Vu la requête, enregistrée le 26 août 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Alain X, demeurant ..., par Me Delerue ;
M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nos 0305030-0305032 en date du 30 juin 2005 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande de décharge de la cotisation supplémentaire de taxe sur la valeur ajoutée à laquelle il a été assujetti pour la période du 1er janvier 1994 au
31 décembre 1999 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que le jugement a été rendu au terme d'une procédure irrégulière ; que, s'agissant de la taxe à la valeur ajoutée, à la date de l'établissement de l'avis de mise en recouvrement, la recette des impôts de Lille-Seclin n'était pas compétente pour assurer le recouvrement de la somme en cause ; que, s'agissant de la procédure de l'établissement de l'impôt, les sommes revenant à l'exposant sont inférieures au chiffre limite de l'évaluation administrative et du régime spécial des micro-entreprises ; que la procédure suivie n'est pas conforme à celle relative à la fixation du forfait ni à celle du régime spécial des micro-entreprises ; que les impositions ont été établies selon une procédure irrégulière ; qu'il n'a pas été possible de rencontrer l'interlocuteur départemental ; que l'administration n'a jamais informé l'exposant de la teneur des renseignements obtenus de l'autorité judiciaire et ne lui a jamais communiqué le moindre document malgré sa demande ; que le Tribunal n'a pas répondu à ce moyen ; que, s'agissant du bien-fondé, le service n'a pas apporté la preuve d'une activité non commerciale postérieure au 31 décembre 1995 ; qu'il n'y a pas de bénéfices non commerciaux et d'activités taxables à la taxe à la valeur ajoutée au titre des années 1996 et suivantes ; qu'il n'a pas été tenu compte des versements à M. Y dans le calcul du chiffre d'affaires et des bénéfices imposables ; que les sommes imposables tant en matière de BNC que de taxe à la valeur ajoutée seraient largement en dessous des limites du forfait ou de l'évaluation administrative pour les années antérieures à 1999 et en dessous des limites du micro-entreprise BNC et de la franchise en base pour la taxe à la valeur ajoutée de l'année 1999 ; que les sommes provenant des loyers pour l'immeuble de Croix n'ont pas à être imposées deux fois ; que de nombreuses erreurs ont été relevées bien que les justifications aient été déposées lors du contrôle comme les prêts consentis ; que le Tribunal n'a pas statué sur ces éléments de la contestation ; qu'il n'a pas été tenu compte des dépenses qui ont pu être engagées ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 mars 2006, présenté par le ministre de l'économie et des finances ; le ministre conclut au rejet de la requête ; il soutient qu'il s'en remet à la sagesse de la Cour quant à la régularité de la procédure juridictionnelle ; que le requérant ne saurait se prévaloir du fait qu'il résidait depuis juillet 2001 à Ronchin dès lors qu'il n'en a pas informé la recette des impôts de Lille-Seclin ; que, s'agissant de la procédure d'imposition, la procédure d'évaluation et de taxation d'office ont donc été régulièrement appliquées pour l'ensemble de la période vérifiée ; que le requérant ne saurait se prévaloir du bénéfice du forfait BIC dans la mesure où le bénéfice imposable relève de la catégorie BNC ; qu'il ne saurait pas davantage se prévaloir du régime de l'évaluation administrative de ses bénéfices non commerciaux dès lors qu'il s'est abstenu de déposer la déclaration prévue à l'article 101 du code général des impôts ; que l'intéressé n'a pas fait appel à l'interlocuteur départemental ; que la notification de redressement en date du 18 décembre 2000 mentionne expressément l'origine des documents obtenus de l'autorité judiciaire et le requérant n'a présenté qu'une seule demande de documents le 11 janvier 2001 concernant uniquement les comptes bancaires pour l'année 1994 et le Trésor public pour les années 1995 et 1996 à laquelle il a été répondu le 19 janvier 2001 ; que le requérant ayant fait l'objet d'une procédure de taxation d'office, la preuve de l'exagération des impositions lui incombe ; qu'il n'apporte pas la preuve ni le moindre justificatif des sommes qui auraient été reversées ; que les justifications des erreurs invoquées ne sont pas apportées ; que les frais invoqués ont été retenus et évalués à 10 % ; que le bénéfice imposable a été calculé par application sur le montant déclaré d'un abattement de frais fixé à 25 % pour l'année 1997 ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 13 avril 2006, présenté pour M. X, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 29 novembre 2006, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire, par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 février 2007 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur et M. Christian Bauzerand, premier conseiller :
- le rapport de M. Christian Bauzerand, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant, en premier lieu, que M. X soutient que le jugement attaqué a été rendu à l'issue d'une procédure irrégulière, le Tribunal ayant pris en compte un mémoire de l'administration enregistré après la clôture de l'instruction ; qu'il résulte, toutefois, de l'instruction que le Tribunal n'a pas fondé sa décision sur les faits énoncés dans ce dernier mémoire ; que, par suite, le fait que ce mémoire n'ait pas été transmis au requérant est sans incidence sur la régularité du jugement attaqué ;
Considérant, en second lieu, que, contrairement à ce que M. X allègue, le tribunal administratif a expressément répondu au moyen tiré de l'absence d'indication de la teneur des renseignements obtenus ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : « Sont taxés d'office : 1°) A l'impôt sur le revenu, les contribuables qui n'ont pas déposé dans le délai légal la déclaration d'ensemble de leurs revenus (…), sous réserve de la procédure de régularisation prévue à l'article L. 67 ; (…) 3°) Aux taxes sur le chiffre d'affaires, les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes » ; qu'aux termes des dispositions de l'article L. 67 du même livre : « La procédure de taxation d'office prévue aux 1° et 4° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation fiscale dans les 30 jours de la notification d'une première mise en demeure » ; qu'enfin, aux termes des dispositions de l'article L. 73 dudit livre : « Peuvent être évalués d'office : (…) 2°) Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus non commerciaux ou des revenus assimilés lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 97 du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal » ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a constaté que
M. X qui, selon les informations obtenues de l'autorité judiciaire le 14 septembre 2000 en vertu de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, exerçait depuis 1990 l'activité de comptable et de conseiller en comptabilité, n'avait pas souscrit les déclarations fiscales de résultats et les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée auxquelles il était tenu au titre de cette activité ; qu'elle lui a adressé le 2 octobre 2000 une mise en demeure de souscrire ces déclarations à laquelle l'intéressé, qui a reçu ce document le 3 octobre 2000, ainsi qu'il résulte des pièces produites par le service, s'est abstenu de répondre ; que si le requérant, qui a reconnu exercer cette activité depuis 1990, soutient qu'à compter de l'année 1996, il se bornait à aider des amis, il n'établit pas que les sommes perçues à ce titre ne représentaient pas des honoraires ; que c'est, dès lors, à bon droit que, pour l'ensemble des années en cause, il a fait l'objet, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, de la procédure de taxation d'office prévue à l'article L. 66-3 précité du livre des procédures fiscales et, en matière de bénéfices non commerciaux, de la procédure d'évaluation d'office visée à l'article
L. 73 précité du même livre dès lors qu'en tout état de cause, la mise en demeure prévue à l'article L. 67 du livre des procédures fiscales a été réellement faite ; que, par ailleurs, la circonstance qu'il aurait pu, compte tenu du montant des recettes qu'il a encaissées, bénéficier du régime de l'évaluation administrative de ses bénéfices non commerciaux, ne l'autorise pas, dès lors qu'il s'est abstenu de déposer la déclaration prévue à l'article 101 du code général des impôts, à se prévaloir des règles propres à ce régime pour contester la procédure d'imposition d'office de ses bases d'imposition ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'administration, dans la notification de redressement du 18 décembre 2000 relative aux redressements en litige, a informé le contribuable de la teneur et de la nature des renseignements obtenus de l'autorité judiciaire le
14 septembre 2000 en vertu de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales ainsi que du détail, figurant en annexe à cette notification de redressement, de l'analyse des comptes bancaires à partir de laquelle a été effectuée l'évaluation du montant des recettes générées par son activité professionnelle non déclarée ; que M. X n'est ainsi pas fondé à soutenir que l'administration ne l'aurait pas informé de la teneur des renseignements obtenus ; que s'il soutient avoir demandé communication des documents obtenus de l'autorité judiciaire, il ne l'établit pas, la seule demande de documents qu'il a présentée le 11 janvier 2001, avant la mise en recouvrement des impositions en litige, concernant uniquement les comptes bancaires pour l'année 1994 et le compte Trésor public pour les années 1995 et 1996 ; qu'il résulte de l'instruction que, par courrier adressé par lettre recommandée avec accusé de réception le 19 janvier 2001 à M. X et reçu le 23 janvier 2001 par celui-ci, ces documents lui ont été communiqués ;
Considérant, en troisième lieu, que M. X soutient que la procédure de redressements dont il a fait l'objet est entachée d'une irrégularité dès lors que l'administration n'a pas donné suite à sa demande d'entretien avec l'interlocuteur départemental, en méconnaissance des dispositions de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ;
Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction qu'en réponse aux notifications de redressement des 18 et 19 décembre 2000, M. X a fait connaître, par lettre du 11 janvier 2001, son désaccord sur les redressements envisagés ; que ce même courrier indiquait que M. X souhaitait rencontrer le vérificateur ainsi que son chef de brigade « et éventuellement, si cela est encore nécessaire, l'interlocuteur départemental » ; que cette demande, formulée avant la confirmation des redressements par le vérificateur, n'a cependant pas été réitérée en dépit de la lettre de relance de l'administration en date du 5 juillet 2001 ; que, dès lors, M. X n'est pas fondé à invoquer la méconnaissance des dispositions de la charte ;
Considérant, en quatrième lieu, que si M. X soutient que la procédure suivie ne serait pas conforme à celle relative à la fixation du forfait ni à celle du régime spécial des micro-entreprises qui auraient dû lui être appliquées, il n'établit pas que les sommes perçues seraient inférieures au seuil limite de l'évaluation administrative et du régime spécial des micro-entreprises ;
Sur l'avis de mise en recouvrement :
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article R. 256-8 du livre des procédures fiscales : « Le comptable public compétent pour établir l'avis de mise en recouvrement est soit celui du lieu de déclaration ou d'imposition du redevable, soit, dans le cas où ce lieu a été ou aurait dû être modifié, celui compétent à l'issue de ce changement, même si les sommes dues se rapportent à la période antérieure à ce changement.» ;
Considérant qu'il est constant que, au cours des années 1994 à 1999 au titre desquelles a été émis l'avis de mise en recouvrement des droits de taxe sur la valeur ajoutée en litige,
M. X demeurait à Templeuve, lieu de déclaration des sommes à raison desquelles a été émis l'avis de mise en recouvrement ; que la seule circonstance que M. X réside depuis le mois de juillet 2001 dans la commune de Ronchin n'implique pas que le lieu de déclarations du redevable a été ou aurait dû être modifié ; que, dès lors, M. X n'est pas fondé à soutenir que l'avis de mise en recouvrement aurait dû être émis par le comptable de Ronchin conformément aux dispositions précitées de l'article R. 256-8 du livre des procédures fiscales ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, il appartient à M. X, dès lors qu'il a fait l'objet pour les impositions en cause d'une procédure d'office dont, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, il n'établit pas qu'elle serait irrégulière, d'apporter la preuve de l'exagération des impositions qu'il conteste ; que s'il soutient qu'il remettait, sous forme d'espèces, la moitié des sommes encaissées à la personne avec laquelle il exerçait son activité occulte, il ne l'établit pas ; qu'il résulte de l'instruction que les loyers perçus en espèces par M. X et déclarés par lui ont été imposés non comme bénéfices non commerciaux mais dans la catégorie des revenus fonciers ; que la seule circonstance que l'administration ait majoré forfaitairement de 20 % les sommes déposées sur les comptes bancaires du contribuable et regardées comme des recettes pour tenir compte des dépenses réglées par lui en espèces ne suffit pas à établir que la totalité de ces 20 % constituerait des dépenses déductibles et que le montant de frais déductibles évalué à 10 % par l'administration serait insuffisant ; que les allégations du requérant tirées de ce que les sommes versées sur le compte Trésor public correspondent à des remboursements de frais de déplacements, de ce que l'administration aurait à tort qualifié de recettes imposables des sommes provenant de remboursements par des tiers, de crédits accordés à M. X, de cessions de biens effectuées par celui-ci et enfin de virements de compte à compte ne sont assorties d'aucune justification ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. X la somme qu'il réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. Alain X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Alain X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.
N° 05DA01106 2