mémoire de réclamation qui précise le montant des sommes dont il revendique le paiement et qui fournit les justifications nécessaires en reprenant sous peine de forclusion, les réclamations déjà formulées antérieurement et qui n'ont pas fait l'objet d'un règlement définitif ; ce mémoire doit être remis au maître d'oeuvre dans le délai indiqué au premier alinéa du présent article. Le règlement du différend intervient alors suivant les modalités indiquées à l'article 50. (...) ; qu'aux termes de l'article 50 du même CCAG : (...) 50.21. Lorsque l'entrepreneur n'accepte pas la proposition de la personne responsable du marché ou le rejet implicite de sa demande, il doit, sous peine de forclusion, dans un délai de trois mois à compter de la notification de cette proposition ou de l'expiration du délai de deux mois prévu au 12 du présent article, le faire connaître par écrit à la personne responsable du marché (...) 50.22. Si un différend survient directement entre la personne responsable du marché et l'entrepreneur, celui-ci doit adresser un mémoire de réclamation à ladite personne aux fins de transmission au maître de l'ouvrage. 50.23. La décision à prendre sur les différends prévus aux 21 et 22 du présent article appartient au maître de l'ouvrage. / Si l'entrepreneur ne donne pas son accord à la décision ainsi prise, les modalités fixées par cette décision sont appliquées à titre de règlement provisoire du différend, le règlement définitif relevant des procédures décrites ci-après. / (...) / 50.32. Si, dans le délai de six mois à partir de la notification à l'entrepreneur de la décision prise conformément au 23 du présent article sur les réclamations auxquelles a donné lieu le décompte général du marché, l'entrepreneur n'a pas porté ses réclamations devant le tribunal administratif compétent, il est considéré comme ayant accepté ladite décision et toute réclamation est irrecevable. / Toutefois, le délai de six mois est suspendu en cas de saisine du comité consultatif de règlement amiable dans les conditions du 4 du présent article (...) ;
Considérant qu'il est constant que, par une décision du 15 janvier 2002, notifiée le 18 février 2002 à la SARL Ramery Travaux Publics, la COMMUNE D'OUTREAU, maître d'ouvrage, a rejeté le mémoire de réclamation présenté le 29 novembre 2001 par cette société ; que cette dernière a, le 12 avril 2002, saisi le comité consultatif interrégional de règlement amiable des litiges relatifs aux marchés publics de Nancy lequel a, au cours de sa séance du 2 avril 2004, émis un avis qui a été notifié le 18 juin 2004 à la COMMUNE D'OUTREAU ; que celle-ci n'ayant pas pris de décision à la suite de cette notification, l'avis dudit comité doit, en application des dispositions précitées de l'article 8 du décret du 3 septembre 2001, être réputé avoir été rejeté le 18 septembre 2004 ; que la SARL Ramery Travaux Publics a saisi le tribunal administratif, par demande enregistrée le 25 janvier 2005 ;
Considérant, en premier lieu, que si les dispositions de l'article 8 du décret du 3 septembre 2001 prévoient que l'avis du comité interrégional intervient dans un délai de six mois à compter de sa saisine, sauf à ce que ce délai soit prolongé par décision motivée du président du comité pour des périodes de trois mois, il ressort néanmoins des dispositions de l'article 131 précité du code des marchés publics, que la saisine du comité suspend le délai de recours contentieux devant le tribunal administratif, jusqu'à l'intervention de la décision de l'autorité responsable du marché sur la réclamation de l'entreprise ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'absence d'avis émis par le comité interrégional, dans le délai de 6 mois qui lui est imparti, n'a pas pour effet de faire courir les délais de recours à compter de l'expiration de cette période de 6 mois et malgré l'absence de décision expresse du président du comité prolongeant ce délai dans les conditions prévues par l'article 8 du décret du 3 septembre 2001 ; que, par suite, la COMMUNE D'OUTREAU n'est pas fondée à soutenir, qu'en l'absence de décision du président du comité interrégional et malgré la saisine dudit comité le 12 avril 2002, le délai de 6 mois prévu par l'article 50.32 du CCAG Travaux avait commencé de courir le 12 octobre 2002 et qu'il était expiré depuis le 12 avril 2003, à la date d'enregistrement de la demande devant le tribunal administratif, le 25 janvier 2005 ;
Considérant, en second lieu, que le rejet, le 15 février 2002, de la réclamation de la SARL Ramery Travaux Publics accompagnant le décompte général et définitif, a fait courir le délai de recours contentieux prévu par les stipulations de l'article 50.32 du CCAG -Travaux, à compter de la notification de cette décision le 18 février 2002 ; que ce délai a été suspendu, après 1 mois et 23 jours, par la saisine, le 12 avril 2002, du comité consultatif interrégional de règlement amiable des litiges ; que le comité a émis son avis à l'issue de la réunion du 2 avril 2004 et l'a notifié aux parties le 18 juin 2004 ; qu'en l'absence de décision expresse de la COMMUNE D'OUTREAU, il résulte des dispositions de l'article 8 du décret du 3 septembre 2001 précitées, qu'une décision implicite de rejet est intervenue le 18 septembre 2004, trois mois après cette notification ; qu'il résulte également des dispositions dudit article 8, que le délai de recours contentieux a recommencé de courir à compter de cette date ; qu'il restait alors un délai de 4 mois et 7 jours, qui a expiré le 25 janvier 2005 ; que, par suite, la COMMUNE D'OUTREAU n'est pas fondée à soutenir que la demande de la SARL Ramery Travaux Publics n'était pas recevable, à la date d'enregistrement de celle-ci, le 25 janvier 2005 ;
Sur les conclusions indemnitaires :
En ce qui concerne la découverte de branchements d'assainissement en amiante-ciment :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment de l'avis du comité interrégional qui rappelle l'absence de signalement par le donneur d'ordre d'une éventuelle présence d'amiante et des résultats négatifs des sondages effectués, que la présence d'amiante n'était pas prévisible et présentait le caractère d'une sujétion exceptionnelle, justifiant l'indemnisation de l'entreprise en sus du prix forfaitaire prévu au marché ; que si la COMMUNE D'OUTREAU conteste l'indemnisation accordée par les premiers juges au titre des barrières Heras et des barrières base de vie, il résulte de l'instruction que la présence des premières, dotées d'un film polyane, était justifiée par les exigences techniques relatives à la protection contre l'amiante, et que les secondes, qui servaient à matérialiser les zones de stockage, ont dû être maintenues du fait de la prolongation du chantier ; que l'interruption du chantier, du 14 septembre 2000 au 7 novembre 2000, a nécessité le comblement provisoire des tranchées pour permettre aux riverains d'utiliser la chaussée ; qu'il n'est pas sérieusement contesté que la SARL Ramery Travaux Publics s'est efforcée de redéployer le maximum de salariés sur d'autres chantiers, et que l'indemnisation qu'elle a demandée au titre du personnel maintenu sur le chantier est limitée à 30 % des dépenses de personnel correspondant à la période d'arrêt du chantier ci-dessus rappelée ; qu'enfin, la remise en état du chantier, pour laquelle une indemnisation a été accordée, ne correspond pas à la fin du chantier, mais à la reprise des travaux après déblaiement des comblements provisoires ; que, dès lors, la COMMUNE D'OUTREAU n'est pas fondée à soutenir que les travaux et les charges supplémentaires en cause n'étaient pas consécutifs à la présence de branchements en amiante ciment et ne résultaient pas d'une circonstance présentant un caractère imprévisible et exceptionnel ;
En ce qui concerne la présence de roches dures en fond de fouilles :
Considérant que la présence de roches en fond de fouilles, correspondant aux fondations d'une ancienne église, était sans rapport avec la constitution géologique du sol ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment de l'avis du comité interrégional, que cette présence extérieure aux parties, était imprévisible et, par son importance, présentait un caractère exceptionnel ; qu'il ressort des comptes rendus de chantier, produits au dossier, que l'utilisation de la pelle Hyundai de 15 T, associée au traitement des roches dures, fait ressortir une durée de 30 jours au cours de laquelle des roches ont été extraites ; que la COMMUNE D'OUTREAU n'est donc pas fondée à soutenir que les travaux liés à l'extraction des roches auraient été limités à 3 jours ; que, sur la base d'un volume de roches non contesté de 3,23 m³ par jour, les premiers juges ont pu, à bon droit, retenir un volume extrait de 77,52 m³, représentant un surcoût de 12 793,10 euros ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que la COMMUNE D'OUTREAU n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Lille l'a condamnée à indemniser la SARL Ramery Travaux Publics à hauteur de 39 169,32 euros ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la COMMUNE D'OUTREAU doivent, dès lors, être rejetées ;
Considérant qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la COMMUNE D'OUTREAU à payer à la SARL Ramery Travaux Publics une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la COMMUNE D'OUTREAU est rejetée.
Article 2 : La COMMUNE D'OUTREAU versera à la SARL Ramery Travaux Publics une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la SARL Ramery Travaux Publics est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE D'OUTREAU et à la SARL Ramery Travaux Publics.
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N°10DA00389