Vu la requête, enregistrée le 28 novembre 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Jean-Pierre X, demeurant ..., par la SCP Lefranc, Bavencoffe, Meillier ; M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0402060, 0404121 du 27 septembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 février 2004 du maire de Camiers intitulé « Chasse interdite sur le site de la station d'épuration », ainsi que sa demande tendant à la condamnation de la commune de Camiers à lui verser une somme de
15 000 euros au titre du préjudice résultant de la limitation du droit de chasse prononcée par les arrêtés du 22 octobre 2003 et du 11 février 2004 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 11 février 2004 ;
3°) de condamner la commune de Camiers à lui verser une somme de 30 000 euros au titre du préjudice résultant de la limitation du droit de chasse ;
4°) de condamner la commune de Camiers à lui verser une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que le maire de Camiers, en interdisant tout acte de chasse sur le site et dans un rayon de 150 mètres, a excédé les pouvoirs qu'il détient et a édicté une mesure disproportionnée par rapport aux buts recherchés ; que le périmètre de 150 mètres autour des bâtiments de la station d'épuration s'étend au-delà de la propriété du syndicat, et interdit aux riverains de pénétrer sur leur propre propriété ; qu'aucun incident ou accident ne s'est produit depuis 1985 ; que les dispositions de l'acte de vente du 19 septembre 1985 lui conservaient « le bénéfice du droit de chasse sur la totalité de l'immeuble faisant l'objet de la présente vente » ; que l'atteinte portée à sa possibilité de chasser sur l'emprise de la station d'épuration et sur une partie des terrains dont le groupement forestier des quatre vents est propriétaire lui cause un préjudice ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 avril 2007, présenté pour la commune de Camiers, par Me Caffier ; elle conclut au rejet de la requête et à ce que M. X soit condamné à lui verser la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient, à titre principal, que la requête est irrecevable faute d'intérêt pour agir de M. X ; que l'atteinte portée à la possibilité de chasser sur l'emprise de la station d'épuration et sur une partie des terrains dont le groupement forestier des quatre vents est propriétaire ne constitue pas un préjudice grave, anormal et spécial ;
Vu l'ordonnance en date du 16 mai 2007 portant clôture d'instruction au 18 juin 2007 ;
Vu les nouveaux mémoires, enregistrés les 12 et 18 juin 2007, présentés pour M. X ; il reprend les conclusions de son mémoire initial par les mêmes moyens ; il soutient en outre qu'il avait un intérêt à demander l'annulation de l'arrêté attaqué et qu'il justifie d'un préjudice au titre de la limitation de son droit de chasse ;
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 25 juin 2007 par télécopie et régularisé par la production de l'original le 27 juin 2007, présenté pour la commune de Camiers ; elle reprend les conclusions de son mémoire initial par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juillet 2007 à laquelle siégeaient Mme Christiane Tricot, président de chambre, M. Olivier Yeznikian, président-assesseur et
M. Alain Stéphan, premier conseiller :
- le rapport de M. Alain Stéphan, premier conseiller ;
- les observations de Me Meillier, pour M. X et de Me Caffier, pour la commune de Camiers ;
- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, le 19 septembre 1985, M. X a vendu une partie de parcelle au syndicat intercommunal d'assainissement de Dannes-Camiers, sur laquelle le syndicat a édifié une station de lagunage ; que M. X est resté titulaire d'un droit de chasse sur cette parcelle en application de l'acte de vente ; que des travaux importants ont été réalisés sur la station entre 2001 et le 31 janvier 2004, pour la transformer en station d'épuration ; que, toutefois, par un arrêté du 22 octobre 2003, le maire de Camiers a interdit la pratique de la chasse sur le site de la station d'épuration pendant la durée des travaux et sur rayon de 150 mètres ; que par un nouvel arrêté du
11 février 2004, le maire a réitéré son interdiction, en ajoutant, à son article 3, que : « Il est rappelé qu'il est interdit à toute personne étrangère au service de pénétrer dans la zone ainsi définie autour de la station d'épuration » ;
Considérant que M. X fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 février 2004, ainsi que celle tendant à l'indemnisation du préjudice résultant de la limitation du droit de chasse résultant des arrêtés du 22 octobre 2003 et du 11 février 2004 ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 février 2004 :
Considérant qu'en sa qualité de membre du groupement forestier des quatre vents, dont les terres entourent entièrement le site de la station d'épuration et sont affectées par les interdictions prononcées par l'arrêté attaqué, M. X avait un intérêt lui donnant qualité pour agir contre ledit arrêté ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 2212-1 du code général des collectivités territoriales : « Le maire est chargé, sous le contrôle administratif du représentant de l'Etat dans le département, de la police municipale, de la police rurale et de l'exécution des actes de l'Etat qui y sont relatifs » et qu'aux termes de l'article L. 2212-2 du même code : « La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques (…) » ;
Considérant qu'eu égard à la nécessité d'assurer la sécurité des personnels intervenant journellement sur ce site et de protéger ces installations techniques en raison de leur coût élevé et de l'existence de quatre bassins d'une superficie de 3 000 m² chacun, de lits sablés et de lagunes, et eu égard à la circonstance que plus de 90 hectares restent accessibles à la pratique de la chasse, le maire de Camiers, en interdisant tout acte de chasse sur le site et dans un rayon de 150 mètres, n'a pas, nonobstant l'absence de tout incident ou accident depuis 1985, excédé les pouvoirs qu'il détient ni édicté une mesure disproportionnée par rapport aux buts recherchés ; que M. X ne saurait utilement se prévaloir, à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation, des dispositions de l'acte de vente du 19 septembre 1985 lui conservant « le bénéfice du droit de chasse sur la totalité de l'immeuble faisant l'objet de la présente vente » ;
Considérant toutefois qu'ainsi qu'il a été dit, l'arrêté du 11 février 2004 interdit, à son article 3, à toute personne étrangère au service de pénétrer dans le périmètre de 150 mètres autour des bâtiments de la station d'épuration ; que ce périmètre s'étend au-delà de la propriété du syndicat, et qu'ainsi les prescriptions de cet article conduisent à interdire aux riverains de pénétrer sur leur propre propriété ; qu'en prenant une telle mesure, qui affecte des propriétés privées de manière permanente, sans justifier de sa nécessité, le maire a excédé les pouvoirs de police qu'il détenait en application des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales ; que, dans cette mesure ledit arrêté doit être annulé ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 11 février 2004 intitulé « Chasse interdite sur le site de la station d'épuration », en ce que, par cet arrêté, le maire de Camiers a interdit à toute personne étrangère au service de pénétrer dans les propriétés privées se situant dans un périmètre de 150 mètres autour des bâtiments de la station d'épuration de Dannes-Camiers ; qu'en revanche, il n'était pas fondé à demander l'annulation des autres prescriptions du même arrêté ; qu'ainsi, dans cette mesure, il est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande d'annulation ;
Sur les conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice résultant de l'interdiction de chasse :
Considérant que M. X demande réparation du préjudice au seul titre de la limitation de son droit de chasse, résultant des arrêtés des 22 octobre 2003 et 11 février 2004 ;
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, l'arrêté du 11 février 2004 est entaché d'une illégalité relative à l'interdiction de pénétrer sur une propriété privée mais d'aucune illégalité relative à la limitation du droit de chasse ; que M. X n'invoque aucune illégalité de l'arrêté du 22 octobre 2003 distincte de celles dont il se prévaut pour demander l'annulation de l'arrêté du 11 février 2004 ; qu'ainsi l'illégalité dont est entaché l'arrêté du 11 février 2004 ne saurait être la cause du préjudice relatif à la limitation du droit de chasse dont se prévaut M. X ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les terrains appartenant à M. X ne sont pas concernés par l'interdiction litigieuse ; que l'atteinte portée à sa possibilité de chasser sur l'emprise de la station d'épuration et sur une partie des terrains dont le groupement forestier des quatre vents est propriétaire, par son caractère limité, ne constitue pas un préjudice grave et spécial de nature à engager la responsabilité sans faute de l'administration ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Camiers à lui verser une somme de 15 000 euros au titre du préjudice résultant de la limitation du droit de chasse prononcée par les arrêtés du
22 octobre 2003 et du 11 février 2004 ; que doivent également être rejetées, pour les mêmes motifs, et en tout état de cause, ses conclusions présentées en appel tendant à la condamnation de la commune de Camiers à lui verser une somme de 30 000 euros au titre dudit préjudice ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Camiers, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à ce titre ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner
M. X à verser à la commune de Camiers une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'article 3 de l'arrêté du maire de Camiers du 11 février 2004 intitulé « Chasse interdite sur le site de la station d'épuration » est annulé en tant que, par cet article, le maire de Camiers a interdit à toute personne étrangère au service de pénétrer dans les propriétés privées se situant dans un périmètre de 150 mètres autour des bâtiments de la station d'épuration de
Dannes-Camiers.
Article 2 : Le surplus des conclusions de M. X est rejeté.
Article 3 : Le jugement n° 0402060, 0404121 du 27 septembre 2006 est annulé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Les conclusions de M. X présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : M. X est condamné à verser à la commune de Camiers la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Pierre X et à la commune de Camiers.
Copie sera transmise au préfet du Pas-de-Calais.
2
N°06DA01560