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10/07/2025 | FRANCE | N°25BX00914

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 2ème chambre, 10 juillet 2025, 25BX00914


Vu la procédure suivante :



M. A... C... a demandé, par un recours déposé le 13 mars 2025 à la cour administrative d'appel de Nantes, l'annulation de la décision du 31 janvier 2025 par laquelle le président de cette cour a rejeté son recours gracieux dirigé contre le rejet, par décision

du 20 décembre 2024, de sa demande d'inscription au tableau des experts pour les spécialités C.15 " Réseaux publics et privés " et C.4 " Génie Civil-travaux publics ".



Par bordereau du 7 avril 2025, le président de la cour administrative d'appe

l de Nantes a transmis cette demande, en application de l'article R. 221-19 du code de justice...

Vu la procédure suivante :

M. A... C... a demandé, par un recours déposé le 13 mars 2025 à la cour administrative d'appel de Nantes, l'annulation de la décision du 31 janvier 2025 par laquelle le président de cette cour a rejeté son recours gracieux dirigé contre le rejet, par décision

du 20 décembre 2024, de sa demande d'inscription au tableau des experts pour les spécialités C.15 " Réseaux publics et privés " et C.4 " Génie Civil-travaux publics ".

Par bordereau du 7 avril 2025, le président de la cour administrative d'appel de Nantes a transmis cette demande, en application de l'article R. 221-19 du code de justice administrative, à la cour administrative d'appel de Bordeaux, qui l'a enregistrée le 10 avril 2025.

Dans sa requête, et par deux mémoires enregistrés le 20 avril et le 30 mai 2025,

M. C... soutient que :

- dans ses fonctions de direction au sein du groupe BAGE, il était responsable de quatre filiales du groupe situées en Nouvelle Aquitaine, les sociétés Elitel Sud-Ouest, Aquitaine Réseaux, TTPI réseaux et Lagès Réseaux, toutes les quatre des PME spécialisées dans la construction de réseaux et le génie civil. Ces quatre sociétés étant d'une taille comprise entre 25 et 50 salariés, il était très proche des équipes et du terrain, et très impliqué quotidiennement sur le plan technique, y compris au travers de visites et de réunions régulières sur les chantiers ;

- outre une très longue pratique technique, il a aussi une très bonne connaissance des marchés publics, ce qui est absolument indispensable pour traiter les dossiers d'expertise confiés par la cour ;

- il s'est vu confier en 2024 à Poitiers trois expertises correspondant à son expérience en matière de voirie, de génie civil et de réseaux ;

- il est inscrit sur la liste des experts de la cour d'appel de Rennes depuis

le 1er janvier 2025, à la suite de son transfert depuis celle de Poitiers ;

- ses fonctions diversifiées, nécessitant la recherche des solutions techniques les plus économiques, constituent bien une activité professionnelle directe dans les secteurs demandés, et une inscription doit lui être accordée à tout le moins pour les rubriques C.15.1. Eau Potable et industrielle (incendie, lavage, process...), - C.15.2. Eaux usées domestiques et industrielles (assainissement), - C.15.3. Electricité, téléphone et réseaux de données, - C.15.4. Gaz et GP d'une part, et les rubriques C.4.1. Génie Civil et travaux publics : généralistes, et - C.4.10. Voiries, chaussées lourdes et légères d'autre part.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 mai 2025, le président de la cour administrative d'appel de Nantes conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- selon l'article R. 221-11, 2° le candidat doit justifier ne pas avoir cessé d'exercer, depuis plus de deux ans avant le 15 septembre de l'année précédant le tableau, l'activité professionnelle dans le ou les domaines techniques de compétence au titre desquels l'inscription est demandée ; aucun justificatif d'une activité professionnelle directe n'a été fourni, alors que les fonctions de direction exercées par M. C... jusqu'en 2024 concernaient le budget et le management d'une équipe

de 150 collaborateurs, et qu'il a créé une activité de conseil en 2021 ;

- la circonstance qu'il est inscrit en qualité d'expert judiciaire ou a réalisé des expertises pour le tribunal administratif de Poitiers est sans incidence sur le fait qu'il ne respecte pas la condition prévue par l'article R. 221-11, 2° ;

- les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu la décision attaquée et les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires ;

- l'arrêté du 18 juin 2023 relatif à la nomenclature pour les tableaux d'experts établis par les cours administrative d'appel ;

- l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat du 19 novembre 2013 relatif à la présentation des demandes d'inscription et de réinscription aux tableaux des experts prévus à l'article R. 221-13 du code de justice administrative ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B... ;

- et les conclusions de Mme Isoard, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article R. 221-9 du code de justice administrative : " Il est établi, chaque année, par le président de la cour administrative d'appel, un tableau des experts auprès de la cour et des tribunaux administratifs du ressort, selon une nomenclature arrêtée par le vice-président du Conseil d'Etat correspondant aux domaines d'activité dans lesquels les juridictions administratives sont susceptibles de recourir à une expertise. / Le président de la cour administrative d'appel arrête les inscriptions en fonction des besoins des juridictions statuant dans chacun de ces domaines, après avis de la commission prévue à l'article R. 221-10 ". Aux termes de l'article R. 221-11 du même code : " Peuvent être inscrites sur le tableau des experts les personnes physiques qui remplissent les conditions suivantes : / 1° Justifier d'une qualification et avoir exercé une activité professionnelle, pendant une durée de dix années consécutives au moins, dans le ou les domaines de compétence au titre desquels l'inscription est demandée, y compris les qualifications acquises ou les activités exercées dans un Etat membre de l'Union européenne autre que la France. / 2° Ne pas avoir cessé d'exercer cette activité depuis plus de deux ans avant la date limite de dépôt des candidatures,

le 15 septembre de chaque année ; / (...) / Les experts inscrits, à l'issue de la

période probatoire, sur l'une des listes prévues par la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires sont réputés remplir les conditions énoncées au 1° et au 4° du présent article. / (...) ". Aux termes de l'article R. 221-13 : " La demande d'inscription au tableau est adressée au président de la cour administrative d'appel territorialement compétente, au plus tard le 15 septembre de chaque année. Elle précise le ou les domaines d'activité au titre desquels le candidat sollicite son inscription. Elle est accompagnée des pièces propres à justifier que celui-ci satisfait aux conditions prévues par l'article R. 221-11 et à permettre à la commission de donner son avis sur les éléments d'appréciation définis par l'article R. 221-14. / (...) ". Selon l'article R. 221-14, la commission, qui est composée des présidents des tribunaux administratifs ayant leur siège dans le ressort de la cour ou de magistrats les représentant ainsi que d'experts inscrits au tableau de la cour, " vérifie que le candidat remplit les conditions énoncées à l'article R. 221-11 et apprécie la qualification de

celui-ci, l'étendue de sa pratique professionnelle, sa connaissance des techniques de l'expertise et sa capacité à exercer sa mission avec conscience, objectivité, impartialité et diligence. Elle tient compte des besoins des juridictions du ressort. ".

2. Par une décision du 20 décembre 2024, le président de la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté la demande d'inscription au tableau des experts de la cour de M. C..., pour les spécialités, qu'il a requalifiées au regard de la nomenclature applicable aux juridictions administratives, comme relevant des rubriques C.3.1 : Structures : généralistes, C.3.2 : Béton, béton armé, béton précontraint, bétons spéciaux, C.3.3:charpentes et ossatures bois - Constructions en bois, C.3.4: Constructions métalliques, C.15.1 : Eau potable et industrielle (incendie, lavage, process...), C.15.3 : Electricité, téléphone et réseaux de données, C.15.4 : Gaz et GPL, C.4.9 : Terrassements généraux et grands aménagements - Voies ferrées et infrastructures ferroviaires, C.4.10 : Voiries, chaussées lourdes et légères et enfin C.4.11: travaux et équipements. Cette décision a estimé, en mentionnant une cessation de fonctions de direction du groupe BAGE depuis 2019, que M. C... avait cessé son activité dans ces domaines depuis plus de deux ans, ne remplissant ainsi pas la condition fixée au 2° de l'article R.221-11. Saisi d'un recours gracieux de l'intéressé faisant valoir une mauvaise lecture de son curriculum vitae, le président de la cour a maintenu sa position au motif que si M. C... n'avait quitté les fonctions de directeur délégué de ce groupe de BTP qu'en septembre 2024, il ne justifiait pas, dans le cadre de ses fonctions successives de direction, d'une pratique professionnelle personnelle sur le plan technique directement liée aux spécialités demandées. M. C... demande à la cour d'annuler cette dernière décision.

3. M. C..., qui est ingénieur depuis 1985, fait valoir sa longue carrière dans le bâtiment et les travaux publics, puis le traitement de l'eau, l'exploitation de réseaux télécom, la construction de réseaux d'infrastructures, et souligne qu'après avoir passé dix années en Australie où il a implanté des câbles pour d'importants réseaux, il est revenu en France en 2019 et a rejoint en 2022 un groupe de bâtiment et travaux publics, comprenant 4 filiales spécialisées dans les réseaux secs et humides. Toutefois, il résulte du curriculum vitae qu'il a joint à son dossier que ses fonctions de directeur délégué de ce groupe, qu'il n'a certes quitté qu'en septembre 2024 pour se consacrer à la société de conseil qu'il a créée en 2021, étaient centrées sur les budgets et le management d'un grand nombre de collaborateurs, ainsi que le développement commercial, et n'appelaient donc pas une pratique technique en lien avec les spécialités demandées. C'est ainsi à bon droit que le président de la cour administrative d'appel de Nantes a estimé, sans nullement remettre en cause les compétences de l'intéressé, que M. C... ne justifie pas ne pas avoir cessé d'exercer une activité professionnelle depuis plus de deux ans dans le domaine des spécialités demandées.

4. Si le requérant se prévaut également de son inscription en qualité d'expert judiciaire près les cours d'appel de Poitiers, puis de Rennes, il résulte des justificatifs produits qu'il était seulement inscrit par la première à titre probatoire depuis 2024, et que l'accord à son transfert donné par la seconde le 15 novembre 2024 ne serait effectif qu'en janvier 2025, après la décision initiale du président de la cour administrative d'appel de Nantes. Au demeurant, M. C... ne peut bénéficier de la présomption prévue par les dispositions précitées de l'article R. 221-11 du code de justice administrative, qui ne s'applique qu'aux conditions posées au 1° et au 4° de cet article, et non

au 2°. Par ailleurs, la circonstance que le tribunal administratif de Poitiers l'ait désigné deux fois

en 2024 pour procéder à des expertises en matière de travaux publics est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée, qui s'apprécie au regard des conditions fixées par les dispositions règlementaires précitées.

5. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du 31 janvier 2025 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nantes a confirmé son refus de l'inscrire au tableau des experts de cette cour.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., au président de la cour administrative d'appel de Nantes et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 1er juillet 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, présidente,

Mme Sabrina Ladoire, présidente-assesseure,

M. Antoine Rives, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 juillet 2025.

La présidente-assesseure,

Sabrina Ladoire

La présidente, rapporteure

Catherine B...Le greffier,

Fabrice BenoitPour le greffier d'audience décédé

La greffière de chambre

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 25BX00914
Date de la décision : 10/07/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Catherine GIRAULT
Rapporteur public ?: Mme ISOARD

Origine de la décision
Date de l'import : 20/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-07-10;25bx00914 ?
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