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27/03/2025 | FRANCE | N°23BX00991

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 4ème chambre, 27 mars 2025, 23BX00991


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Saint-Pantaléon Automobiles a demandé au tribunal administratif de Limoges de prononcer la décharge totale, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2014, 2015 et 2016, pour un montant global de 161 261 euros.



Par un jugement n° 2100103 du 9 février 2023, le tribunal administratif de Li

moges a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Saint-Pantaléon Automobiles a demandé au tribunal administratif de Limoges de prononcer la décharge totale, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2014, 2015 et 2016, pour un montant global de 161 261 euros.

Par un jugement n° 2100103 du 9 février 2023, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 avril 2023, l'EURL Saint-Pantaléon Automobiles, représentée par Me Combradet, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 9 février 2023 ;

2°) de faire droit à ses demandes de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- contrairement à ce qu'a considéré l'administration pour remettre en cause l'exonération accordée aux entreprises nouvelles implantées en zone de revitalisation rurale, elle ne disposait pas de moyens d'exploitation en dehors d'une zone de revitalisation rurale ; son objet social se limitant au négoce de véhicules d'occasion, elle a sous-traité la réparation ou l'entretien des véhicules ainsi que leur nettoyage ; l'activité de la société s'effectuant principalement par internet, elle ne nécessitait pas d'un important parc d'exposition et, par suite, d'établissements secondaires pour réaliser son activité ; elle ne peut avoir six établissements secondaires, comme l'a retenu l'administration, eu égard à ses effectifs sur la période vérifiée ; la circonstance que la visite et la vente de quelques véhicules se soient opérées hors d'une zone de revitalisation n'est pas de nature à remettre en cause son implantation exclusive dans une telle zone ;

- c'est à tort que l'administration fiscale a fait application de la majoration pour manquement délibéré dès lors qu'aucune infraction fiscale n'a été retenue par la commission des infractions fiscales dans son avis du 5 juillet 2019, qu'aucune minoration n'a pu être relevée par le service et qu'aucune intention de sa part d'éluder l'impôt n'est établie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 septembre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens invoqués par la requérante ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 9 septembre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 8 novembre 2024 à 12h00.

Une demande de pièces pour compléter l'instruction (MSI) a été adressée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique le 13 janvier 2025 ; ce dernier a produit la pièce sollicitée le jour même, qui a été communiquée à Me Combradet, représentant l'Eurl Saint-Pantaléon Automobiles.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lucie Cazcarra,

- les conclusions de Mme Pauline Reynaud, rapporteure publique,

- et les observations de M. A... gérant de l'entreprise Saint-Pantaléon Automobiles.

Considérant ce qui suit :

1. L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Saint-Pantaléon Automobiles a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er janvier 2014 au 30 avril 2016. L'entreprise Saint-Pantaléon Automobiles qui était exploitée sous le nom de société à responsabilité limitée (SARL) Attraction au cours de la période vérifiée avait son siège social à Naves (Corrèze) et exerçait une activité d'achat revente de véhicules d'occasion auprès de particuliers. A l'issue du contrôle, l'administration a remis en cause le bénéfice du régime d'imposition des entreprises nouvelles prévu par les dispositions de l'article 44 sexies du code général des impôts dont elle s'était prévalue au motif que la condition d'implantation dans une zone éligible à ce dispositif de faveur n'était pas satisfaite. L'entreprise Saint-Pantaléon Automobiles a été assujettie par voie de conséquence, au titre des exercices clos en 2014, 2015 et 2016, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et à la majoration pour manquement délibéré prévue au a- de l'article 1729 du code général des impôts. Par la présente requête, l'entreprise Saint-Pantaléon Automobiles relève appel du jugement du 9 février 2023 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2014, 2015 et 2016 ainsi qu'aux pénalités y afférentes.

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

2. Aux termes du I de l'article 44 sexies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux exercices d'imposition en litige : " (...) les entreprises qui se sont créées à compter du 1er janvier 2004 jusqu'au 31 décembre 2010 dans les zones de revitalisation rurale mentionnées à l'article 1465 A, et à la condition que le siège social ainsi que l'ensemble de l'activité et des moyens d'exploitation soient implantés dans ces zones, sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés, (...) ".

3. L'implantation d'une activité dans une zone de revitalisation rurale, en l'absence de salarié, s'apprécie, pour le bénéfice de l'exonération prévue par les dispositions précitées de l'article 44 sexies du code général des impôts, au regard de tous éléments pertinents, notamment de la situation des locaux et des moyens d'exploitation utiles à cette activité, ainsi que son lieu d'exercice effectif.

4. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si un contribuable remplit les conditions légales d'une exonération.

5. L'entreprise Saint-Pantaléon Automobiles soutient qu'au cours de la période vérifiée, son activité se limitait à une activité de négoce de véhicules d'occasion qu'elle exerçait à partir de son siège social situé sur la commune de Naves, dans une zone de revitalisation rurale éligible au régime d'exonération. Son activité consistant principalement à diffuser sur des sites internet des annonces pour les véhicules qu'elle souhaitait mettre en vente et à rechercher, par ce même biais, des véhicules nécessaires à son activité, elle fait valoir que les moyens nécessaires à son activité étaient implantés dans la zone éligible. Il ressort toutefois des pièces produites, en particulier de la proposition de rectification du 19 décembre 2017, qu'après exercice de son droit de communication auprès du cabinet Lifar Crasnier Cezard, assureur de l'entreprise, et du cabinet d'expertises Ransan, expert automobiles, l'administration a relevé que l'entreprise entreposait de nombreux véhicules sur le parking du garage Battier sur la commune d'Objat. A la suite de l'exercice de son droit de communication auprès du garage Battier, ce dernier a adressé à l'administration un contrat de prêt de parking à titre gracieux signé avec le gérant de la SARL Attraction le 11 juillet 2013. La société Auto Clean Services, auprès de laquelle l'administration a également exercé son droit de communication, a fourni un contrat de mise à disposition gracieuse de places de parking situées à l'adresse de la société, à Brive-la-Gaillarde, au profit de la SARL Attraction, à charge pour cette dernière de confier à la société Auto Clean Services le nettoyage des véhicules stockés. Enfin, sur les vingt et une réponses de clients de la SARL Attraction aux demandes de renseignements adressées par l'administration, seuls quatre clients ont indiqué avoir visité et pris possession de leurs véhicules à Naves, les autres s'étant rendus à Toulouse, ou sur le parking du garage Battier ou sur celui de la société Auto Clean Services. L'ensemble de ces éléments atteste par conséquent que l'activité de l'entreprise, qui requérait un important parc d'exposition de véhicules, était implantée hors de la zone éligible, faisant ainsi obstacle au bénéfice du régime d'exonération prévu à l'article 44 sexies du code général des impôts, ainsi que l'ont jugé à bon droit les premiers juges.

Sur le bien-fondé des pénalités en litige :

6. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, (...) la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration ".

7. Il résulte de ces dispositions que la pénalité pour manquement délibéré a pour seul objet de sanctionner la méconnaissance par le contribuable de ses obligations déclaratives. Pour établir ce manquement délibéré, l'administration doit apporter la preuve, d'une part, de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations et, d'autre part, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt.

8. Pour justifier l'application de la majoration de 40 % prévue en cas de manquement délibéré aux impositions en litige, l'administration a retenu, selon les termes de la proposition de rectification qu'elle a adressée le 19 décembre 2017 au gérant de l'entreprise Saint-Pantaléon Automobiles, que l'établissement du siège social de l'entreprise au domicile des parents du gérant était incompatible avec la nature de l'activité exercée et, qu'au regard de l'importance et du caractère répété des minorations constatées, l'entreprise requérante ne pouvait ignorer qu'elle ne remplissait pas les conditions nécessaires pour bénéficier du régime de l'exonération entreprise nouvelle en zone de revitalisation rurale. Elle fait également valoir qu'en sortant du régime d'exonération à la suite du transfert du siège de la société hors de la zone de revitalisation rurale à compter du 1er mai 2016, l'entreprise avait pleinement conscience des modalités d'application du régime d'exonération et que le fait de s'octroyer indûment le bénéfice d'un régime de faveur lui a permis de renforcer sa capacité financière et de poursuivre son développement en créant un garage automobile à compter du 1er mai 2016. Par ces considérations, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'intention délibérée de l'entreprise d'éluder l'impôt et, par suite, du bien-fondé de la majoration pour manquement délibéré dont ont été assorties, en application des dispositions précitées, les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2014, 2015 et 2016.

9. Il résulte de tout ce qui précède que l'entreprise Saint-Pantaléon Automobiles n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administration de Limoges a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'EURL Saint-Pantaléon Automobiles est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'EURL Saint-Pantaléon Automobiles et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 27 février 2025 à laquelle siégeaient :

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente,

Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,

Mme Lucie Cazcarra, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 mars 2025.

La rapporteure,

Lucie CazcarraLa présidente,

Frédérique Munoz-Pauziès La greffière,

Laurence Mindine

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23BX00991


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX00991
Date de la décision : 27/03/2025
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur ?: Mme Lucie CAZCARRA
Rapporteur public ?: Mme REYNAUD
Avocat(s) : COMBRADET-CLAVERIE

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-03-27;23bx00991 ?
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