Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai
le 16 février 2009, présentée pour M. Eric A, demeurant ..., par Me Mebarek ; M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0403050 du 22 décembre 2008 du Tribunal administratif d'Amiens en tant qu'il ne lui a accordé qu'une somme de 2 000 euros en réparation des préjudices nés de son infection par le virus de l'hépatite C ;
2°) de condamner l'Etablissement Français du Sang à lui payer les sommes de 181 608,70 euros au titre du préjudice professionnel à caractère permanent, 30 000 euros au titre du préjudice scolaire ou universitaire ou de formation, 320 000 euros au titre de l'incapacité permanente partielle (IPP), 20 000 euros au titre du pretium doloris, 20 000 euros au titre du préjudice d'agrément et 200 000 euros au titre du préjudice moral ;
3°) de mettre à la charge de l'Etablissement Français du Sang une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 de financement de la sécurité sociale pour 2009 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;
Vu le décret n° 2010-251 du 11 mars 2010 relatif à l'indemnisation des victimes de préjudices résultant de contaminations par le virus d'immunodéficience humaine ou par le virus de l'hépatite C causées par une transfusion de produits sanguins ou une injection de médicaments dérivés du sang ainsi qu'à l'indemnisation des victimes de préjudices résultant de vaccinations obligatoires ;
Vu le décret n° 2010-252 du 11 mars 2010 relatif à la dotation couvrant les dépenses liées à l'indemnisation des victimes de préjudices résultant de contaminations par le virus de l'hépatite C causées par une transfusion de produits sanguins ou une injection de médicaments dérivés du sang ;
Vu l'arrêté du ministre de la santé et des sports du 15 mars 2010 portant nomination au conseil d'orientation de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Guillaume Mulsant, président de chambre, les conclusions de M. Xavier Larue, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;
Considérant que M. A, né en 1972, hémophile, a subi de nombreuses transfusions entre 1973 et 1992, date à laquelle sa contamination par le virus de l'hépatite C a été diagnostiquée ; que, par un jugement du 22 décembre 2008, le Tribunal administratif d'Amiens a condamné l'Etablissement Français du Sang à verser à M. A une somme de 2 000 euros en réparation de son préjudice moral provoqué par sa contamination par le virus de l'hépatite C ; qu'il relève appel de ce jugement en ce qu'il estime insuffisante l'évaluation de son préjudice et demande à ce que la somme soit portée à 771 608,70 euros ;
Sur la personne publique responsable :
Considérant que le paragraphe I de l'article 67 de la loi du 17 décembre 2008 de financement de la sécurité sociale a introduit, dans le code de la santé publique, l'article L. 1221-14 qui confie à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, en lieu et place de l'Etablissement Français du Sang, l'indemnisation des victimes de préjudices résultant de la contamination par le virus de l'hépatite C causée par une transfusion de produits sanguins ou une injection de médicaments dérivés du sang ; que l'article L. 1221-14 institue également, au profit de ces victimes, une procédure de règlement amiable devant l'ONIAM ; que, compte tenu de la nécessité de mettre en place de manière simultanée, conformément à l'intention du législateur, tant la procédure d'indemnisation amiable qu'il a instituée pour les victimes d'une contamination par le virus de l'hépatite C que le conseil d'orientation commun aux trois procédures de règlement amiable dont l'ONIAM a désormais la charge, la date d'entrée en vigueur des dispositions de l'article L. 1221-14 du code de la santé publique et du paragraphe IV de l'article 67 de la loi du 17 décembre 2008 est intervenue à la date d'entrée en vigueur des décrets en Conseil d'Etat d'application des articles L. 1221-14 et L. 3122-1 du code de la santé publique et du décret prévu à l'article L. 1142-23 du même code ; que les décrets susvisés n° 2010-251 et 2010-252 du 11 mars 2010 ont été publiés au journal officiel le 12 mars 2010 ; qu'aux termes de l'article 8 du premier de ces deux décrets : les dispositions du présent décret entrent en vigueur le premier jour du troisième mois suivant la publication de l'arrêté de nomination des membres du conseil d'orientation et au plus tard avant le 1er juillet 2010 ; que les membres du conseil d'orientation de l'ONIAM ont été nommés par arrêté du ministre de la santé et des sports du 15 mars 2010, publié au Journal officiel le 18 mars 2010 ; qu'en vertu de ces diverses dispositions, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales se trouve substitué à l'Etablissement Français du Sang à compter du 1er juin 2010 ; que l'Etablissement Français du Sang doit donc être mis hors de cause ;
Sur les droits à réparation de M. A :
Considérant qu'il n'est pas contesté en appel que la contamination de M. A par le virus par l'hépatite C a pour origine les nombreuses transfusions sanguines dont il a fait l'objet ;
En ce qui concerne les préjudices à caractère personnel :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que M. A ne présente aucun état pathologique en relation avec sa contamination par le virus de l'hépatite C ; que, dans son rapport, l'expert relève qu' il serait important que M. A accepte un suivi thérapeutique avec traitement susceptible ( l'état du foie permet de l'envisager ) comme devant déboucher ( en l'état actuel des connaissances ) sur une guérison ; qu'il indique que l'incapacité totale temporaire et l'incapacité permanente partielle dont celui-ci est affecté n'ont pas pour origine sa contamination par le virus de l'hépatite C, mais résultent exclusivement de l'évolution de l'hémophilie dont il atteint ; que M. A n'est dès lors pas fondé à demander que l'ONIAM soit condamné à l'indemniser des conséquences de son invalidité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède et du rapport d'expertise que l'état de santé de M. A nécessite un suivi médical composé de contrôles et de soins, lesquels sont à l'origine de troubles dans ses conditions d'existence, d'un préjudice moral et d'un pretium doloris que l'expert estime à 2 sur une échelle de 7 ; qu'il sera fait une juste appréciation de l'ensemble de ces préjudices subis par M. A en condamnant l'ONIAM à lui verser une indemnité de 4 000 euros ;
En ce qui concerne les préjudices à caractère patrimonial :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que les préjudices professionnel, scolaire ou de formation dont M. A se prévaut ne sont pas imputables à sa contamination par le virus de l'hépatite C, mais résultent directement de l'hémophilie dont il est atteint, et pour laquelle la Cotorep l'a reconnu invalide à un taux de 80 % ; qu'il n'est dès lors pas fondé à demander la condamnation de l'ONIAM pour la réparation de ces préjudices ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est seulement fondé à demander que la somme mise à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales soit portée à 4 000 euros ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ; que selon les dispositions de l'article 43 de la loi du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique, le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner, dans les conditions prévues à l'article 75 de la même loi, la partie perdante au paiement d'une somme au titre des frais qu'il a exposés ; qu'en l'espèce, en l'absence de frais exposés par M. A, autres que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été accordée par décision du 2 février 2009, il n'y a pas lieu de faire droit à ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de l'Etablissement Français du Sang présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales est substitué à l'Etablissement Français du Sang dans la présente instance.
Article 2 : L'Etablissement Français du Sang est mise hors de cause dans la présente instance.
Article 3 : L'indemnité accordée à M. A est portée à la somme de 4 000 euros.
Article 4 : Le jugement n° 0403050 du 22 décembre 2008 du Tribunal administratif d'Amiens est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. Eric A, à l'Etablissement Français du Sang, à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à la Mutuelle Sociale de la Somme.
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N°09DA00239