Vu la requête, enregistrée par télécopie le 27 juin 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE dont le siège est 69 rue de la Louvière à Lille (59042), par Me Jean-Michel de Forges ; la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE demande à la Cour :
11) d'annuler le jugement n° 0203754, en date du 11 avril 2006, par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Agence régionale de l'hospitalisation de la région Nord-Pas-de-Calais à lui verser la somme de 222 758,50 euros en réparation du préjudice subi du fait de la modification de la prise en charge financière des séances de chimiothérapie ambulatoire, somme majorée des intérêts de droit à compter du 1er mai 2001 et à sa condamnation à lui verser la somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de prononcer ladite condamnation au principal ;
3°) de mettre à la charge de l'Agence régionale de l'hospitalisation de la région Nord-Pas-de-Calais la somme de 15 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que l'accord national intervenu le 4 avril 2001 avait un caractère réglementaire ; que, dans ces conditions, le Tribunal administratif de Lille a commis une erreur de droit en ne procédant pas à cette qualification ; que l'accord régional du 12 avril 2001 qui doit être analysé comme un acte réglementaire du directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation, aurait dû être écarté par le Tribunal car, d'une part, il est contraire à l'accord national dans la mesure où il viole le principe de neutralité financière et, d'autre part, ne prévoit aucune modulation des tarifs contrairement aux dispositions de l'article L. 162-22-3 du code de la sécurité sociale ; que, contrairement à ce qu'a retenu le Tribunal qui a commis une erreur de droit en l'écartant, la fiche technique n° 1 constituait une directive opposable à l'administration et avait un caractère impératif ; que le principe d'égalité a été méconnu dans la mesure où le principe de neutralité financière n'ayant pas été respecté, certains établissements ont été gagnants par rapport à d'autres ; que l'agence régionale de l'hospitalisation a engagé sa responsabilité en violant le texte et l'esprit de l'accord du 4 avril 2001 en majorant son tarif de médecine d'une somme forfaitaire de 178 francs et non du montant de la perte financière réellement subie par la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE du fait de la suppression de la marge sur les médicaments utilisés en chimiothérapie ; qu'ainsi le refus de revalorisation tarifaire découle d'une erreur de droit commise par l'Agence ; qu'elle est pourtant tenue d'appliquer les engagements conventionnels de l'Etat dans les contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens qu'elle conclut avec les établissements de santé de sa région ; qu'à titre subsidiaire, elle a engagé sa responsabilité sans faute sur le fondement de la rupture d'égalité devant les charges publiques, à supposer que son refus ne soit pas fautif ; que la décision prise lui cause un préjudice certain, anormal et spécial ; que les justifications fournies à l'appui de sa demande indemnitaire pour justifier de son préjudice n'ont fait l'objet d'aucune contestation ; que s'agissant des frais irrépétibles, il est tout à fait anormal que la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE ait dû faire procéder elle-même aux calculs permettant de justifier sa demande et de multiplier les démarches jusqu'en à en venir au prétoire ; qu'il serait donc inéquitable de laisser à sa charge les frais correspondant à ces calculs, à ces démarches et à la présente procédure ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 octobre 2006 par télécopie et régularisé par la réception de l'original le 18 octobre 2006, présenté pour l'Agence régionale de l'hospitalisation du Nord-Pas-de-Calais dont le siège est situé 2 rue de Tenremonde à Lille cedex (59042), représentée par son directeur, par Me Dioque de la Selafa Fidal ; elle demande à la Cour de rejeter la requête de la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE et de mettre à sa charge la somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que le Tribunal administratif de Lille n'a commis aucune erreur de droit en ne qualifiant pas l'accord national du
4 avril 2001 et l'accord régional du 12 avril 2001 d'actes réglementaires ; que le préjudice invoqué par la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE sur le fondement de la responsabilité sans faute n'est ni spécial ni anormal ; qu'aucune rupture d'égalité devant les charges publiques n'a été commise en l'espèce, le dispositif rétablissant au contraire l'égalité entre les établissements ; qu'aucune erreur de droit consistant en une méconnaissance de l'obligation de moduler pour chaque établissement le montant du supplément au forfait de séance ne saurait être retenue ; que la fiche technique du ministère sur laquelle la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE s'appuie n'avait aucune portée normative ; que seuls les partenaires conventionnels avaient compétence en la matière ; que le principe de neutralité financière invoqué ne concernait pas chacun des établissements mais l'ensemble des structures concernées ; que la compensation envisagée n'a jamais été de surcroît intégrale mais partielle ; que l'accord régional, librement négocié avec les partenaires locaux au nombre desquels figurait, dans le cadre d'un comité régional des contrats, le directeur de la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE, a pu, à bon droit, écarter la modulation du taux moyen ; qu'un dispositif identique a été repris en 2002 et 2003 sans contestation ; que le directeur de l'ARH était tenu d'appliquer l'accord régional décliné par avenant tarifaire et dont la légalité n'avait pas été discutée à l'époque par la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE ; que, lors de la signature de l'avenant tarifaire de la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE, le directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation était tenu de respecter l'accord tarifaire régional ; que l'agence régionale de l'hospitalisation ne peut donc être considérée comme à la source des pertes de ressources puisque celle-ci résulte de la signature par la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE de son avenant tarifaire conformément à l'accord régional ; que la perte financière subie par l'appelante ne résulte d'aucune décision unilatérale du directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation ; que l'attente d'une décision de revalorisation a posteriori du tarif applicable relève d'une approche fantaisiste ; que la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE ne fait état d'aucune promesse ou d'engagement formel en ce sens ; qu'aucune faute ne pourra donc être retenue ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 22 décembre 2006, présenté pour la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;
Vu la lettre en date du 5 février 2007, informant les parties, en application de l'article
R. 611-7 du code de justice administrative, que la décision à intervenir est susceptible d'être fondée sur un moyen soulevé d'office ;
Vu le mémoire, enregistré le 12 février 2007, par lequel le ministre de la santé et des solidarités déclare faire siennes les conclusions présentées pour l'Agence régionale de l'hospitalisation du Nord-Pas-de-Calais ;
Vu le mémoire, enregistré le 13 février 2007, présenté pour l'Agence régionale de l'hospitalisation du Nord-Pas-de-Calais qui fait savoir que le mémoire en réplique présenté pour la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE n'appelle pas d'observations de sa part ;
Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 14 février 2007 et régularisé par la réception de l'original le 16 février 2007, présenté pour la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE qui maintient ses conclusions et moyens précédents et répond à la lettre de communication d'un moyen d'ordre public ; que la juridiction administrative est compétente pour connaître du litige ; que le présent contentieux ne portant pas sur l'application d'un contrat d'objectifs et de moyens, la compétence du Tribunal des affaires de sécurité sociale ne peut être retenue en application de l'article L. 6114-3 du code de la sécurité sociale ; que ce contentieux est, en effet, relatif à la responsabilité de l'agence régionale de l'hospitalisation du fait d'un acte unilatéral qui concerne le refus de modifier une clause d'un contrat en application d'une réglementation nationale ; qu'en tout état de cause, le contrat d'objectifs et de moyens est un contrat administratif par ses clauses ou son régime ; que c'est ce qu'a déjà jugé le Tribunal administratif de Lille et le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris ; que l'accord national est un acte réglementaire ; que les conclusions indemnitaires tendant à la condamnation de l'agence régionale de l'hospitalisation sont bien dirigées ; que la décision indemnitaire résulte d'une décision du directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation ; que les contrats d'objectifs et de moyens sont signés au nom de cette agence et non au nom de l'Etat ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 février 2007 à laquelle siégeaient Mme Christiane Tricot, président de chambre, M. Olivier Yeznikian, président-assesseur et M. Albert Lequien, premier conseiller :
- le rapport de M. Olivier Yeznikian, président-assesseur ;
- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'à la suite de la suppression, à compter du 1er mai 2001, par l'accord national du 4 avril 2001 signé en application de l'article L. 162-22-3 du code de la sécurité sociale, de la marge de facturation pour le remboursement des médicaments anticancéreux utilisés dans le cadre des traitements de chimiothérapie ambulatoire, la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE, après avoir signé son avenant tarifaire annuel prévu par l'article L. 162-22-5 du même code, recherche la responsabilité de l'Agence régionale de l'hospitalisation du Nord-Pas-de-Calais qui a refusé, malgré ses demandes, de modifier son avenant tarifaire ; qu'elle se prévaut, à titre principal, de la faute résultant du caractère irrégulier de l'accord régional du 12 avril 2001, signé en application de l'article L. 162-22-4 dudit code et sur le fondement duquel l'avenant tarifaire a été établi et, à titre subsidiaire, de la responsabilité sans faute de l'Agence régionale de l'hospitalisation du Nord-Pas-de-Calais ;
Sur la compétence de la juridiction administrative :
Considérant que le premier et le septième alinéas de l'article L. 6114-3 du code de la santé publique dans sa rédaction alors applicable, dispose que : « Les contrats mentionnés à l'article
L. 6114-1 conclus avec les établissements de santé privés autres que ceux mentionnés à l'article
L. 6114-2 déterminent par discipline les tarifs des prestations d'hospitalisation et le montant du forfait annuel. Ils sont conclus dans le respect des articles L. 162-22-1 à L. 162-22-5, L. 162-22-7 et L. 162-22-8 du code de la sécurité sociale. / (…) / Les litiges relatifs à l'application de ces contrats sont portés devant les juridictions compétentes en matière de sécurité sociale » ; que les conclusions indemnitaires présentées par la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE reposent sur la mise en cause de la responsabilité de l'Agence régionale de l'hospitalisation du Nord-Pas-de-Calais du fait du refus de son directeur de signer un avenant tarifaire avec l'établissement de santé privé se substituant à celui déjà établi pour la même année ; que le contentieux indemnitaire né de cette décision de refus, qui présente un caractère administratif, n'est pas au nombre des litiges relatifs à l'application des contrats d'objectifs et de moyens pluriannuels devant être portés devant les juridictions compétentes en matière de sécurité sociale au sens de l'article L. 6114-3 du code de la santé publique ; que la juridiction administrative est, dès lors, compétente pour connaître des conclusions indemnitaires présentées par la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE ;
Sur la responsabilité pour faute :
Considérant que, pour rechercher la responsabilité pour faute de l'Agence régionale de l'hospitalisation du Nord-Pas-de-Calais en tant qu'elle a refusé de signer un nouvel avenant tarifaire devant prendre effet le 1er mai 2001, la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE se prévaut du caractère irrégulier de l'accord régional du 12 avril 2001 dès lors qu'il aurait méconnu le « principe de neutralité financière » posé par l'accord national du 4 avril 2001, qu'il n'aurait pas été tenu compte des recommandations d'une fiche technique ministérielle ayant valeur de directive et que le principe d'égalité aurait été méconnu ;
En ce qui concerne les dispositions applicables :
S'agissant des dispositions générales :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 162-22-3 du code de la sécurité sociale dans sa version alors applicable : « I. - Chaque année, au plus tard le 25 février, un accord entre les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale et au moins une des organisations nationales les plus représentatives des établissements de santé privés mentionnés à l'article L. 710-16-2 du code de la santé publique détermine : (…) / 2° Les variations maximale et minimale des taux d'évolution des tarifs des prestations et des montants afférents aux forfaits annuels mentionnés à l'article L. 162-22-8 qui peuvent être alloués aux établissements par les agences régionales de l'hospitalisation selon les modalités définies par l'accord régional mentionné à l'article L. 162-22-4 ; / (…) / A défaut d'accord dans le délai précité et au plus tard le 15 mars de l'année, un arrêté conjoint des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale fixe les éléments mentionnés aux 1° à 4° ci dessus » ; que l'article
L. 162-22-4 énonce que : « Chaque année, au plus tard le 31 mars, un accord conclu entre le directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation et les représentants, dans la région, d'une au moins des organisations nationales les plus représentatives des établissements de santé privés signataires de l'accord mentionné à l'article L. 162-22-3 fixe, dans le respect des dispositions des articles L. 162-22-1, L. 162-22-2 et L. 162-22-3 ainsi que les orientations arrêtées par la commission exécutive de l'agence régionale de l'hospitalisation, définie au 2° de l'article L. 710-20 du code de la santé publique, les règles générales de modulation des tarifs des prestations des établissements de la région, en fonction des données disponibles sur l'activité des établissements (…). / Cet accord détermine, en outre, compte tenu des objectifs du schéma d'organisation sanitaire et des orientations de la conférence régionale de santé, les critères susceptibles d'être pris en compte pour accorder à certains établissements, notamment en vue de l'amélioration de la qualité des soins, des évolutions de tarifs différentes du taux moyen d'évolution arrêté dans les conditions prévues au 1° du I de l'article L. 162-22-3. Il détermine également, dans les mêmes conditions, les critères qui président à la modulation des taux d'évolution des forfaits visés à l'article L. 162-22-8. / A défaut d'accord, le directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation fixe ces dispositions » ; qu'enfin, l'article
L. 162-22-5 dispose que : « I. Les tarifs des prestations ainsi que les forfaits annuels de chaque établissement de santé privé mentionné à l'article L. 710-16-2 du code de la santé publique sont fixés dans le cadre d'un avenant tarifaire au contrat d'objectifs et de moyens mentionné au même article. / Ils prennent effet, (...), au 1er mai de l'année en cours » ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les accords régionaux déterminent les critères susceptibles d'être pris en compte et qui président à la modulation des taux d'évolution des forfaits annuels globaux qui sont visés à l'article L. 162-22-8 du code de la sécurité sociale, compte tenu des objectifs du schéma d'organisation sanitaire et des orientations de la conférence régionale de santé, pour accorder à certains établissements, notamment en vue de l'amélioration de la qualité des soins, des évolutions de forfait différentes du taux moyen ;
S'agissant des dispositions particulières et leur mise en oeuvre :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'accord national du 4 avril 2001, signé notamment du ministre de l'emploi et de la solidarité, qui a un caractère réglementaire, a déterminé, en application du 2° du I de l'article L. 162-22-3 du code de la sécurité sociale, les variations des taux d'évolution moyen de tarifs de prestations, et des montants afférents aux forfaits annuels globaux mentionnés à l'article L. 162-22-8 du même code ; qu'en particulier, l'article 12 de cet accord a prévu la création d'un supplément au forfait de séance de chimiothérapie afférent aux frais de gestion, de préparation, de reconstitution et d'administration des médicaments au cours d'une chimiothérapie anticancéreuse ambulatoire, dont le tarif a été fixé à la valeur unitaire fixe de 280 francs ; qu'en vue de poursuivre la réduction des inégalités de ressources allouées aux établissements, l'accord a également décidé de compléter et d'amplifier cette action par des mesures tarifaires sectorielles qui se traduisent, dans le domaine de la cancérologie, par un rééquilibrage et une revalorisation des ressources allouées aux établissements entre les différents modes de prise en charge, notamment entre hospitalisation complète et traitement ambulatoire ; qu'en particulier, l'accord supprime, à compter du 1er mai 2001, la marge, au maximum de trente pour cent, de facturation sur les médicaments anticancéreux au profit d'une facturation sur la base du prix d'achat toutes taxes comprises ; que, toutefois, afin « d'assurer la neutralité financière de la mesure pour les structures pratiquant la cancérologie », l'accord a prévu que le montant de l'objectif quantifié national défini en application de l'article L. 162-22-2 du code de la sécurité sociale, serait abondé d'un montant équivalent à l'économie réalisée sur l'enveloppe des « dépenses de ville » qui servait à assurer jusque-là le remboursement de la marge sur les médicaments anticancéreux ; qu'en conséquence, l'accord prévoit, outre la création du supplément au forfait de séance de chimiothérapie prévu par l'article 12 déjà mentionné, une augmentation du forfait de la séance de chimiothérapie ambulatoire d'un montant unitaire moyen de 178 francs ainsi qu'une augmentation du forfait médicament de chimiothérapie en hospitalisation complète ; que le protocole d'accord régional pour le Nord-Pas-de-Calais, signé le 12 avril 2001 notamment du directeur de l'Agence régionale de l'hospitalisation du Nord-Pas-de-Calais, qui a également un caractère réglementaire, a prévu à son article 7 relatif à la « régulation régionale des tarifs de chimiothérapie en hématologie et cancérologie » : qu'« En matière d'hospitalisation ambulatoire, il est retenu d'attribuer le taux de base moyen régional à tous les tarifs de prestation, augmenté pour le forfait d'accueil (ou frais de séances), de l'enveloppe spécifique de majoration » ; que l'Agence régionale de l'hospitalisation du Nord-Pas-de-Calais a, en application de l'accord régional, majoré le forfait d'accueil et de soins correspondant à chaque établissement de l'augmentation moyenne nationale d'un montant de
178 francs ; que la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE a ainsi obtenu un forfait d'accueil et de soins d'un montant de 619,65 francs pour 2001, comprenant le montant unitaire moyen de
178 francs, auquel vient s'ajouter le montant unitaire fixe de 280 francs prévu par l'article 12 de l'accord national ;
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'accord national par l'accord régional :
Considérant qu'il ne résulte ni des dispositions précitées du code de la sécurité sociale, ni davantage des dispositions de l'accord national du 4 avril 2001, sus-analysées, que l'accord régional du 12 avril 2001, pris en application de l'article L. 162-22-4, devait nécessairement fixer des critères destinés à assurer la modulation de l'augmentation du forfait de séance de chimiothérapie ambulatoire entre les établissements de santé privés concernés compte tenu de leur niveau réel de perte de ressources provoquée par la suppression de la marge de facturation ; que l'objectif de « neutralité financière », défini par l'accord national, est assuré par le mécanisme d'abondement de l'objectif quantifié national et par la redistribution de ce montant au niveau de chaque établissement, ne serait-ce qu'en fonction du taux moyen dégagé au niveau national et appliqué ensuite au niveau régional ; qu'il résulte, par ailleurs, des éléments d'information contenus dans la fiche technique n°1 du ministère de la santé précitée dont la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE entend se prévaloir, que le montant équivalent à l'économie réalisée sur l'enveloppe « ville » du fait de la suppression de la marge de facturation et qui a abondé l'objectif quantifié national, s'il était destiné exclusivement à la cancérologie, devait être « recyclé » tant vers les structures de chimiothérapie ambulatoire que vers les structures de l'hospitalisation complète ; que ce recyclage correspond d'ailleurs à l'orientation mentionnée ci-dessus visant à un rééquilibrage et une revalorisation des ressources allouées aux différents types d'établissements de santé ; que, par suite, l'accord national du 4 avril 2001 n'a jamais garanti aux établissements de santé privés, pratiquant des séances de chimiothérapie ambulatoire une compensation intégrale de leurs pertes de ressources par rapport au mécanisme antérieur de facturation sur marge des médicaments anticancéreux ; que, dès lors, l'accord régional du 12 avril 2001 n'a pas méconnu l'accord national du 4 avril 2001 ;
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de la fiche technique ministérielle :
Considérant que si la fiche technique n° 1 du ministère de la santé a précisé les modalités pratiques de mise en oeuvre de la réforme visant à la suppression de la marge sur facturation et si elle a précisé qu'« il appartient aux ARH » de « moduler l'application » de l'augmentation du forfait de séance de chimiothérapie ambulatoire « selon les établissements en tenant compte notamment du niveau réel de la perte de ressources issue de la suppression de la marge de facturation », une telle recommandation n'a pas, en tout état de cause, eu pour objet ou pour effet de se substituer aux dispositions propres à chaque accord régional ;
En ce qui concerne la méconnaissance du principe d'égalité :
Considérant que, compte tenu des buts et des modalités de la réforme, et de ce qui a été dit précédemment, l'application uniforme du taux moyen d'augmentation du forfait de séance de chimiothérapie ambulatoire par l'accord régional du 12 avril 2001 n'a pas méconnu l'objectif fixé par l'accord national de « neutralité financière de la mesure pour les structures pratiquant la cancérologie » et, par suite, méconnu le principe d'égalité qui aurait inspiré cet objectif ;
Considérant que si, par ailleurs, les accords régionaux déterminent les critères susceptibles d'être pris en compte et qui président à la modulation des taux d'évolution des forfaits annuels globaux, une telle modulation est destinée à accorder à certains établissements, notamment en vue de l'amélioration de la qualité des soins, des évolutions de forfait différentes du taux moyen ; que, par suite, si la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE prétend qu'une application uniforme d'un taux moyen provoquerait des différences de situation entre établissements, il en irait, en tout état de cause, de même de la mise en oeuvre d'une modulation telle qu'elle est prévue par l'article L. 162-22-4 du code de la sécurité sociale ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que les différences de situation provoquées, au plan régional, par l'application du taux moyen seraient sans rapport avec les buts poursuivis dans l'intérêt général par la réforme de suppression de la marge sur facturation qui tend, ainsi qu'il a été dit, au « rééquilibrage » et à la « revalorisation des ressources allouées aux établissements », ou seraient excessives par leurs effets ; qu'en effet, il ressort d'un courrier de l'Agence régionale de l'hospitalisation du Nord-Pas-de-Calais, en date du 14 janvier 2002, que, si le « forfait d'accueil et de soins », correspondant au traitement de chimiothérapie ambulatoire, alloué à la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE pour 2001 est celui qui a le moins progressé au plan régional, il résulte de l'instruction, d'une part, que la polyclinique a bénéficié d'une progression comparable à celle des établissements ayant un forfait déjà élevé, et, d'autre part, que son forfait demeure le plus élevé en valeur absolue au plan régional ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'Agence régionale de l'hospitalisation du Nord-Pas-de-Calais n'a pas commis de faute en refusant de signer un nouvel avenant tarifaire se substituant à celui déjà passé avec la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE pour 2001 ;
Sur la responsabilité sans faute :
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la décision contenue dans l'accord régional du 12 avril 2001, consistant à appliquer, pour le versement de l'augmentation du forfait de séance de chimiothérapie ambulatoire, un taux uniforme à tous les établissements de santé privés concernés de la région Nord-Pas-de-Calais plutôt qu'une modulation de ce taux selon les pertes de ressources réelles de ces établissements provoquées par la suppression du remboursement de la marge de facturation des médicaments anticancéreux, ait fait naître pour la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE un préjudice anormal, compte tenu du montant du forfait d'accueil et de soins qui lui a été alloué, et spécial, dès lors qu'elle n'a pas été la seule à en supporter les conséquences ; que, par suite, la responsabilité de l'Agence régionale de l'hospitalisation du Nord-Pas-de-Calais ne peut être recherchée sur le terrain de la responsabilité sans faute ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin, en tout état de cause, de se prononcer sur la recevabilité des conclusions dirigées contre l'Agence régionale de l'hospitalisation du Nord-Pas-de-Calais, que la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a écarté sa demande indemnitaire ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, il y a lieu, sur le fondement de ces dernières dispositions, de mettre à la charge de la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE le paiement à l'Agence régionale de l'hospitalisation du Nord-Pas-de-Calais de la somme de 2 000 euros au titre des frais que celle-ci a exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE est rejetée.
Article 2 : La POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE versera à l'Agence régionale de l'hospitalisation du Nord-Pas-de-Calais la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la POLYCLINIQUE DE LA LOUVIERE, à l'Agence régionale de l'hospitalisation du Nord-Pas-de-Calais et au ministre de la santé et des solidarités.
Copie sera transmise pour information au préfet de la région Nord-Pas-de-Calais.
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N°06DA00832