Vu la requête, enregistrée le 7 août 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société à responsabilité limitée KIDZY 02, dont le siège est 1 avenue Saint Pierre à Wambrechies (59118), par Me Soulier ; la société KIDZY 02 demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nos 0600420, 0604419, 0604619, 0604637, 0701066 et 0700744 du 10 mai 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes tendant, d'une part, au remboursement de crédits de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période d'avril 2005 à septembre 2005 puis de la période de janvier 2006 à mars 2006 et, d'autre part, à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période de septembre 2003 à septembre 2005 ;
2°) d'ordonner les remboursement et décharge demandés ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que c'est à tort que le tribunal a déclaré irrecevables ses demandes comme faisant double emploi ; que les droits d'entrée acquittés par les clients de son parc sont soumis au taux réduit en application des articles 279-b nonies du code général des impôts, qui n'excluent pas les lieux couverts, dès lors que le parc en litige constitue bien un parc à décors animés illustrant un thème culturel ; que le taux réduit est également applicable en vertu de l'article
279-b bis du code général des impôts dès lors que les installations répondent à la définition de jeux et manèges forains ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 décembre 2007, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ; il conclut au rejet de la requête, par les mêmes moyens ; il soutient que les demandes enregistrées sous les nos 06-4419 et 06-420 par le greffe du tribunal administratif font double emploi en ce qu'elles concernaient les mêmes impositions ; qu'en ayant limité le champ d'application du taux réduit aux parcs de jeux, le législateur a entendu le réserver à des structures d'une taille importante, ce qui n'est pas le cas de l'enceinte en litige ; que le simple fait d'utiliser la figurine Kidzy ne confère pas la qualité de parc à thème culturel ; que le seul fait de faire des couleurs vives le signe distinctif ne permet pas de conclure à l'illustration d'un thème culturel ; que les installations de jeux, qui ne sont pas mues par un moteur ou qui sont en réalité fixes même si elles sont en principe démontables, ne sont pas des manèges forains au sens du b) bis de l'article 279 du code général des impôts ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré par télécopie le 6 mars 2008 et régularisé par la production de l'original le 7 mars 2008, présenté pour la société KIDZY 02 ; elle conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ; elle soutient en outre que ses installations constituent des jeux et manèges forains au sens de la doctrine administrative ; que la loi française, en ce qu'elle prévoit un taux de taxe différent de celui pratiqué par d'autres Etats de l'Union européenne, méconnaît le principe de la neutralité qui caractérise cet impôt ;
Vu le mémoire, enregistré le 2 avril 2008, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ; il conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures, par les mêmes moyens ; il soutient en outre que la doctrine invoquée est inopérante ; que l'atteinte au principe de neutralité n'est pas établie ;
Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 4 avril 2008 et régularisé par la production de l'original le même jour, présenté pour la société KIDZY 02 ; elle conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la sixième directive n° 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - système commun de TVA ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 avril 2008 à laquelle siégeaient M. Antoine Mendras, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur et M. Patrick Minne, premier conseiller :
- le rapport de M. Patrick Minne, premier conseiller ;
- les observations de Me Soulier, pour la société KIDZY 02 ;
- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité des demandes présentées au tribunal administratif :
Considérant, en premier lieu, que si la demande enregistrée au Tribunal administratif de Lille le 13 juillet 2006 sous le n° 0604419 tendait, comme la demande enregistrée le 16 janvier 2006 sous le n° 0600420, à obtenir le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 4 000 euros au titre de la période couvrant le 3e trimestre 2005, cette circonstance n'a pas eu pour objet ou pour effet de rendre irrecevable, comme privée d'objet, la requête introductive d'instance n° 0604419, enregistrée postérieurement à la requête n° 0600420 ; que, par suite, en déclarant la requête n° 0604419 irrecevable comme dépourvue d'objet en ce qu'elle visait les mêmes impositions, alors que cette requête avait été précédée d'une décision de l'administration fiscale statuant sur une réclamation préalable distincte susceptible d'être fondée sur des moyens différents, le tribunal a entaché son jugement d'irrégularité ;
Considérant, en second lieu, que, comme le soutient la société KIDZY 02 et l'admet l'administration, les demandes enregistrées au Tribunal administratif de Lille les 30 janvier et 13 février 2007 respectivement sous les nos 0701066 et 0700744 tendaient seulement à obtenir la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre, respectivement, de la période de septembre 2003 à juin 2005 et de la période de juillet 2005 à septembre 2005 ; que ces instances relatives à des impositions supplémentaires sont distinctes des instances n° 0600420 et n° 0604619 dont le tribunal était saisi par ailleurs et qui avaient pour seul objet d'obtenir le remboursement de crédits de taxe sur la valeur ajoutée ; que si les premiers juges pouvaient joindre ces instances qui présentaient à juger des mêmes questions qui concernaient un même contribuable, ils ne pouvaient en revanche déclarer partiellement irrecevables les conclusions des demandes enregistrées sous les nos 0700744 et 0701066 qui avaient un objet différent de celui des affaires nos 0600420 et 0604619 ; que le jugement attaqué doit donc être annulé en tant qu'il a déclaré partiellement irrecevables les requêtes introductives d'instance nos 0700744 et 0701066 présentées devant lui ;
Considérant qu'il y a lieu, dans la mesure de ce qui précède, d'évoquer et de statuer sur les conclusions des demandes enregistrées au Tribunal administratif de Lille sous les
nos 0604419, 0700744 et 0701066 ; qu'il appartient à la Cour d'examiner, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, les autres conclusions et moyens de la société KIDZY 02 ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant qu'aux termes de l'article 279 du code général des impôts : « La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit de 5,50 % en ce qui concerne : (...) b bis. Les spectacles suivants : (...) Jeux et manèges forains à l'exception des appareils automatiques autres que ceux qui sont assimilés à des loteries foraines en application de l'article 7 de la loi du 21 mai 1836 portant prohibition des loteries ; (...) b nonies. Les droits d'entrée perçus pour la visite des parcs à décors animés qui illustrent un thème culturel et pour la pratique des activités directement liées à ce thème. Les attractions, manèges, spectacles, loteries, jeux et divertissements sportifs présentés à titre accessoire dans ces parcs demeurent soumis au taux qui leur est propre. Il en est de même des recettes procurées par la vente d'articles divers et des ventes à consommer sur place. Lorsqu'un prix forfaitaire et global donne l'accès à l'ensemble des manifestations organisées, l'exploitant doit faire apparaître dans sa comptabilité une ventilation des recettes correspondant à chaque taux. La détermination de l'assiette de l'impôt s'effectue sur une base réelle ; (...) » ;
Considérant que la société KIDZY 02, qui exploite à Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais) une structure de jeux pour enfants dans un bâtiment aménagé à l'intérieur duquel elle organise aussi d'autres activités, telles que des expositions sur le thème de la couleur, revendique le bénéfice du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée prévu par les dispositions précitées de l'article 279 du code général des impôts ;
Considérant, en premier lieu, que l'application du taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée est réservée aux parcs d'attraction récréatifs, qui, tout en satisfaisant à l'exigence du divertissement, facilitent la diffusion de la culture populaire en proposant au public, à côté d'activités foraines traditionnelles, des activités particulières par la présentation de décors animés organisés autour d'un thème culturel ; qu'à le supposer culturel, le thème de la couleur autour duquel sont organisés les activités et jeux proposés n'est en l'espèce illustré que par l'utilisation de décors génériques faisant appel aux couleurs primaires et par la mascotte du renard « Kidzy » qui n'est issu d'aucune oeuvre culturelle ou artistique ; que la seule circonstance qu'un animateur déguisé en « Kidzy » se manifeste toutes les heures n'est pas de nature à regarder la structure en litige comme assortie de décors animés ; que la société, qui se borne en réalité à proposer dans un bâtiment unique des jeux pour enfants, sans faciliter la diffusion de la culture populaire autour d'un thème culturel, n'est pas fondée à demander le bénéfice du taux réduit, prévu par les dispositions précitées du b nonies de l'article 279 du code général des impôts, pour les droits d'entrée qu'elle perçoit ;
Considérant, en second lieu, que la sixième directive n° 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977 invoquée par la contribuable ne fait pas obstacle à ce que les Etats membres fassent une application sélective du taux réduit et soumettent un même produit ou une même prestation de services à des taux différents de taxe sur la valeur ajoutée dès lors que cette distinction ne porte pas atteinte au principe de la neutralité du système commun de taxe sur la valeur ajoutée et n'est, compte tenu du caractère spécifique des marchés sur lesquels ces produits ou services sont proposés, pas de nature à entraîner un risque de distorsion de concurrence ; qu'il résulte de l'instruction que les jeux pour enfants exploités par la société KIDZY 02 dans des locaux fermés présentent des caractéristiques, notamment en termes d'offres de services et de durée de visite, nettement différentes des prestations offertes à la clientèle des parcs à décors animés illustrant un thème culturel visés à l'article 279-b nonies du code général des impôts ; que compte tenu de ce que le marché sur lequel elle opère est ainsi distinct de celui sur lequel interviennent ces parcs, la société KIDZY 02 n'est pas fondée à soutenir que l'application des dispositions de cet article aurait pour effet de fausser la concurrence entre des agents économiques effectuant des mêmes opérations ; que si elle soutient également que la France est le seul Etat de l'Union européenne à pratiquer une telle dualité de taux, alors que de nombreux autres Etats membres ont adopté des taux réduits pour les jeux récréatifs, elle ne justifie pas, en se bornant à faire référence aux objectifs d'harmonisation et de rapprochement des taux énoncés dans les considérants introductifs de la 6ème directive, de ce que la loi nationale instaure une discrimination injustifiée entre opérateurs économiques et porte atteinte au principe de neutralité du système commun de la taxe sur la valeur ajoutée ;
Considérant, en dernier lieu, que si les installations de jeux proposées aux enfants par la société requérante sont susceptibles d'être démontées, elles n'en consistent pas moins en une vaste structure tubulaire comprenant un parcours composé de formes en mousse, toboggans, piscine à balles et ponts suspendus ; que ces installations fixées dans le bâtiment sans être aisément démontables et déplaçables sur un autre site, ne peuvent être regardées comme des jeux et manèges forains au sens des dispositions précitées du b bis de l'article 279 du code général des impôts ; que la société requérante ne peut se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la documentation administrative n° 3 C-2253 à jour au 30 mars 2001 qui se borne à énumérer différents cas de jeux forains, manèges, structures gonflables et circuits de véhicules relevant du taux réduit dans lesquels la contribuable n'entre pas ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande de décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été réclamés à la société KIDZY 02 au titre de la période de septembre 2003 à septembre 2005 présentée au Tribunal administratif de Lille doit être rejetée ; que la société KIDZY 02 n'est, pour le surplus, pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille, qui a justement analysé les faits soumis à son appréciation, a rejeté sa demande tendant au remboursement des crédits de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période d'avril 2005 à septembre 2005 puis de la période de janvier 2006 à mars 2006 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la société KIDZY 02 la somme qu'elle a demandée en première instance et qu'elle demande en instance d'appel au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 10 mai 2007 du Tribunal administratif de Lille est annulé en tant qu'il a déclaré irrecevable la demande n° 0604419 et partiellement irrecevables les demandes nos 0700744 et 0701066 présentées devant lui.
Article 2 : La demande de décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée réclamés au titre de la période de septembre 2003 à septembre 2005 présentée au Tribunal administratif de Lille par la société à responsabilité limitée KIDZY 02 et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée KIDZY 02 et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.
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N°07DA01267