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09/04/2025 | FRANCE | N°23BX02249

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 3ème chambre, 09 avril 2025, 23BX02249


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... et B... A... ont demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler la décision par laquelle la communauté d'agglomération du Pays basque a implicitement rejeté leur demande tendant à la modification du plan local d'urbanisme de Jatxou en ce qu'il porte sur le classement des parcelles cadastrées section AD n°s 462, 464 à 467 et 524.

Par un jugement n° 2001903 du 13 juin 2023, le tribunal administratif de Pau a rejeté cette demande et mis à la charge de

M. et Mme A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de jus...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... et B... A... ont demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler la décision par laquelle la communauté d'agglomération du Pays basque a implicitement rejeté leur demande tendant à la modification du plan local d'urbanisme de Jatxou en ce qu'il porte sur le classement des parcelles cadastrées section AD n°s 462, 464 à 467 et 524.

Par un jugement n° 2001903 du 13 juin 2023, le tribunal administratif de Pau a rejeté cette demande et mis à la charge de M. et Mme A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 11 août 2023, 16 septembre 2024 et 18 octobre 2024, M. et Mme A..., représentés par Me Leplat, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 13 juin 2023 du tribunal administratif de Pau ;

2°) d'annuler la décision par laquelle la communauté d'agglomération du Pays basque a implicitement rejeté leur demande tendant à la modification du plan local d'urbanisme de Jatxou en ce qu'il porte sur le classement des parcelles cadastrées section AD n°s 462, 464 à 467 et 524 ;

3°) d'enjoindre à la communauté d'agglomération du Pays basque de procéder au classement des parcelles cadastrées section AD n°s 462, 464 à 467 et 524 situées à Jatxou en zone urbaine dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération du Pays basque une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué ne comporte pas les signatures prévues à l'article R. 741-7 du code de l'urbanisme ;

- en méconnaissance de l'article L. 9 du code de justice administrative, le jugement n'est pas motivé ;

- leur demande de première instance était recevable ;

- la décision en litige est entachée d'une erreur de droit ; le classement des parcelles en cause en zone agricole est étranger à l'objectif de préservation du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles ; ces parcelles sont d'une superficie trop réduite pour présenter un potentiel agricole, sont incluses dans une partie particulièrement urbanisée de la commune et jouxtent des terrains bâtis ;

- la décision en litige repose sur une erreur manifeste d'appréciation ; les parcelles sont enclavées dans une zone classée UC ; elles sont desservies par la voirie et par l'ensemble des réseaux.

Par des mémoires enregistrés les 26 janvier et 14 octobre 2024, la communauté d'agglomération du Pays basque, représentée par la société Etche avocats, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge des requérants d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens invoqués par les appelants ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 15 octobre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 8 novembre 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy,

- les conclusions de M.Julien Dufour, rapporteur public,

- et les observations de Me Bach, représentant M. et Mme A..., et D..., représentant la communauté d'agglomération du Pays basque.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme A... sont propriétaires, sur le territoire de la commune de Jatxou, des parcelles cadastrées section AD n°s 462, 464 à 467 et 524. Ces parcelles, qui étaient classées en zone urbaine par le plan d'occupation des sols de la commune approuvé en 2001, ont été classées en zone agricole par le plan local d'urbanisme approuvé le 30 janvier 2014. Par un courrier du 13 février 2020, M. et Mme A... ont demandé au maire de Jatxou une modification de ce classement. Cette demande, transmise à la communauté d'agglomération du Pays basque, compétente en matière de plan local d'urbanisme, a été implicitement rejetée. M. et Mme A... relèvent appel du jugement du 13 juin 2023 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cette décision implicite de la communauté d'agglomération du Pays basque.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, la minute du jugement attaqué figurant au dossier de première instance transmis à la cour par le tribunal administratif de Pau comporte les signatures du président-rapporteur, de la magistrate assesseure et de la greffière d'audience, ainsi que l'exigent les dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. La circonstance que ces signatures ne figuraient pas sur l'ampliation adressée à la société requérante est sans incidence sur la régularité de ce jugement.

3. En second lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

4. Le tribunal a considéré, au point 5 du jugement, que compte tenu de l'objet de la demande de M. et Mme A..., à savoir le classement des parcelles litigieuses en zone urbaine, les moyens invoqués par ces derniers, tirés de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation entachant le classement de ces parcelles en zone agricole, étaient inopérants. Il a ainsi suffisamment répondu aux moyens soulevés par les requérants. Le bien-fondé de la réponse apportée à ces moyens est sans incidence sur la régularité du jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

5. M. et Mme A..., qui ont sollicité le 13 février 2020, " un reclassement de leurs parcelles en zone urbanisée " eu égard à " l'erreur manifeste d'appréciation qui a été commise par le conseil municipal de la collectivité ", doivent être regardés comme ayant demandé, en vain, l'abrogation du plan local d'urbanisme de Jatxou en tant qu'il classe les parcelles cadastrées section AD n°s 462, 464 à 467 et 524 en zone agricole.

6. Dans le cadre de la contestation d'un acte réglementaire intervenant après l'expiration du délai de recours contentieux contre cet acte, par la voie de l'exception ou sous la forme d'un recours pour excès de pouvoir contre le refus de l'abroger, la légalité des règles qu'il fixe, la compétence de son auteur et l'existence d'un détournement de pouvoir peuvent être utilement critiquées. L'effet utile de l'annulation pour excès de pouvoir du refus d'abroger un acte réglementaire illégal réside dans l'obligation, que le juge peut prescrire d'office en vertu des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, pour l'autorité compétente, de procéder à l'abrogation de cet acte afin que cessent les atteintes illégales que son maintien en vigueur porte à l'ordre juridique. Il s'ensuit que, dans l'hypothèse où un changement de circonstances a fait cesser l'illégalité de l'acte réglementaire litigieux à la date à laquelle il statue, le juge de l'excès de pouvoir ne saurait annuler le refus de l'abroger. A l'inverse, si, à la date à laquelle il statue, l'acte réglementaire est devenu illégal en raison d'un changement de circonstances, il appartient au juge d'annuler ce refus d'abroger pour contraindre l'autorité compétente de procéder à son abrogation. Lorsqu'il est saisi de conclusions aux fins d'annulation du refus d'abroger un acte réglementaire, le juge de l'excès de pouvoir est conduit à apprécier la légalité de l'acte réglementaire dont l'abrogation a été demandée au regard des règles applicables à la date de sa décision.

7. Aux termes de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. ". Aux termes de l'article L. 151-9 de ce code : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger (...) ". Aux termes de l'article R. 151-22 dudit code : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles ". Il résulte de ces dispositions qu'une zone agricole, dite " zone A " du plan local d'urbanisme, a vocation à couvrir, en cohérence avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, un secteur, équipé ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles.

8. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que les auteurs du plan local d'urbanisme de Jatxou, qui avaient initialement envisagé de classer le tènement que composent les parcelles litigieuses en zone urbaine, ont suivi l'avis du commissaire-enquêteur qui préconisait leur classement en zone agricole eu égard à leur état naturel et aux objectifs, figurant dans le projet d'aménagement et de développement durables, de " gestion économe " de l'espace et de conservation des espaces agricoles. Contrairement à ce que soutiennent les appelants, les auteurs dudit document d'urbanisme n'ont pas commis d'erreur de droit en se fondant sur de tels motifs pour procéder au classement des parcelles en cause en zone agricole.

9. En second lieu, il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme, qui ne sont pas liés par les modalités existantes d'utilisation du sol, de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

10. Le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme de Jatxou indique que " la commune de Jatxou est d'abord un territoire de coteaux dont les versants se répartissent entre espaces agricoles, boisés et naturels " et qu'" aujourd'hui encore, l'espace est très largement exploité par des agriculteurs (prairies essentiellement) ". Il fixe un objectif de préservation de cet équilibre et de limitation de " l'urbanisation susceptible de compromettre la pérennisation, voire le développement de ces activités encore présentes sur la commune " et souligne également que " la volonté de la commune est de circonscrire l'essentiel de l'urbanisation autour du bourg ".

11. Il ressort des pièces du dossier que le tènement composé des parcelles litigieuses, d'une superficie totale de l'ordre de 4 200 m², vierge de toute construction et à l'état de prairie, est situé au nord du centre-bourg, en limite d'un secteur caractérisé par une urbanisation éparse. Le terrain jouxte, au nord et à l'ouest, des terrains bâtis caractérisant un habitat diffus, s'ouvre à l'est sur un vaste espace rural à l'état de prairie et n'est séparé, au sud, que par une unique parcelle bâtie d'une autre zone agricole. S'il est vrai que les parcelles jouxtant, à l'est, le terrain litigieux ont été classées en zone urbaine, il ressort cependant des pièces du dossier, en particulier des clichés photographiques, que ces parcelles sont à l'état naturel et s'ouvrent sur un vaste secteur à dominante agricole. Il ne ressort par ailleurs pas des pièces du dossier qu'eu égard à sa superficie, le terrain litigieux ne présenterait aucun potentiel agricole intrinsèque, et la seule circonstance qu'il ne ferait actuellement pas l'objet d'une exploitation agricole et serait desservi par l'ensemble des réseaux ne fait pas obstacle, en soi, au classement contesté. Dans ces conditions, eu égard aux caractéristiques des parcelles en cause et au parti d'aménagement retenu par les auteurs du plan local d'urbanisme de Jatxou, le classement litigieux ne repose pas sur une erreur manifeste d'appréciation.

12. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision implicite de la communauté d'agglomération du Pays basque portant refus d'abrogation du plan local d'urbanisme de la commune de Jatxou, en tant qu'il classe les parcelles cadastrées section AD n°s 462, 464 à 467 et 524 en zone agricole. Leurs conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, être accueillies.

13. Enfin, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme A... le versement de quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par la communauté d'agglomération du Pays basque et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la communauté d'agglomération du Pays basque au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... et B... A... et à la communauté d'agglomération du Pays basque.

Copie en sera adressée à la commune de Jatxou.

Délibéré après l'audience du 18 mars 2025 à laquelle siégeaient :

M. Laurent Pouget, président,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,

M. Vincent Bureau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 avril 2025.

La rapporteure,

Marie-Pierre Beuve-Dupuy

Le président,

Laurent Pouget Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Atlantiques, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23BX02249


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX02249
Date de la décision : 09/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. POUGET
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre BEUVE-DUPUY
Rapporteur public ?: M. DUFOUR
Avocat(s) : LEPLAT JULIEN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-09;23bx02249 ?
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