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03/04/2025 | FRANCE | N°22BX01655

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 1ère chambre, 03 avril 2025, 22BX01655


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de la Martinique, d'une part, d'annuler la décision du 2 juillet 2020 par laquelle le préfet de la Martinique a rejeté comme irrecevable sa demande de cession de la parcelle cadastrée section AO n° 871 située dans la zone artisanale " Volga Plage " sur la commune de Fort-de-France, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux du 17 décembre 2020 et, d'autre part, de condamner l'Etat à lui verser des ind

emnités d'un montant total de 425 000 euros en réparation des préjudices qu'il estim...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de la Martinique, d'une part, d'annuler la décision du 2 juillet 2020 par laquelle le préfet de la Martinique a rejeté comme irrecevable sa demande de cession de la parcelle cadastrée section AO n° 871 située dans la zone artisanale " Volga Plage " sur la commune de Fort-de-France, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux du 17 décembre 2020 et, d'autre part, de condamner l'Etat à lui verser des indemnités d'un montant total de 425 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait du comportement de l'administration.

Par un jugement n° 2100226 du 17 mars 2022, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, des pièces et des mémoires complémentaires, enregistrée les 17 juin 2022, 16 octobre, 4 novembre et 12 décembre 2024 M. B..., représenté par Me Tagne, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement du 17 mars 2022 du tribunal administratif de la Martinique ;

2°) d'annuler la décision du préfet de la Martinique du 2 juillet 2020, ensemble la décision implicite de rejet du recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Martinique de faire droit à sa demande de cession de la parcelle AO 871 et de lui délivrer le titre de propriété correspondant ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Martinique de retirer la décision administrative qui procède au repositionnement de son activité de garage automobiles sur les parcelles cadastrées BY 15 et BY 23 ;

5°) de condamner l'Etat à lui verser des indemnités d'un montant total de 425 000 euros en réparation des préjudices dont il estime avoir été victime à raison du comportement fautif de l'administration sous astreinte de 407 euros par jour de retard et une somme de 25 000 euros en réparation de son préjudice moral ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 14 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la délibération du conseil municipal de Fort-de-France du 29 juin 2004, qui a décidé de la cession de la parcelle AO n° 871 à son père et l'a autorisé à exercer l'activité de garage automobile qu'il a reprise, confirmée à plusieurs reprises par la commune, a créé des droits pour son père et ses ayants-droit ; le retrait de cette délibération, par courrier de la SOAME du 5 mars 2020, près de dix-huit ans après son édiction et sans qu'il ait été démontré que cet acte était illégal est irrégulier ;

- dans ces conditions, la décision du préfet de la Martinique en litige, qui n'était pas en situation de compétence liée compte tenu du droit de regard de l'Etat dans l'opération résorption habitat insalubre du Bas Volga, est elle-même illégale ;

- il subit un préjudice financier et moral du fait de cette situation dès lors qu'il a engagé d'importantes dépenses sur le projet de garage.

Par un mémoire en défense enregistré le 30 janvier 2024, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique du 13 mars 2025 :

- le rapport de Mme Béatrice Molina-Andréo,

et les conclusions de M. Mickael Kauffmann, rapporteur public,

Considérant ce qui suit :

1. Par lettre du 18 février 2019, M. A... B... a saisi le préfet de la Martinique d'une demande sur le fondement de l'article L. 5112-5 du code général de la propriété des personnes publiques, tendant à la cession par l'Etat de la parcelle cadastrée section AO n° 871, située dans la zone artisanale de Volga Plage, sur le territoire de la commune de Fort-de-France. Cette demande a été rejetée par une décision du préfet en date du 2 juillet 2020. M. B... a alors saisi le tribunal administratif de la Martinique de demandes tendant à l'annulation de cette décision et de la décision rejetant implicitement son recours gracieux formé le 17 décembre 2020, ainsi qu'à la condamnation de l'Etat à l'indemnisation des préjudices qu'il estime avoir subis à raison du comportement fautif de l'administration. Par la présente requête, M. B... relève appel du jugement du 17 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de la Martinique a rejeté ses demandes.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 5111-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " La zone comprise entre la limite du rivage de la mer et la limite supérieure de la zone dite des cinquante pas géométriques définie à l'article L. 5111-2 fait partie du domaine public maritime de l'Etat. ". Aux termes de l'article L. 5111-2 du même code : " La réserve domaniale dite des cinquante pas géométriques est constituée par une bande de terrain délimitée dans les départements de La Réunion, de la Guadeloupe et de la Martinique. Elle présente dans le département de la Guyane une largeur de 81,20 mètres comptée à partir de la limite du rivage de la mer tel qu'il a été délimité en application de la législation et de la réglementation en vigueur à la date de cette délimitation. ". Aux termes de l'article L. 5112-1 même code dans sa version applicable au litige : " L'autorité compétente délimite après consultation des communes, à l'intérieur de la zone des cinquante pas géométriques, d'une part, les espaces urbains et les secteurs occupés par une urbanisation diffuse, d'autre part, les espaces naturels. La décision administrative portant délimitation de ces espaces constate l'état d'occupation du sol (...) ". Aux termes de l'article L.5112-2 du même code dans sa version applicable au litige : " L'Etat délimite par décret en Conseil d'Etat, au plus tard le 1er juillet 2021, après avis des collectivités territoriales ou de leurs groupements, à l'intérieur de la zone des cinquante pas géométriques, d'une part, les espaces urbains et les secteurs occupés par une urbanisation diffuse, d'autre part, les espaces naturels. Cette délimitation prend en compte l'état d'occupation du sol et les orientations du document stratégique d'aménagement et de mise en valeur de la zone des cinquante pas géométriques prévu au IV de l'article 27 de la loi n° 2015-1268 du 14 octobre 2015 d'actualisation du droit des outre-mer. (...). ". Aux termes de l'article L. 5112-5 du même code dans sa version applicable au litige : " Les terrains situés dans les espaces urbains et les secteurs occupés par une urbanisation diffuse, délimités conformément aux articles L. 5112-1 et L. 5112-2, peuvent être déclassés aux fins de cession à titre onéreux aux occupants qui y ont édifié ou fait édifier avant le 1er janvier 1995, ou à leurs ayants droit, des constructions affectées à l'exploitation d'établissements à usage professionnel. La cession à une personne morale est soumise pour avis à la collectivité territoriale ou au groupement de collectivités territoriales concerné, qui dispose de trois mois pour faire connaître son avis. / Les demandes de cession faites en application du présent article doivent, sous peine de forclusion, être déposées avant le 1er janvier 2021. / Le prix de cession est déterminé d'après la valeur vénale du terrain nu à la date du dépôt de la demande de cession. Il est fixé selon les règles applicables à l'aliénation des immeubles du domaine privé. / La superficie cédée est ajustée en fonction des nécessités de l'équipement du secteur en voirie et réseaux divers et des conditions de cession des fonds voisins. Elle ne peut excéder de plus de la moitié la superficie occupée par l'emprise au sol des bâtiments et installations édifiés avant le 1er janvier 1995. / La cession du terrain à des personnes privées ne peut être effectuée lorsque la construction est située dans une zone exposée à un risque naturel grave et prévisible menaçant des vies humaines. ". Aux termes de l'article R. 5112-14 du même code : " La demande de cession prévue par l'article L. 5112-5 est adressée au préfet par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. (...).". Aux termes de l'article R. 5112-17 du même code : " Lorsque le préfet est saisi d'une demande de cession, il en informe sans délai le secrétariat de la commission départementale de vérification des titres, pour l'application du dernier alinéa de l'article L. 5112-3. / Lorsque la demande porte sur un terrain mis à la disposition de l'agence pour la mise en valeur des espaces urbains de la zone dite des cinquante pas géométriques, le préfet la lui transmet pour recueillir son avis sur la compatibilité du projet de cession avec le programme d'équipement établi. / L'agence joint à son avis, le cas échéant, des propositions d'ajustement de la surface de terrain dont la cession est demandée. / Lorsque la demande de cession provient d'une personne morale, le préfet la transmet également pour avis à l'autorité exécutive de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné. ". Aux termes de l'article R. 5112-19 du même code : " Le directeur régional des finances publiques fixe le prix du terrain nu à la date du dépôt de la demande de cession. / Le préfet notifie au demandeur une offre de cession et l'invite à souscrire aux conditions de celle-ci. / L'offre est caduque à l'expiration d'un délai de six mois à compter de la notification si l'occupant n'a pas souscrit, dans ce délai, aux conditions de celle-ci. / Le transfert de propriété ne peut avoir lieu qu'après l'entière exécution des conditions mises à la cession et après déclassement du terrain dans les conditions prévues à l'article R. 5111-1. ".

3. Il ressort de l'examen de la décision en litige que le préfet de la Martinique a rejeté comme " irrecevable " la demande de M. B... présentée sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 5112-5 du code général de la propriété des personnes publiques, tendant à la cession par l'Etat de la parcelle cadastrée section AO n° 871, au motif que cette parcelle appartient à la commune de Fort-de-France, le préfet conseillant en conséquence à l'intéressé de se rapprocher de la commune en vue d'une régularisation de sa situation. D'une part, il ressort de la consultation du site internet Géoportail accessible tant au juge qu'aux parties, que cette parcelle dépasse la limite supérieure de la réserve domaniale dite des cinquante pas géométriques, au sens des dispositions précitées. D'autre part, il est constant que cette parcelle a été acquise le 9 mars 1990 par la société d'économie mixte d'aménagement de la ville de Fort-de-France (SEMAFF) dans le cadre d'une opération de résorption de l'habitat insalubre, puis qu'elle a été cédée le 28 janvier 1994 à la société d'habitations à loyers modérés Ozanam, avant d'être finalement rétrocédée à la commune de Fort-de-France le 30 juillet 2003. Dès lors que l'Etat n'était pas propriétaire de ce terrain, le préfet de la Martinique se trouvait en situation de compétence liée pour refuser de faire usage des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 5112-5 du code général de la propriété des personnes publiques et pour opposer un refus à la demande de cession présentée par M. B.... Par suite, les moyens soulevés par M. B... à l'appui de sa requête ne peuvent qu'être écartés comme inopérants.

4. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté ses conclusions à fin d'annulation. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées.

Sur les conclusions indemnitaires :

5. Si dans le dernier état de ses écritures d'appel, M. B... reprend sa demande de première instance tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser des indemnités d'un montant total de 425 000 euros en réparation des préjudices dont il estime avoir été victime à raison du comportement fautif de l'administration, il n'assortit ses conclusions d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé. Elles ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

6. Les dispositions de l'article 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante, la somme que demande M. B... au titre des frais liés à l'instance.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

Copie en sera adressée au préfet de la Martinique.

Délibéré après l'audience du 13 mars 2025 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Béatrice Molina-Andréo, présidente-assesseure,

Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 avril 2025.

La rapporteure,

Béatrice Molina-Andréo

La présidente,

Evelyne Balzamo

La greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

No 22BX01655


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22BX01655
Date de la décision : 03/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Edwige MICHAUD
Rapporteur public ?: M. KAUFFMANN
Avocat(s) : DOMORAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-03;22bx01655 ?
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