Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Béatrice Molina-Andréo,
- les conclusions de M. Mickaël Kauffmann, rapporteur public,
- et les observations de Me Maitrot, représentant la SAS Photosol Développement.
Considérant ce qui suit :
1. La société par actions simplifiée (SAS) Photosol Développement a déposé une demande de permis de construire, le 26 mai 2020, auprès de la préfecture de la Gironde, en vue de la réalisation d'un parc photovoltaïque, situé au lieu-dit " Pontac " sur le territoire de la commune de Jau-Dignac-et-Loirac, comprenant un ensemble de panneaux et leurs supports, la construction d'un poste de livraison, de deux postes transformateurs et d'une clôture grillagée. Par un arrêté du 5 mai 2021, le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer le permis de construire sollicité. Le silence gardé par le préfet de la Gironde sur le recours gracieux contre cette décision, reçu le 26 mai 2021, a fait naître, le 26 juillet 2021, une décision implicite de rejet. Saisi par la société Photosol Développement, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 5 mai 2021, ainsi que la décision implicite de rejet du gracieux formé contre cet arrêté. Par la présente requête, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires relève appel de ce jugement.
2. Aux termes de l'article L. 121-8 du même code dans sa version issue de la loi du 23 novembre 2018 applicable aux demandes d'autorisation d'urbanisme déposées avant le 31 décembre 2021 : " L'extension de l'urbanisation se réalise soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. / Dans les secteurs déjà urbanisés autres que les agglomérations et villages identifiés par le schéma de cohérence territoriale et délimités par le plan local d'urbanisme, des constructions et installations peuvent être autorisées, en dehors de la bande littorale de cent mètres, des espaces proches du rivage et des rives des plans d'eau mentionnés à l'article L. 121-13, à des fins exclusives d'amélioration de l'offre de logement ou d'hébergement et d'implantation de services publics, lorsque ces constructions et installations n'ont pas pour effet d'étendre le périmètre bâti existant ni de modifier de manière significative les caractéristiques de ce bâti. Ces secteurs déjà urbanisés se distinguent des espaces d'urbanisation diffuse par, entre autres, la densité de l'urbanisation, sa continuité, sa structuration par des voies de circulation et des réseaux d'accès aux services publics de distribution d'eau potable, d'électricité, d'assainissement et de collecte de déchets, ou la présence d'équipements ou de lieux collectifs. / L'autorisation d'urbanisme est soumise pour avis à la commission départementale de la nature, des paysages et des sites. Elle est refusée lorsque ces constructions et installations sont de nature à porter atteinte à l'environnement ou aux paysages ". Aux termes du III de l'article 42 de la loi du 23 novembre 2018 : " Jusqu'au 31 décembre 2021, des constructions et installations qui n'ont pas pour effet d'étendre le périmètre du bâti existant, ni de modifier de manière significative les caractéristiques de ce bâti, peuvent être autorisées avec l'accord de l'autorité administrative compétente de l'Etat, après avis de la commission départementale de la nature des paysages et des sites, dans les secteurs mentionnés au deuxième alinéa de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction résultant de la présente loi, mais non identifiés par le schéma de cohérence territoriale ou non délimités par le plan local d'urbanisme en l'absence de modification ou de révision de ces documents initiée postérieurement à la publication de la présente loi. ".
3. D'une part, il résulte de ces dispositions que, dans les communes littorales, ne peuvent être autorisées que les constructions réalisées en continuité avec les agglomérations et villages existants, c'est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions ou, sous certaines conditions, au sein des secteurs déjà urbanisés autres que les agglomérations et villages identifiés par le schéma de cohérence territoriale et délimités par le plan local d'urbanisme, se distinguant des espaces d'urbanisation diffuse par, entre autres, la densité de l'urbanisation, sa continuité, sa structuration par des voies de circulation et des réseaux d'accès aux services publics de distribution d'eau potable, d'électricité, d'assainissement et de collecte de déchets, ou la présence d'équipements ou de lieux collectifs. En revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d'autres, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages ou de ces secteurs déjà urbanisés. Le respect du principe de continuité posé par l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme s'apprécie en restituant le terrain d'assiette du projet dans l'ensemble de son environnement, sans s'en tenir aux constructions situées sur les seules parcelles limitrophes de ce terrain.
4. D'autre part, l'implantation de panneaux photovoltaïques, qui doit être regardée comme une extension de l'urbanisation au sens de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, ne peut être autorisée que si elle est située en continuité avec une agglomération ou un village existant.
5. Le terrain sur lequel la société Photosol Développement projette d'édifier un parc photovoltaïque se situe sur le territoire de la commune de Jau-Dignac-et-Loirac, laquelle est soumise à la loi Littoral, à l'ouest du quartier " A... " identifié par la carte communale comme un village, et à environ 400 mètres de son bourg. Il ressort des pièces du dossier et notamment des documents photographiques qui y sont joints, ainsi que des données publiques de référence produites par l'Institut géographique national et librement accessibles aux parties comme au juge sur le site internet Géoportail, que le secteur du Centre, qui comporte plus d'une centaine d'habitations, ainsi que la mairie de la commune, une église, une salle des fêtes et des commerces ouverts à l'année, est accessible par plusieurs axes routiers, notamment les chemins de Pontac et du Gadet, rejoignant les rues d'entrée dans le centre-bourg. A ce titre, cette zone doit être regardée, comme constituant, non pas une zone d'urbanisation diffuse, mais un secteur déjà urbanisé, caractéristique, au regard du nombre et de la densité significatifs de constructions, d'un village au sens des dispositions précitées de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme. Par ailleurs, il ressort également des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet, qui est situé au lieu-dit " Pontac " et classé en zone NC, est adossé dans sa partie nord, à plusieurs habitations, qui constituent le dernier noyau urbanisé du village, avec une trentaine d'habitations et un salon de coiffure, au nord-ouest vers le bourg, à l'ouest du chemin de Pontac et de part et d'autre, au nord, du chemin du Gadet. Dès lors que le terrain d'assiette du projet est ainsi en continuité immédiate avec la zone urbanisée existante qui est située de part et d'autre du chemin de Pontac, la circonstance que ce terrain, implanté sur deux parcelles, soit lui-même traversé par le chemin de Pontac et qu'il soit bordé au nord-est par un espace boisé d'une centaine de mètres et au sud et à l'ouest par des espaces naturels à l'exception d'une déchetterie, n'est pas de nature à constituer une rupture d'urbanisation. Dans ces conditions, le ministre n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le projet devait être regardé comme une extension de l'urbanisation réalisée en continuité du village existant du Centre et en ont déduit que le préfet de la Gironde avait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme en refusant d'autoriser le projet au motif qu'il serait situé dans une zone d'urbanisation diffuse. L'ampleur du projet, sa destination ou les conséquences que son autorisation pourrait avoir sur l'urbanisation future de la zone sont à cet égard sans incidence sur sa conformité avec les dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme.
6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense, que le ministre appelant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 5 mai 2021 et la décision implicite de rejet du recours gracieux formé contre cet arrêté.
7. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à la société Photosol Développement en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à la société Photosol Développement la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche et à la société Photosol Développement.
Copie en sera adressée pour information au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 27 mars 2025 à laquelle siégeaient :
Mme Evelyne Balzamo, présidente,
Mme Béatrice Molina-Andréo, présidente-assesseure,
Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 avril 2025.
La rapporteure,
Béatrice Molina-AndréoLa présidente,
Evelyne BalzamoLa greffière,
Sylvie Hayet
La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche, en ce qui la concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 24BX01493