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10/04/2025 | FRANCE | N°23BX02333

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 4ème chambre, 10 avril 2025, 23BX02333


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau à titre principal, d'annuler l'arrêté n° 3124/21/02 du 18 janvier 2021 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a liquidé partiellement l'astreinte prononcée à son encontre pour un montant de 24 600 euros, au titre de la période du 4 juin 2019 au 19 mai 2020, du fait du non-respect de l'article 3 de l'arrêté du 3 novembre 2017 le mettant en demeure de fournir un diagnostic environnemental actualisé et un plan de gestio

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau à titre principal, d'annuler l'arrêté n° 3124/21/02 du 18 janvier 2021 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a liquidé partiellement l'astreinte prononcée à son encontre pour un montant de 24 600 euros, au titre de la période du 4 juin 2019 au 19 mai 2020, du fait du non-respect de l'article 3 de l'arrêté du 3 novembre 2017 le mettant en demeure de fournir un diagnostic environnemental actualisé et un plan de gestion, et de procéder à la dépollution du site situé sur le territoire de la commune de Gelos, à titre subsidiaire, de réformer cet arrêté en fixant le montant de l'astreinte à 10 euros par jour de retard, ramenant le montant réclamé à 11 480 euros.

Par un jugement n° 2100948, 2100949 du 27 juin 2023, le tribunal administratif de Pau a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 août 2023, M. A..., représenté par Me Moutier, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2100948, 2100949 du 27 juin 2023 du tribunal administratif de Pau ;

2°) d'annuler les arrêtés n° 3124/21/02 et n° 3124/21/03 du 18 janvier 2021 du préfet des Pyrénées-Atlantiques ;

3°) à titre subsidiaire, de supprimer le montant des astreintes mises à sa charge, à proportion de 24 600 euros (arrêté n° 3124/21/02) et 43 624 euros (arrêté n°3124/21/03), ou à défaut de les minorer ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le préfet a commis une erreur sur la qualité de la personne à qui il incombe de satisfaire les obligations prévues au titre de la réglementation sur les installations classées; il est recevable à contester, par voie d'exception, la légalité des deux arrêtés du 18 janvier 2021 qui sont la consequence des arrêtés du 3 novembre 2017, des 16 août et 12 décembre 2018; la mise en demeure ne pouvait concerner que la société exploitante ;

- la société A... n'a jamais exercé l'activité de stockage des déchets; l'arrêté du 3 novembre est entaché d'une erreur matérielle : la parcelle n° 4 ne comportait aucun déchet; la parcelle n° 18 p n'existe pas; la société n'exerce plus aucune activité sur la parcelle n° 19 depuis 1968;

- à titre subsidiaire, les sommes mises à sa charge doivent être réduites; le préfet a laissé passer un délai de 883 jours avant de lui répondre, ce qui a aggravé abusivement le montant de l'astreinte qu'il a entendu liquider; le préfet est responsable d'une part non négligeable du retard pris dans l'exécution de ses obligations;

- il a apporté la preuve que les éléments déposés ne constituaient nullement des déchets et n'étaient pas entreposés sur les parcelles.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 septembre 2024, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bénédicte Martin,

- et les conclusions de Mme Pauline Reynaud, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté n° 3124/17/53 du 3 novembre 2017, le préfet des Pyrénées-Atlantiques a mis en demeure M. A..., qui exploite une installation de recyclage et de construction mécanique sur les parcelles cadastrées section AC n° 4, 18p et 19 sur le territoire de la commune de Gelos, de cesser tout apport et dépôt de déchets, de procéder sous 8 jours à la pose de panneaux interdisant tout dépôt de déchets, de trier et d'évacuer dans un délai n'excédant pas un mois les déchets présents vers des filières autorisées, de dépolluer et remettre en état le site dans un délai de 4 mois comprenant la revégétalisation compatible avec l'intérêt écologique de la Saligue et de transmettre dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêté un diagnostic de l'état des sols et des sous-sols, le plan de gestion et le programme de revégétalisation. En l'absence de mise en conformité constatée les 30 janvier, 12 juillet et 8 octobre 2018 par l'inspecteur des installations classées, le préfet des Pyrénées-Atlantiques a, par deux arrêtés n° 3124/18/68 du 16 août 2018 et n°3124/18/99 du 12 décembre 2018, rendu redevable M. A... d'une part, d'une astreinte d'un montant journalier de 133 euros jusqu'à satisfaction des prescriptions des articles 1 et 2 de la mise en demeure prononcée le 3 novembre 2017, d'autre part, d'une astreinte d'un montant journalier de 75 euros jusqu'à satisfaction des prescriptions de l'article 3 de la mise en demeure prononcée le 3 novembre 2017, l'astreinte pouvant être liquidée complètement ou partiellement par arrêté préfectoral. L'arrêté n° 3124/18/101 pris le 12 décembre 2018 par le préfet des Pyrénées-Atlantiques a prescrit en son article 1er la cessation de tout apport et dépôt de métaux ou déchets de métaux sur les parcelles section AC n° 4, 18p et 19, ainsi qu'à l'article 4.1 la cessation définitive de l'installation de transit, regroupement, tri ou préparation en vue de la réutilisation de métaux ou de déchets de métaux, de déchets non dangereux à défaut de procéder dans un délai de deux mois à la régularisation administrative de son installation. Deux nouvelles inspections conduites les 13 décembre 2018 et 4 juin 2019 ont permis de constater la présence et l'apport de déchets non dangereux sur les parcelles, susceptibles de présenter des risques pour la protection de l'environnement et l'absence de régularisation administrative de l'activité. Par deux arrêtés n° 3124/2019/072 et n° 3124/2019/073 du 2 octobre 2019, le préfet des Pyrénées-Atlantiques a, d'une part, procédé à la consignation d'une somme de 34 369, 46 euros correspondant au coût des travaux prévus à l'article 2 de l'arrêté préfectoral du 3 novembre 2017 et au point 4.1 de l'arrêté préfectoral de mise en demeure du 12 décembre 2018, d'autre part, prononcé une amende administrative de trois mille euros. Enfin, par les troisième et quatrième arrêtés n° 3124/2019/064 et n°3124/2019/065 du 2 octobre 2019, le préfet des Pyrénées-Atlantiques a liquidé partiellement les astreintes, l'une de 12 525 euros, pour la période courant du 18 décembre 2018 au 3 juin 2019, l'autre de 22 876 euros, pour la période courant du 13 décembre 2018 au 3 juin 2019. Lors du déplacement sur site le 20 mai 2020, l'inspection des installations classées a relevé le respect partiel des prescriptions de l'arrêté de mise en demeure, bien qu'une quantité faible de déchets liés à l'activité de chaudronnerie demeure encore sur site et est stockée dans des conditions non conformes, tout en constatant l'absence de production du diagnostic environnemental spécifique, des plans de gestion et de revégétalisation ainsi que du dossier de régularisation administrative de l'activité. Le préfet des Pyrénées-Atlantiques a, par deux arrêtés n° 3124/21/02 et n° 3124/21/03 du 18 janvier 2021, liquidé partiellement les astreintes, l'une de 24 600 euros, correspondant à 350 jours d'astreinte à 75 euros l'autre de 43 624 euros, correspondant à 350 jours d'astreinte à 133 euros pour la période courant du 4 juin 2019 au 19 mai 2020, moins 22 jours du 12 mars 2020 au 2 avril 2020. M. A... relève appel du jugement du 27 juin 2023 par lequel le tribunal administratif a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des arrêtés n° 3124/21/02 et n° 3124/21/03 du 18 janvier 2021.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 171-7 du code de l'environnement : " I. Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, lorsque des installations ou ouvrages sont exploités, des objets et dispositifs sont utilisés ou des travaux, opérations, activités ou aménagements sont réalisés sans avoir fait l'objet de l'autorisation, (...) requis en application du présent code, ou sans avoir tenu compte d'une opposition à déclaration, l'autorité administrative compétente met l'intéressé en demeure de régulariser sa situation dans un délai qu'elle détermine, et qui ne peut excéder une durée d'un an./ Elle peut, par le même acte ou par un acte distinct, suspendre le fonctionnement des installations ou ouvrages, l'utilisation des objets et dispositifs ou la poursuite des travaux, opérations, activités ou aménagements jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la déclaration ou sur la demande d'autorisation, (...), à moins que des motifs d'intérêt général et en particulier la préservation des intérêts protégés par le présent code ne s'y opposent. /L'autorité administrative peut, en toute hypothèse, édicter des mesures conservatoires aux frais de la personne mise en demeure. /L'autorité administrative peut, à tout moment, afin de garantir la complète exécution des mesures prises en application des deuxième et troisième alinéas du présent I : /1° Ordonner le paiement d'une astreinte journalière au plus égale à 1 500 € applicable à partir de la notification de la décision la fixant et jusqu'à satisfaction de ces mesures. L'astreinte est proportionnée à la gravité des manquements constatés et tient compte notamment de l'importance du trouble causé à l'environnement. Les deuxième et dernier alinéas du 1° du II de l'article L. 171-8 s'appliquent à l'astreinte ; /2° Faire procéder d'office, en lieu et place de la personne mise en demeure et à ses frais, à l'exécution des mesures prescrites./ II. S'il n'a pas été déféré à la mise en demeure à l'expiration du délai imparti, (...), l'autorité administrative ordonne la fermeture ou la suppression des installations ou ouvrages, la cessation de l'utilisation ou la destruction des objets ou dispositifs, la cessation définitive des travaux, opérations, activités ou aménagements et la remise des lieux dans un état ne portant pas préjudice aux intérêts protégés par le présent code. /Elle peut faire application du II de l'article L. 171-8 aux fins d'obtenir l'exécution de cette décision." Le II de l'article L. 171-8 du code de l'environnement permet à l'autorité administrative compétente d'arrêter une ou plusieurs des sanctions administratives parmi lesquelles ordonner le paiement d'une astreinte journalière au plus égale à 1 500 euros applicable à partir de la notification de la décision la fixant et jusqu'à satisfaction de la mise en demeure ou de la mesure ordonnée.

3. M. A... soutient qu'il doit être mis hors de cause dès lors que l'activité en litige n'est pas exploitée à titre personnel. Il résulte toutefois de l'instruction que l'intéressé, en sa qualité de gérant et de responsable légal de la société à responsabilité limitée A..., exploite sans disposer d'aucune autorisation administrative une installation de tri et de transit de déchets dangereux et non dangereux, ainsi que l'inspecteur de l'environnement l'a constaté par des visites sur site les 28 août 2017, 30 janvier, 12 juillet, 8 octobre et 13 décembre 2018, 4 juin 2019 et 20 mai 2020. Dès lors, l'administration a pu légalement, sur le fondement des articles précités L. 171-7 et L. 171-8 du code de l'environnement, procéder à la liquidation des astreintes, par les arrêtés contestés du 18 janvier 2021, au motif que M. A..., en sa qualité d'exploitant, n'avait pas, à cette date, procédé à la régularisation de sa situation, conformément à l'arrêté du 3 novembre 2017 le mettant en demeure notamment de remettre en état le site.

4. L'illégalité d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure que si cette dernière décision a été prise pour l'application du premier acte ou s'il en constitue la base légale. S'agissant d'un acte réglementaire, une telle exception peut être formée à toute époque, même après l'expiration du délai du recours contentieux, contre cet acte. S'agissant d'un acte non réglementaire, l'exception n'est, en revanche, recevable que si l'acte n'est pas devenu définitif à la date à laquelle elle est invoquée, sauf dans le cas où l'acte et la décision ultérieure constituent les éléments d'une même opération complexe, l'illégalité dont l'acte serait entaché peut être invoquée en dépit du caractère définitif de cet acte.

5. M. A... excipe, à l'appui des conclusions dirigées contre les arrêtés n°3124/21/02 et n°3124/21/03 du 18 janvier 2021 procédant à la liquidation partielle des astreintes, de l'illégalité de l'arrêté du 3 novembre 2017 de mise en demeure, aux motifs que la société A... exerce seulement une activité de chaudronnerie et que les parcelles visées par ledit arrêté soit ne comportent aucun déchet, soit n'existent pas, soit n'accueillent aucune activité. Il résulte toutefois de l'instruction et il n'est pas contesté que cet acte, qui ne revêt pas de caractère règlementaire et comportait la mention des délais et voies de recours, est devenu définitif, dès lors que l'appelant, qui en a eu connaissance au plus tard le 30 janvier 2018, date de la visite de l'inspecteur des installations classées pour procéder au récollement de l'arrêté de mise en demeure, ne l'a pas contesté. Au surplus, par un jugement définitif du 5 décembre 2019 rendu à l'égard de M. A... et de sa société d'exploitation, le tribunal correctionnel de Pau a établi la matérialité des faits d'exploitation sans autorisation d'une installation classée et de stockage de déchets non dangereux, de déchets non inertes et de déchets contenant des substances dangereuses du 28 août 2017 au 17 septembre 2019 sur les parcelles section AC n° 4, 18p et 19 de la commune de Gelos.

6. M. A... soutient que le retard pris dans l'exécution de ses différentes obligations est imputable à l'administration qui a tardé à répondre à ses questionnements et ne lui a pas permis de faire procéder à une analyse des sols avant le mois de décembre 2020. Toutefois, alors qu'une mise en demeure de mise en conformité lui a été adressée le 3 novembre 2017, que diverses visites d'inspection s'en sont suivies, que deux arrêtés préfectoraux ont prononcé les 16 août et 12 décembre 2018 deux astreintes de 133 euros et de 75 euros, qui ont été liquidées, suivis de nouvelles visites d'inspection, que l'administration a procédé à la consignation de sommes pour le financement de travaux et prononcé une amende administrative, M. A... ne saurait, en tout état de cause, prendre prétexte des délais de réponse de l'administration pour justifier de sa défaillance dans la mise en conformité de ses installations, constatée par les arrêtés contestés.

7. Au regard de l'ancienneté de la décision de mise en demeure puis d'astreinte dont elle a fait l'objet, des multiples visites d'inspection qui ont précédé les arrêtés en litige, rappelant les manquements constatés, du montant des astreintes journalières de 75 et 133 euros fixées par les arrêtés du 18 janvier 2021, bien inférieures au montant maximal de 1 500 euros prévu à l'article L. 171-8 du code de l'environnement, le moyen, à le supposer soulevé, tiré du caractère disproportionné du montant des astreintes partiellement liquidées, par les arrêtés du 18 janvier 2021, doit être écarté.

8. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté ses demandes.

Sur les frais liés à l'instance :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. A... en application de ces dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Atlantiques.

Délibéré après l'audience du 24 mars 2025 à laquelle siégeaient :

Mme Bénédicte Martin, présidente,

Mme Béatrice Molina-Andréo, présidente assesseure,

Mme Lucie Cazcarra, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 avril 2025.

La présidente assesseure,

Béatrice Molina-Andréo La présidente,

Bénédicte Martin

La greffière,

Laurence Mindine

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche en ce qui la concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 23BX023332


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX02333
Date de la décision : 10/04/2025

Composition du Tribunal
Président : Mme MARTIN
Rapporteur ?: Mme Bénédicte MARTIN
Rapporteur public ?: Mme REYNAUD
Avocat(s) : MOUTIER

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-10;23bx02333 ?
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