Vu la requête, enregistrée le 13 février 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société anonyme IRIDIS NORD, dont le siège est 92/98 boulevard Victor Hugo, Bâtiment A3 à Clichy (92115), représentée par son président-directeur général en exercice, par Me Quentin ; la société IRIDIS NORD demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nos 0305778-0305779 en date du 15 décembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la restitution de la somme de
89 847 euros correspondant à la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a acquittée à tort au titre de la période couvrant l'année 2000 ;
2°) de prononcer la restitution demandée ;
Elle soutient qu'en vertu de l'article 13-A-1 de la 6ème directive du 17 mai 1977, qui prévoit un principe d'exonération autonome par rapport au droit national, elle peut bénéficier de l'exonération des opérations étroitement liées à l'hospitalisation et aux soins médicaux dès lors que les prestations de radiothérapie qu'elle assure s'inscrivent dans le processus de traitement des malades du cancer ; qu'elle dispose en effet de toutes les autorisations sanitaires nécessaires à l'acquisition des appareils et justifie de la nature des opérations de radiothérapie, de sorte que son activité se réduit aux soins à la personne ; que la circonstance que les redevances versées par les praticiens au centre de radiothérapie en contrepartie de la mise à leur disposition du matériel médical soient intégrées dans le tarif de la consultation remboursée par la sécurité sociale ne s'oppose pas à l'exonération de ces redevances dès lors que, si ces forfaits techniques étaient payés directement par la sécurité sociale, elles seraient exonérées, ainsi qu'on le constate dans les centres de radiologie-scanner ; que l'administration n'est pas fondée à lui opposer l'article 283-3 du code général des impôts qui présume redevable de la taxe toute personne qui la mentionne sur facture dès lors que les praticiens qui acquittent les redevances ne peuvent déduire la taxe sur la valeur ajoutée ; que la doctrine administrative, exprimée dans la réponse ministérielle à M. Francou, sénateur, du 1er juin 1979, n'est pas équitable en ce qu'elle subordonne la justification de la taxe irrégulièrement mentionnée sur les factures à l'envoi de factures rectificatives ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 juin 2006, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; il conclut au rejet de la requête ; il soutient que les redevances présentant au cas d'espèce la contrepartie de prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel, elles sont imposables par nature ; qu'aucun texte n'exonère ces redevances pour clinique ouverte ; que la circonstance que le tarif des soins remboursés inclut le coût de l'utilisation des installations techniques est sans incidence sur le caractère distinct de la prestation rendue aux praticiens par la société requérante ; qu'aucun lien direct n'est établi entre les honoraires versés directement par les patients ou remboursés par les caisses de sécurité sociale, d'une part, et les prestations de mise à disposition des installations techniques par le centre de radiothérapie, d'autre part ; que le droit communautaire, à savoir la 6ème directive TVA ajoutée interprétée par la Cour de justice des communautés européennes, ne s'oppose pas à cette qualification fondée sur l'existence d'une prestation rendue et facturée par le centre de radiothérapie, distincte de celle réglée par le patient ou supportée par la sécurité sociale ; que la mise en oeuvre de l'article 283-3 du code général des impôts n'est pas subordonnée au fait que la taxe soit déductible par le destinataire de la facture qui mentionne, fut-ce à tort, la taxe ; qu'aucune facture rectificative n'ayant été émise, la contribuable ne peut se prévaloir de la doctrine qu'elle invoque ;
Vu le mémoire, enregistré le 27 juillet 2006, présenté pour la société IRIDIS NORD ; elle conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ; elle soutient, en outre, que la Cour de justice des communautés européennes ne prend pas en compte le critère de la prise en charge directe des frais par le patient ;
Vu le mémoire, enregistré le 24 janvier 2007, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; il conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures, par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la sixième directive n° 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977 ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mars 2007 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant,
président-assesseur et M. Patrick Minne, premier conseiller :
- le rapport de M. Patrick Minne, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts : « I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. (…) » ; qu'aux termes de l'article 261 du code général des impôts : « Sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : (…) 4. (…) 1° bis Les frais d'hospitalisation et de traitement, y compris les frais de mise à disposition d'une chambre individuelle, dans les établissements de santé (…) » ; qu'aux termes de l'article 13 de la sixième directive n° 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977 : « A. Exonérations en faveur de certaines activités d'intérêt général. 1. Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les Etats membres exonèrent, dans les conditions qu'ils fixent en vue d'assurer l'application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels : (…) b) l'hospitalisation et les soins médicaux, ainsi que les opérations qui leur sont étroitement liées (…) » ; que l'exonération de l'hospitalisation, des soins médicaux et des opérations qui leur sont étroitement liées prévue par les dispositions précitées de l'article 13 de la sixième directive du 17 mai 1977 a été instituée, dans un but d'intérêt général, pour permettre un accès des patients aux soins hospitaliers ; que les dispositions précitées de l'article 261 du code général des impôts, prises pour la transposition de cette directive, s'appliquent aux frais d'hospitalisation et de traitement supportés par les patients ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, dans deux centres qu'elle exploite à Croix et à Dunkerque, la société IRIDIS NORD met à disposition de praticiens spécialisés dans le traitement de tumeurs cancéreuses par radiothérapie, des appareils de radiothérapie ainsi qu'une assistance en personnel médical qualifié ; qu'en contrepartie de la mise à disposition par la contribuable de ces moyens techniques et en personnel, les praticiens s'acquittent d'une redevance calculée sur la base des honoraires payés par les patients ; que les honoraires acquittés par les patients, qui rémunèrent non seulement les actes de soin accomplis par les praticiens mais également le coût de la mise à disposition à ces médecins des locaux, matériels et personnels, sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée ;
Considérant que la mise à disposition des moyens techniques et en personnel aux praticiens ne présente pas, en soi, la nature d'une hospitalisation ou de soins médicaux, ni celle d'une opération étroitement liée à l'acte de soin au sens de la sixième directive dès lors que seul l'usage, dans l'exercice de son art par le médecin, des moyens techniques ainsi mis à disposition fait l'objet d'un prix acquitté par le patient ; que la fourniture des moyens techniques à titre onéreux présente le caractère d'une opération taxable par nature au sens du I de l'article 256 du code général des impôts ; que les dispositions de l'article R. 162-33 du code de la sécurité sociale relatif à la composition des tarifs d'hospitalisation invoquées par la contribuable sont sans incidence sur le bien-fondé de l'imposition au regard de la loi fiscale, seule applicable ; qu'ainsi qu'elle l'indique elle-même, la société IRIDIS NORD se trouve placée dans une situation différente des centres de radiologie-scanner dont le prix des forfaits techniques, directement acquitté par le patient, est exonéré ;
Considérant, au surplus, que l'administration s'est opposée à la demande de remboursement présentée par la société requérante au motif qu'en application du 3 de l'article 283 du code général des impôts, la taxe facturée est due ; que la circonstance que la taxe ainsi facturée n'a pu faire l'objet d'une déduction par les destinataires des factures est sans incidence sur le caractère exigible de la taxe du seul fait de sa facturation ; que la société requérante ne peut utilement se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la réponse ministérielle à M. Francou, sénateur, du 1er juin 1979, dès lors qu'elle n'a pas fait l'objet d'un rehaussement et qu'elle n'a pas appliqué l'interprétation administrative contenue dans cette réponse ministérielle ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société IRIDIS NORD n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société anonyme IRIDIS NORD est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme IRIDIS NORD et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.
N°06DA00210 2