Vu la requête, enregistrée le 13 mars 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société CONSTRUCTIONS DASSE, dont le siège social est rue Cante Cigale à Castets (40260), représentée par son représentant légal, par Me Declety ; la société demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0201828 en date du 15 décembre 2005 du Tribunal administratif d'Amiens qui a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Troussencourt à lui verser la somme de 44 168,65 euros toutes taxes comprises, augmentée des intérêts de retard ;
2°) de faire droit à sa demande de première instance ;
3°) de condamner la commune de Troussencourt à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que la commune n'ayant pas respecté le délai prévu par l'article 13.42 du cahier des clauses administratives générales, doit être regardée comme ayant accepté le projet de décompte final remis par la société exposante ; que, par suite, les pénalités de retard qui auraient dû être notifiées à la société, soit au cours de l'exécution des travaux, soit par le biais du décompte général du marché ne l'ont jamais été régulièrement ; que l'application de pénalités par la commune est irrégulière et irrecevable ; que lesdites pénalités n'ont pas été notifiées dans le cadre de l'établissement du décompte général et définitif du marché ; qu'au cours de l'exécution du marché, aucune pénalité de retard n'a été notifiée ni par le maître d'ouvrage, ni par le maître d'oeuvre ; que le projet de pénalités, établi le 5 juillet 2000, n'a jamais été notifié à la société ; qu'aucune mise en demeure n'a été adressée par la commune à la société ; que devant le tribunal administratif, la commune ne reprenait pas la somme de 10 737,35 francs toutes taxes comprises correspondant à de prétendues réfactions opérées sur la situation de travaux n° 4 ; que c'est donc à tort que le Tribunal n'a pas condamné la commune à verser à la société cette somme ; que, s'agissant des pénalités de retard, la commune n'a pas justifié avoir appliqué ces pénalités en cours d'exécution des travaux et les avoir imputées sur les situations de travaux n° 2 et 4 ; que la commune n'apporte pas davantage la preuve que les quatre-vingt treize jours de retard appliqués lui auraient causé un préjudice ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 26 février 2007 et régularisé par la production de l'original le 28 février 2007, présenté pour la commune de Troussencourt, par le cabinet Goutal et Alibert, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la société CONSTRUCTIONS DASSE à lui verser la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que le silence gardé par la commune sur le projet de décompte final ne peut valoir acceptation tacite et ne peut donc conférer à ce document le caractère d'un décompte général et définitif ; que s'agissant des pénalités de retard, aucune mise en demeure préalable n'est exigée ; qu'il n'est pas davantage utile d'établir la réalité d'un préjudice pour pouvoir les infliger à l'entrepreneur ; que le montant des pénalités de retard appliqué est pleinement justifié ; que s'agissant de la réfaction appliquée sur le solde du marché, il est constant que les réserves affectant l'exécution de l'ouvrage n'ont pas fait l'objet des reprises nécessaires ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 avril 2007, à laquelle siégeaient Mme Christiane Tricot, président de chambre, M. Olivier Yeznikian, président-assesseur et
Mme Agnès Eliot, premier conseiller :
- le rapport de Mme Agnès Eliot, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la société CONSTRUCTIONS DASSE a passé avec la commune de Troussencourt un marché correspondant à la réalisation du lot n° 1 « bâtiment industrialisé » dans le cadre de la construction d'une école maternelle ; que l'entrepreneur fait appel du jugement du Tribunal administratif d'Amiens qui a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Troussencourt à lui verser une indemnité de 44 168,65 euros, correspondant, d'une part, au montant de 42 533,28 euros de pénalités de retard que lui a infligées le maître d'ouvrage, d'autre part, à la réfaction de 1 635,37 euros appliquée pour défaut de reprises des réserves ;
Sur les pénalités de retard :
Considérant qu'il ressort de l'instruction que les pénalités infligées par la commune de Troussencourt à la société CONSTRUCTIONS DASSE se rapportent à un retard d'exécution de quatre-vingt treize jours constaté entre le 5 avril et le 7 juillet 2000 ;
Considérant, d'une part, qu'en vertu des articles 13.3 et 13.4 du cahier des clauses administratives générales, approuvé par le décret du 21 janvier 1976, et applicable au marché en litige, il appartient à l'entrepreneur, après l'achèvement des travaux, de dresser un projet de décompte final établissant le montant total des sommes auxquelles il peut prétendre et notifié au maître d'oeuvre ; qu'il revient ensuite au maître de l'ouvrage d'établir, à partir de ce projet de décompte final et des autres documents financiers du marché, un décompte général et de le notifier à l'entrepreneur ; qu'au cas où celui-ci n'a pas renvoyé ce décompte dans les quarante cinq jours, en exposant le cas échéant les motifs de son refus ou de ses réserves, ce décompte général est réputé accepté par lui et devient le décompte général et définitif du marché ; qu'aucune disposition du cahier des clauses administratives générales ne prévoit que le silence gardé par le maître de l'ouvrage sur le projet de décompte final établi par l'entrepreneur vaudrait acceptation tacite de ce projet de décompte qui ne pourrait, dès lors, plus être contesté par le maître de l'ouvrage ; que, par suite, c'est à bon droit que le Tribunal administratif d'Amiens a jugé, que, nonobstant l'absence de réponse du maître d'ouvrage au décompte final envoyé par la société CONSTRUCTIONS DASSE, la commune de Troussencourt pouvait infliger des pénalités de retard non prévues dans le projet de décompte précité ;
Considérant, d'autre part, qu'en se référant expressément aux dispositions des articles 4.3 du cahier des clauses administratives particulières et 20.1 du cahier des clauses administratives générales, applicables au marché en cause par l'article 2 du cahier des clauses administratives particulières, les parties ont exprimé leur volonté de rendre les pénalités applicables par la seule échéance du terme ; que par ailleurs, aucune disposition du cahier des clauses administratives générales ne prévoit avant leur application une notification des pénalités à l'entrepreneur ; que, par suite, la circonstance selon laquelle ni les situations de travaux n° 2 et 4 portant application de pénalités, ni la lettre du 5 juillet 2000 adressée par le maître d'oeuvre à la commune concernant les pénalités à appliquer à la société n'ont été notifiées à l'entrepreneur n'est de nature à rendre irrégulières les pénalités contestées dès lors que la réalité du retard d'exécution et le montant des pénalités sont établis par les pièces du dossier ;
Considérant, enfin, que les stipulations contractuelles relatives aux pénalités de retard sont, en raison de leur caractère propre, applicables sans que la partie qui en réclame le bénéfice ait à justifier d'un préjudice ; que, par suite, la société CONSTRUCTIONS DASSE ne peut utilement soutenir que la commune de Troussencourt n'apporte pas la preuve que les quatre-vingt treize jours de retard lui auraient causé un préjudice ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société CONSTRUCTIONS DASSE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à obtenir la restitution des sommes mises à sa charge au titre des pénalités de retard ;
Sur les réfactions appliquées à la rémunération contractuelle :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du document annexé au procès-verbal de réception en date du 20 juillet 2000 ainsi que des courriers échangés par le maître d'ouvrage et la société titulaire du marché en date des 20 septembre et 31 octobre 2001, que les travaux réalisés par la société CONSTRUCTIONS DASSE ont fait l'objet de réserves de la part du maître de l'ouvrage en raison de l'exécution incomplète desdits travaux ; que la société ne justifie en appel, pas plus qu'en première instance, qu'elle aurait procédé aux reprises nécessaires à la levée desdites réserves ; que, par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal a rejeté sa demande tendant à la restitution des réfactions appliquées à son encontre par la commune ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Troussencourt, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à la société CONSTRUCTIONS DASSE la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner la société CONSTRUCTIONS DASSE à verser à la commune de Troussencourt une somme de 1 500 euros ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société CONSTRUCTIONS DASSE est rejetée.
Article 2 : La société CONSTRUCTIONS DASSE versera à la commune de Troussencourt la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3: Le présent arrêt sera notifié à la société CONSTRUCTIONS DASSE et à la commune de Troussencourt.
Copie sera transmise au préfet de l'Oise.
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N°06DA00381