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23/09/2010 | FRANCE | N°09DA01344

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 23 septembre 2010, 09DA01344


Vu le recours, enregistré le 9 septembre 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 0701553 du 29 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a prononcé la décharge des cotisations de taxe professionnelle auxquelles l'Association Sportive Beauvais Oise a été assujettie au titre des années 2005 et 2006 dans les rôles de la commune de Beauvais ;

2°) de remettre à la c

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Vu le recours, enregistré le 9 septembre 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 0701553 du 29 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a prononcé la décharge des cotisations de taxe professionnelle auxquelles l'Association Sportive Beauvais Oise a été assujettie au titre des années 2005 et 2006 dans les rôles de la commune de Beauvais ;

2°) de remettre à la charge de l'Association Sportive Beauvais Oise ces cotisations de taxe professionnelle ;

Il soutient que les premiers juges ont commis une erreur au regard des dispositions du 1 bis de l'article 206 du code général des impôts, dès lors que les chiffres d'affaires réalisés par l'association en 2005 et 2006 excèdent 60 000 euros ; que les principes applicables sont ceux dégagés par la jurisprudence Association Jeune France ; que le caractère désintéressé de la gestion de l'association n'est pas contesté ; qu'en revanche, l'association évoluant au niveau national, l'équipe première est amenée à se déplacer sur l'ensemble du territoire national et offre ainsi un spectacle semblable à des prix comparables à celui qui est présenté par des clubs professionnels français dans des conditions d'exploitation semblables à celles du secteur lucratif ; que la jurisprudence dégagée par le Conseil d'Etat avant 1975 en matière d'assujettissement à la patente de clubs sportifs est transposable ; que l'association emploie certains joueurs sous statut juridique dit du contrat fédéral, qui constitue une situation intermédiaire entre le joueur professionnel et le joueur amateur ; que l'association organise de manière habituelle et fréquente des rencontres sportives avec le concours de joueurs recrutés et rétribués à cet effet ; que ces rencontres, annoncées par voie publicitaire, sont destinées à attirer un public nombreux et susceptibles de procurer d'importantes recettes ; que, dès lors, l'activité exercée présente un caractère lucratif ; que la circonstance que d'autres clubs évoluant dans le championnat de France National ne sont pas assujettis à la taxe professionnelle est sans influence ; que l'activité de l'association est assimilable à celle d'un entrepreneur de spectacles sportifs ; que, dès lors que le caractère non lucratif de l'association est écarté, les versements effectués par des entreprises ne peuvent relever du régime du mécénat ; que les recettes perçues des sponsors se rapportent à une activité publicitaire lucrative ; que la réalisation d'opérations commerciales de manière marginale mais habituelle, telle que l'exploitation d'une buvette, doit être regardée comme imposable à la taxe professionnelle dès lors que, même si l'exploitation de cette activité est effectuée dans des conditions différentes de celles du secteur concurrentiel, elle constitue l'accessoire d'une activité lucrative ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré par télécopie le 1er février 2010 et régularisé par la production de l'original le 4 février 2010, présenté pour l'Association Sportive Beauvais Oise, prise en la personne de ses représentants légaux et dont le siège est 171 avenue Marcel Dassault à Beauvais (60000), par Me Boulay, avocat, qui conclut : 1) au rejet du recours du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT ; 2) à la décharge de la cotisation de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2007 ; 3) à la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 2 392 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle fait valoir qu'en ce qui concerne l'année 2007, elle a présenté une réclamation ; qu'il ne pourra qu'être constaté que les activités non lucratives sont significativement prépondérantes ; que le prix de vente des billets n'est pas comparable à ceux proposés par les clubs professionnels mais sont très inférieurs et d'un montant maximum de huit euros ; que les conditions d'exercice de son activité sont très différentes de celles des clubs professionnels ; que les jurisprudences invoquées sont anciennes et concernent la patente et non la taxe professionnelle ; que l'analogie proposée sur leur fondement ne peut être retenue et qu'elles ne concernent que des clubs employant des joueurs professionnels ; que la vente des billets d'entrée ne procure pas à l'association des recettes importantes ; que le statut du joueur fédéral est applicable aux clubs qui ne sont pas autorisés à utiliser des joueurs professionnels et qui participent au championnat National ; que la doctrine administrative citée ne prévoit l'imposition des clubs qu'autant qu'ils font appel à des joueurs professionnels et que l'organisation de rencontres sportives de manière régulière ne peut donc à elle seule entraîner l'imposition à la taxe professionnelle ; que le ministre n'apporte pas la moindre preuve de l'existence de la prétendue publicité dont il fait état ; que, dès lors que l'association a une activité essentiellement non lucrative, les dispositions de l'article 238 bis du code général des impôts relatives au mécénat ont vocation à s'appliquer ; que les recettes tirées des activités lucratives sont effectivement inférieures à 60 000 euros ; que, subsidiairement, la taxe professionnelle ne pouvait être assise sur la valeur locative du stade Brisson, dont l'association n'a ni la maîtrise, ni la libre disposition et qui appartient à la commune de Beauvais ;

Vu les observations, enregistrées le 16 février 2010, présentées par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT, qui conclut aux mêmes fins que son recours, par les mêmes moyens et fait en outre valoir que l'appel incident de l'Association Sportive Beauvais Oise concernant l'année 2007 est irrecevable dès lors que concernant une année différente de celles concernées par l'appel principal ; que, même si l'administration n'est pas à même de produire des éléments démontrant la publicité pratiquée, il est difficilement contestable que l'association annonce la tenue des matches par voie d'affiches et d'annonces publicitaires ; que les documents comptables font apparaître des postes afférents à la publicité ; que l'association ne conteste pas son assujettissement aux autres impôts commerciaux ; que les recettes d'exploitation excèdent 60 000 euros, rien ne permettant d'en exclure les recettes tirées du sponsoring ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 9 avril 2010 et régularisé par la production de l'original le 13 avril 2010, présenté pour l'Association Sportive Beauvais Oise, qui conclut aux mêmes fins que son mémoire en défense ;

Vu les observations, enregistrées le 6 mai 2010, présentées par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT, qui conclut aux mêmes fins que son recours, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984, modifiée, relative à l'organisation des activités physiques et sportives ;

Vu le code du sport ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Antoine Durup de Baleine, premier conseiller, les conclusions de Mme Corinne Baes Honoré, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que l'Association Sportive Beauvais Oise a pour objet statutaire la gestion et l'animation d'activités sportives organisées par la Fédération française de football ainsi que la promotion de la pratique et du développement du football et la participation aux compétitions sportives organisées par cette fédération et la Ligue de football professionnel ; que, par le jugement susvisé, le Tribunal administratif d'Amiens a, à la demande de cette association, prononcé la décharge des cotisations de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie dans les rôles de la commune de Beauvais au titre des années 2005 et 2006 mais rejeté, comme irrecevables, les conclusions tendant à la décharge de la cotisation de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie dans les mêmes rôles au titre de l'année 2007 ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT relève appel de ce jugement en tant que, s'agissant des années 2005 et 2006, il a fait droit à la demande de l'Association Sportive Beauvais Oise ; que, cette dernière conclut au rejet de ce recours et, par la voie de l'appel incident, à ce que soit accueillie sa demande concernant l'année 2007 ;

Sur les conclusions de l'Association Sportive Beauvais Oise concernant l'année 2007 :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le jugement du Tribunal administratif d'Amiens du 29 mai 2009 a été notifié à l'Association Sportive Beauvais Oise le 12 juin 2009 et que cette notification comportait l'indication exacte des voies et délais d'appel ; que les conclusions du recours du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT concernent seulement la taxe professionnelle mise à la charge de cette association au titre des années 2005 et 2006 ; qu'il en résulte que les conclusions d'appel incident présentées par cette dernière, après l'échéance du délai d'appel ouvert par la notification susmentionnée, sont irrecevables, dès lors qu'elles tendent à la décharge de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2007, différente de celles qui font l'objet du recours principal ;

Sur le recours du ministre :

Considérant qu'aux termes de l'article 1447 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : I. La taxe professionnelle est due chaque année par les personnes physiques ou morales qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée (...) ;

Considérant que, pour l'application de ces dispositions, les associations ne sont pas passibles de la taxe professionnelle lorsque, d'une part, leur gestion présente un caractère désintéressé et, d'autre part, que les services qu'elles rendent ne sont pas offerts en concurrence dans la même zone géographique d'attraction avec ceux proposés au même public par des entreprises commerciales exerçant une activité identique ; que, toutefois, même dans le cas où l'association intervient dans un domaine d'activité et un secteur géographique où existent des entreprises commerciales, le non-assujettissement à la taxe professionnelle lui reste acquis si elle exerce son activité dans des conditions différentes de celles des entreprises commerciales, soit en répondant à certains besoins insuffisamment satisfaits par le marché, soit en s'adressant à un public qui ne peut normalement accéder aux services offerts par les entreprises commerciales, notamment en pratiquant des prix inférieurs à ceux du secteur concurrentiel et à tout le moins des tarifs modulés en fonction de la situation des bénéficiaires, sous réserve de ne pas recourir à des méthodes commerciales excédant les besoins de l'information du public sur les services qu'elle offre ;

Considérant, en premier lieu, que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT ne conteste pas le caractère désintéressé de la gestion de l'Association Sportive Beauvais Oise ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'Association Sportive Beauvais Oise assure, notamment, la gestion d'une équipe de football amateur évoluant au niveau du championnat de France National au cours des années 2005 et 2006, laquelle équipe comprend un certain nombre de joueurs recrutés et rétribués par l'association et titulaires d'un contrat dit fédéral, les joueurs titulaires d'un tel contrat ne relevant toutefois pas du statut des footballeurs professionnels ; qu'à ce titre et dans le cadre du déroulement du championnat de France de football National, l'association organise de manière habituelle des rencontres de football, soit à domicile et à raison de dix-neuf fois par an dans le stade Pierre Brisson de Beauvais, qui appartient à la commune de Beauvais, soit chez les compétiteurs de son équipe de niveau National, lesquels compétiteurs sont répartis sur l'ensemble du territoire national ; que ces rencontres lui procurent des recettes tirées, à titre principal, de la vente de billets et, à titre secondaire, de l'exploitation d'une buvette et de la vente de divers articles se rapportant au football ;

Considérant qu'à supposer que les services que rend ainsi l'Association Sportive Beauvais Oise seraient offerts en concurrence dans la même zone géographique d'attraction avec ceux proposés au même public par des entreprises commerciales exerçant une activité identique - ce qui ne résulte toutefois pas de l'instruction -, il en résulte en revanche que cette association pratiquait, au cours des années 2005 et 2006 et pour la vente des billets d'accès au stade susnommé de Beauvais, des tarifs unitaires compris entre 3 et 8 euros ainsi qu'un demi-tarif pour les moins de 16 ans et la gratuité pour les moins de 12 ans ; qu'il n'est pas contesté que de tels tarifs sont très inférieurs à ceux pratiqués par des entreprises commerciales exerçant dans le même secteur d'activité et permettent ainsi l'accès à de telles manifestations à un public constitué de personnes qui ne peuvent normalement, pour des raisons économiques, accéder aux services offerts par ces entreprises ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que les méthodes commerciales pratiquées par l'association excèderaient les besoins de l'information du public sur les services qu'elle offre et ce, eu égard en particulier au montant très modique des dépenses de publicité et sous-traitance publicitaire ressortant des comptes de résultat et états financiers produits au dossier ; que le ministre soutient lui-même que la réalisation d'opérations commerciales telles que l'exploitation d'une buvette est effectuée dans des conditions différentes de celles du secteur concurrentiel ; qu'ainsi, il résulte de l'instruction que l'Association Sportive Beauvais Oise exerce son activité dans des conditions différentes de celles des entreprises commerciales ; qu'elle n'est donc pas passible de la taxe professionnelle ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement qu'il conteste, le Tribunal administratif d'Amiens a prononcé la décharge des cotisations de taxe professionnelle auxquelles l'Association Sportive Beauvais Oise a été assujettie au titre des années 2005 et 2006 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros que demande à ce titre l'Association Sportive Beauvais Oise ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à l'Association Sportive Beauvais Oise la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de l'Association Sportive Beauvais Oise est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT et à l'Association Sportive Beauvais Oise.

Copie sera adressée au directeur de contrôle fiscal Nord.

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N°09DA01344 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09DA01344
Date de la décision : 23/09/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Appeche-Otani
Rapporteur ?: M. Antoine Durup de Baleine
Rapporteur public ?: Mme Baes Honoré
Avocat(s) : BOULAY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-09-23;09da01344 ?
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