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25/02/2003 | FRANCE | N°00DA01218

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2eme chambre, 25 février 2003, 00DA01218


Vu 1°) sous le n° 00DA00254 la requête enregistrée le 18 février 2000 et le mémoire ampliatif enregistré le 3 mai 2000 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentés pour le centre hospitalier de Saint Quentin dont le siège social est BP 608 à Saint Quentin cédex (02321), pris en la personne de son directeur en exercice, par Me Le Prado, avocat ; le centre hospitalier de Saint Quentin demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 9 décembre 1999 par lequel le tribunal administratif d'Amiens l'a déclaré entièrement responsable des conséque

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Vu 1°) sous le n° 00DA00254 la requête enregistrée le 18 février 2000 et le mémoire ampliatif enregistré le 3 mai 2000 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentés pour le centre hospitalier de Saint Quentin dont le siège social est BP 608 à Saint Quentin cédex (02321), pris en la personne de son directeur en exercice, par Me Le Prado, avocat ; le centre hospitalier de Saint Quentin demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 9 décembre 1999 par lequel le tribunal administratif d'Amiens l'a déclaré entièrement responsable des conséquences dommageables de l'infection dont la jeune Sarah Z a été victime lors de son hospitalisation et a alloué à M. et Mme Z une provision de 40 000 francs ;

2°) de rejeter les conclusions de M. et Mme Z et de la caisse primaire d'assurance maladie de Saint Quentin ;

Code C+ Classement CNIJ : 60-02-01-01-01-01

54-04-02-02-01

Il soutient que le jugement est insuffisamment motivé ; que le régime de présomption de faute ne peut s'appliquer que s'il est établi par l'instruction que l'infection a eu pour cause l'introduction accidentelle dans l'organisme du patient d'un germe microbien ; qu'en l'espèce, l'expert a établi que les règles d'asepsie étaient respectées dans le service de néonatalogie ; que l'infection a pu être contractée lors de l'accouchement lui-même dans une clinique privée de Saint Quentin ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés les 6 et 27 octobre 2000, présentés pour M. et Mme A... Z par Me Danièle X..., avocat ; ils concluent à la condamnation du centre hospitalier de Saint Quentin à leur verser une provision de 150 000 francs, déduction faite de la provision déjà accordée de 40 000 francs et à la désignation d'un expert à fin d'évaluation du préjudice ainsi qu'à la condamnation du centre hospitalier de Saint Quentin à leur payer une somme de 10 000 francs au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; ils soutiennent que la jeune Sarah subit un préjudice très important qui a évolué depuis la précédente expertise ; que le centre hospitalier de Saint Quentin ne fait pas la preuve de l'absence de faute de sa part et que la jurisprudence Cohen doit dès lors s'appliquer ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 4 novembre 2002, présenté par le centre hospitalier de Saint Quentin ; il conclut aux mêmes fins que la requête et soutient, en outre, qu'il n'existe pas d'obligation de sécurité qui pèse sur les hôpitaux ; que la responsabilité du centre hospitalier n'est pas engagée si les germes à l'origine de l'infection sont présents dans l'organisme avant l'intervention ;

Vu 2°) sous le n° 00DA01218 la requête enregistrée le 25 octobre 2000 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée par M. et Mme A... Z demeurant ... et le mémoire enregistré le 21 novembre 2000 présenté pour M. et Mme Z par Me X..., avocat ; ils demandent à la Cour d'annuler le jugement en date du 27 juin 2000 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leurs demandes indemnitaires et concluent à la condamnation du centre hospitalier de Saint Quentin à leur verser une provision de 150 000 francs et 10 000 francs au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; ils soutiennent que le mémoire du 25 janvier 2000 par lequel ils chiffraient leur préjudice n'a pas été enregistré au tribunal administratif d'Amiens qui a commis une erreur ; que le préjudice de Sarah est très important ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 janvier 2001, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de Saint Quentin par Me X..., avocat ; la caisse primaire d'assurance maladie de Saint Quentin conclut à la confirmation des jugements attaqués, à la condamnation du centre hospitalier de Saint Quentin à lui payer une somme de 296 464,87 francs au titre des débours justifiés au 27 juin 2000 pour Sarah Z et une somme de 10 000 francs au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 novembre 2002, présenté pour le centre hospitalier de Saint Quentin par Me Le Prado, avocat ; il conclut au rejet de la requête ; il soutient que la requête de M. et Mme Z apparaît comme irrecevable faute d'être présentée par l'intermédiaire d'un avocat et comme tardive ; que M. et Mme Z n'établissent pas avoir déposé un mémoire le 25 janvier 2000 ; que le préjudice directement imputable à l'infection nosocomiale est très limité ;

Vu 3°) sous le n° 00DA01246 la requête enregistrée le 31 octobre 2000 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour le centre hospitalier de Saint Quentin par Me Le Prado, avocat ; il conclut à ce que la Cour 1) annule le jugement en date du 27 juin 2000 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté les conclusions indemnitaires de M. et Mme Z et l'a condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Saint Quentin une somme de 296 464,87 francs ; 2) rejette les conclusions de M. et Mme Z et de la caisse primaire d'assurance maladie de Saint Quentin ; il soutient que ce jugement ne pourra être annulé que par voie de conséquence de l'annulation du jugement du 9 décembre 1999 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de Saint Quentin par Me X..., avocat ; elle conclut à la confirmation des jugements attaqués et à la condamnation du centre hospitalier de Saint Quentin à lui payer la somme de 296 464,87 francs au titre des débours exposés et la somme de 10 000 francs au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 février 2003 où siégeaient Mme Fraysse, président de chambre, Mme Lemoyne de Forges, président-assesseur et M. Nowak, premier conseiller :

- le rapport de Mme Lemoyne de Forges, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Michel, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes du centre hospitalier de Saint Quentin et de M. et Mme A... Z sont relatives aux conséquences d'un même accident ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision :

Considérant que, par jugement en date du 9 décembre 1999, le tribunal administratif d'Amiens, d'une part, a déclaré le centre hospitalier de Saint Quentin entièrement responsable des conséquences dommageables de l'infection contractée par la jeune Sarah Z au cours de son hospitalisation au centre de soins intensifs de néonatalogie et accordé à M. et Mme Z une provision de 40 000 francs (6 097,96 euros) à valoir sur leur préjudice et, d'autre part, sursis à statuer jusqu'à ce que les parents de la victime précisent le montant définitif dudit préjudice ; que, par jugement en date du 27 juin 2000, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté le surplus des conclusions indemnitaires de M. et Mme Z et condamné le centre hospitalier de Saint Quentin à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de Saint Quentin la somme de 296 464,87 francs (45 195,78 euros) ; que le centre hospitalier de Saint Quentin fait appel du principe même de sa responsabilité tandis que M. et Mme Z demandent la condamnation dudit établissement à leur verser une provision de 150 000 francs (22 867,35 euros) et à ce que la Cour prescrive une nouvelle expertise ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expertise ordonnée par les premiers juges que l'infection dont a été victime Sarah Z sept jours après sa naissance et qui a entraîné des séquelles osseuses et ostéo-articulaires a eu pour cause l'introduction accidentelle dans l'organisme de l'enfant d'un staphylocoque doré lors de son séjour dans le service de néonatalogie du centre hospitalier de Saint-Quentin ; qu'alors même que les médecins n'auraient commis aucune faute, notamment en matière d'asepsie, et qu'une telle infection se produirait dans une proportion de 30 % dans les cas d'hyper-prématurés comme celui de Sarah, le fait que cette infection ait néanmoins pu se produire, alors que rien ne permet de présumer que ce nouveau-né aurait été lui-même porteur d'un foyer infectieux avant sa naissance ou à la suite de l'accouchement de sa mère dans une clinique privée de Saint Quentin, révèle une faute dans l'organisation et le fonctionnement du service de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier de Saint Quentin ; que, par suite, celui-ci n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, par ailleurs suffisamment motivé, en date du 9 décembre 1999, le tribunal administratif d'Amiens l'a déclaré responsable des conséquences dommageables subies par Sarah Z ;

Sur le préjudice :

Sur les fins de non-recevoir opposées par le centre hospitalier de Saint Quentin et tirées de l'irrecevabilité de la requête d'appel de M. et Mme Z :

Considérant, d'une part, que contrairement à ce que soutient le centre hospitalier de Saint Quentin, la requête présentée par M. et Mme Z sans ministère d'avocat a été régularisée par un mémoire du 21 novembre 2000 présenté par leur conseil ; que, d'autre part, la requête de M. et Mme Z, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel le 25 octobre 2000 suite à une notification du jugement attaqué le 2 septembre 2000, soit à l'intérieur du délai de recours contentieux de deux mois, n'est pas tardive ; que, par suite, il y a lieu d'écarter les fins de non-recevoir opposées par le centre hospitalier de Saint Quentin ;

Sur la régularité du jugement du 27 juin 2000 :

Considérant que, dans leur mémoire enregistré le 1er février 2000 au greffe du tribunal administratif d'Amiens et à fin de satisfaire au supplément d'instruction diligenté le 9 décembre 1999, M. et Mme Z ont demandé la condamnation du centre hospitalier de Saint Quentin à leur verser une somme de 150 000 francs (22 867,35 euros) à titre provisionnel et l'organisation d'une nouvelle expertise ; que, par suite, le tribunal administratif ne pouvait rejeter le surplus des conclusions indemnitaires de M. et Mme Z au motif que ces derniers s'étaient abstenus de préciser dans le délai qui leur était imparti le montant du préjudice dont ils se prévalaient ; qu'il suit de là que M. et Mme Z sont fondés à soutenir que le jugement du 27 juin 2000 a été pris au terme d'une procédure irrégulière et à en demander l'annulation ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. et Mme Z et la caisse primaire d'assurance maladie de Saint Quentin ;

Sur l'expertise :

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise déposé le 24 février 1996 qu'à cette date aucun taux d'incapacité ne pouvait être fixé dès lors que la croissance osseuse de la jeune Sarah née le 9 janvier 1991 n'était pas terminée et que le bilan orthopédique était susceptible d'évolution ; qu'il y a lieu, dès lors, avant de statuer sur la demande d'indemnité de M. et Mme Z d'ordonner une expertise aux fins précisées ci-après ;

Sur la demande de provision :

Considérant qu'il n'y pas a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de majorer la provision de 40 000 francs (6 097,96 euros) accordée à M. et Mme Z par le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 9 décembre 1999 ;

Sur les droits de la caisse primaire d'assurance maladie de Saint Quentin :

Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie demande la condamnation du centre hospitalier de Saint Quentin à lui rembourser la somme de 296 464,87 francs (45 195,78 euros) au titre des débours qu'elle a exposés pour Sarah Z ; qu'il y lieu de réserver ses droits jusqu'en fin d'instance ;

DÉCIDE

Article 1er : La requête du centre hospitalier de Saint Quentin dirigée contre le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 9 décembre 1999 est rejetée.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 27 juin 2000 est annulé.

Article 3 : Il sera, avant de statuer sur les demandes de M. et Mme A... Z et de la caisse primaire d'assurance maladie de Saint Quentin, procédé par un expert désigné par le président de la Cour à une expertise en vue de déterminer :

- la date de consolidation de l'état de Sarah Z

- le taux de l'incapacité permanente partielle

- le préjudice esthétique

- les souffrances physiques

- le préjudice d'agrément

- la part de débours exposés par la caisse primaire d'assurance maladie de Saint Quentin à mettre en relation directe avec l'aggravation de l'état de l'enfant lié à l'infection nosocomiale.

Article 4 : L'expert sera désigné par le président de la Cour. Il accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative.

Article 5 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par la présente décision sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 6 : La présente décision sera notifiée au centre hospitalier de Saint Quentin, à M. et Mme A... Z, à la caisse primaire d'assurance maladie de Saint Quentin, à l'expert ainsi qu'au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

Copie sera transmise au préfet de l'Aisne.

Délibéré à l'issue de l'audience publique du 4 février 2003 dans la même composition que celle visée ci-dessus.

Prononcé en audience publique le 25 février 2003.

Le rapporteur

Signé : P. Lemoyne de Forges

Le président de chambre

Signé : G. Y...

Le greffier

Signé : M.T. Z...

La République mande et ordonne au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le greffier

Marie-Thérèse Z...

8

N°00DA00254

N°00DA01218

N°00DA01246


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2eme chambre
Numéro d'arrêt : 00DA01218
Date de la décision : 25/02/2003
Sens de l'arrêt : Avant dire-droit - expertise
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Fraysse
Rapporteur ?: Mme Lemoyne de Forges
Rapporteur public ?: M. Michel
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2003-02-25;00da01218 ?
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