Vu la requête, enregistrée le 30 juin 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai par télécopie et régularisée par la production de l'original le 1er juillet 2009, présentée pour la COMMUNE DE LAFRAYE, représentée par son maire en exercice, par la SCP Leprêtre ; la COMMUNE DE LAFRAYE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0701394-0701426 du 21 avril 2009 du Tribunal administratif d'Amiens en tant qu'il a annulé, à la demande de la SCI Breuil de Paris, la délibération du 12 mars 2007 de son conseil municipal approuvant le plan d'urbanisme en tant qu'il classe en zone 2AUh une partie de la parcelle cadastrée section B n° 723 située rue des Lilas ;
2°) de rejeter la demande présentée par la SCI Breuil de Paris ;
3°) de mettre à la charge de la SCI Breuil de Paris la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que la demande présentée devant le Tribunal était irrecevable dans la mesure où la SCI Breuil de Paris ne justifie ni de son intérêt à agir, ni de la qualité à agir de son représentant ; que les premiers juges n'ont pas répondu à ces fins de non-recevoir soulevées en première instance ; que la partie de la parcelle en cause devait être exclue des zones urbaines à bâtir dans l'immédiat ; qu'en effet, la zone de 2,3 ha entre la rue des Lilas et la route de Vélennes est destinée à être ouverte à l'urbanisation en fonction des constructions réalisées dans la zone 1 AU, du rythme d'évolution de la population communale et du renforcement des réseaux ; que cette ouverture est subordonnée à la réalisation d'une nouvelle voie routière faute que la rue des Lilas, ainsi que le souligne le rapport de présentation, soit en mesure d'absorber le flux supplémentaire de véhicules qui pourrait résulter d'une telle opération d'aménagement, laquelle implique un schéma d'ensemble ; que cet aménagement nécessite une concertation entre la collectivité publique et le porteur du projet ; que l'ensemble des réseaux ont une capacité insuffisante dans ce secteur, le réseau d'alimentation en eau étant perfectible du fait de son faible débit à l'extrémité, le borne incendie ayant un débit manifestement insuffisant de 36 mètres cubes par heure et le réseau électrique devant être renforcé suite à des chutes de tension ; que la présence de constructions alentour est sans incidence, ce critère ne s'appliquant qu'à propos du classement non justifié en zone naturelle ou agricole ; que le classement est ainsi conforme à l'article R. 123-6 du code de l'urbanisme ; que l'annulation prononcée est de nature à préjudicier au développement futur et à l'urbanisation cohérente de la commune tel que notamment exposé dans le rapport de présentation afin de préserver les plus belles perspectives de développement du village ; que la partie de la parcelle n° 723 donnant sur la rue des Lilas n'est pas apparue immédiatement constructible compte tenu de sa configuration au regard de la largeur du terrain situé dans la bande des 30 mètres où les constructions doivent être réalisées selon le règlement du plan local d'urbanisme ; qu'il a donc été choisi d'envisager son désenclavement en l'intégrant à la zone 2AU et non dans la zone 1UA pour la partie donnant directement sur la rue ; que cette parcelle présente une importance capitale dans le développement futur de la commune pour assurer son urbanisation cohérente ; que l'accès à la parcelle se limite à un seul accès de 8 mètres de large sur une longueur imposant dans ces conditions une construction dite en deuxième rideau interdite par l'article UA6 du règlement ; que les classements en zone U au plan correspondent toujours à des parcelles entières ; que si la parcelle en cause peut accueillir deux à trois terrains à bâtir, un seul de ces terrains pourrait être directement desservi depuis la voie publique dans la bande constructible de 30 mètres ; qu'en jurisprudence, l'erreur manifeste d'appréciation résulte très fréquemment d'une discrimination à l'intérieur d'une zone homogène ce qui n'est pas le cas ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 octobre 2009, présenté pour la SCI Breuil de Paris, dont le siège est 38 rue principale à Lafraye (60510), représentée par son gérant en exercice, par la SCP Bourhis et Associés, qui conclut, à titre principal, au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à l'annulation de la délibération du conseil municipal de Lafraye son conseil municipal du 12 mars 2007 ainsi qu'à la mise à la charge de la commune de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle fait valoir que sa requête est recevable dès lors qu'elle a intérêt à agir en sa qualité de propriétaires des parcelles litigieuses et qu'elle est régulièrement représentée par son gérant selon les articles 2 et 14 de ses statuts et 1848 du code civil ; que les premiers juges ont répondu aux fins de non-recevoir ; que la délibération est irrégulière compte tenu de l'incertitude de la date de son adoption ; qu'il existe une incertitude totale sur les conditions dans lesquelles la délibération a été adoptée ; qu'en effet, tous les conseillers municipaux n'ont pas été convoqués à leur domicile ; que la commune se borne à affirmer que les délais de convocation ont été respectés ; que l'on ignore si les jours, heures et lieu de la séance ont été mentionnés sur les convocations ; que l'on ignore également si une note explicative de synthèse a été jointe aux convocations ; que celles-ci ne sont en effet pas produites au débat sans que les attestations pré-remplies par la commune pour les besoins de la procédure ne puissent les remplacer ; que la charge de la preuve incombe à la commune contrairement à ce qu'a estimé le Tribunal ; qu'il n'est pas justifié qu'un secrétaire de séance ait été désigné ; que le plan du dossier soumis à enquête publique est erroné en ce qu'il ne comporte pas toutes les voies et les constructions édifiées ce qui vicie la procédure ; que le classement de la parcelle n° 723 était manifestement erroné puisqu'elle devait être classée en zone U dès lors que des habitations existent sur plusieurs parcelles qui l'entourent et que, contrairement à ce qu'a indiqué la commissaire enquêteur, elle est située en bordure de la rue des Lilas qui est l'une des rues principales ; que si la commune soutient que le classement est destiné à éviter le bâti le long des voies et rompre avec l'organisation traditionnelle du village et son insertion dans le site, la parcelle est située à une centaine de mètres de l'église et de la mairie et il s'agit en réalité de combler un espace vide ; que la perturbation de l'exploitation des terres agricoles avancée n'est pas avérée dès lors qu'aucune terre n'est enclavée et qu'au surplus les agriculteurs peuvent accéder aux champs situés derrière ses parcelles par la route de Vélennes ; que les deux autres secteurs ouverts immédiatement à l'urbanisation sont plus éloignés du centre, étirent le bâti vers l'extérieur et comportent des parcelles propriété du maire ou de sa famille (315 et 136) ; que la commune entend régler ses comptes avec son gérant qui s'est présenté sur la liste adverse lors des dernières élections municipales ; que les motifs nouveaux allégués de création de nouveaux maillages routiers ou de réalisation de bouclages en raison de problèmes d'usage ne sont appuyés sur aucun projet précis proche ; qu'il n'a pas été tenu compte des observations du commissaire enquêteur et le conseil n'a même pas pris la peine d'examiner ses observations, la commune ne conteste pas sérieusement que la parcelle 723 est largement desservie par les réseaux ;
Vu la lettre en date du 31 mai 2010 par laquelle la Cour, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative a informé les parties que son arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office ;
Vu les mémoires, enregistrés les 9 juin 2010 par télécopie et confirmé par la production de l'original le 10 juin 2010 et le 21 juin 2010, présentés pour la SCI du Breuil, qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens et soutient, en outre, en réponse au moyen relevé d'office, que la partie de la parcelle dont le classement a été annulé était divisible du reste de la zone ;
Vu le mémoire, enregistré le 24 juin 2010 par télécopie et régularisé par la production de l'original le 28 juin 2010, présenté pour la COMMUNE DE LAFRAYE qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens et soutient, en outre, en réponse au moyen relevé d'office, que la partie de la parcelle dont le classement a été annulé n'était pas divisible du reste de la zone ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Hubert Delesalle, premier conseiller, les conclusions de M. Jacques Lepers, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;
Considérant que la COMMUNE DE LAFRAYE relève appel du jugement du 21 avril 2009 du Tribunal administratif d'Amiens en tant qu'il a annulé, à la demande de la SCI Breuil de Paris, la délibération de son conseil municipal, qui doit être regardée comme étant datée du 12 avril et non du 6 avril 2007, approuvant le plan local d'urbanisme en tant qu'il classe en zone 2AUh une partie de la parcelle cadastrée section B n° 723 située rue des Lilas ;
Sur les fins de non-recevoir opposées par la COMMUNE DE LAFRAYE en première instance :
Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que la SCI Breuil de Paris est propriétaire de parcelles situées sur le territoire de la COMMUNE DE LAFRAYE ; qu'elle justifiait, à ce titre, d'un intérêt à agir contre la délibération par laquelle ladite commune a approuvé son plan local d'urbanisme ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 1849 du code civil : Dans les rapports avec les tiers, le gérant engage la société par les actes entrant dans l'objet social (...) ; qu'en vertu de ces dispositions, reprises à l'article 14 des statuts de la SCI Breuil de Paris, le gérant de cette société, dont l'objet tel que fixé à l'article 2 de ces statuts est notamment la mise en valeur de terrains en particulier par l'édification de constructions, la SCI Breuil de Paris tient de ses fonctions le droit d'agir en justice ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les fins de non-recevoir opposées par la COMMUNE DE LAFRAYE, et auxquelles les premiers juges ont répondu, doivent être écartées ;
Sur la légalité du classement d'une partie de la parcelle cadastrée section B n° 723 :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 123-6 du code de l'urbanisme : Les zones à urbaniser sont dites zones AU. Peuvent être classés en zone à urbaniser les secteurs à caractère naturel de la commune destinés à être ouverts à l'urbanisation. / Lorsque les voies publiques et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone, les orientations d'aménagement et le règlement définissent les conditions d'aménagement et d'équipement de la zone. Les constructions y sont autorisées soit lors de la réalisation d'une opération d'aménagement d'ensemble, soit au fur et à mesure de la réalisation des équipements internes à la zone prévus par les orientations d'aménagement et le règlement. / Lorsque les voies publiques et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU n'ont pas une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone, son ouverture à l'urbanisation peut être subordonnée à une modification ou à une révision du plan local d'urbanisme ;
Considérant qu'il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer la partie d'aménagement à retenir en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction ; qu'ils ne sont pas liés pour déterminer l'affectation future des divers secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme et qu'ils ne sont pas tenus, pour fixer le zonage, de respecter les limites des propriétés ; que cependant, leur appréciation peut être censurée par le juge administratif au cas où elle serait fondée sur des faits matériellement inexacts ou entachée d'une erreur de droit, d'une erreur manifeste ou d'un détournement de pouvoir ;
Considérant que la parcelle cadastrée section B n° 723, située au sud de la rue des Lilas, est classée, par le plan local d'urbanisme approuvé par la délibération attaquée, en zone 2AUh, dont l'ouverture à l'urbanisation est subordonnée à une modification de ce plan ; qu'il ressort des pièces du dossier que le front de rue de cette parcelle est enclavé entre des terrains classés quant à eux en zone UA, correspondant, selon les termes du règlement et du rapport de présentation, au vieux village de Lafraye (rue principale, rue de l'Eglise, rue des Lilas) , largement urbanisé ; qu'il est desservi par la voirie et les réseaux, à l'exception du réseau d'assainissement inexistant sur l'ensemble du territoire de la commune, sans que l'insuffisance de ces derniers au regard des besoins d'une construction ne ressorte des pièces du dossier ; que si la commune fait valoir que la construction d'une habitation sur la parcelle en cause priverait la future opération d'aménagement d'ensemble d'un accès automobile, il ressort toutefois du rapport de présentation du plan local d'urbanisme que la rue des Lilas sur laquelle donnerait cet accès serait, en revanche, impropre, compte tenu de l'importance d'un tel projet, à assurer une telle desserte ; que dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont pu estimer que le plan local d'urbanisme de la COMMUNE DE LAFRAYE était entaché d'erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il incluait dans la zone 2AUh le front de rue de la parcelle n° 723 compris comme s'étendant jusqu'au niveau de la limite sud de la parcelle voisine n° 722 et l'ont annulé dans celle seule mesure ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE LAFRAYE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé, dans cette mesure, la délibération de son conseil municipal du 12 mars 2007 approuvant le plan local d'urbanisme ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions susmentionnées font obstacle à ce que la somme de 4 000 euros demandée par la COMMUNE DE LAFRAYE soit mise à la charge de la SCI Breuil de Paris, qui n'est pas, dans la présente affaire, la partie perdante ; qu'il y a lieu en revanche, en application des mêmes dispositions, de mettre à la charge de la COMMUNE DE LAFRAYE une somme de 1 500 euros qui sera versée à la SCI Breuil de Paris au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la COMMUNE DE LAFRAYE est rejetée.
Article 2 : La COMMUNE DE LAFRAYE versera à la SCI Breuil de Paris une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE LAFRAYE et à la SCI Breuil de Paris.
Copie sera transmise au préfet de l'Oise.
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N°09DA00962